L'atelier du diable

Le narrateur, qui n'a pas de prénom, a grandi à Theresienstadt, sur les vestiges du camp de concentration «modèle». Sous la houlette d'oncle Lebo (né clandestinement dans le camp), lui et les autres gamins du coin fouillent les ruines et les galeries en quête de vestiges. Ayant appris l'informatique en prison il dresse la liste de leurs trouvailles. Lebo n'accepte pas que «ne subsistent de Theresienstadt que le Mémorial et le sentier pédagogique imaginé par les forts en thème». Autour de Lebo se forme peu à peu une communauté de jeunes gens sur la trace de leurs grands-parents décédés dans le camp. Un jour arrive Sarah, «chercheuse» suédoise, puis Rolf, photoreporter, ils voient le potentiel touristique du lieu en ruines et organisent un trafic de souvenirs, pizza Ghetto et t-shirts Kafka pour financer leurs restaurations. de riches donateurs sont sollicités partout dans le monde et les fonds affluent. le narrateur devient expert en fund raising et possède sur clé USB un carnet d'adresses bien fourni. Leurs activités sont mal vu des autorités qui mettent fin à ce juteux commerce et rasent les ruines. le narrateur, avec sa clé USB, est alors exfiltré par Alex et Marouchka, de République Tchèque … en Biélorussie ! C'est dire le burlesque de la situation. Là le narrateur, assez réticent (il se sent pris en otage) apprend que là il y a eu encore plus de morts, entre shoah et villages incendiés façon Oradour sur Glane, sans compter quelques massacres soviétiques. le projet est autrement grandiose que celui d'oncle Lebo, avec momies sonorisées de survivants des massacres racontant leurs souvenirs de l'horreur, un projet à l'extrême limite du voyeurisme et de la fascination morbide. Là encore tout part en sucette, entre conflits d'intérêt des ex-soviétique et des allemands, du gouvernement biélorusse et de l'opposition.
Le coup de génie de l'auteur, c'est d'avoir réussi à transgresser de nombreux tabous en traitant le thème du tourisme mémoriel sur un mode burlesque. Pour y parvenir il a eu l'excellente idée de faire du narrateur un personnage malin, mais naïf et ingénu, ballotté par des intérêts qui le dépassent, qui a un regard au ras des pâquerettes, quoi qu'il arrive. Cela permet un récit à la limite du fantastique sur un thème très sérieux : qu'est-ce qu'il faut mémoriser et comment transmettre ?

Je suis probablement passé à coté de quelque chose, mais pas pu finir...