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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
De la lecture de ‘'François le Champi'' il y a longtemps, j'avais gardé le souvenir d'une histoire intéressante, mais prenant en cours de route une orientation fleur bleue un peu niaise qui la gâchait passablement. Cela ne m'avait pas donné plus que ça envie d'explorer Georges Sand, et j'en étais resté là jusqu'à ce que l'on m'offre ‘'les maitres sonneurs''.

Impressionnant contraste. On trouve un peu les mêmes ingrédients dans les deux romans : romance, observation d'un phénomène social rural, peinture de la vie paysanne. Mais l'assemblage qui m'avait paru maladroit dans les aventures du pauvre champi est ici impeccable comme une queue d'aronde. Les histoires d'amour sont adroitement menées, sans empiéter sur la trame de fond. L'analyse, si elle est poussée jusqu'à avoir une véritable dimension ethnologique, est bien dosée par touches au fil de l'histoire, sans s'imposer par gros pavés descriptifs indigestes.

Curieusement, le récit est à la première personne, et Georges Sand n'hésite pas – avec brio – à prendre la voix d'un homme. le jeune Tiennent nous raconte donc son amour pour sa belle cousine, Brulette, et l'amitié que celle-ci porte envers et contre tout à son frère de lait, Joseph. Rêveur, taciturne, ce dernier a mauvaise réputation. Il passe pour paresseux, renfrogné, voir à moitié idiot. C'est que dans cette tête s'agitent des idées qui ne sont pas celles d'un simple paysan ! Des musiques et des airs y virevoltent sans trêve, et son ambition n'est pas de se fixer à quelques arpents de terre. L'irruption d'un robuste muletier va bouleverser leur vie quotidienne. Il faut dire que les muletiers sont une caste à part, à la fois estimée et crainte, capable de faire souffler comme un vent de folie sur la vie paisible des paysans ! Peut-être l'occasion pour Joseph…

Bien entendu, cette lecture est déformée par notre prisme moderne, et les cent cinquante ans de littérature qui se sont accumulés depuis Georges Sand. Pour un intellectuel de l'époque, les romances paysannes de ‘'François le Champi'' ou ‘'la petite Fadette'' étaient d'une force et d'une nouveauté séduisante, alors que ‘'les maitres sonneurs'' paraissait probablement plat et sans caractère. Les temps changent, et avec eux les goûts.
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George Sand ressuscite la parole paysanne du vieil Étienne Depardieu qui, de part le récit de ses naïves aventures de jeunesse, meublait les veillées d'hiver à broyer le chanvre.

Il remonte au temps de sa communion, en 1770, là où les faits sont ancrés dans sa souvenance comme il dit. Il habitait non loin de sa petite cousine que l'on appelait la Brulette. Orpheline, elle vivait avec son grand-père et a été élevée par une brave femme qui louait une partie de la maison et qui avait un fils à peu près du même âge, Joseph.
Dans ce monde de paysans qui n'allaient point à l'école, les compagnons d'enfance étaient ceux rencontrés lors du catéchisme. Ces trois jeunes s'y voyaient donc jusqu'à leur communion.
Joseph était alors distrait, taciturne, frêle de constitution, sans aucune expression et toujours dans ses rêveries. Il goûtait peu l'enseignement disant que « les mots ne se mettent point en ordre dans ma souvenance ; je n'y peux rien. » La Brulette et Étienne se devaient de le protéger des railleries et bagarres des autres galopins.
Pendant ce temps, Étienne racontait à l'assemblée que sa tête partait dans des folletées d'amour pour sa belle cousine.
Tout ce petit monde grandit et arrive à l'âge des demandes en mariage et la Brulette, dansant la bourrée les dimanches, se faisait manger des yeux par beaucoup de prétendants. Mais elle se refuse, jouant un peu la coquette en enflammant les coeurs tout en attendant sagement que le sien palpite réellement pour s'engager vraiment.
Joseph, à la nuit tombée, se réfugie auprès du grand chêne de Nohant pour aller flûter des airs de musique qui le métamorphosent. Pas besoin de paroles, la musique dit tout et véhicule tout ce qu'il ne sait pas dire par des mots. Dès lors, son souhait est de devenir cornemuseux. Il décide alors de rejoindre le Bourbonnais, pays voisin de leur Berry, afin d'apprendre à sonner la musette pour rentrer dans la confrérie des maîtres sonneurs.
Se rajoutent alors à ce singulier trio, un jeune muletier et sa soeur, pour emmêler quelques fils amoureux qui viennent tisser leur toile au-dessus de ces cinq jeunes têtes.

Deux mondes si proches géographiquement et pourtant si dissemblables dans leur tempérament s'affrontent dans ce roman. le Berrichon apparaît ici comme l'homme attaché à sa terre, franc et aimant le confort de son chez-soi, alors que le Bourbonnais, homme des bois, se complait à vivre et respirer sous la feuillée des arbres, aime à vagabonder à travers les corporations nomades de muletiers et de bûcheux.
Même les sonneurs diffèrent dans leur art ; ceux de la plaine se contentent de jouer en reproduisant les anciens airs alors que ceux des forêts mettent toute leur passion dans leur musique.

