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EAN : 9782897128890
320 pages
Mémoire d'Encrier (22/03/2023)
4.41/5   16 notes
Résumé :
Inspiré d’une légende Taïno, le roman "La sirène de Black Conch" raconte l’histoire de Aycayia, une jeune femme condamnée à vivre comme une sirène, errant de siècle en siècle dans la mer des Caraïbes.

Un jour, David le pêcheur qui chantait dans sa pirogue, attendant une prise, attire miraculeusement la belle sirène. Il tombe éperdument amoureux. Lorsque des touristes américains, à grands coups de violence, la capturent, David la sauve et jure de la p... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Déjà autrice de nombreux romans en langue anglaise, Monique Roffey reste pourtant complètement inconnue sous nos latitudes.
Cette année, Mémoire d'Encrier et Gerty Dambury nous offrent enfin son oeuvre la plus récente et la plus primée.
Tout droit venue de Trinidad, voici une nouvelle voix qui devrait faire beaucoup parler d'elle.
La sirène de Black Conch est bien davantage qu'une énième variation sur un mythe archi-connu…

Attiré par ton chant
David Baptiste se souvient. Des évènements de l'année 1976, cette année où l'ouragan Rosamund a balayé le village de Black Conch dans les petites Antilles. L'un des plus terribles de l'histoire.
Pourtant, ce n'est pas tant la brutalité de la tempête qui l'a marqué que la personne qu'il a perdu avec elle.
Aycayia. Une femme à la peau rouge, innocente et magnifique, l'amour de toute une vie.
Aycayia. Une femme inoubliable…et une sirène !
David Baptiste n'était qu'un pêcheur comme un autre avant de voir émerger en pleine mer le visage d'Aycayia, comme une fantastique découverte, comme un rêve impossible. Attirée par la guitare et le chant de David, la voici qui le retrouve régulièrement pour l'écouter.
Jusqu'au jour où des Américains viennent la pêcher et l'entraînent sur la terre ferme comme un trophée, une curiosité, un objet.
Pendant la nuit, David la libère et l'emmène chez lui. Il ne sait pas encore son nom mais il sait que c'est la bonne chose à faire.
Il sait qu'Aycayia est une merveille que l'on n'enferme pas.
Et puis, Aycayia se met à changer… pour redevenir la jeune femme qu'elle était bien des années auparavant.
Monique Roffey s'empare du mythe de la sirène, le malaxe, le triture et en extrait quelque chose de neuf, quelque chose d'infiniment humain et touchant. Elle inverse d'abord la rencontre, fait en sorte que la sirène soit attirée par le chant d'un pêcheur…puis elle redevient femme et découvre ce qu'on lui a toujours caché : l'amour.

L'Histoire s'en mêle
Le roman de Monique Roffey s'articule en trois temps : 1976 aux côtés d'un narrateur omniscient qui nous raconte cette rencontre incroyable, 2015–2016 par le journal intime d'un David Baptiste devenu vieux et quelque part entre les deux, par la poésie d'Aycayia elle-même, prise à jamais dans les flots. L'entrelacement de ces trois angles narratifs offre une densité remarquable à ce qui aurait pu rester un conte fantastique un peu naïf sur fond de romance improbable. Mais non seulement Monique Roffey a plus d'un tour dans son sac, mais c'est sans compter le poids de l'Histoire qui accompagne le tout. Nous sommes à Black Conch, un territoire Antillais marqué par la colonisation et l'esclavage. Un village possédé en grande partie par une femme blanche, Arcadia Rain, qui vit avec son fils métis, Reggie, sourd de naissance et dont le père Noir, un surnommé Life, s'est fait la malle il y a bien longtemps. Tout est plus compliqué sur ce territoire confisqué à des peuples amérindiens exterminés et repeuplé par des populations sous le joug de l'esclavage des Blancs.
Et si l'Histoire ne suffit pas, c'est aussi la place de la femme qui viendra jouer les trouble-fête dans cette aventure bien plus complexe qu'il n'y paraît de prime abord. On y suit des femmes meurtries, blessées jusque dans leur chair, des femmes manipulées…mais aussi des femmes fortes et redoutables.
Ne croyez pas cependant que Monique Roffey choisit la simplicité en séparant tout ce beau monde entre bons et méchants.
Noirs et Blancs. Femmes et Hommes. Humains et Sirène.
Non, tout est plus complexe que ça. Aycayia a été maudite par des femmes jalouses et se retrouve en danger de nouveau à cause d'une femme mesquine et banalement méchante. Arcadia n'a jamais voulu ce domaine hérité de ses parents morts depuis longtemps, et elle aime un Noir qui l'aime en retour. Et qui n'est pas tant un salaud que ça, juste une personne qui a eu peur et qui n'était pas prête alors à aimer un enfant.
La sirène de Black Conch est un roman de nuances et de changement, c'est un roman qui croit que les évènements changent les hommes, et que la course du temps nous transforme, inéluctablement.

