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sur 438 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Le soulagement l'emportant sur le chagrin lorsque son père succombe (enfin?) à dix terribles années de démence sénile, Kay se rallie à la résolution de Cyril, son mari. Hors de question de passer un jour à leur tour par une telle déchéance, d'encombrer leurs enfants et de peser sur le chancelant système de santé britannique : cette infirmière et ce médecin d'un hôpital public londonien se suicideront préventivement aux barbituriques dès que sonneront leurs 80 ans, dans trois décennies d'ici. Mais, quand survient la date fatidique, le passage de la théorie à la pratique s'avère bien plus compliqué que prévu…


On est alors en 2020 et le couple, toujours très actif et en parfaite santé, se déchire, à l'image de toute la société britannique, à propos du Brexit et du confinement. Est-ce bien le moment de partir ? En écho malicieux au titre original « Should I Stay or Should I Go » emprunté aux Clash, et sur le ton au vitriol avec lequel, de livre en livre, elle s'attaque au prêt-à-penser de tout poil, l'auteur décline la réponse en douze versions cyniquement jubilatoires, entrelacées de scènes familiales et de tableaux de la classe moyenne anglaise aussi justes que féroces.


Vieillesse précaire ou épanouie, entourage prévenant ou maltraitant, hospice sordide ou établissement haut de gamme inabordable : le livre sonde tous les sujets sensibles avec une joyeuse absence de retenue, pointant les irrationalités nées de nos terreurs face à la mort, soulignant les égoïsmes générationnels et cette étrange conviction que la décrépitude n'arrive qu'aux autres, s'aventurant dans la dystopie et la science-fiction pour explorer un futur post-cryogénisation ou les conséquences qu'aurait sur le monde la découverte d'un élixir de jouvence.


Il en résulte un texte original et décapant, souvent drôle, tendre aussi, pour une conclusion paradoxale et pourtant évidente : c'est son inévitable échéance qui donne toute sa valeur à la vie.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Vous vous souvenez sans doute de ce jeu animé par Arthur dans les années 2004-2010, également connu sous le nom de "jeu des boîtes". Il s'agissait de prendre ou de laisser le contenu de boîtes choisies successivement, et pouvant contenir aussi bien une forte somme que des clopinettes. Je ne sais pas si ce jeu a inspiré la traduction du titre de ce livre, mais pour ma part je préfère celui d'origine "Should we stay or should we go", même si le choix ici n'a rien à voir avec celui de la chanson des Clash.

Non, là on se pose la question de rester en vie après l'âge fatidique de 80 ans, au risque d'être un boulet à traîner pour ses enfants et une charge financière pour la société. On est en Angleterre, où le système de santé n'est pas aussi généreux qu'en France, même si on râle tout le temps contre la sécu chez nous. Et, accessoirement, ce titre fait aussi référence à une autre grande question qui s'est posée pour nos amis britanniques il y a quelques années : rester ou sortir de l'Europe ? Eh oui, ce fameux brexit, un des seuls sujets de discorde entre Kay et son époux Cyril, qui par ailleurs s'aiment de façon touchante, même s'ils se chamaillent régulièrement (tiens, ça me rappelle un couple que je connais bien...)

Au début de l'histoire, Kay et Cyril n'ont que 50 ans, mais le père de Kay vient de mourir après une longue maladie invalidante et particulièrement pénible pour l'entourage, cette saleté d'Alzheimer. Et sa mère sombre également dans une folie inexorable. Kay s'interroge sur sa propre future vieillesse, et Cyril s'inquiète du coût de leur future prise en charge pour le contribuable s'ils ne peuvent plus s'assumer. Et ils voient mal leurs trois enfants s'occuper d'eux dans ce cas, vu leur caractères respectifs. Et c'est là que naît l'idée d'un pacte, proposé par Cyril. Au soir des 80 ans de Kay, le 29 avril 2020, ils se suicideront grâce à une surdose de Séconal, un barbiturique puissant que Cyril, médecin peut aisément se procurer.

