En terminant la lecture de ce roman (?) de
Alice Schwarzer, écrit en 2017, je me suis souvenu de l'une des phrases de la première page :
«Les filles gloussent. Allons ce n'est pas si grave, Alice, ça ne fait rien. Tout le monde sait bien que tu es une étrangère. Ca n'est pas ta faute si tu n'es au courant de rien.»
C'est exactement ce que j'ai ressenti tout au long de la lecture.
Comment se contenter d'écrire en 2017 : «On raconte sous le manteau, qu'Ouyahia pourrait devenir président après la mort de Bouteflika. Agé de 80 ans, celui-ci bénéficie jusqu'à nos jours de l'aura de la lutte pour l'indépendance. Il était déjà ministre sous la présidence du colonel Boumédiène, le successeur de Ben Bella. Mais on le dit gravement malade et manipulé par des tiers.»
Comme ce roman m'a été offert à l'occasion d'une masse critique dont je remercie Babelio et les éditions de l'Observatoire, je me suis appliqué à le lire jusqu'à la fin.
Je ne multiplierai pas les exemples de mes déceptions ou les approximations et les analyses superficielles sur l'Algérie.
On est au mieux dans le factuel , présenté sans distanciation, sans analyse ; au pire dans l'exotisme de bon aloi :
« Des clans y ont établi leur territoire, hommes en bermuda ou pantalon et tee-shirt, femmes en burkini ou même en voile intégral.»
« Je l'ai déjà remarqué : ce sont souvent les femmes entièrement voilées qui ont des filles habillées avec une certaine coquetterie. Comme si les mères s'épanouissaient à travers elles.»
L'auteur retourne en Algérie en 2016 pour le mariage du neveu d'une amie, Djamila, une journaliste algérienne qu'elle a connu en 1989 au cours d'un séminaire qu'elle a animé à Tunis.
Elles se sont revues plusieurs fois, et la famille de Djamila est «venue rendre visite à l'exilée». Durant les années noires et la terreur instauré par le FIS, elle a accueilli Sarah la petite fille de la famille dont les parents vivent en France.
Le livre contient plusieurs chapitres construits de la même façon. L'auteure décrit ses souvenirs ou ses impressions, puis donne la parole aux personnes qu'elle rencontre.
Je m'interroge encore sur le sens qu'il faut donner à certaines analyses à l'emporte pièce, comme (l'auteure est à Alger) :
« (...) nous passons de nouveau devant l'inévitable bâtiment de la mosquée Bouteflika, qui est encore au stade du gros oeuvre. «Quand elle sera achevée dit Sarah, des milliers de pèlerins viendront. Quelle horreur ! » Je me demande ce que dirait Sarah en voyant la monumentale mosquée de la Ditib à Cologne. La mosquée située dans le quartier populaire d'Ehrenfeld, avec ses nombreuses ruelles, est la plus grande d'Allemagne. Ce n'est sans doute pas un hasard si elle est à portée de vue de la cathédrale, l'un des plus importants édifices chrétiens de l'Occident.»
Les années noires sont évoquées à plusieurs reprises de façon très superficielle, en niant la complexité de la situation dans laquelle le terrorisme d'état répondait souvent de façon aveugle au terrorisme intégriste. L' assassinat des moines de Tibhirine en est un exemple.
Bien que citant souvent
Kamel Daoud ou
Boualem Sansal, l'auteur en fait, à mon avis, une lecture sommaire qui sert son argumentation.
La fin de l'ouvrage contient des contradictions, on y lit que
« l'Algérie a pris ses distances avec l'islamisme», puis plus loin, « on fait de plus en plus pression sur les étudiantes pour qu'elles portent un foulard.»
En résumé, un livre décevant, bien loin de ce que j'attendais en lisant la 4ème de couverture, une vision de l'Algérie débarrassé des rancoeurs de la colonisation et de l'affrontement entre la France et l'Algérie.
Même la Petite chronique algérienne et l'index des personnalités en fin d'ouvrage laisse le lecteur sur sa fin.
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