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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
J'aime beaucoup l'écriture de Leïla Sebbar. Je la trouve fluide, pudique et riche en émotions. Pendant des années j'en ai fait étudier, lorsque les programmes me le permettaient, des extraits à mes élèves. Ce recueil de nouvelles ne fait que renforcer mon sentiment sur le talent de cette dame de Lettres. Il nous permet d'en savoir toujours plus sur ce pays dont elle trace les contours, dont elle ancre les paysages, les coutumes et les moeurs au fil de ses écrits.

Ici, comme souvent, elle laisse la parole aux femmes. Elle fait un panorama de chaque caractère, retraçant ainsi la réalité : il n'y en a pas un de semblable. Et pour adhérer au mieux à cela, différentes voix se font entendre. Nous découvrons ainsi, à travers les personnages féminins, tous ceux qui ont fait l'Algérie. Mais ce n'est pas tout, puisque nous suivons également une Algérie complexe, dont l'Histoire est constituée d'épisodes douloureux : colonialisme, guerres… Un thème est souvent présent, en lien avec ces moments sombres : le sort réservé aux femmes. Sans victimisation aucune, Leïla Sebbar met en évidence, très souvent, dans ses nouvelles, le viol. Mémoire de l'arbre m'a particulièrement marquée. de ce texte, commençant de façon très poétique, il ressort une noirceur inimaginable. La chute laissera l'imagination du lecteur oeuvrer pour en comprendre la finalité. J'ai également aimé La Maison bleue, rappelant, la chanson de Maxime le Forestier : « C'est une maison entre eucalyptus et cyprès, au pied de la colline » (P73). Là encore, il ne faut pas s'attendre à du bucolique ! Les textes de Leïla Sebbar dénoncent, pointent du doigt et donnent à réfléchir. Ils sont puissants. Ce petit recueil est un véritable coup de pied dans la fourmilière. C'est un coup de coeur pour moi.

Un grand merci aux Éditions Chèvre-feuille étoilée qui mettent en avant des textes de qualité.
Lien : https://promenadesculturelle..
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Ce court recueil de nouvelles de 91 pages à peine, se lit très vite. Il contient dix nouvelles écrites par l'auteur entre 1998 et 2021, pour certaines parues dans la revue "Étoiles d'encre", une revue trimestrielle parlant des femmes en Méditerranée, les autres nouvelles étant inédites.
L'auteur nous parle de l'Algérie, de son histoire et surtout des femmes qui y vivent ou y ont vécu, ainsi que de ceux qui les entourent, les pères, les frères, les enfants. Ils parlent toutes les langues, vivent en ville ou dans un petit village perdu du bled, sont nés ou pas sur cette terre, mais tous ont en commun de l'aimer.
Les femmes sont toutes différentes, rebelles ou dociles, parfois elles sont mères, elles veulent vivre et aimer, être libres et sont prêtes à tout pour cela.
Ce qui est important dans ce recueil c'est la parole des femmes, ce qui est dit ou pas, de leurs vies.
L'ambiance est très particulière. le ton est juste, à la fois nostalgique et douloureux, ou bien poétique, comme le titre d'ailleurs, et parfois drôle et plus léger. Ainsi, parfois, vous vous promènerez le long des boulevards, sous les oliviers ou dans les vignes, admirerez la couleur rouge des fleurs de grenadiers, sentirez l'odeur du bougainvillier...
Les textes sont courts (parfois 2 à 3 pages à peine) mais percutants. Les langues, les nationalités se mêlent pour ne former plus qu'une seule voix devenant au fil des pages, intemporelle.
L'auteur nous livre ici de magnifiques portraits de femmes, volontaires, protectrices, amoureuses, fortes ou farouches, mais libres.
Les nouvelles parlent toutes de ce besoin vital d'aimer que ce soit entre natifs de l'Algérie ou pas, que l'on soit algérien ou colon. Mais en filigrane, la guerre d'Algérie est passée par là. Il ne reste que la douleur de la séparation, de l'exil, de la perte de l'être aimé, et de cette terre qui ne sait plus à qui elle appartient désormais.
Au coeur du texte, les références littéraires ne manquent pas.
Le seul bémol est que peut-être ces beaux textes ne parleront pas suffisamment aux jeunes lecteurs qui ne connaissent rien, ou trop peu, de l'histoire de ce pays. L'histoire de la colonisation est abordée, la Guerre d'Algérie bien entendu, mais aussi la guerre civile des années 90.
Désormais, tous ceux qui ont aimé l'Algérie, qu'ils soient nés en France ou au pays, ne se sentiront plus jamais nulle part chez eux. Qu'ils soient nés d'un côté ou de l'autre de la mer, sont-ils condamnés à être pour toujours... des étrangers ?

