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sur 417 notes
Deux ans après le gigantesque uppercut envoyé par « le démon de la colline aux loups », Dimitri Rouchon-Borie balance une nouvelle claque littéraire intitulée « le Chien des étoiles » !

A vingt ans, Gio a déjà été mis plusieurs fois KO par une vie qui ne lui a pas fait beaucoup de cadeaux. D'ailleurs, personne ne s'attendait à le revoir vivant après avoir été emmené à l'hôpital avec un tournevis enfoncé dans la tête. Et pourtant, après six mois à côtoyer la mort entouré d'infirmières, le voilà de retour parmi son clan. Bon, certes avec une immense cicatrice sur le crâne et la tête un peu dans les étoiles, mais surtout avec l'envie de tourner définitivement le dos à la violence des clans…

« le Chien des étoiles » est un road-trip qui invite à suivre les pas de cet étrange colosse sérieusement amoché par la vie et de ses deux compagnons de route qui ne sont pas beaucoup mieux lotis. Il y a tout d'abord Papillon, un jeune gamin particulièrement sauvage et privé de parole, qui doit son surnom à sa manière de s'exprimer, en agitant les mains dans tous les sens. Puis il y a la belle Dolores, dont la beauté fait tourner la tête des hommes, souvent les mauvais, et qui est malheureusement persuadée qu'offrir son corps à tout le monde est sa seule manière d'exister. Un trio pour le moins surprenant donc, qui décide de fuir la misère en sautant dans un train à la recherche d'un avenir moins sombre…

Dimitri Rouchon-Borie dresse donc à nouveau un univers peu séduisant, débordant de noirceur et admirablement servi par une plume sombre et parfois même assez crue. Une obscurité qui sert néanmoins à mieux faire jaillir cette petite lueur fait d'espoir, d'amour et de poésie. Enrobant l'horreur d'innocence et faisant apparaître la beauté sur un fond de noirceur, telle une fleur poussant subitement dans un décor postapocalyptique, Dimitri Rouchon-Borie livre une sorte de conte moderne, sombre et brutal, mais tout de même délicieusement lumineux.

Un style dont je demeure grand fan et un récit qui termine par un clin d'oeil au « Démon de la colline aux loups », qui m'avait mis KO. Ici, je demeure debout, mais tout de même bien sonné !
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À 20 ans, après avoir reçu un tournevis dans la tête qui a failli lui coûter la vie et passé des mois à l'hôpital, le voilà de retour parmi les siens. Une famille de gitans qui l'accueille à bras ouverts. Mais, aujourd'hui, Gio n'est plus le même. Il sent et ressent les choses différemment, il est plus sensible et sa cicatrice vibre parfois quand il contemple la nuit. Si pour son père et ses oncles, le temps est maintenant celui des représailles, lui renie dorénavant cette violence. Lorsque les choses tournent mal, que le sang coule, que le feu détruit tout, il n'a d'autre choix que de fuir, flanqué de deux gamins recueillis par le clan, Papillon, qui ne dit pas un mot, et Dolores, une adolescente habituée à offrir son corps aux hommes voraces...

C'est ce trio, bancal et hétéroclite, que l'on suivra, au gré des rencontres hasardeuses, parfois chanceuses, parfois tragiques. Gio, dont la sensibilité exacerbée le tiendra un peu à l'écart du monde, se sent investi d'une mission dès qu'ils ont pris la route : protéger ces deux gamins. Dolores, une adolescente dont la beauté attisera les hommes à qui elle s'offre. Papillon, dépourvu de paroles mais qui s'exprime par les gestes. Un trio écorché, extrêmement attachant, qui se heurtera aux caprices de la vie, qui suscitera des jalousies, qui aura peine à trouver sa place au sein d'une société avide de pouvoir. Cette épopée, marginale, hors du temps, ténébreuse, se révélera tout aussi intense qu'effroyable, tout aussi sombre que lumineuse, tout aussi violente que tendre, tout aussi belle que cruelle. La plume, vibrante, poétique, brute ou crue parfois, donne du corps et de l'âme à cette épopée percutante.
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Une agression qui aurait pu lui coûter la vie a changé à tout jamais Gio, en lui donnant un petit supplément d'âme, une faculté particulière de ressentir et de percevoir. Flanqué de deux gamins fragiles, le gitan prend la route qui le mènera vers des rencontres à haut risque. Jusqu'au drame de trop …

Il suffit de quelques lignes pour se prendre en pleine figure l'efficacité et la flamboyante de cette écriture. Bien que différente dans la forme de cette prouesse qu'a été le démon de la colline aux loups, le style est ici aussi percutant !