Voilà pour le pitch de base. Mais 30 ans, c'est long, et toutes sortes d'évènements positifs comme négatifs peuvent se produire. La santé peut se maintenir au top, ou se dégrader chez l'un ou chez l'autre. Des découvertes révolutionnaires peuvent changer le cours de la vie. On peut atterrir dans une résidence pour seniors de luxe, parce qu'on a été prévoyant, ou dans un affreux mouroir digne d'une prison, parce qu'on a claqué toutes ses économies, ou que l'Economie s'est effondrée. Ou tout simplement, on peut changer d'avis, seul ou à deux. Petit clin d'oeil supplémentaire, Lionel Shriver a choisi de faire tomber l'anniversaire de Kay juste après la proclamation du confinement pour cause de Covid.

L'auteure a imaginé une douzaine de scenarii en partant de ce pacte conclu entre les deux époux, et elle nous offre des histoires jubilatoires ou effrayantes, avec son humour grinçant et son écriture reconnaissable entre toutes. J'aime de plus enplus, même si, comme d'habitude, certaines digressions sur le fonctionnement du système de santé anglais ou l'économie du pays m'ont un peu fait soupirer. C'est son petit travers, mais je lui pardonne bien volontiers car non seulement le sujet m'a vraiment interpellée (je viens d'avoir soixante ans, et je me pose la question de continuer à vivre ou pas dans certaines situations), mais elle a l'art d'imaginer des développements très différents, mais pour laplupart plausibles. Bon, il y en a quand même deux ou trois où elle s'est fait plaisir en inventant des futurs assez rocambolesques...

