L'écriture d'Amit Chauduri coud très délicatement un récit entre deux lieux, deux temps, deux expériences, en entrelaçant nostalgie du passé et incertitude du présent. Tout d'abord, deux lieux et deux temps. Il y a l'enfance et l'adolescence à Bombay du fils d'un couple aisé, la mère est chanteuse et musicienne, le père est cadre dans une entreprise. Puis, s'esquisse la vie étudiante à Oxford d'un jeune homme qui travaille sur la poésie de D. H. Lawrence. Deux expériences, aussi intimes que formatrices, accompagnent le protagoniste du roman, celle de la musique qui submerge le temps indien, et celle de l'amour qui, telle la vague, recouvre la solitude de l'étudiant avant de se retirer.
Ce roman repose sur l'impalpable : le calme d'un appartement au petit matin avant que le maître de musique n'arrive pour une répétition, un regard jeté dans la cour d'une résidence universitaire, l'éloignement douloureux qu'imposent des sentiments non partagés, une lettre écrite et jamais envoyée. de ce tremblé de l'écriture, quasi impressionniste, restituant la chaleur écrasante de Bombay, la pluie apportée par la mousson, les rendez-vous manqués et les attirances dénouées sans que les mots soient prononcés, il se dégage une profonde mélancolie. de temps à autre, la plume se fait plus acérée pour décrire des servantes maussades, une veuve altière, des prolétaires échappés du pub, avant de retrouver sa trace légère, toute empreinte de fugacité et de doute. La mort s'installe dans un corps, l'amour se dissout, une ville est quittée pour une autre.
Le charme des évocations d'Amit Chauduri finit cependant par s'évanouir lui-même, en refusant aux personnages une certaine épaisseur pour n'ébaucher que des ombres fantomatiques.
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Court roman, léger, délicat, presque trop délicat. Bien écrit. allers-retours entre Oxford où étudie le narrateur et Bombay et Calcutta où vivent ses parents. pages impressionnistes. Pa s d'histoire : le héros hésite entre deux femmes, mais on ne sait ni pourquoi, ni comment.
Un peu inconsistant, joli, cependant.
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Car pour un étranger comme pour un étudiant, la pièce où l'on se réveille et s'endort finit par devenir votre meilleur ami, la seule chose avec laquelle on établit une relation à la fois naturelle et structurelle, dont l'air et la lumière se mêlent à vos propres pensées, qui vous offre son espace profond, sans équivoque, aussi bien de jour que dans l'obscurité, quand la lumière a été éteinte, que l'on revient à soi.
Dans ce monde brièvement saisi par le passant à travers une porte entrouverte, une certaine lumière, un certain espace, le gris de la pierre et de la nuit, un certain équilibre entre lumière artificielle, pierre et obscurité coexistent presque pour l'éternité, et ce sont les étudiants, avec leurs diverses nationalités et caractéristiques, leurs voix et leurs accents, leurs différences d'habitudes et leurs efforts d'adaptation, leur sens du grotesque et leur maîtrise de la réalité qui, en vérité, disparaissent et sont étrangement niés dans leur existence; si bien que plus tard, si le passant se souvient de ce qu'il a vu, les étudiants semblent plus flous, plus colorés, plus incertains, touchants même, mais sans cesse à la lisière de sa vision, alors qu'il lui est possible, clairement et sans équivoque aucune, de se remémorer la dignité et le silence de cette porte et de l'univers qu'elle abrite.
"Les saisons et les heures n'ont pas d'existence absolue ; elles se définissent les unes par rapport aux autres."
L’Ambassador est un véhicule carré comme une boîte, avec l’obstination du taureau et la ténacité d’un rickshaw. Elle est réputée pour être la « voiture familiale » ; le dimanche, cousines et tantes de sortie s’y installent, en sueur ; à l’intérieur, j’associe son plancher brûlant, son levier de vitesse endolori ou ses pédales récalcitrantes à notre vie de famille et à mon enfance. De toutes les voitures que je connais, c’est peut-être celle qui connaît le nom le plus exaltant, comme si sa mission était, yeux écarquillés, d’apporter au monde de bonnes nouvelles.
Créer était faire œuvre de dévotion ; cette famille était enthousiaste et remplie d'amour pour cette statue ; ils l'avaient façonnée ensemble, mon cousin accomplissant le travail de sculpture pendant que sa soeur et l'enfant l'aidaient à la mettre en force et à parfaire les proportions. Elle n'était pas encore peinte, toujours couleur argile, mais le regard du saint et l'expression de son visage et de son corps n'appartenaient plus à la terre ni à l'argile, mais déjà au royaume de l'imagination. Pour la première fois, je comprenais d'où provenaient mes joies intérieures - l'amour des chansons et de la musique, l'orgueil et le plaisir infini de créer. Ce délice, c'est le don que j'ai reçu de ma famille.
« Gourmandises » de Amit Chaudhuri
Traduit de l'anglais (Inde) par Annick le Goyat
Tout empreints de chaleur et d'intimité, les poèmes réunis dans « Gourmandises » explorent le plaisir frivole et la nostalgie d'Amit Chaudhuri pour les friandises de l'enfance.
« Coupable » de Reginald Dwayne Betts
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Héloïse Esquié
Ces poèmes sont à la fois chants d'amour et cris de désespoir – où le mot prison est maintes fois répété mais aussi les silences et le vide persistant entre les hommes et les chiffres et les lois.
« L'Aube américaine » Joy Harjo
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Héloïse Esquié
Pour célébrer les noces du deuil et de la paix de l'âme, de l'horreur et de l'aurore américaines, Joy Harjo revient sur les terres de ses ancêtres par « la Piste des Larmes ».
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