Suites slaves

Suite n° 10 : Pour voix seule


Voilée
enchifrenée, spectrale, d'ailleurs
de la gorge ou du ventre ou de l'
âme-corps
ne lui ressemblant irreconnaissable
comme d'autres pays venue une Slavie
mais sans accent
elle riait elle opinait et lente
et faisant un avec les paroles elle
il cita des noms Villon Sponde Chas-
signet elle-il dit des mots : chair,
squelette, miroir, elle répondit oui
il était là
…

Suite n° 12 : À l'Automne aux Sœurs


Extrait 1

Moi, un augmenteur de bran dit bien
Léonard de notre vie un remplisseur
de latrines méditant sur le trou des
casernes et lycées
ô saison de la chute
des feuilles et des trébuchements
hors des bras chauds de l'épouse
une limace sans os
barbiche de Courbet ‒ et c'était l'été
mais la houppelande déjà de Gauguin
bonjour aux morts
qui ne hantez pas seulement vos dortoirs
mais à l'humus mêlés sur vous poussent
les laitues
vous êtes la glèbe la sève des arbres
qui nous veillent
jouant du chalumeau ou assoupis
sous la dernière guêpe de soleil
quand soudain voici que des enfants
font des signes amicaux incompris
des adultes et que les singes ont
occupé la cuisine
…

Suite n° 12 : À l'Automne aux Sœurs


Extrait 3

‒ ah musicalité de la langue anglaise
pour bibliothécaires borgésiens ! ‒
et vous baissez la tête de plaisir sur
un banc vous êtes assise sous l'aulne
un livre nouveau sous le bras : " alors Djoude ? "
comme descendant l'escalier d'or de leurs
songes elles vont vers la rivière où l'une
plongera sa main
les autres se taisent au murmure infatigable
aux herbes qui survivront
puis remontent désunies
tout charme aboli en
la jonchée des feuilles
un chien accourt trop tard
ne recueillant qu'amitié
et dans la maison celle qui nous a portés
prie
…

Suite n° 12 : À l'Automne aux Sœurs


Extrait 2

…
comme vous accompagniez les sœurs en
léger retrait ce dernier jour d'
automne aux feuilles rousses mortes
elles tout en blanc trop heureuse d'
être nées pour oublier la mort du père
dans le parc vous descendiez vers le
bonheur et la jeunesse et je suis encore
celui qui vous voit
en haine des pommes et des tiédeurs ou
de vos odes à réciter
…