Tel un conte, hors du temps et peuplé de personnages aux confins du réel, la noirceur du décor contraste avec la caractère lumineux de Gio dont l'humanité irradie les pages jusqu'à l'incandescence .

Aussi séduite que par le Démon de la colline aux loups, ce roman est pour moi un grand coup de coeur

240 pages Tripode 17 août 2023


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Après avoir pris une mandale, venez tendre l'autre joue.

Ceux qui ont eu le nez de lire le précédent roman de Dimitri Rouchon-Borie, le démon de la colline aux loups, comprendront de quoi je parle. Et viendront, rampant et tremblant, rencontrer le chien des étoiles.

A se frotter à cette nouvelle expérience de lecture, sensorielle, noire comme le charbon mais emplie de mots qui irradient. Car la beauté peut se dissimuler derrière les ténèbres et les épreuves de la vie.

Et les épreuves, Gio y est familiarisé. A vingt ans, sa condition de gitan ne l'a pas habitué à une vie tranquille, encore moins depuis qu'il a reçu un coup de tournevis dans la tête, qui aurait dû lui être fatal.

Au sortir de l'hôpital, il n'est plus le même, ne voit plus les choses et les gens de la même manière. Sent sa cicatrice vibrer quand il se met à contempler les étoiles et à se laisser emporter par la nuit.

La vie va faire le reste, à coups de déchirures. Et de rencontres aussi, bonnes comme mauvaises. Gio, ce colosse aux pieds d'argile, n'aspire qu'à la tranquillité. Mais c'est trop demander quand on doit subitement fuir la violence des clans.

Sauf que le destin va lui adjoindre deux gamins qui vont le changer à jamais.

L'histoire de la colline des loups avait touché et marqué par son flot d'émotions, mais aussi par l'écriture éblouissante de Dimitri Rouchon-Borie. On retrouve cette patte singulière, saisissant la naïveté des pensées et des propos de Gio pour les transformer en envolées lyriques.

250 pages qui serrent le coeur, broient les tripes, grâce à une capacité inouïe de l'auteur à nous faire entrer en empathie absolue avec un personnage pourtant très atypique.

C'est le parcours d'existence, semé d'embûches, d'un Gio qui trébuche mais pourtant se relève à regarder les étoiles. Même détruit, il forge son destin sans le savoir. Même courant vers sa perte, il avance. Parce que son amour pour les deux gamins est plus fort que la mort.

Ce roman est un vrai voyage, à travers les émotions, dans l'intime. Une expédition dans l'obscurité, à la fois très noire et pourtant lumineuse, avec comme guide un écrivain littéralement habité.

Sa plume est d'une incroyable sensibilité, tout en étant brute et âpre. D'une véritable poésie, mais aussi parfois crue. Une écriture qui insuffle un immense supplément d'âme à cette histoire bouleversante.

Réussir à trouver du beau dans les épreuves les plus terribles, exacerber les émotions de lecture. Avec des belles réflexions qui pointent. A travers une histoire qui sait surprendre, l'auteur n'empruntant pas le chemin le plus évident.

