L'idée de départ de
Jean Teulé était alléchante : se mettre dans la peau de
François Villon, poète du XVème siècle à la réputation sulfureuse, et livrer via cette autobiographie fictive un nouvel éclairage sur ses oeuvres. Passionnée par le Moyen Age, je pensais que "Je,
François Villon" allait agréablement augmenter mes connaissances sur cette époque. Las, j'ai vite déchanté !
En fait de connaissances,
Jean Teulé nous sert les pires clichés de violence et d'obscurantisme, à contre-courant de la réhabilitation médiévale entreprise par de nombreux historiens depuis une bonne trentaine d'année. Prétextant un parcours initiatique du jeune François pour intégrer une sinistre bande de truands, l'auteur oublie le poète au profit de l'assassin, personnage odieux qui accumule mensonges, larcins et violences en tout genre, sans conscience du bien ni du mal.
Ce point de vue subversif pourrait être défendable s'il était traité avec brio. Malheureusement,
Jean Teulé confond truculence avec grossièreté et misogynie. Dans son univers, la femme - jeune ou vieille, pucelle, bourgeoise ou prostituée - est systématiquement haïe, violée ou tuée, voire emmurée vivante, telle Isabelle, dont Villon se prétend amoureux et qui finit recluse, pataugeant au milieu de ses excréments... L'auteur, ravi de son mauvais scénario, ne nous épargne aucun détail, saturant le livre de digressions sordides et pornographiques. Serais-je tombée dans une parodie d'Orange Mécanique au temps des troubadours ou dans une version trash des Visiteurs ?
Comme je lisais du
Teulé pour la première fois, j'ai voulu lui laisser une chance. Je suis donc allée courageusement au bout de son récit, espérant qu'à un moment il s'élève au-dessus de la ceinture. En vain : seuls les poèmes colorés de Villon parviennent à flotter à la surface de ce marécage.
Je n'ai jamais été aussi soulagée de refermer un livre, comme l'on noue fermement un sac poubelle pour éviter que son contenu nauséabond ne se répande. La prochaine fois que je voudrai lire du Villon, j'ouvrirai mon Lagarde et Michard du Moyen Age, c'est plus sain !