Non, vraiment je ne regrette pas d'avoir cédé aux sirènes des retours enthousiastes de certain(e)s ami(e)s, même si j'ai mis du temps à terminer ma lecture pour cause de grosse fatigue ! Et maintenant, should I stay pour lire mon fil d'actu, or should I go pour aller faire un gros dodo ? That's the question !
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En 1991, à Londres, le couple composé de Kay et Cyril Wilkinson, la cinquantaine, assiste depuis dix ans à la déchéance progressive du père de Kay, et à sa mort, à cause de la maladie d'Alzheimer. Travaillant tous deux dans le domaine médical, puisque Cyril est médecin tandis que Kay est infirmière, ils ont l'habitude de ces maladies neurodégénératives, mais n'en redoutent pas moins d'en être eux aussi victimes. C'est alors que Cyril fait à son épouse une proposition inattendue : ils se suicideront lorsque Kay atteindra quatre-vingts ans, c'est-à-dire un peu après que Cyril lui-même sera arrivé à cet âge. Cyril n'a aucun problème pour se procurer les médicaments idoines, qui restent au réfrigérateur, dans une boîte à savon. Bien sûr, à cinquante ans, l'âge de quatre-vingts ans paraît très lointain. Mais un jour il arrive… Que feront-ils ? ● Lionel Shriver nous propose non pas une mais douze réponses à cette question, en douze chapitres dont la plupart sont vraiment très réussis. ● Pour ce suicide, Cyril a des tas d'arguments qu'il défend face à une Kay moins convaincue que lui : « As-tu remarqué que, dans la nature, on ne voit jamais d'animaux qui ont l'air vraiment vieux – des animaux voûtés qui perdent leurs poils et marchent avec difficulté ? Prenons le cerf, par exemple : il arrive à l'âge adulte, puis il garde plus ou moins le même aspect toute sa vie durant et ensuite, il meurt. On s'habitue à voir des gens très âgés mais on est aussi des animaux, or, chez les animaux, survivre dans un état de délabrement avancé est contre nature. […] On ne vit pas plus longtemps. On n'en finit pas de mourir ! […] [P]our conserver la maîtrise de sa fin de vie, il faut avoir la volonté de renoncer à une petite tranche d'une existence qui n'est pas encore pourrie. Sinon, c'est la dégringolade, les médecins et la famille prennent le relais et on est bons pour perdre cette partie de nous-mêmes qui réfléchit et qui agit. La fenêtre de tir qui nous permet d'exercer encore la maîtrise de notre vie est étroite. […] C'est la meilleure façon de tirer sa révérence, martela-t-il. À nos conditions, chez nous, quand nous sommes encore sains d'esprit et capables de nous reconnaître mutuellement, de nous embrasser pour nous dire au revoir. Avant que nous tombions dans la déchéance et l'humiliation. Avant de coûter un bras à nos compatriotes pour survivre à l'état d'imitations grotesques de ce que nous étions jeunes ou comme de simples outres à souffrances. Nous contrôlons nos destinées. Rappelle-toi ce qui est arrivé à tes parents. » ● Kay et Cyril ont trois enfants qui joueront un rôle dans les différentes suites proposées par l'autrice. Simon, l'aîné, est trader, conservateur bon teint et plutôt mou. Hayley (qui « à seulement quarante-huit ans, ressemble à un tonneau ») a obtenu un diplôme universitaire en spectacle vivant, mais ne doit sa relative prospérité qu'à un mari titulaire d'une chaire universitaire à University College. Enfin Roy mène une existence marginale, sans argent, et se drogue sans doute. ● L'enjeu principal du roman, le suicide du couple et ses alternatives, est doublé par le problème du Brexit, pouvant être considéré comme le suicide d'une nation (Lionel Shriver est américaine mais vit en Grande-Bretagne depuis plusieurs années). Cyril, qui se prétend « socialiste » (il dit quand même « j'en suis venu à me demander si je ne m'étais pas fait le chantre de la justice sociale surtout pour avoir une bonne opinion de moi-même… »), est farouchement pour rester dans l'UE, tandis que Kay, que le problème préoccupe moins, est plutôt pour partir. ● A cet égard, je suis d'accord avec mon ami Dominique (@Blok), qui écrit que le livre perd beaucoup dans la traduction de son titre « Should we stay or shall we go », qui se réfère à la fois au suicide et au Brexit, sans compter la référence à la chanson des Clash. Pourquoi ne pas l'avoir intitulé « Partir ou rester » ? ● En revanche, je suis en totale opposition avec la conclusion de Dominique, qui fait du suicide tel qu'envisagé par les protagonistes une « démission […] presque un déshonneur métaphysique ». Lorsqu'on a vu ses parents se dégrader lentement jusqu'à la complète déchéance, on n'a pas du tout envie de suivre le même chemin. Je comprends très bien qu'on veuille quitter ce monde avant cette descente fatidique à laquelle nous condamne la médecine moderne. Je milite d'ailleurs pour cela dans plusieurs associations. ● Pour revenir au roman, il faut insister sur son humour, car même si le sujet est grave le ton est guilleret et on s'amuse beaucoup. ● Je trouve tout de même qu'à partir de la moitié du roman, les scénarii proposés sont outranciers, que ce soit dans la description de l'hospice ou dans la science-fiction de la cryogénisation, et donc moins réussis. La fin en revanche redevient intéressante. ● Lionel Shriver a une finesse d'observation remarquable comme lorsqu'elle écrit : « Mais pour les personnes désespérément plus âgées comme Kay et Cyril, la progression inexorable des années était passée d'attendue à surprenante, de surprenante à invraisemblable, puis à sidérante jusqu'à ce que la date dans le coin gauche de leur Guardian quotidien se transforme en une manifestation de l'impossible. Vivre en 2010 apparaissait en soi à Cyril comme une expérience étrange et il restait persuadé, dans le même temps, que l'année en question n'appartenait qu'à la science-fiction. » C'est curieux comme moi aussi je me suis déjà dit que 2023 relève de la science-fiction. ● Il y a aussi, bien sûr, dans son livre, une épaisseur métaphysique : « J'ai mis un temps fou à me rendre compte que je ne comprends toujours pas à quoi rime tout ça, lança gaiement Kay. Je trouve difficile d'abandonner quelque chose quand on ignore encore ce que c'est. J'ai peut-être quatre-vingts ans, et je ne mérite peut-être pas de vivre plus longtemps, mais je n'arrive toujours pas à cerner ce que signifie être vivant et encore moins être mort. Je ne sais pas ce qu'est cet endroit, ou même s'il est réel, et encore moins ce qu'on est censés y faire et, si j'ai perdu mon temps, je ne peux toujours pas te dire ce que j'aurais dû faire à la place. Je ne sais pas plus qu'à cinq ans ce qui est important. Je continue d'avoir le sentiment qu'il y avait un truc à saisir, or j'aurais du mal à m'y atteler maintenant qu'il me reste (elle vérifia l'heure à sa montre) quatorze minutes ! » ● Elle va jusqu'à faire allusion au pari pascalien revisité : « On perd, point : on perd tout, toute notre mise. Gagner quelque chose ou perdre tout ? Comme disent les jeunes : ‘lol'. » ● Elle va aussi jusqu'à citer « cette Shriver », « hystérique », omniprésente « sur Radio 4 ». ● En conclusion, c'est un roman très agréable à lire, plein d'humour, que je conseille !
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Que la thématique du livre n'effraie pas les lecteurs, on rit beaucoup dans ce roman !
Kay et Cyril, couple très uni, décide lors de leur anniversaire de 50 ans, qu'ils se suicideront ensemble pour leur 80 ans (la boîte de pilules attend dans le frigidaire).
Pourquoi ? Pour épargner à leurs enfants leur déchéance (expérience du père de Kay qui a eu Alzheimer pendant dix ans), pour ne pas coûter d'argent à la société (ils ont tous deux une profession médicale), pour ne pas finir dans un mouroir, pour éviter la tristesse de survivre à l'autre,...