Une vraie élégance du style et de l'esprit, au service d'une histoire terrible et cruelle, et surtout de personnages qui marquent les esprits. Dimitri Rouchon-Borie a de l'or entre les doigts, nous invitant à suivre le chien des étoiles pour un tour de piste qui laisse des traces. La confirmation d'un formidable talent.
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Gio a été gravement blessé pendant une bagarre : il a pris un coup de tournevis dans la tête. Il s'en est sorti, mais il n'est plus le même. Quand le père vient chercher son géant de fils à l'hôpital, il lui parle de vengeance. Mais de retour au camp de gitans où Gio vivait avec ses parents, il ne voit plus le monde de la même façon. Son père lui a aménagé un mobile-home, tout près de leur bicoque, cependant Gio ne se sent plus chez lui nulle part, préfère la nuit au jour, les éléments aux humains, et se construit un monde imaginaire fait de ses rêves et de ses ressentis.
***
Je n'ai pas lu le Démon de la colline aux loups, je n'ai donc aucun point de comparaison avec le premier roman, semble-t-il très réussi (13 prix littéraires, tout de même), de Dimitri Rouchon Borie que vante la quatrième de couverture. Dans le Chien des étoiles, j'ai tout d'abord été conquise par l'écriture, le style et le ton, comparaisons et métaphores originales, souvent poétiques, avant d'en trouver certaines totalement inopérantes à mon avis : « il écoute, en grimaçant, s'annoncer la guerre aux broussailles » (p. 26), alors que les oncles s'apprêtent à faucher un champ. Après une quarantaine de pages, le style me rappelle celui de Cécile Coulon, que je trouve, aussi, parfois laborieusement poétique. Composé de neuf parties toutes titrées Comme on se retrouve, Comme on s'échappe, Comme on…, etc., chacune divisée en chapitres de différentes longueurs, ce roman se lit vite malgré l'univers surprenant dans lequel le narrateur à la troisième personne nous entraîne. J'ai été étonné par une scène à la fois incongrue et parfaitement gratuite présentée au début du roman  . Évidemment, il n'est pas question ici de réalisme, pas même de vraisemblance, il s'agit d'une sorte de conte dont, je l'avoue, je n'ai pas très bien compris la portée. D'ailleurs, on ne sait trop où on est, ni à quelle époque : dans la ville, les routes ne sont pas achevées et certaines personnes sont encore à cheval (p. 68). Plus tard, on aura brièvement droit à l'intervention d'un shérif (p. 223). La manière de présenter les gitans avec tous les lieux communs qui s'attachent à eux et à leur communauté m'a désolée. On se croirait par moment dans un feuilleton du XIXe siècle, misérabilisme inclus. Ces regrets valent aussi pour le personnage de Dolores : cette « gamine » ne se sent exister que quand un homme la désire et Dimitri Rouchon-Borie ne lui accorde que la séduction comme moyen d'expression. Bref, je suis complètement passée à côté de ce roman, et quand je lis les critiques très élogieuses, j'en suis d'autant plus désolée. Je suis pourtant contente de l'avoir lu pour certains passages superbement écrits, sans affectation, et… pour le chien, forcément.
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J'ai déjà été impressionnée par l'écriture de cet auteur avec le démon de la colline aux loups. Comment arrive-t-il à mêler poésie et violence ? Trop fort ! Ici nous suivons le parcours de trois jeunes rejetés de la société et plus particulièrement Gio du haut de ses vingt ans. Des mômes que l'existence a mal mené et qui vont se créer un semblant de famille en s'apportant de l'amour et surtout du respect et de la protection. Eléments qu'ils ont peu connu jusqu'à maintenant. J'invite chaque lecteur à faire connaissance avec Gio grand gaillard boxeur à ses heures au coeur gros comme ça, de la jolie Dolorès qui pense que la seule chose qu'elle a à offrir est son corps et enfin avec Papillon qui n'ayant pas la parole pense que la seule communication est le couteau.
Ah je ne suis pas prête de les oublier ces trois là !
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« Il reste rien que la mort, et tous les jours elle me souffle des flammes au cul. »

Gio est un survivant, rescapé de plusieurs coups de tournevis à travers la tête. de ce traumatisme, il a hérité du meilleur : parler aux chevaux, rencontrer les chouettes la nuit et voyager vers les étoiles.

Dans son clan, l'affront appelle vengeance. Mais celle-ci ne va pas prendre la tournure attendue et Gio va se lancer dans une longue errance. Où ? Quand ? Nous n'en saurons rien, car là n'est pas l'essentiel. Ce qui compte, c'est avec qui.

Dans ses bagages, se trouvent en effet Dolores et Papillon, deux ados sans famille, recueillis par le clan. Elle, dont le corps a déjà déclenché l'appétit dégueulasse des hommes. Lui qui a appris à se méfier de ces mêmes hommes, mutique et quasi-sauvage quand il le faut.

