Une nouvelle conception de l'« Esthétique urbaine » commence à rajeunir nos vieilles villes du MoyenAge. Un ordre secret avait bien dessiné leur plan au cours des siècles, mais voici qu'à nos esprits abstraits, indifférents au pittoresque, il paraît confus et malsain. On a soif de la clarté des espaces libres, d'uniformité et de symétrie. « Symmetria ! » C'est le mot d'ordre que criaient les théoriciens de la Renaissance italienne, de Francesco Colonna à L. Battista Alberti, et les nôtres après eux. Il faut que Paris soit aussi beau que Rome, et l'on se figurait ainsi Rome antique.
C'est l'Italie en effet qui ressuscite la Peinture française. A elle nous devons la naissance de notre École nationale avec Vouet, Blanchard, Vignon, etc... On ne se contente plus d'aller à Fontainebleau : on remonte à la source, « par delà », disait la Renaissance, « outre-monts » dira cet âge classique. Mais ceux qui y vont partent individuellement, spontanément selon la vieille tradition, plus vieille même que le XVIe siècle, pour perfectionner leur « métier » au pays élu qui sera pour deux cents ans « la patrie des arts ».
Et il construit selon des règles. Car il y a des règles : c'est le premier et le dernier article de foi. Des règles qui s'enseignent et s'apprennent comme un catéchisme. L'art classique en effet est en son essence la croyance en l'éducation. Le Moyen Age avait bien aussi une initiation, et très forte, qui se transmettait hiérarchiquement du maître au compagnon et à l'apprenti ; mais elle était surtout empirique, riche en préceptes pratiques, élaborés et reçus dans le secret corporatif.
Ils ont tous le culte de la raison. Poussin est logicien comme Descartes ou Corneille. Mansart et Le Nôtre savent aussi bien que Pascal, Racine, ou Boileau, « ce que c'est que l'ordre ». Versailles, c'est le beau obtenu par la méthode : il est équilibré et harmonieux. L'artiste alors construit, organise, par le jeu naturel de son esprit et de son oeil.
Il pense les choses autant qu'il les observe : c'est un art intellectuel. Après les avoir regardées consciencieusement, honnêtement, il leur fait subir son pouvoir d'épuration pour les rapprocher de la beauté qu'il conçoit : c'est un art platonicien. Il rebâtit l'Univers suivant des lois qu'il lui impose : c'est un art volontaire.