Mais ils ont 80 ans en mars 2020, et le contexte est difficile : confinement à cause du Covid et tractation pro et anti-Brexit (nous sommes en Grande-Bretagne).
Leur décision va-t-elle être inflexible ?
L'auteur choisit astucieusement de nous proposer douze scénarios différents, comme douze variations musicales sur un thème...

On passe du rire au drame dans ces scénarios où l'on voit successivement toutes les images du grand âge.
Que nous réserve la vieillesse ? Seniors en grande forme comme dans les publicités, mort à petit feu dans un Ehpad, sérénité retrouvée, dépression, …
C'est avec un ton brillant, incisif, avec un humour souvent sombre, très anglais, que Lionel Shriver mène son roman.
Malgré quelques petites longueurs, elle mène le récit avec beaucoup de vivacité jusqu'au point final.
Que fait la société du grand âge, et que faisons-nous pour notre grand âge...
Mélancolie et humour se mêlent dans ce roman très réussi 
!
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En 1991, Kay et Cyril ont la petite cinquantaine. le père de Kay vient de mourir des suites de la maladie d'Alzheimer : après une rapide déchéance, durant plus de 10 ans, il a phagocyté la vie de ses proches, et plus particulièrement celles de son épouse et de sa fille. Pendant la soirée qui suit cet enterrement, Cyril (médecin) propose à Kay (infirmière) un pacte pour éviter de finir de la même façon : quand ils auront tous les deux quatre-vingts ans, ils se suicideront ensemble. À partir de ce thème, Lionel Shriver va broder douze suites en forme de variations qui lui permettent de décliner douze motifs différents avec humour et brio.
***
J'ai trouvé l'illustration de couverture parlante. Dans À prendre ou à laisser, la manière d'aborder la vie va conditionner en partie les événements selon qu'on perçoit le verre plein ou le verre vide. Il est vrai que le dessin peut tout simplement faire allusion au goût de Kay pour le vin rouge… le rôle du pessimiste râleur est le plus souvent dévolu à Cyril, mais pas toujours, et parfois, les deux se rejoignent dans une implacable mauvaise foi. le caractère des trois enfants adultes du couple semble aussi grandement influencé par le comportement des parents dans telle ou telle occasion, même s'ils gardent tous certains traits de caractère d'une variation à l'autre. Leur vie se module selon l'importance accordée à l'argent et au statut social, selon l'engagement professionnel, selon le charisme de l'un ou de l'autre, selon celui qui joue le meneur, etc., et selon les événement qui surviennent, évidemment. On comprend que l'autrice réside maintenant en Angleterre : Cyril, plus encore que Kay, se révèle « so British »…
***
La construction en variations permet à l'autrice de conserver l'intégralité de certains passages et d'en moduler certains autres. On se retrouve donc parfois avec deux « possibles » dont les deux premiers paragraphes sont identiques, par exemple, ou encore dont un seul minuscule élément change, bouleversant ainsi la suite de l'aventure. Par ailleurs, le roman est fortement ancré dans le présent : il sera question de Brexit, de pandémie, de confinement, de pollution, de pénurie d'eau, de réchauffement climatique, d'immigration, de chômage, de système de santé, etc., et d'horribles maisons de retraite, pour riches comme pour pauvres, dans lesquelles on se retrouve, d'une manière ou d'une autre, dépossédé de sa propre vie bien avant la mort ! Ne vous y trompez pas : le sujet n'est pas gai, mais paradoxalement, la patte de Lionel Shriver, son humour décapant, sa manière de présenter toujours argument et contre-argument, bref, tout son talent ressort ici et fera naître plus d'un sourire et, pourquoi pas, quelques éclats de rire.
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Lionel Shriver est devenue une autrice mondialement connue et reconnue, en 2006, lors de la parution de son huitième roman, « Il faut qu'on parle de Kevin », un livre percutant qui ne peut laisser ses lecteurs insensibles. Il a également été porté à l'écran, en 2011, par Lynne Ramsay avec, dans les rôles principaux, Tilda Swinton et Ezra Miller. Ce texte m'avait tout simplement bluffée et hantée un très long moment.

