Wouah !
Seul autour du monde sur un voilier de 11 mètres, en 1895 !
Parti en 1895 de Boston, il y est revenu trois ans après, affinant son expérience déjà longue de capitaine Haddock, mille sabords ! En effet, il avait déjà roulé sa bosse depuis 20 ans dans ces océans comme matelot puis capitaine de navires plus gros. C'est alors qu'on lui offrit une épave qu'il reprit à zéro avec du chêne, un bois qui résiste à tout ou presque tout. Il en fit un sloop ( quillard avec un seul mât) de 11.20 m.
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L'expérience qu'il nous raconte en 250 pages lors du périple du premier homme, qu'il appelle "l'équipage", qui a fait le tour du monde en SOLITAIRE sur une coque de noix... est incroyable. Je ne peux pas tout dire, mais il y a la technique de manoeuvre, la santé, la nourriture, les avaries, la force des éléments (calmes et tempêtes, ouragans ), et la variabilité de l'accueil humain à l'arrivée dans les ports... et les animaux, baleines, marsouins, poissons volants et insectes, mais aussi la chèvre infernale de l'île de l'Ascension ! Par sa connaissance des éléments, son expérience et son humilité,
Joshua Slocum a réussi, en trois ans, à éviter tous les écueils, sachant exactement là où il était à chaque instant, par rapport aux cartes, grâce à sa montre (horloge), son loch ( vitesse) dont il se passe à la fin, ainsi que de sa connaissance antérieure de certains ports.
En général, il est bien reçu par le capitaine du port, et même par le gouverneur du lieu, pour ceux qui connaissaient et admiraient sa tentative.
Il en profite pour radouber la coque, et réparer les voiles déchirées par des coups de vent. il connaît son bateau à fond, il sait l'équilibrer pour que, barre amarrée, il puisse passer beaucoup de temps, quand la mer n'est pas trop agitée, contrairement au cap Horn, du temps à lire, entre autres les aventures de
Robert Louis Stevenson sur l'Oise ou dans les Cévennes !
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Il est notamment bien reçu aux Samoas où, alors qu'il a jeté l'ancre, une pirogue de jeunes femmes l'aborde en demandant en riant s'il avait mangé ses coéquipiers. C'est d'ailleurs là qu'il rencontre la femme de
Robert Louis Stevenson, cher à son coeur et au mien, mort l'année précédente.
Autre rencontre fameuse :
à Durban,
Henry Morton Stanley vient l'aborder pour lui poser des questions pertinentes, auxquelles il répond avec humour, et sans embarras.
Lors d'une longue escale à Captown, il va voir, à Prétoria, le président Krüger qui croit encore que la Terre est plate, et n'en démord pas !
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C'est donc un journal de bord simplifié qui nous est présenté, mais Joshua évite "l'écueil" de la barbarie technique ( Dieu sait que le jargon voileux comporte des termes, et je me suis retrouvé en terrain familier, même si je n'ai fait que de la voile côtière, dont le tour de Bretagne, sur des quillards de 10 mètres )... Il évite donc ce pénible langage par des pointes d'humour bien placées, ainsi, l'épisode de la chèvre mangeuse de cartes, ou les jeunes filles et leur tante qui montèrent à bord avec enthousiasme, lui, pensant qu'elles feraient un petit tour, avait rendez-vous le soir avec une personnalité, croyait qu'il serait de retour en temps voulu, ... Mais elles étaient tellement enthousiastes, manoeuvraient l'écoute, hissaient la grand voile et barraient avec une telle joie qu'il continua à les faire naviguer, passant outre la personnalité, qui vint d'ailleurs aux renseignements !
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Il faut lire "
la longue route", de
Bernard Moitessier, que j'admire : il a baptisé son bateau Joshua en honneur de
Slocum.
Le record actuel du Vendée Globe est de 74 jours en monocoque, mais ça n'a rien à voir.
Bernard Moitessier s'en fout : en 1968, il est en tête de cette course, mais continue vers l'Océan Indien et la Liberté, au lieu de remonter vers l'Europe pour recevoir son trophée :)