Dans le Chien des étoiles, Dimitri Rouchon-Borie nous embarque dans une rêverie assez sombre, où évoluent ses personnages tourmentés en quête de salut physique et moral. Mais faute d'histoire cohérente et sans empathie pour ses héros, je suis resté un peu sur la touche de ce livre dont j'attendais beaucoup.

Mais il m'aura manqué la puissance fracassante du Démon, que même le clin d'oeil (mais pourquoi ?) à la Colline aux loups n'aura pas réveillée. RDV manqué donc, mais retour isolé et à contre-courant des autres lus ci-et-là. Pas grave, ça arrive…
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Ce roman m'a déstabilisée au point de ne pas savoir comment l'étiqueter. Conte? Fable sociale? Roman noir? Certainement une part de chaque ! Récit sur la violence des Hommes, mais aussi sur la force de rencontres émouvantes, désintéressées,d'un amour pur.
Au delà de l'histoire, c'est un roman qui interpelle sur le langage. Il commence par des paroles vulgaires, brutales,crues qui agressent davantage que de chercher à communiquer.
En miroir Papillon et Dolores,deux êtres blessés pour lesquels la parole n'est plus possible. Et puis, Gio,le personnage central qui est le trait d'union entre les deux, et entre deux mondes. Celui de la poésie, de l'espoir,des étoiles, et celui de la souffrance, de l' obscurité.
Est-ce un hasard si la jeune fille que Gio prend sous sa protection se nomme " Dolores" ? Est-ce un hasard si ce petit garçon s'appelle " Papillon" ? Même si une explication terre à terre explique ce surnom,l'évocation des ailes et de la légèreté n'est sûrement pas fortuite.
Gio revient de loin...suite à une bagarre il s'est retrouvé avec un tournevis enfoncé dans le crâne. Ce voyage entre la vie et la mort l'a éloigné des siens et de leur barbarie. " ça l' a fait reculer d'un cran dans la présence au monde".
De retour au camps de gitans il ne veut pas se plier aux règles de vengeance sous prétexte d'honneur. Il se sauve avec Dolores et Papillon car il veut croire " que rien n'est fini,qu'on peut remettre de l'ordre dans cette vie". Il veut les laver pour qu'ils redeviennent les enfants qu'ils étaient avant le cauchemar de leur jeune vie.
Le chemin n'est pas celui de la bohème romantique mais plus la route de l'enfer.
Réalisme cruel et poésie se côtoient, dévoilant ce qu'il y a de pire mais aussi de plus merveilleux chez l'humain.
Dimitri Rouchon-Borie sait faire briller les étoiles et vibrer nos coeurs, mais n'a t'il pas abandonné l'espoir que la lumière puisse être de notre monde?!

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Après sa tonitruante entrée en littérature, j'avais hâte de retrouver Dimitri Rouchon-Borie et son style singulier, un alliage bouillant de rage et de poésie qui ne sied pas à toutes les histoires. Il faut que ça saigne, que ça suinte et que ça dérape.
Dans la première partie de son nouveau roman, « le chien des étoiles », tout fonctionne à merveille. Gio, un géant grièvement blessé dans un règlement de comptes, sort de l'hôpital dans un état second, tel un zombie, à la lisière de la folie, préférant le paradis de ses nuits rêvées à l'enfer de ses journées cauchemardesques. Il s'enfuit de son camp de malheur et sur sa route, il croise le mioche « Papillon » qui a tutoyé la mort beaucoup trop tôt et Dolorès, une lolita qu'il n'ose pas toucher tellement sa beauté l'impressionne. C'est un peu comme si l'auteur avait revu « Down by Law », « Slumdog Millionaire », « le temps des gitans » et « Shéhérazade » et qu'il en avait fait un concentré de nitroglycérine. Intense et brut.
Mais dans la deuxième partie, j'ai eu le sentiment que l'auteur était aussi paumé que son personnage, à la recherche d'une fin décente. Vengeance (trop hollywoodien ?), errance (répétitif ?), résignation (ennuyeux ?) ou suicide (trop simple) ? de cette hésitation pouvait naître le suspense. C'est plutôt la confusion et la perplexité qui s'installent.
J'ai eu encore un immense plaisir à relire cet auteur qui crée des personnages inoubliables et dont les phrases sont créatives, ciselées avec des métaphores filées sur le rasoir. Je regrette seulement que son histoire s'abîme à chaque bifurcation. le récit d'un vagabond ne peut tout expliquer.
Bilan : 🌹
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Chronique vidéo : https://www.youtube.com/watch?v=jp2bQe6IYJ8

