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Yves-Alain Favre (Auteur de la postface, du colophon, etc.)
EAN : 9782253932598
575 pages
Le Livre de Poche (01/04/1996)
4.24/5   33 notes
Résumé :
Bien qu'il convoque l'ombre tutélaire de Stendhal, le Condottière s'est délesté de toute autorité. Son voyage a ceci d'unique qu'il traite des villes comme des caractères : Rimini est « maussade comme un attentat réussi », Gênes banale « comme la pensée d'un boutiquier d'Amérique ». Chaque ville a non seulement son tableau, sa pièce musicale, son église, son grand homme, elle a aussi son visage propre, ses verrues, ses rides, sa mauvaise haleine, son sourire (Sienne... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique

Voyage culturel "total" en Italie, pour le plus grand bonheur de qui y accompagne Suarès.

Publié en trois tomes ("Venise", "Florence", "Sienne") entre 1914 et 1932, le "Voyage du Condottière" est ce qui se rapproche sans doute le plus de l'oeuvre d'une vie pour l'étonnant polygraphe André Suarès (1868-1948), élève prodige, pauvre et tôt orphelin, qui effectua son tout premier voyage en Italie, à pied, dès 1893, à 25 ans, après sa réussite à l'ENS Ulm et son échec à l'agrégation d'histoire, avant de devenir une figure littéraire mythique de l'entre-deux-guerres, et l'un des quatre grands animateurs de la NRF avec Gide, Claudel et Valéry.

Vrai-faux « guide de voyage », nourri d'une culture proprement phénoménale en peinture, sculpture, architecture, littérature et histoire italienne, principalement du Moyen-Âge et De La Renaissance, mais encore tout à fait spectaculaire pour le XVIIIème et le XIXème siècles, l'ouvrage enchaîne au long des 550 pages de ses trois tomes une centaine de chapitres, courts ou très courts : descriptions de villes, de lieux, de routes, flamboyantes et épiques, ou au contraire, poétiques et intimistes, parsemées d'incises consacrées à un peintre, un sculpteur, un tableau, un écrivain, une figure historique.

Au-delà de ce rare foisonnement, le charme particulier du "Condottière" tient sans doute à ce que la formule « Dieu vomit les tièdes » a pu être inventée pour caractériser Suarès : passion dévorante, engagement permanent (sur « tout », le plus essentiel, ou sur « rien », le plus futile), mauvaise foi prodigieuse, mansuétude tout aussi étonnante (du type « Oui, c'était un monstre abject et d'une bêtise effroyable, mais toute sa vie, il protégea le peintre Untel, donc respect »).

Parfois « trop » métaphysique et quelque peu grandiloquent par instants, c'est néanmoins LE livre pour voyageurs sauvages et cultivés en Italie du Nord.
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Passionné de l'Italie où il a effectué plusieurs voyages, Suarès rédige ce livre, dans lequel le voyageur lui ressemble évidemment. Car le voyage ne peut devenir parlant que si l'on connaît le voyageur, le regard qu'il porte sur les choses. le voyage est subjectif par essence, et l'auteur revendique cette subjectivité. La vision dépend du l'oeil qui regarde.

Donc ici toute description se teinte d'un point de vue, d'une évaluation, d'amour ou de détestation. Peu de tiédeur, de la passion dans un ou dans l'autre sens avant tout. Trois villes forment le triangle magique : Venise, Florence et Sienne. D'autres sont moins bien aimées. le paysage, l'art, l'histoire, les grands artistes du passé, les habitants aussi un peu. Tout est sujet à des rêveries, des imaginations flamboyantes, ou cinglantes.

Un voyage hors du temps aussi : ce qui fut est bien plus important que ce qui est, ce qui est n'existe qu'en regard de ce qui fut. Un voyage dans le temps autant que dans l'espace, dans l'imaginaire autant que dans le tangible.

Il faut avoir le goût de prendre le temps de cheminer de cette façon, d'épouser le rythme sinueux de cette phrase, de cette pensée. Pas vraiment consensuelle la plupart du temps. Parfois un peu datée, sa vision de la femme par exemple fait sourire ou froncer le sourcil. Mais la langue est somptueuse, et les visions sont parfois d'une beauté saisissante. Quelqu'un avec qui on est pas forcément d'accord mais qu'on ne peut s'empêcher de trouver souvent intéressant. Ce n'est pas une lecture pour tous les lecteurs ni pour tous les moments de lecture. Il faut avoir envie de quelque chose de très personnel et qui l'assume, aucune envie de faire plaisir au lecteur. Pas de récit ni d'intrigue non plus, juste des impressions, une façon de suivre son propre cheminement intérieur avant même qu'extérieur.
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Chronique sur un voyageur en Italie. J'aurais aimé lire cet ouvrage avec un projecteur qui me montrerait les oeuvres et les villes dont il est question pendant ma lecture, car on ne connaît pas toujours les milliers de références qui émaillent cet ouvrage, et l'on perd beaucoup de contenu si on lit sans les relever. le style est extraordinaire, et quelques formules resteront gravées dans ma mémoire.
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poésie, philosophie, histoire - un de mes livres de chevet. Une langue claire et simple, une ambiance.
Il faut le lire "après" avoir aimé Venise, Florence ou Sienne
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A lire ou à picorer. Suarès écrit bien. Il a le goût de la formule. C'est aussi un érudit, qui a la critique acerbe, il suit une Italie littéraire à la suite de Stendhal et on se demande si l'Italie réelle le touche vraiment. Peinture et musique, il raconte un oeuvre ou un artiste qu'il associe à un lieu. Sa promenade est datée, certes, mais si séduisante et pimentée..
Lien : http://miriampanigel.blog.le..
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Citations et extraits (41) Voir plus Ajouter une citation
Tu es partout en Italie, quand tu n'y serais que l'enseigne et le dicton de l'orgueil national. Mais à Florence, chaque pierre de la vieille ville est ton os ; ces murs sont de ta chair ; les dalles et les tours, tout parle de toi ; et du Baptistère aux Colosses de Michel-Ange, presque tout ce qui est grandeur semble fait à ton image. Salut, Dante.

