Pour retrouver les croyances archaïques, l'auteur repère les thèmes qui ne se rattachent à aucun système existant et ont posé par la suite les plus grands problèmes aux théologiens. Il identifie ainsi 8 croyances archaïques : la naissance miraculeuse de JC, la venues messianique de JC, JC crucifié comme zélote, la mise à mort et la résurrection de JC alors qu'on le pensait délivreur d'Israël, JC comme messie souffrant et humilié, la crucifixion comme expiation des péchés (qui font naître les dogmes de la chute et de la rédemption), la nécessité d'harmoniser les natures de JC (humain et divin).
Ces croyances présentées, il faut montrer les problèmes auxquels elles ont menés : si JC n'est pas le libérateur d'Israël puisqu'il est mort, serait-il le sauveur de l'humanité puisqu'il est ressuscité ? mais en quoi sa mort sauve-t-elle qui que ce soit sinon à considérer qu'elle contente dieu ? mais pourquoi dieu est-il content d'une mort, de sa mort ? JC peut-il être dieu s'il est mort et n'a pas prévu sa mort ?...
Il ressort que JC est bien jugé comme zélote (agitateur) par les romains, mais que sa mort déçoit la communauté juive qui voyait en lui le libérateur d'Israël. Sa résurrection est l'occasion pour Paul et les évangélistes de réinterpréter les énoncés de la Torah pour justifier que tout était prédit mais que personne ne l'a compris. Alors naît le christianisme. L'expiation par la crucfixion implique le renforcement de l'importance du péché originel (nul chez les Juifs) et interroge sur ceux qui seront sauvés (arbitraire de la grâce divine ? mais alors Jésus n'a pas sauvé tout le monde ? Alors à quoi a servi sa mort ?... et si sa mort a racheté tout le monde, à quoi sert le baptême ? et pourquoi suivre la liturgie si tout le monde est sauvé ? ne suffit-il pas de croire ?, etc...).
La révélation est encore problématique : seule l'Église serait habilitée à interpréter les Écritures - mais alors à quoi sert la Révélation si personne ne la comprend ? et, en retour, à quoi sert l'Église si tout le monde comprend la Révélation ? de toute façon, les Pères de l'Église ne se sont jamais entendus entre eux comme le nombre des conciles et hérésies en témoignent.
L'institution papale ne date que de la chute de l'Empire romain quand l'Évêque de Rome, jusque-là un des évêques parmi les autres, prend le nom de "pontifex maximus", titre des empereurs, et invente par la rédaction d'un faux, la donation de Constantin, dénoncée seulement à partir du XVème siècle. Quant à Pierre, Jésus n'aurait jamais eu pour idée de fonder une église puisqu'il annonce les fin des temps.
La double nature du Christ (humaine et divine, mais une seule personne) est rendue nécessaire par l'explication de l'expiation des péchés : Dieu est fâché depuis la faute d'Adam. Un sacrifice humain ne saurait le contenter. Il sacrifie alors son fils, devenu humain, dont la nature divine est seule capable de satisfaire un dieu. JC est donc "aussi" un dieu. Il s'ensuit que dieu a au moins deux personnes (en fait trois avec l'esprit Saint), mais, évidemment, monothéisme oblige, une seule nature. Et voilà la trinité.
Vatican II reprend tout cela et met un peu les choses au clair en autorisant que l'Église n'impose plus les dogmes, mais les "laisse à disposition", en quelque sorte, ce qui libère la pensée, l'esprit critique, la conscience individuelle, laquelle est libre de revenir au dogme quand elle en ressent le besoin.
La conclusion est que le christianisme ne doit pas tant son succès à ses dogmes, qui n'ont fait que celui de l'Église, mais à sa morale, bien que ses préceptes aient été déjà énoncés dans d'autres contextes antérieurement (aimez-vous les uns les autres en particulier).
L'énoncé est à la fois très précis et lisible, y compris sans connaissances préalables. Les citations sont souvent réduites, la présentation en chapitres est claire. le tout invite à lire les autres ouvrages de l'auteur (le premier est paru depuis 1925).