J'avais apprécié la voix narrative du Démon de la colline aux loups, la voix du personnage qui déroule sa vie, et ici, est-ce que c'est parce que c'est un récit à la troisième personne… je n'ai pas retrouvé la même force. J'ai l'impression que l'auteur a passé moins de temps à le peaufiner, parce qu'il est plus superficiel, les scènes sont très rapides, chaque chapitre n'a le temps que de cadrer une seule action. Il y a le défaut que je vois dans certains livres, lors justement des scènes d'action, on a qu'un enchainement de verbes « Isaac soulève la redingote et montre un gourdin court […] Isaac jette le gourdin loin, dans l'eau. Gio se tourne vers Isaac. », ça manque de relief ; et comme le roman de Chris Offut, Nuits Appalaches, dont je parlais en janvier dernier, lors des scènes descriptives, on a une impression d'artificialité, que Rouchon-Borie a juste ouvert un almanach pour nous faire le bingo des plantes sauvages, mais sans jamais vraiment s'attarder sur elles pour nous montrer leurs couleurs, leur toucher, leur odeur. On reste sur la surface des choses, les scènes terminent avant d'avoir réellement commencé.

Les situations sont assez prévisibles, et je trouve assez curieux le fait de s'intéresser toujours aux classes les plus pauvres pour en faire un tableau sale, sombre, la fange quoi. Il faut qu'il y ait de l'inceste ou des attouchements, que les gens soient illettrés. Berceau de la violence. Je me demande si c'est pas son boulot qui lui donne ce regard sur les gens, parce que comme Robert-Diard, il travaille dans la chronique judiciaire, donc il voit l'exceptionnel de l'humanité, et souvent, j'ai envie de dire, c'est les prolétaires qui se font choper là où les bourgeois font la même chose impunément. Et que donc, il donne une image à la fois éculée et mensongère du gitan. Mais bon, le contexte historique est flou, on peut se dire qu'après tout, ça se passe au début 20ème, . qu'il y a pas de message social, ou alors pas de manière délibérée. (même si au bout de deux bouquins, on peut quand même se poser des questions sur la vision qu'il a des pauvres, le côté cour des miracles). Les classes populaires sont toujours sur la même note, à friser l'animalité. En plus, le souci, c'est que même si on fait abstraction de ça, du fait qu'ils savent pas bien parler, c'est même pas vraiment bien mis en scène, parce que les dialogues sont un peu pompeux, trop recherchés pour sonner justes, on voltige d'un parler très folklorique à des gens qui s'expriment par aphorismes. Je comprends pas comment il a pu ne pas savoir doser, ce qu'il avait réussi à faire dans le précédent. Puisqu'on était dans le regard de Duke, on se disait qu'il y avait forcément reconstruction, et que si les scènes ne paraissaient pas tout à fait tangibles, c'était parce qu'on nous les restituait.
Comme pour Chris Offut, c'est pour moi une littérature assez infantile, où les mecs font la bagarre et les nanas ne servent que de monnaie d'échange entre eux. Dolores n'a aucun désir propre, tout ce qu'elle fait, c'est se réserver pour Gio. C'est le trope de la demoiselle en détresse, je trouve ça assez fou de trouver encore ce genre de personnages féminins en 2023. Elle est essentialisée, tout le temps ramenée à ses « pêches », et rien que ce terme, ça manque de réalisme, parce que tous les hommes vont dire ah les bonnes vieilles pêches de Dolores (d'ailleurs, il aurait dû appeler le livre comme ça), mais dans la vraie vie, y a un millier de mots pour décrire les seins d'une femme, pourquoi ils emploient tous le même, et ce sans s'être concertés ? le gamin est monolithique, il s'exprime avec la même palette gestuelle (se passe le doigt sur la gorge). Les deux servent qu'à investir Gio d'une mission protectrice, d'asseoir son autorité virile face aux menaces viriles elles aussi. Donc c'est bim boum bagarre, oh Gio, mon sauveur, un rôle de ravissante idiote qui ne sait même pas ce qu'est le coton, l'hésitation, ou d'autres mots simples et accessibles. Surtout que quelques pages plus tôt, elle nous fait une envolée lyrique, c'est pas cohérent.
