Les contemporains de Gérin-Lajoie, entre autres l'abbé Casgrain lui-même, auraient souhaité une production plus abondante. L'auteur de Jean Rivard avait sitôt, étant élève au Collège de Nicolet, donné des gages de brillantes promesses littéraires. Il y faisait des vers, où se répandait un fervent patriotisme, des vers qu'il cachait au fond de son pupitre, qu'il ne voulait lire à personne, et que le directeur fit copier une nuit par l'un de ses régents ; il composait à dix-huit ans une tragédie, le jeune Latour, d'un art fort inexpérimenté, qui fut représentée au Collège, publiée dans le Répertoire national, qui eut une heure de gloire fragile, et fit connaître au public, avant qu'il eût fini ses études, l'écolier prodige dont s'enorgueillissait déjà
l'Alma Mater. Ce même écolier, ému un jour de voir s'en aller en exil les victimes de 1837¬1838, composait cette naïve ballade qui devintla plus populaire de nos chansons : Un Canadien errant. Et l'abbé Ferland, qui était alors professeur à Nicolet, qui estimait à sa valeur l'excellent humaniste qu'était Gérin-Lajoie, l'encourageait de ses conseils et de son affection, commençait avec lui ces relations d'amitié qui devaient plus tard se renouer à Québec.
Dans quelle mesure les prix officiels vont-ils accroître notre avoir littéraire, augmenter la valeur de nos productions en prose et en vers ? C'est une question à laquelle il est assurément difficile de répondre. Mieux vaut laisser à l'avenir le soin de le faire.