- Où allez vous ? questionna Jonathan, les yeux fixés sur la route.
- Chez mon oncle, répondit Angine. Puisque vous m'avez posé une question, j'ai le droit de vous en poser sept. Si vous donnez votre langue au chat, je vous débarque.
- Ne pourriez vous pas remettre ces questions à plus tard, je suis un peu fatigué.
La princesse regarda le chancelier d'un air entendu et celui-ci, au mépris du danger, fit de même. Le camion, déporté sur la gauche, frôla un autocar qui venait en sens inverse.
- Si monsieur est trop fatigué pour répondre à sept malheureuses questions, il l'est beaucoup moins pour en poser une, et de son invention encore ! Alors qu'il est bien plus difficile d'inventer des questions que d'y répondre !
Un long silence boudeur suivit cette déclaration. Jonathan finit par céder.
- Je répondrai si le Chancelier regarde droit devant lui.
- Ne vous inquiétez pas, il ne nous espionnera pas. Je vais lui bander les yeux.
- Non, s'il vous plait. Je réponds sans condition.
- Première question : les centaures sentent-ils mauvais des sabots ?
- Uniquement lorsqu'ils ne se lavent pas. Les centaures férus d'hygiène qui prennent leur bain hebdomadaire n'exhalent pas la moindre odeur malhonnête.
- Vous entendez, Chancelier ? Ne me racontez plus que vous êtes un centaure ! Deuxième question : Combien de temps contient une montre ?
- Une quantité variable. Pour l'évaluer avec précision il faudrait s'adresser à une autruche. Elles ont sur l'horlogerie des connaissances illimitées.
- Trois. Quelle était la couleur du cheval blanc d'Henri IV et celle d'Henri IV par-dessus le marché ?
- Henri IV était vert de peur, ce qui rendait son cheval rouge de honte. Et vice versa.
- Quatre. A-t-on le droit d'écrire "AVARE" avec une seul "A" ?
- Oui, si on manque de place.
- Cinq. Possède-t-on une oreille pour le français, et une autre pour l'anglais ?
- Cela peut arriver lorsqu'on possède également deux langues.
- Six. Êtes vous un révolté ?
- Oui, malheureusement, dès que je ne suis pas content.
- Sept. Qu'ont les culs-de-jattes que les petits bateaux n'ont pas ?
- Une maman.
Le Chancelier lâcha le volant pour applaudir des deux mains. Le camion fit une embardée et monta sur le talus. Sans s'émouvoir, le vieillard reprit la direction du véhicule.
p. 38 - 39
Il y a un superbe coucher de soleil. N'aimez-vous pas les couchers de soleil? Je les adore car ils me donnent l'impression de recevoir du courrier tellement ils ressemblent à des cartes postales.
- Et si je vous révélais que je ne suis pas Princesse, que le Chancelier n'est pas Duc, qu'en déduiriez-vous?
- Que vous auriez aimé l'être.
Vous savez j'ai l'impression de devenir fou. Vos propos sont tellement insensés pour moi et semblent tellement normaux pour vous que je m'y perds. J'aimerai bien être à votre place.
- Je vais vous écrire la ballade de l’amnésique :
Je n’ai rien oublié
Je n’ai rien
Je n’ai
Je n’
Je
?
- Qu’elle était la couleur du cheval blanc d’Henri IV et celle d’Henri IV par-dessus le marché ?
- Henri IV était vert de peur, ce qui rendait son cheval rouge de honte. Et vice versa.
- Vous jouissez d'une immense popularité, constata Jonathan.
- Ils ne me connaissent pas, ou bien mal. C'est moi qui les connais. Tous. C'est un grand calvaire de connaître tout le monde. [...] Croyez-moi, il vaut mieux être célèbre.
- [...] Maman m'a assuré que si je ne recommençais pas, je pourrais rester à la maison. Je n'ai plus jamais volé, excepté quelques cendriers et deux ou trois diamants.
- Les frères Barbe sont d'une autre envergure ! Ce sont eux qui ont organisé et répandu l'usage du crédit.
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Il faut écrire dans les passages cloutés pour ne pas se faire écraser par la Critique.
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- Stop !
Jonathan obtempéra.
- Que se passe-t-il ?
- Il y a un superbe coucher de soleil. N'aimez-vous pas les couchers de soleil ? Je les adore car ils me donnent l'impression de recevoir du courrier tellement ils ressemblent à des cartes postales.