Les dialogues sont ratés, ils s'appellent tous par leur prénom, parlent tous pareil, par exemple, il leur fait répéter la même phrase en fin de dialogue « Je vais y veiller, au môme, je vais y veiller » (Miçek) « Je sais pas, mais j'imagine, Suzy, j'imagine » (Henrique) et même Gio fait pareil. Ce qui est assez ridicule au bout d'un moment, ça fait mauvais dialogue de western.
De plus, ce qui empêche de se projeter, c'est que le livre souffre du white room syndrome, c'est-à-dire que le décor, l'endroit où ils vivent n'est jamais décrit longuement, qu'il y a pas d'adéquation ou d'inadéquation entre ce que le héros ressent et l'endroit où il se trouve, et souvent dans ce genre de roman d'aventures, c'est important pour laisser un peu reposer l'action, c'est pour ça qu'il y a un gros manque d'équilibre dans la tension dramatique.
La fin est abracadabrantesque, je veux pas spoiler, mais il nous fait presque du fan service là, Rouchon Bourie, ou un Marvel universe à sa sauce. Les scènes sont déjà vues mille fois (on a le droit aux villageois avec les fourches et les torches contre Frankenstein). À part quelques passages poétiques, le style est anémique, ce qui donne l'impression de lire un long synopsis pour un film — et j'ai peur que ce soit ce genre de livre qui serve de modèle à la littérature de demain. Qu'on abandonne le roman, et sa particularité : celle de distendre le temps, de l'arrêter, pour avoir à la place un enchainement d'actions, de plus en plus prévisibles, de moins en moins bien dosées. Qu'est-ce qui s'est passé entre le démon de la colline aux loups et ça ? du côté auteur et du côté éditeur ? On a que le plan là, un plan avec des ellipses et des scènes paresseuses (à la fin, le héros parle avec son chien et lui raconte tout de but en blanc, parce que mettre en scène, on dirait que Rouchon-Borie il en a soupé, même si Gio, c'était un taiseux tout le long du livre, on s'en fout de la cohérence — et le chien, en plus, va avoir tout le temps la même réaction de chien. En gros Gio sort un bloc du récit — le chien fait un truc de chien, Gio boit une gorgée de rhum, et c'est reparti pour un tour, et ça sur toute la scène. D'ailleurs, le chien me parait être sorti de son chapeau au dernier moment pour justifier le titre.
Je sais pas si je continue. Bon encore quelques remarques pour terminer.
L'histoire de l'espèce de voyage astral que fait le héros n'est jamais clairement mise en scène, encore une fois, on survole trop, ce qui fait qu'il n'y a aucun engagement. En fait, c'est l'un des plus gros défauts du livre, on se sent pas engagé, on s'en fout de ce qu'il peut arriver aux personnages, parce que leur relation n'est jamais mise en relief, à travers des scènes qui calmeraient un peu la tension dramatique. Comme l'auteur s'en fout de nous montrer le côté humain des personnages, leur amitié, qu'il veut juste s'amuser avec ses action man, comme Chris Offut, on prend pas de plaisir. En plus, un moment, il décide de couper la narration pour nous faire aller quelques années plus tard, et je me suis dit, ouah, s'il décide de rien nous raconter là, s'il décide de laisser le destin de Papillon et de Dolores en suspens, ce serait vachement audacieux, de nous faire juste pressentir, mais rester dans le non-dit, qu'on comprenne sans que ce soit formulé. Mais non, il vient avec ses gros sabots avec la discussion du chien, et ruine la seule audace scénaristique du livre.
Et pour finir, comme les chapitres sont hyper courts, chaque chapitre, c'est une action très schématique, j'ai eu l'impression de passer des petits niveaux de jeux vidéos avec des mini boss, même, au cas où on serait perdus, on nous rappelle souvent les enjeux du livre, comme un « previosly in the dog in the stars » de série.
Donc voilà, j'aurais aimé apprécier ce livre, malheureusement, c'est l'un des plus ratés que j'ai lus cette année. J'espère que Rouchon-Borie va se reprendre et nous proposer quelque chose de plus abouti pour la prochaine fois.

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