Je suis persuadé qu'être en paix avec soi-même et accepter sa finitude permet d'affecter toute l'énergie disponible au service des processus innés de guérison.
Ma recette pour préserver mon capital d'optimisme, c'est de me concentrer sur ce qui va bien. Chaque jour, je passe en revue toutes les choses, grandes et petites, qui ont été agréables, qui m'ont apporté du plaisir, de la joie ou simplement de l'amusement, et j'éprouve de la reconnaissance. (..) Je me fais plaisir tous les jours, plusieurs fois par jour.
Quand l'invalidité s'installe, garder sa dignité se révèle de plus en plus difficile pour le malade.
Je sais que l'image de mes grands-parents et de mon père continue de vivre en moi [...] Nos morts vivent dans nos cœurs. [...] J'aime cette phrase tirée d'une lettre qu'un homme avait envoyée à sa femme au moment de partir pour la guerre civile américaine. Il avait assez peu de chances d'en revenir. "Si je ne reviens pas physiquement, lui écrit-il, n'oublie pas que chaque fois que tu sentiras la brise sur ton visage, ce sera moi qui serai revenu t'embrasser." Cette intuition, j'aimerais la partager avec ma femme et mes enfants. Qu'au moment où ils sentiront la caresse du vent sur leur visage, ils se diront : "Tiens, c'est papa qui vient m'embrasser."
Il m'arrive de fantasmer qu'en grandissant mes enfants se sentiront enveloppés d'un fin voile protecteur, comme si une force bienveillante flottait sur eux. Comme si, en m'en allant je leur avais laissé quelque chose de moi, une part immatérielle qui ne peut être vue, entendue, ni touchée.. Mais qui peut être ressentie comme une force d'amour inconditionnel toujours prête à les soutenir, à les animer, à les pousser.
Quand on a renoncé à se battre contre la maladie, il reste encore un combat à mener, celui pour réussir sa mort : bien dire au revoir aux personnes à qui on a besoin de dire au revoir, pardonner aux personnes auxquelles il faut pardonner, obtenir le pardon des personnes dont on a besoin de se faire pardonner.
Je préfère le parcours que j'ai eu même s'il m'a mis au bord du précipice.
Toute réflexion me conduit à penser que ce qui aide à vivre,aide en fait la puissance de vie inhérente à tout organisme vivant.Et inversément,tout ce qui ronge l'envie de vivre, diminue nos capacités de guérison.
(...) après tout, je ne suis pas le seul à devoir mourir. Ce n'est pas comme si on m'avait injustement puni, mis au cachot, à l'eau et au pain sec. Non, tout le monde devra y passer un jour.
Je n'ai pas de mots pour décrire la satisfaction que j'éprouve à l'idée d'avoir un tant soi peu redonné confiance et espoir à ces malades – mes frères – dans la tourmente.