Lettre d’un Républicain espagnol à un ami

Une longue lettre de plus de 130 pages, écrite « presque d'un trait », sans aucune consultation de document, par un homme de 64 ans ancien républicain espagnol réfugié en France à 19 ans pour échapper au franquisme .
Cette lettre, il l'adresse à un ancien ami resté en Espagne.
Il y relate les six années de cauchemar qu'il a vécues de 1939 à 1945 .

D'abord dans plusieurs camps successifs du Sud de la France, où rien n'était épargné aux refugiés, ni la boue, ni le froid, ni la faim, ni la vermine, ni la maladie, et où il leur fallait subir aussi brimades et châtiments.
Puis en 1940, balloté en divers coins de la France occupée, il fit étape à Bordeaux où il resta jusqu'en 1944. C'est là qu'il fut employé 4 ans dans des conditions indignes à la construction d'une base de sous-marins à flot : un vrai travail de bagnard, de marchandise humaine taillable et corvéable à merci au service des patrons français.

L'intérêt majeur de cet ouvrage précis, sobre, dépouillé de toute superflu, est qu'au delà du récit d'une expérience individuelle il participe de la mémoire collective.
Ce que Carlos Ruiz-Garcia a vécu, des milliers d'autres communistes espagnols réfugiés en France l'ont vécu.
Notons d'ailleurs que les verbes utilisés par Ruiz-Garcia pour relater ces six années sont le plus souvent à la deuxième personne du pluriel . le pronom je est rare, c'est le nous qui prévaut dans ce récit.
Et c'est bien pour cela qu'il mérite d' être lu.

Lettre d'un Républicain espagnol à un amiCarlos Ruiz-Garciatous les livres sur Babelio.com
Encore un très bon livre gagné à Masses critiques de juin.
Un témoignage très fort et très détaillé de ce que fut l'exil des perdants républicains à la fin de la guerre civile espagnole. Carlos Ruiz Garcia nous raconte ici, comme un récit-témoignage, sans même savoir alors que son texte sera publié, son exil et son arrivée en France. Au début de la Seconde Guerre Mondiale, en France , ce que l'on a appelé la Retirada, cette masse migratoire importante ne fut pas bien accueillie en France. Tous ces immigrés espagnols furent pour beaucoup enfermés dans des camps de travail, main d'oeuvre peu chère pour compenser le manque d'homme partis à la guerre.
Ici l'on se rend compte d'une manière si réaliste ce que furent réellement les conditions de vie de ces hommes qui avaient déjà tout perdu en abandonnant l'Espagne fasciste de Franco. Alors qu'ils pensent être accueillis à bras ouverts, c'est bien le contraire qu'il va se passer. Carlos réussi malgré tout à changer de camps et participe à la construction de la base sous-marine de Bacalan , près de Bordeaux. Au gré des brimades allemandes, de la faim, et de la dureté des conditions de travail, il nous raconte jusqu'à la fin de la seconde guerre mondiale, cette vie miséreuse, jusqu'à la libération.
Un récit poignant, cruel, difficile. D'un tel réalisme que l'on s'y croirait, un texte simple, qui n'a que l'intention de retracer le vécu de son auteur. il y réussit avec une incroyable efficacité.

A 18 ans, Carlos Ruiz-Garcia traverse les Pyrénées avec son régiment pour fuir l'armée franquiste. Il pense alors être libre et sauf. Cantonné par les gendarmes dans un camp improvisé, couchant à même la boue, se nourrissant de rien, il va, durant des mois, connaître l'errance et l'enfermement d'un camp à l'autre (Barcares, Argelès) et parvient finalement à Saint-Médard-en-Jalles. Il participe à la construction de la base sous-marine de Bacalan, vit au rythme des alertes, des brimades et des humiliations.
J'ai lu ce livre d'une traite, il mêle fin de la guerre civile et histoire de la France en guerre. Un joli témoignage.