Cette année, elle nous revient avec « A prendre ou à laisser ». Un livre dont la quatrième de couverture pourrait laisser penser à une histoire légère, peut-être un brin frivole. Pourtant, comme dans ses précédents bouquins, elle traite de sujets et de thèmes difficiles tels que l'euthanasie, la fin de vie, le Brexit, la crise du Covid qui, hélas, nous toucheront tous, comme aussi la vieillesse.

Parents de trois enfants, Kay et Cyril forment un couple d'anglais de la classe moyenne haute, travaillant tous deux dans le milieu médical. Lors du décès du père de Kay, ils se font la promesse de ne pas devenir des « boulets » pour la société et leur famille et de penser garder leur dignité en se suicidant à l'âge de 80 ans. Les années passent tranquillement jusqu'à ce que la date fatidique survienne….

L'autrice, Lionel Shriver, imagine alors une petite dizaine de fins alternatives, certaines drôles, d'autres fantastiques mais toujours intelligentes et qui poussent à la réflexion sur les dérives que nous connaissons dans le monde occidental. J'ai beaucoup aimé cette écriture très posée souvent grinçante mais dotée d'une bonne touche d'humour à la fois cinglant et si véridique.

Rencontrée lors de la Foire du Livre de Bruxelles cette année, elle a présenté son oeuvre avec beaucoup de simplicité et de modestie. Pourtant, je peux vous dire que ce livre mérite d'être lu et dégusté !
Lien : https://www.musemaniasbooks...
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Le choix de mourir à 80 ans

Avec son humour caustique, Lionel Shriver nous offre une douzaine de variations sur un couple qui, après avoir dû souffrir en accompagnant un père sénile décide de se donner la mort à 80 ans. le pacte de Kay et Cyril Wilkinson résistera-t-il à l'actualité du Royaume-Uni ?

