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Une curieuse découverte que celle du Jujubier du patriarche, qui nous plonge dès les premières pages dans les méandres de conflits familiaux entre époux et épouse, enfants d'adoption, tantes, oncles et cousins, autant attachés aux liens du sang qu'à leur tradition chantée par les griots, qui s'évertuent à perpétuer l'épopée de Yéllimanée.

J'ai rapidement accroché à ce récit de mesquineries et de joies de femmes dans une culture qui ne leur fait pas la part belle ; Aminata Sow Fall décrit sans autre jugement que celui de la tradition les disputes conjugales, la mainmise féroce de la belle-famille sur l'héritage du père et mari, délaissant son épouse désormais veuve, ou encore l'idée fixe que seules les femmes peuvent être stériles. On s'étonne d'autant plus de la soumission de toutes ces femmes qu'elles sont toute fermement ancrées à l'épopée de leurs ancêtres, qui dicte leur positionnement et leur valeur, mais qui narre surtout le la rébellion d'une femme qui se soustrait à son époux en allant se cacher dans le ventre d'une baleine.

Cette obsession pour l'histoire familiale amuse et fascine, tout comme la manie des griots cupides à la changer au gré de ceux qui les paient, et ne pourrait mieux mettre en lumière l'importance capitale des ancêtres et des liens familiaux dans la culture qui nous est ici décrite.

J'ai moins apprécié la seconde partie du Jujubier du patriarche, passant du présent à l'épopée que les personnages semblent revivre suite aux bourgeons ayant éclos sur l'arbre du patriarche. Je demeure cependant saisie par la facilité qu'à l'auteur de fondre et mêler ainsi épopée, conte et présent ; personnages actuels et leurs ancêtres ; un ouvrage à lire pour tout adepte de littérature africaine.
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Ce roman est un chant épique. Il s'inscrit dans la liste des oeuvres africaines qui plongent dans l'histoire des peuples du contient jusqu'à leurs origines mythiques. Si Djibril Tamsir Niane, dans sa célèbre épopée, met à l'honneur le peuple manding, Aminata Sow Fall chante le Foutadjallon. Et c'est au griot, thaumaturge du verbe, qu'incombe l'imposante charge de perpétuer et de rendre toujours vivante l'âme de ce dernier. Pour autant Naarou est une griotte pas comme les autres.

Consciente que cette fonction a perdu nombre de ses lettres de noblesse et que l'on ne peut plus en vivre, Naarou se reconvertit en griotte au goût du jour. Elle allie alors affaires commerciales et prestations artistiques lors des grandes rencontres. Elle chante l'histoire du Foutadjallon truffée de mythes et de légendes. Une manière de joindre l'utile à l'agréable, de marier le passé légendaire au présent bouillonnant de la vie citadine. Toutefois le point d'orgue de cette consécration du passé a lieu annuellement au village de Babyselli en l'honneur du jujubier du patriarche, emblème éternel de ce territoire mythique peul.

À travers le parcours de ce personnage charismatique et de ses proches, l'auteure dénonce plusieurs stéréotypes dont souffrent les femmes notamment la stérilité censée être uniquement féminine. Ou encore le divorce qui charrie toujours honte et humiliation chez la famille de la femme. Elle dénonce aussi la balkanisation de cette nouvelle société post-indépendance en deux classes qui se supportent difficilement : les descendants des anciens nobles et ceux des anciens esclaves. Néanmoins si Tacko a une dent contre Naarou, sa fille adoptive, c'est davantage à cause de son épanouissement matériel que de son extraction sociale. Comme pour dire qu'elle accepte avec grand-peine cette ironie de l'histoire qui propulse les anciens dominés au-dessus des anciens dominants.

En explorant le récit au second degré, on pourrait dire qu'il est le contrepied du Baobab fou de Ken Bugul. En effet si Ken Bugul, le personnage, s'acharne à écarter son identité d'un revers de main et s'occidentaliser jusqu'au trognon, Naarou assume à la fois ses racines tout en s'ouvrant aux valeurs occidentales.