Si ces veillées traînent parfois en longueur, elles sont tellement riches en expressions oubliées, en verbes inusités de nos jours, en adjectifs naïfs et délicieusement désuets qu'elles ont eu le mérite de me faire sourire tout au long de leur lecture. Qui dépeint aujourd'hui un physique avec « une clarté dans la figure » et « de la belle gaité dans le rire » ?
Le dépaysement temporel dans le XIXe siècle de George Sand est absolument permanent. Ce langage mais aussi tous les grands emportements d'honnêteté, de vertu, de complaisance, de confiance et de bon coeur semblent si loin de notre époque !
Enfin, jalousies et médisances avaient aussi leur place et il ne suffit pas d'exceller en musique pour musiquer à son aise et faire danser dans les noces des villages.

Toute l'évolution des ces jeunes, tant physique que caractérielle et amoureuse, est décrite minutieusement et celui qui semblait le plus éteint des cinq devient fougueux par l'amour de la musique.

C'est un joli roman pour garder en mémoire la musicalité des mots d'un autre temps sur fond sonore des cornemuses.

Challenge XIXe siècle 2020
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Lorsqu'on pense aux romans champêtres de la dame de Nohant, on cite facilement "La Mare au Diable", "La Petite Fadette" ou encore "François le Champi". On pense moins aux "Maîtres Sonneurs", et pour cause, il est bien moins connu que les trois romans sus-cités.
Plus long et moins facile d'accès, moins doux aussi, "Les Maîtres-Sonneurs" hantent plus souvent les rayonnages oubliés des bibliothèques familiales et les logis des fondus de folklore; où ceux- tout aussi riches- des musiciens et des danseurs qui font claquer les planchers au son des airs trad d'antan, que les librairies. C'est dommage et pas seulement parce qu'un livre qui s'efface des mémoires est un petit chagrin, mais parce que ce roman est des plus intéressants en plus d'être plutôt bon, voire très bon.
"Les Maîtres-Sonneurs" ressuscite le Berry et le Bourbonnais de la fin du XVIII°siècle et la vie de ces terres rurales empreintes de traditions, de croyances et de musique en s'arrêtant particulièrement sur les cornemuseux et les charbonniers aux confréries mystérieuses. C'est le vieil Etienne Depardieu qui prend la parole et il déroule pour nous ce que fut le fil de sa vie, de sa prime enfance aux alentours de 1770 à sa jeunesse. le récit se divise en trente-deux veillées, chaque veillée offrant un épisode de l'histoire. On n'est pas loin des mille et une nuits, on est surtout au plus proche de cette tradition qui voulait qu'on se retrouve autrefois à la veillée entre voisins pour profiter du feu, écouter des histoires et éplucher des châtaignes (enfin, ça, c'était par chez moi!). Cela tombe bien, George Sand y était attachée à ces traditions et tenait à les faire perdurer à sa manière, à les immortaliser par l'écrit.
Notre Etienne encore petit vivait non loin de chez sa petite cousine, la Brulette, qui elle-même vivait avec son grand-père, la servante de ce dernier et son fils: Joseph, un gamin malingre et sensible, pleurnichard même. L'enfance est douce au pays de Sand: la nature est belle et généreuse, les enfants jouent dans l'eau des rivières et les blés et le temps passe doucement. Bientôt nos trois mômes et leurs compagnons ont l'âge pour aller danser la bourrée le dimanche et pour penser aux accordailles. La Brulette est devenue belle comme le jour et ils sont nombreux à vouloir la marier, Etienne et Joseph comme les autres. La petite fait la coquette, et rit, et danse. Son cousin devient un honnête laboureur quant à Joseph, il se réfugie derrière un chêne pour jouer de la cornemuse. Et il joue bien le diable, tellement bien qu'il fait danser et qu'il enchante. Sa vocation est toute trouvée: musicien il est, sonneur il sera. Pour entrer dans la confrérie des maîtres-sonneurs, il quitte le Berry pour le Bourbonnais, laissant ses amis dans l'inquiétude. le triangle amoureux ne le demeurera pas puisque au gré de l'intrigue viendront s'ajouter à ce personnel romanesque un muletier et sa soeur. Bien des fils vont se nouer entre ses cinq jeunes gens attachants parce qu'imparfaits qui empruntent beaucoup aux personnages des pastorales d'antan (Pays de l'Astrée: represents!). "Les Maîtres-Sonneurs", c'est donc un roman champêtre qui a l'air un peu gentillet (lisez, lisez, vous verrez s'il l'est tant qu'on le croit! Vous verrez si Joseph est si gentillet que ça... Et si les charbonniers ne sont pas tout sauf gentillets!) et qui évoque la douceur du paradis perdu, mais c'est aussi un roman qui cherche à mettre en lumière le terroir, ses habitants, ses coutumes, son parler. Sand achève ici tout ce qu'elle a théorisé sur l'importance d'écrire tout ce patrimoine et son travail sur la langue est remarquable d'authenticité, de recherche. de même, elle nous donne à voir les deux "pays" proches et pourtant très différents que sont le Berry et le Bourbonnais avec un luxe de détails qui nous permettent un véritable voyage dans le temps et le folklore (et c'est passionnant). Pas ce folklore édulcoré dont on se moque et qui fait vendre, mais ce qu'il a d'authentique, de constitutif de l'identité. C'est un roman politique, sociale, "Les Maîtres Sonneurs" déguisé en jolie pastorale et George Sand peint ce monde et ses traditions, ses êtres loin de Paris sans aucune condescendance mais avec une affection véritable, qui transcende le roman, les personnages et les paysages.