La vie de Kay Wilkinson n'est pas de tout repos. Elle voit son père décliner, rongé par la maladie. En soins constants, il devient sénile, agressif et ne reconnaît plus ses enfants. Autant dire que sa mort est un soulagement. Après ses obsèques, le traumatisme reste présent – ce père leur a pompé toute leur énergie pendant plus d'une décennie – et va la mener à accepter le pacte que lui propose son mari Cyril, se suicider lorsqu'elle aura 80 ans.
Nous sommes en octobre 1991, Kay a 51 ans et Cyril 52. le couple, lui est médecin généraliste et elle est infirmière, vit à Lambeth dans le sud de Londres, dans une maison qu'ils ont fini de payer. S'il leur reste donc encore de longues années à vivre, cette échéance va désormais leur servir de boussole, à la fois épée de Damoclès et incitation à profiter de la vie qui leur reste. Puisant dans leur fortune, ils vont s'offrir des voyages et chercher leur bonheur loin de leurs trois enfants, Hayley, Roy et Simon.
Mais leur retraite va être perturbée par le Brexit, décidé alors que leur échéance s'approche à grands pas. Cyril, travailliste et fermement opposé à la sécession, va alors s'engager pour le maintien dans l'UE et faire des dons conséquents pour soutenir les opposants au gouvernement. Kay, qui avouera plus tard avoir voté pour les conservateurs, ne partage pas vraiment ce combat et préfère se consacrer à leurs obsèques. Elle imagine aussi des rendez-vous – les derniers – avec les amis et la famille. Mais cette fois, c'est la pandémie qui vient chambouler ce beau programme. Des impondérables dont Lionel Shriver va faire son miel et nous régaler de quelques scénarios qui vont permettre à la romancière de faire étalage de cet humour qui nous avait déjà ravi dans Quatre heures, vingt-deux minutes et dix-huit secondes. Celui que je préfère voit Hayley débarquer avec toute une équipe d'urgence. Sans montrer la moindre compassion, elle veut persuader des parents qui visiblement n'ont plus toute leur raison, de finir en maison de retraite. Autrement dit, d'aller dans l'endroit qu'ils détestent et que leur pacte voulait justement éviter.
Mais les développements sur la crise des réfugiés ou sur la recherche de médicaments miracle ne sont pas mal non plus, surtout si vous aimez l'humour noir. Mais ce qui donne au roman son charme, derrière la satire acerbe, c'est l'amour qui unit ce couple au fil du temps. Plus d'un demi-siècle de vie commune et cette impression que désormais même le pire ne saura les séparer.



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Je rejoins, les deux pieds joints (car je saute d'allégresse), les lecteurs épatés par ce roman. Bien que la fin de vie soit un sujet pas gai du tout, j'ai ri, souri, éclaté de rire tout au long de ma lecture tout en ne perdant pas de vue que l'issue nous sera toute fatale évidemment... et que ça ce n'est pas drôle !

Cela fait longtemps que je n'avais ouvert un livre de Lionel Shriver. Cette auteure que je trouve diaboliquement caustique aborde toujours des sujets qui font réfléchir, comme on dit, des sujets sensibles, dérangeants, universels et dans l'air du temps, avec des personnages pas toujours sympathiques d'ailleurs.

Ici, nous voici face à un couple de quinquas britanniques, Kay et Cyril. Parce que la première a été confrontée à la sénilité avilissante de son père, parce que le second estime que la prise en charge des vieilles personnes au-delà d'un certain âge est un gâchis financier, parce que tous les deux souhaitent partir en beauté et ne pas devenir un poids pour l'autre, pour la société, pour leurs enfants (soit-dit en passant, ils n'attendent pas grande aide de la part de ces ingrats !) , ils signent un pacte, celui de se suicider en coeur à l'âge de leurs 80 ans. "80 ans, c'est un nombre rond. Donc, j'aime bien que ça soit la limite", proclame Cyril, qui n'a pu que constater, en sa qualité de médecin, que très peu d'individus parviennent à maintenir une qualité de vie acceptable au-delà de cet âge.

Arrive la date fatidique ou libératrice, c'est selon. Que feront-ils ? Passeront-ils à l'acte ? Se défileront-ils ? Qui va avaler en premier les cachets rangés dans la boîte à savon, dans le réfrigérateur, à côté des saucisses et de la bonne bouteille de vin blanc ? Est-ce que l'un d'eux va faillir ?

Lionel Shriver nous concocte 12 scénarios possibles absolument irrésistibles. le Brexit, la pandémie ( nous sommes en 2019), leurs enfants, le camion du laitier, la postière, tout va faire dérailler, bifurquer, differer ou pas leur pacte.

Bref, c'est du rire jaune intelligent et jubilatoire. C'est extrêmement bien
écrit et bavard et tant mieux, car Lionel Shriver excelle dans les dialogues !