Dans la fluidité d'une écriture au style minimaliste, l'auteure joue avec le lecteur comme avec les temps. Passé simple, présent et futur simple se panachent harmonieusement tout comme poésie et prose qui composent le récit. Saupoudrée de termes africains, la langue d'Aminata Sow Fall est authentique et ancrée dans la vie locale.
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Yelli est heureux et fier de lui : le pèlerinage organisé à Babyselli a été une réussite totale, bien au-delà de ses espérances. Pour Yelli, respecter les ancêtres, perpétuer leur souvenir dans le coeur des vivants est essentiel, il y a un peu de chacun de ses ancêtres en lui et savoir d'où il vient lui permet de mieux savoir qui il est et où il va.
La célébration des glorieux ancêtres était aussi au départ un prétexte pour ramener la paix dans sa famille et réconcilier Tacko son épouse avec Naarou « leur fille ». Il pense aux évènements qui l'ont amené à Babyselli…
Les liens familiaux qui unissent les différents personnages sont complexes et la généalogie pas facile à établir ! La polygamie permet aux hommes d'avoir plusieurs épouses, une veuve peut épouser le frère de son défunt mari et suivant une coutume bien établie, une mère peut donner son enfant à une autre. C'est ainsi que Naarou, à six ans s'est retrouvée la fille (esclave ?) de Tacko et de Yelli le jour de leur mariage. Mais jusqu'à ce jour sombre où Tacko avait laissé éclater sa rancoeur, Naarou n'avait connu que le bonheur et l'amour chez ses « parents ».
Près du tombeau du patriarche où le jujubier, autrefois arbre miracle porte-bonheur, refleurit, les griots viennent chanter l'épopée qui mêle dans ses chants les ancêtres de Yelli, de Tacko et de Naarou.
L'auteur nous dit ici l'importance de la lignée avec la survivance de la notion de noblesse et de castes, l'attachement aux ancêtres et le respect des traditions orales transmises par les chants des griots. Elle nous dit aussi la complexité du rôle de la femme aux pouvoirs limités devant la puissance masculine tout en confirmant une place essentielle dans la société : « L'équilibre de notre monde repose sur les épaules de la femme, du marabout et du griot… S'ils révélaient les secrets qu'ils détiennent, le monde éclaterait ».
Superbe roman au caractère particulier qui mêle l'histoire classique d'une famille et la poésie des contes et des légendes.
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A Babyselli, les familles vivent à l'ombre des légendes de leurs ancêtres. Des liens étroits, calqués sur les rapports qu'avaient les ancêtres se nouent entre les descendants. Par exemple, les descendants de Biti (esclave) qui ont aidé Yellimané (fils du patriarche Sarebibi) continuent à vivre auprès d'eux, à se devoir une sorte de solidarité sacrée, tout à fait volontaire.

Nous commençons le récit dans deux de ces familles d'aujourd'hui. Nous entrons dans des préoccupations contemporaines, nous voyons que ce patriarcat est pesant et artificiel, peut-être... Mais la deuxième partie du récit, relatant la fête auprès du jujubier qui jouxte la tombe du patriarche, occasion pour Naari, le griot, de rappeler l'épopée légendaire de Yellimané, nous fait comprendre à quel point les descendants ont tendance à revivre le passé ancestral. Artificiellement ou instinctivement. Ce récit explique soudain beaucoup des incidents et des paroles des personnages du début de l'histoire.

Ce n'est pas très facile à lire, malgré les apparences. Il y a énormément de ruptures temporelles, parfois très subtiles, et le thème s'y prête d'une façon très souple. La geste ancestrale est magnifiquement écrite, mais il manque beaucoup de clés à l'occidentale - ou peut-être simplement à la lectrice - que je suis. Par exemple, pourquoi le clan des chasseurs tue Dioumana et pourquoi Yellimané va quand même se rapprocher de Gueladio (chef du clan des chasseurs et père de Dioumana) tout de suite après.
Lien : http://aufildesimages.canalb..
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Lu à la suite de la Grève des Battù,
Aminata Sow Fall se renouvelle et ce livre ne ressemble pas du tout à la Grève des Battù.
L'inspiration est celle des griots qui chantent les ancêtres .

Comme dans leur chant, elle conte une généalogie compliquée où s'emmêlent nobles et esclaves, ancêtres et rapportés. Si les auditeurs des griots connaissent l'histoire de la lignée, le lecteur (ou la lectrice occidentale) est perdu. Rien n'est fait pour faciliter le repérage, ni repères historiques, ou simplement indication de durée: on fait connaissance avec un bébé, au paragraphe suivant c'est une jeune femme...Ni repères de lieux, sommes-nous à la ville, laquelle? qu'est ce que ce détour par le Congo?
J'aurais adoré me laisser prendre par la narration, j'ai fait de gros efforts, mais je n'ai pas terminé le livre , fatiguée de devoir revenir en arrière pour faire le point sur les différents
,
Lien : http://miriampanigel.blog.le..
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Un quatrième de couverture alléchant qui promet un lien étroit entre vie et légendes africaines. Sans aucun doute on entre dans un autre monde, on approche une autre culture mais la lecture m'a été décevante. Une multiplication de personnages réels et légendaires, une histoire qui met du temps a se mettre en place (mais se met-elle réellement en place ?), et un style peu virtuose (mais pas toujours inadéquat) ont laisse sur moi une empreinte plus que légère, a peine l'effleurement du pied sur le sable mouille déjà efface par la vague du livre suivant.
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La partie du roman centrée sur les personnages de cette famille sénégalaise en déclin est la plus aboutie, et il est dommage que leurs histoires trouvent trop peu de résolution et d'aboutissement. La partie des ancêtres, principalement en forme de chants, semble arriver trop tard et manque malheureusement de cohésion avec le reste du roman.
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