La Divine Comédie est la Somme du monde catholique, entre l'an mille et la Renaissance. Il fallait assurément une magnifique imagination pour muer la Somme de saint Thomas en cathédrale de poésie à trois nefs. D'ailleurs, l'intelligence de Dante, si forte soit-elle, est la moindre part de son génie. Pour les trois quarts, son poème est politique. La théologie y tient la place immense qu'elle avait dans le siècle. [...] . Ainsi le grand poème est souvent une satire enveloppée dans une oraison. Pour s'expliquer ou se défendre, on plaide contre un adversaire. Le grand orgueil blessé de Dante voyage dans les trois royaumes de la vie chrétienne : il plonge dans l'enfer des peines éternelles tous ses ennemis ; il admet au purgatoire tous ceux qu'il eût sauvés, si l'amour seul y pouvait suffire ; il élève au ciel tous ceux de sa lignée, ou qu'il tient dignes de lui. Pour damner les uns, pour sauver les autres, la théologie lui fournit toutes sortes de bonnes raisons. Au fond, elles sont toutes morales ou politiques. Dante veut qu'on pense et qu'on sente comme lui. De là, tant d'injustice, tant d'amertume et de haine féroce. Rien ne le désarme moins que la mort : il la donne et la redonne éternellement.

Dante est l'Homère de l'Italie. Tous les Italiens sont élevés dans le culte de ce poète : son poème est le rite de cette religion.
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Tout est rêve, tout est silence.

La tête des pins est déjà dans la nuit bleue. Et sous les arbres, l'ombre est presque noire ; mais les colonnes sylvestres sont rouges encore, et leurs pieds baignent dans le sang. Tout est silence, sauf un murmure lointain, comme la respiration de l'eau, et peut-être, là-bas, dans quelque taillis mouillé, la flûte lente d'une bête nocturne.