Et puis, faire si bien entendre le vielle et la cornemuse du centre dans un roman aujourd'hui érigé en classique, c'est beau quand même, n'en déplaise à l'accordéon du titi parisien.







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A mon avis, le plus achevé des romans champêtres de la dame de Nohant. Sand y réalise une synthèse parfaite de ses idées sur la manière dont il convient de "rendre" la langue paysanne. Ces théories sont expliquées dans la première des deux citations que je donne, qui est extraite de l'avant propos. Elles sont illustrées dans ma seconde citation où l'on trouve des exemples des divers procédés utilisés dans le roman pour trouver un compromis entre une langue authentiquement locale, mais comprise par tous. Dans ce livre, le recours aux particularismes est bien plus abondant et systématique que dans les autres romans champêtres. Les exemples donnés sont extraits du seul premier chapitre, ce qui suffit à démontrer en quoi, quantitativement et qualitativement, ce roman de terroir se distingue des autres textes du même genre où le recours à la langue populaire est beaucoup plus discret (La mare au diable ou François le Champi, La petite fadette ou le meunier d'Angibault.
J'éprouve également une tendresse particulière à l'égard du roman car l'action se déroule dans une région chère à mon coeur, que je connais bien pour l'avoir sillonnée dans ma jeunesse, avec une bande de copains avec lesquels nous écumions les bals de campagne. Cette région se situe à la frontière de l'Allier de du Berry. C'est là que les musiciens Berrichons rencontre les sonneurs bourbonnais qui leur apprendront à jouer de manière plus experte. J'ai d'ailleurs écrit un roman qui est une sorte d'hommage aux Maîtres sonneurs dans la mesure ou le narrateurs et les personnages s'expriment dans le sabir local, d'une manière beaucoup plus grivoise et pichrocholine que dans le texte sandien il est vrai. Si l'on veut prendre connaissance de ma version plus contemporaine du parler de ces confins déjà un peu berrichons du bourbonnais, il suffira d'aller sur mon blog dont l'adresse est donnée ci-dessous. Une fois sur le site, cliquer sur le lien "Le prince des parquets salons", situé en bas de la colonne de droite, sous le sous titre : "Un roman de jcf".
Lien : http://jcfvc.over-blog.com
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Je n'avais jamais lu George Sand je ne peux donc pas comparer avec ses autres oeuvres. Celle-ci nous parle de vie paysanne et d'amour. Ce roman nous fait découvrir la campagne française avec ses agriculteurs, ses bûcherons et ses muletiers. Modes de vies très différents qui se mélangent peu et pourtant c'est le cas ici malgré les embûches.

J'ai beaucoup apprécié découvrir ces modes de vie et leur langage ! George Sand a su restituer le langage de ses personnages sans pour autant que la lecture en devienne fastidieuse.

Je me suis aperçue que j'avais surtout lu des romans du XIXème siècle qui avaient pour personnages des ouvriers ou des bourgeois. Je suis ravie de cette découverte toute en douceur qui donne envie de se promener dans nos belles campagnes françaises avec l'espoir d'y entendre, au détour d'un chemin, sonner une cornemuse.
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Roman champêtre... on pourrait se dire "encore un" mais on le lit finalement avec beaucoup de plaisir. J'ai beaucoup aimé les relations entre les personnages principaux, la comparaison des différents modes de vie, les nombreux détails sur les muletiers et les sonneurs. L'ensemble est vraiment harmonieux, la découverte de l'autre et la déconstruction des préjugés très intéressantes.
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Se passe entre Berry et Bourbonnais. Vie rurale du 19e siècle. Histoire d'une jeune fille courtisée par trois jeunes garçons. Ces quatre-là vont finalement faire famille avec leurs proches. Il est question de musique, de joueurs de cornemuse (confrérie des sonneurs avec ses traditions). On découvre comment se passaient les bals à cette époque. On découvre des métiers oubliés : muletiers, bûcheux. Les bûcheux vivaient dans la forêt, de façon très rudimentaire dans des huttes. Bref, la vie d'autrefois. Bien, mais pas le meilleur George Sand à mon goût.
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