Retrouve-moi, là-bas, comme avant
Ainsi, Monique Roffey offre à son lecteur une certaine vision du colonialisme et de ses conséquences, avec les fractures sociales et raciales qui en découlent, mais aussi une certaine vision de la femme, de la supposée sororité qui se laisse parfois corrompre par le venin insidieux de la méchanceté et de la jalousie.
La sirène de Black Conch accorde une importance égale à tous ses personnages, des plus tragiques aux plus impardonnables. Monique Roffey cherche au coeur, refusant les compromis, toujours subjuguée par la poésie de sa créature à la fois si fantastique et si humaine. Si touchante.
Aycayia, qui découvre ce qui effraie tant les femmes et les hommes, le fait d'aimer, le fait de plaire, le fait de se donner entièrement.
Le sexe. La liberté.
Au fond, La sirène de Black Conch n'est pas autre chose qu'une histoire sur la liberté et sur ce qu'on y laisse, sur l'amour faillible et sur le temps.
Le tout porté par la plume précise, limpide et poétique d'une Monique Roffey qui impressionne et s'interroge toujours et encore.

La sirène de Black Conch fait mal, elle triture les blessures du passé et les malédictions, elle pèse les âmes et se demande ce que nous deviendrons. Mais surtout, La sirène de Black Conch détricote un mythe pour en faire une histoire d'amour fugace et inoubliable, condamnée à l'ouragan et à demain.
Lien : https://justaword.fr/la-sir%..
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Aycayia est belle. Elle enchante les hommes de sa tribu et irrite les femmes.

Pour prix de son insolente beauté, la jeune femme sera maudite à devenir sirène.

Les années passent, les siècles aussi. le peuple dont était issue Aycayia s'éteint, victime de l'envahisseur espagnol et de ses maladies.

Aycayia erre dans les océans, dans une solitude rompue seulement par la compagnie d'une tortue Luth. Mais un jour, au large de Black Conch sur l'île de Ste Constance, elle entend de la musique, un homme l'intrigue. Un pêcheur, David, avec sa guitare.

Mais d'autres hommes suivront qui ne verront en elle qu'une proie, qu'une chose à vendre, à humilier, à harceler. Pour le pêcheur et ses amis va s'engager une lutte pour préserver cette sirène qui a également ravi son âme.

Ce roman est une grande première pour moi dans la littérature trinidadienne. L'autrice reprend une vieille légende et en offre une version très actuelle.

Ainsi le destin de cette sirène, belle et ensorcelante malgré elle, permet de s'interroger sur les comportements de prédateurs de certains hommes, de leur façon de chosifier une femme, et parfois même avec les meilleures intentions du monde.

Dans cette société, les malheurs du passé éclairent encore le présent : la terre est injustement possédée par les descendants des européens qui ont eu recours à l'esclavage. Une séparation en fonction de la couleur de peau même si, l'espoir est permis. Car malgré la difficulté, voir l'impossibilité de comprendre complément l'autre dans son altérité, les liens du coeur qu'ils soient amoureux, amicaux ou familiaux permettent de tisser des ponts et des liens.

Dans un récit sensuel, servi par une belle plume, le lecteur s'embarque dans un récit sans temps morts, très bien écrit et alternant les points de vue.

Une belle réussite que je vous invite à découvrir.
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Un roman qui transporte dans l'univers chaleureux et épicé d'une île fictive des Caraïbes. Coin du globe enchanteur dont l'autrice et même la traductrice sont toutes les deux originaires et ça se sent à tout bout de mots et à tout bout de pages.