Et par l'espace ardent, le bruissement des pins frémissait en cadence, pareil sous le vent du soir à une mer plus haute, qu'un souffle du large eût poussée sur les sables célestes. Dans le calme et la mélancolie, je m'abîmai, comme la sainte forêt, sur moi-même, retenant le feu de l'occident dans mes paupières, et me laissant bercer à la paix sans fin de· la grande harmonie.
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Ravenne s'efface enfin, dans la terre où elle est ensevelie. Solitude admirable, qui réveille tous mes accords avec la nature, et dans chacun toutes les notes de la vie. Cette forêt de pins est le sanctuaire de la méditation, l'église d'une beauté divine qui se connaît et se contemple. Rien n'est plus à Dante qu'elle, et c'est Dante qui l'emplit, chantre à l'autel, prêtre sombre et magnifique. Voici la forêt du Purgatoire, aux confins du Paradis : le Purgatoire, le plus beau des poèmes, parce que le purgatoire est le plus propre à l'homme ; il contient tout, la faute et la justification, la cause et les effets, le péché qui est la fin du plaisir, et l'ardeur au salut qui purifie le désir en cendres, lieu sûr où la vie et la mort se confrontent.
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J'arrive. Et tout me déçoit. De tout ce que je cherche à Parme, ne trouvant rien, c'est à peine si je m'y retrouve.
J'erre en vain dans la chaleur sèche qui crie. Je tourne sous un soleil dur et fixe. Le jour est blanc comme l'acier. Le pavé brûle. - Où est la Chartreuse ? On me rit au nez : - Quelle Chartreuse ? On ne connaît pas de Chartreuse ; les ordres religieux sont dispersés. - Hé, il s'agit bien des moines ! Je sais que ma Chartreuse n'est point ici ; mais la Tour, où est la tour ? Il n'y a point de tour ; point de palais Contarini - Au diable ! il n'y a donc plus de Parme ? Via !
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Il se peut que la plus grande beauté ne soit pas où il la trouve : c’est pourtant là qu’elle est pour lui. Comme il lui parle, elle répond. L’entretien est infini que la passion nourrit, après l’avoir fait naître. La fringale des fauves ne désarma jamais, pas plus que leur prudence, mais il vient un temps où l’on ne dévore qu’en esprit. Comme un enfant, il a voulu toute l’Italie : il a bientôt compris qu’une telle convoitise est abstraite autant qu’elle est esclave : elle n’est pas de l’amour ni de l’art, elle est de la politique. Un pays fait masse et nombre : la passion comme l’art ne vit que de choix. La poésie est la partialité suprême. Je veux, dit le Condottière, que ma vie se prête à la vie de tout l’univers, et qu’elle y aide. Mais je ne donne mon âme qu’à l’objet unique entre tous les objets. // Ce monde marche par nous et marchera bien sans nous. Que l’esprit persévère dans son combat pour l’harmonie et la beauté. Mais nous n’avons que faire de jeter encore un geste discordant au milieu de la cohue, une autre vague dans le désordre de cette mer orpheline du calme. Bienheureuse l’action qui défend les hommes de se faire machines. Mais la pensée, en lutte perpétuelle avec le train mécanique de la vie, est une action suprême : l’esprit de beauté est l’arme divine qui défend l’homme de l’automate.
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Videos de André Suarès (3) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de André Suarès
CHAPITRES : 0:00 - Titre
A : 0:06 - ACTE - Jacques Deval 0:16 - ACTION - Sacha Guitry 0:28 - ADMIRATION - Comtesse Diane 0:38 - ADULTÈRE - Daniel Darc 0:59 - ÂGE - Fabrice Carré 1:08 - AMI - Jean Paulhan 1:18 - AMIS - Madame du Deffand 1:30 - AMOUR - André Birabeau 1:40 - AMOUR - Madeleine de Scudéry 1:51 - AMOUR DES FEMMES - Edmond Jaloux 2:03 - AMOUR ET FEMMES - Paul Géraldy 2:16 - AMUSEMENT - Jean Delacour 2:36 - ANIMAL - André Suarès 2:47 - APPARENCE - Nathalie Clifford-Barney 2:57 - ARGUMENT - Léonce Bourliaguet 3:07 - AVARICE - Abel Bonnard 3:19 - AVENIR - Gustave Flaubert 3:28 - AVIS - Marie d'Arconville
B : 3:37 - BAISER - Tristan Bernard 3:49 - BEAUTÉ - Fontenelle 4:00 - BÊTISE - Valtour 4:13 - BIBLIOTHÈQUE - André de Prémontval 4:24 - BLASÉ - Louise-Victorine Ackermann 4:35 - BONHEUR - Henri Barbusse 4:45 - BUT - Richelieu
C : 4:54 - CAPITAL - Auguste Detoeuf 5:10 - CERVEAU - Charles d'Ollone 5:20 - CHANCE - Pierre Aguétant 5:31 - COMPRENDRE - Charles Ferdinand Ramuz 5:42 - CONSEIL - Maurice Garçot
5:55 - Générique
RÉFÉRENCE BIBLIOGRAPHIQUE : Jean Delacour, Tout l'esprit français, Paris, Albin Michel, 1974.
IMAGES D'ILLUSTRATION : Jacques Deval : http://www.lepetitcelinien.com/2013/06/lettre-inedite-louis-ferdinand-celine-jacques-deval.html Sacha Guitry : https://de.wikipedia.org/wiki/Sacha_Guitry#/media/Datei:Sacha_Guitry_1931_(2).jp Comtesse Diane : https://www.babelio.com/auteur/Marie-Josephine-de-Suin-dite-Comtesse-Diane/303306 Jean Paulhan : https://jeanpaulhan-sljp.fr/ Madame du Deffand : https://fr.wikipedia.org/wiki/Madame_du_Deffand#/media/Fichier:Mme_du_Deffant_CIPA0635.jpg André Birabeau : https://fr.wikipedia.org/wiki/André_Birabeau#/media/Fichier:André_Birabeau_1938.jpg Madeleine de Scudéry : https://www.posterazzi.com/madeleine-de-scudery-n-1607-1701-french-poet-and-novelist-wood-engraving-19th-century-after-a-painting-by-elizabeth-cheron-poster-print-by-granger-collection-item-vargrc0078786/ Edmond Jaloux : https://excerpts.numilog.com/books/9791037103666.pdf Paul Géraldy : https://fr.wikipedia.org/wiki/Paul_Géraldy#/media/Fichier:Paul_Géraldy_by_André_Taponier.jpg André Suarès : https://www.edition-originale.com/fr/litterature/divers-litterature/suares-correspondance-1904-1938-1951-79921 Nathalie Clifford-Barney : https://www.amazon.fr/Eparpillements-Natalie-Clifford-Barney/dp/B081KQLJ87 Léonce Bourliaguet : https://www.babelio.com/auteur/Leonce-Bourliaguet/123718/photos Abel Bonnard : https://twitter.com/wrathofgnon/status/840114996193329153 Gustave Flaubert : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/e/ea/
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