La préface est de Sabrinelle Bedrane. Elle est intéressante car elle permet de mieux comprendre certaines nouvelles sur le plan symbolique, de se situer dans le temps ou dans L Histoire, et par rapport à la vie de l'auteur. Les superbes aquarelles qui illustrent la couverture, ou l'intérieur du recueil, sont de Sebastien Pignon.
J'ai lu avec grand plaisir ce recueil, reçu lors de la dernière masse Critique de Babelio. Il me donne envie de poursuivre ma découverte de l'auteur. Merci à l'éditeur et à Babelio pour leur confiance.

Plus de détails sur chacune des nouvelles sur mon blog...

Lien : https://www.bulledemanou.com..
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"La maison bleue"

"C'est une maison entre eucalyptus et cyprès, au pied de la colline”: dans cette nouvelle, poignante et mystérieuse, il est question d'une maison bleue. Tantôt refuge, tantôt maison de correction, voire de castration des femmes, elle fait pourtant l'office d'une maison au coeur de ragots de villages : "Ils ne verront plus les femmes de la Maison bleue, la belle maison réquisitionnée après le départ des étrangers".
Revenons au début de cette nouvelle. En premier lieu, il est d'abord question d'une simple description du lieu dans sa propre matérialité et dans sa propre utilité : "Il faut marcher longtemps sur le sentier, terre et cailloux, jusqu'à la mer. Un sentier réservé aux marins, aux pêcheurs jeunes et moins jeunes". Il est également question de légendes contées autour de la maison par les marins et les passants "les pêcheurs ne racontaient plus les belles histoires qu'ils inventaient, avec quel argent auraient-ils approché les femmes assises au bord de la fontaine, derrière les hauts cyprès ?"
Dans une seconde partie il est question d'une simple balade ainsi que d'une discussion entre une vieille dame et une jeune fille venant la voir et partageant des moments avec elle, même si la vieille femme est jugée folle, bizarre par le village : "Une vieille femme faisait la prière de l'aube face à la mer, on la disait folle, on avait peur, on l'évitait, sauf la jeune fille intrépide qui l'accompagne pour la prière au bord des vagues". La femme lui raconte alors ce que la maison abrite une vie de privation et d'esclavagisme pour les femmes y habitant, rencontrant des hommes aux hasard de salons et étant persécutées par une femme riche visiblement maîtresse des lieux. Ont apprend alors la malheureuse vie des résidentes du lieu: "Celles qui n'obéissent pas, les rebelles, elle les fait enfermer dans une chambre noire, creusée sous la maison. Elles sont battues à coups de fouet, on entend leurs cris, des cris de bête qu'on égorge, ces cris, je ne les ai pas oubliés". Ça amène à penser que cette vieille dame faisait partie de cette maison: "je ne les ai pas oubliés".
Cette nouvelle est une des plus marquantes du recueil. C'est ce drame qui est mis en avant: à savoir l'histoire poignante de femmes battues et traitées comme des prostituées. Cette nouvelle peut alors être comparée avec d'autres récits traitant de femmes battues et mises en escalavage tel que La case de l'oncle Tom de Harriet Beecher Stowe ou encore La couleur des sentiments de Kathryn Stockett.
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Léana P8

Un mort pour l'exemple, des mères comme témoins, les femmes pour raconter la guerre. Sous l'eucalyptus géant, elles forment un ensemble, celui d'une mémoire en deuil.

“Qu'allait-il chercher dans les roches sauvages que sa mère n'avait pas su lui donner […]”, elles interrogent le miséricorDieux. La douleur est collective et la perte individuelle. C'est face au fils que la Mère se détache du groupe pour être seule avec lui, dans l'intimité de leur souffrance. “Si elle arrête le sang, son fils ne sera pas mort”, Leïla Sebbar l'écrit non au conditionnel mais au futur, pour prêter aux mères la volonté d'avoir été actrices de l'histoire,
Le ton est poétique malgré la décennie noire et nous, lecteurs, sommes spectateurs de cette souffrance, démunis pareils aux mères qui voient leurs fils partir. La guerre ne laisse que ces femmes et leur douleur, de la séparation, de l'exil, du deuil, et de cette terre qui ne sait plus à qui elle appartient. Seules, endeuillées, veuves, Leïla Sebbar décrit les femmes, sans victimisation aucune. Elle les raconte fidèles, fortes, solidaires.
Mère et fils est un filigrane où les histoires se mêlent pour ne former qu'une seule voix à travers celle de l'auteure, intemporelle. Ici se lit la mémoire des femmes, victimes oubliées de la guerre d'Algérie.

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