On se plonge dans une histoire de sirène qui peut nous paraître au premier coup d'oeil familière et simple, mais on en ressort grandi et le souffle coupé devant une analyse profonde et viscérale de l'héritage du colonialisme, des inégalités raciales et la misogynie et une plume si envoûtante.


A lire.


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Une histoire qui commence dans une île de la mer des Caraïbes avec la rencontre entre un pêcheur et une sirène. le pêcheur va en pirogue chanter des chansons à la sirène, jusqu'au jour où, attirée par un bateau de touristes, la sirène se fait capturer. Tous deux racontent leur version de l'histoire telle qu'ils l'ont vécue et ressentie. le pêcheur écrit cette histoire des années après, en évoquant son amour pour elle. La sirène, elle, raconte tout comme elle le pense, de manière poétique, comme dans une chanson. Elle parle de sa rage, ses peurs, son envie de mourir, décrit son changement d'identité, la perte de mémoire. le récit est toujours fluide, ensorcelant et captivant, aborde des thèmes tels que la misogynie, le colonialisme, l'acceptation de soi et celle de l'autre, avec des personnages à la personnalité forte, comme la femme propriétaire de l'île et son enfant sourd qui va communiquer avec la sirène avec un langage plus fort que celui des mots.
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Subjuguée par ce conte fantastique !
Ce n'est pas une banale histoire de sirènes…pas comme vous l'imaginez…

Monique Roffey parcourt avec nuance et intelligence, en traversant le temps et en alternant les voix, les violences faites à celles et ceux qui ne sont pas dans la « norme », aux femmes notamment exploitées, mutilées et humiliées par la misogynie ordinaire.

Mais elle explore tant d'autres thématiques en s'interrogeant comme par exemple (pour n'en citer que certaines) : qu'est-ce que l'amour ? Et elle décortique les conséquences de la colonisation et de l'esclavage, le rapport des humains à l'intégrité et l'amitié…puis plane tout au long du roman la destruction d'un écosystème.

La Sirène de Black Conch, qui s'inspire d'une légende taïno, est cinématographique, subtil, poétique, cruel et engagé ! Plongez-y sans hésiter !

Ps : Je vous invite vivement à ne pas lire le résumé complet pour vous laisser surprendre !
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critiques presse (2)
Elbakin.net
17 mai 2023
On croit les cerner rapidement mais plusieurs s’étoffent de belle manière au détour de quelques phrases qui résonnent après lecture.
Lire la critique sur le site : Elbakin.net
LeDevoir
07 mars 2023
Dans la mer des Caraïbes, David le pêcheur, chantonnant sur sa pirogue, reçoit la visite d’une sirène, en errance depuis qu’une malédiction s’est abattue sur elle des siècles plus tôt. Au premier regard, il en tombe éperdument amoureux.
Lire la critique sur le site : LeDevoir
Citations et extraits (5) Ajouter une citation
En vérité, j'étais un homme asservi depuis ce premier matin où je lui ai chanté des hymnes. Je peux le dire maintenant, des années plus tard. Elle n'a fait que surgir des vagues et me regarder et en examinant son visage j'ai su que je plongeais en arrière dans le passé de ces îles et dans ma propre histoire d'homme ; c'était mon fichu vieux moi qu'elle me montrait. Elle était venue me revendiquer et m'apprendre à offrir mon cœur autant que mes tripes, à être plus entier que je ne l'avais été jusque là.
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C'est comme ça qu'on s'est connectés
Avec le langage des mains
Langue des temps d'avant le temps
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Un sort dure à jamais
Jeter un sort c'est faire du mal
Ne maudissez jamais personne
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C’est la musique qui l’avait mené à lui, pas le moteur, même si elle connaissait aussi ce son. C’est la magie de la musique, du son qui vit dans chaque créature terrestre, y compris les sirènes. Elle n’avait pas entendu de musique depuis longtemps, peut-être un millier d’années, et elle avait été irrésistiblement attirée à la surface, à la fois très mesurée et très intéressée. 
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Comment pourrais-je m’en aller à la nage ?
Maintenant même le royaume des eaux meurt engorgé de plastique
__p.63
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