Il est toujours sur mon bureau à portée de main. A l'époque des dictionnaires en ligne et des traducteurs parlants.
On le trouve facilement dans les brocantes. le mien cache une belle étiquette portant le nom d'un élève et sa classe : première A. Je suppose qu'un ministre entre les deux guerres mondiales a dû décider que les lycéens apprendraient mieux avec un dictionnaire anglais monolingue. On peut supposer ce qu'on veut pour le ministre, mais je pense que peu d'élèves de seize ans s'en servaient facilement. Résultat après quelques décennies : encombrement des brocantes, peut-être baisse des cours. le brochage* rouge est pourtant fort seyant, et le titre amuse les collègues.
Les collègues s'amusent, moi j'apprends (et je m'amuse, attendez quelques lignes). J'apprends parce que pour bien saisir les sens modernes d'un mot, j'aime mille fois mieux regarder ses sens premiers ( et aller vagabonder de synonyme en synonyme) que lire une liste complète de traductions qui dépendent d'un contexte que les moyens modernes n'indiquent pas souvent correctement. Et pour m'amuser : hasard et curiosité font bien les choses, et si on n'est pas trop anglophobe, comprendre un peu comment pensent nos voisins est fort distrayant.
Par exemple les unités de mesure, chaîne facile à suivre de mot en mot : saviez-vous que le pole mesure 5 yards et demi ? Et le rod 5 yards un quart ? Ensuite le rood, faisant 40 poles carrés, vaut donc un quart d'acre (évidemment, puis que l'acre vaut 4840 square yards). Il y a des jours où ça m'amuse, mais ce soir je trouve ça carrément poétique. Un peuple qui comptait en demi-couronnes (2 shillings et demi, soit 30 pence), en guinées (21 shillings) a forcément pour les fils et filles de la révolution française un attrait étrange. Notez bien que penser à l'envers a parfois des avantages : pour nous une livre vaut (je dis ça au hasard) 1,2 euros, et pour les anglais un livre vaut 1,2 euros. Étonnant, non ? C'est parce qu'ils pensent à l'envers de nous, sinon ils diraient qu'un euro vaut (à peu près) 0,8 livres.
Ce livre n'est pas encore réduit à l'état de chiffon, donc, comme le disait un professeur d'une autre langue, je ne m'en suis pas assez servi et fatalement je ne sais pas encore bien l'anglais (bon, je m'en étais rendu compte). Puissent mon joujou et mon précepteur démodé, mais royal, continuer de m'enchanter longtemps.
*J'avais écrit brochure, en sachant que ce n'était pas ça. le petit Robert confirme que c'est bien brochage. On aura compris que j'aime les dictionnaires papier.
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(Appendice : les pages n'en sont pas roses)
A vinculo matrimonii [L.], from the tie of marriage.
A volonté [Fr.], at pleasure
A votre santé [Fr.], to your health.
Bas bleu [Fr.], a blue-stocking, alitterary woman.
Beatae memoriae, [L.], of blessed memory.
Beau idéal [Fr.], a perfect model of beauty ; a model of ideal perfection.
Beau monde [Fr.], the fashionable word.
Beaux esprits [Fr.], men of wit.
Bête noire [Fr.], a black beast, a bugbear.
Bis dat qui cito dat [L.], he gives twice who gives quickly.