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Contrairement à ce que pourrait laisser penser la couverture, dans son dernier roman, A prendre ou à laisser, Lionel Shriver ne parle ni de vin, ni d'alcoolisme. Peut-être est un clin d'oeil à une habitude du couple vedette du roman, Kay et Cyril, qui se sont fixés de ne jamais boire avant une certaine heure.

Ce couple, qui, après quelques verres un soir, alors qu'ils ont la cinquantaine, décident d'un pacte : mettre fin ensemble à leur vie lorsqu'ils auront 80 ans pour ne pas devenir un poids pour la société et pour ne pas connaitre la vieillesse quand la santé physique ou mentale se font la malle.

A partir de ce « pitch » de départ, Lionel Shriver, s'amuse à imaginer de multiples scénarii, certains plus optimistes que d'autres (d'où peut-être le verre à moitié vide et le verre à moitié plein de la couverture).

Filons la métaphore jusqu'au bout : A prendre ou à laisser est un très bon cru ! J'en ai dégusté chaque gorgée avec délectation, en riant jaune car Lionel Shriver use de son humour noir et caustique pour traiter le sujet de la fin de vie et de la vieillesse. Elle excelle dans ce format « nouvelles » comme c'était déjà le cas dans Propriétés privées auscultant avec finesse aussi bien la société britannique que ses contemporains.

Brexit, Covid-19, système de santé, maison de retraite, à travers ce couple, Lionel Shriver aborde bien d'autres sujets avec un sens de l'à-propos qui fait mouche.

Derrière le rire, l'effroi n'est jamais loin : lorsqu'elle ose imaginer les pires hypothèses (serait-elle un peu sadique ?), lorsque la maison de retraite devient prison qu'elle soit dorée ou pas, lorsque les enfants se mettent à traiter leurs parents comme des neuneus.

Ce que j'aime aussi avec Lionel Shriver sait que si son oeuvre a toujours été un peu provocante (je pense en particulier à Il faut qu'on parle de Kévin où elle osait mettre en scène une mère qui n'aime pas son fils), on ne bascule jamais dans un cynisme à la Houellebecq ou à la Beigbeder. Si elle est égratigne ses personnages, on ressent aussi la tendresse qu'elle nourrit à son égard.

Parce qu'elle arrive parfaitement à concilier ton mordant, réflexion stimulante et émotion, il faut lire A prendre et à laisser ! (et tous ses autres livres !).
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Je découvre Lionel Shriver sur recommandations d'un ami babeliote, et je ne suis vraiment pas déçue.
Quelle écrivaine, quelle imagination !
Il est question de comment vieillir, comment finir de vieillir.
Le père de Kay est atteint de la maladie d'Alzheimer, sa longue agonie a bouleversé voire terrorisé toute la famille.
Cyril, l'époux de Kay est médecin généraliste alors que Kay est infirmière. Ils ont tous les deux la cinquantaine au décès du père de Kay. Cette fin décadente et irradiante sur leur quotidien les amène à méditer sur leur propre vieillesse à venir.
Sur l'initiative de Cyril, ils prennent la décision de se résoudre au suicide collectif le jour des quatre-vingts ans de Kay.
Cyril aura alors quatre-vingt-un ans, ce qui le laissera vivre une année de plus que Kay puisqu'il est d'un an son ainé !
Le pacte est scellé dans une boite noire rangée dans le frigo de la cuisine.
L'originalité de ce roman ne s'arrête pas là, Lionel va pousser la réflexion plus loin encore et envisager plus d'une dizaine d'issues possibles.
Dans un méli-mélo d'humour, de sens de la gravité, nous évoluons dans ces cheminements qui nous concerneront tous un jour ou l'autre en espérant pouvoir vieillir !

De nombreuses allusions sont faites aux mouvements politiques d'actualité au moment de l'écriture du roman, notamment le Brexit, sujet sur lequel les époux sont en désaccord.
J'ai beaucoup aimé ce roman original qui forcément nous amène à nous interroger sur nos propres vieux jours.
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