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EAN : 9782367580890
280 pages
Skol Vreizh (20/09/2018)
4.2/5   5 notes
Résumé :
12 juillet 1944. Des rafales de mitraillettes brisent le silence de l’aube dans une ferme du Morbihan. André Gondet, 23 ans, s’écroule sous les balles au milieu de ses camarades résistants. Ce sanglant épisode marque les habitants des environs au fer rouge. Dans la famille Gondet, la douleur serre la gorge et scelle les lèvres. La souffrance est aussi vive que silencieuse. Soixante-dix ans plus tard, André n’est plus qu’un nom sur un monument aux morts. De lui, il r... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Journaliste à France 24, Stéphanie Trouillard travaille plus particulièrement sur les sujets touchant à l'actualité internationale, au sport et à l'histoire de la Première et de la Seconde Guerre mondiale. À ce titre, elle a réalisé en 2017 un webdocumentaire "Si je reviens un jour", les lettres retrouvées de Louise Pikovsky, consacré à l'enquête qu'elle a menée autour d'une jeune lycéenne juive morte en déportation. L'histoire tragique de cette jeune fille est d'ailleurs en cours d'adaptation sous forme de bande dessinée (sortie en mars 2020).


ANDRÉ GONDET, CET INCONNU...
Le point de départ de cette enquête : la photo d'un jeune homme accrochée sur un mur de la maison familiale en Bretagne. Son nom ? André Gondet. Il s'agit du frère du grand-père de l'autrice, résistant mort le 12 juillet 1944. Une photo, un nom, une date de naissance et une date de décès, rien d'autre. Comme dans nombre d'autres familles ayant vécu la Seconde Guerre mondiale, le silence est alors de mise.

Pourtant, un jour, tout cela va changer. Quelques années après le décès de son grand-père, le père de Stéphanie Trouillard décide de faire l'arbre généalogique de la famille. Pour l'aider, elle se lance alors dans des recherches sur les soldats de sa famille et découvre le nom d'André Gondet. Elle se souvient alors de cette fameuse photo qui l'intrigue depuis son enfance. de lui, il n'existe pas d'autres photos, pas de lettres, pas de papiers. Autour d'elle, personne n'est capable de lui donner le moindre renseignement. Insaisissable, André Gondet est comme un fantôme. Qui était-il ? Que lui est-il arrivé ? Pourquoi son grand-père refusait-il de parler de son frère ? Autant de questions qui ne cessent de tarauder la jeune journaliste passionnée d'histoire. Bien décidée à éclaircir ce mystère, elle se lance alors, telle une détective, dans une longue enquête dont elle ignore encore les tenants et les aboutissants...


LE RÉCIT POIGNANT D'UNE LONGUE ENQUÊTE
Dans ce livre, Stéphanie Trouillard retrace avec beaucoup de sensibilité et de précision les recherches qu'elles a menées pour exhumer la mémoire de son grand-oncle. de la Bretagne à l'Allemagne, en passant par Paris ou bien encore par Caen, l'autrice nous fait partager ses découvertes, fruits de nombreuses heures de travail en archives, de lectures d'ouvrages sur la Seconde Guerre mondiale, de recherches sur le web, d'envoi de lettres, d'appels à témoins dans la presse et de rencontres avec les derniers témoins de cette époque. Une enquête qui s'apparente ainsi à une véritable course contre la montre, beaucoup de témoins étant déjà décédés. Les années ont passé, mais les blessures ne sont pas encore refermées, la douleur est encore bien présente dans de nombreuses familles, se transmettant même de génération en génération. Ainsi, certains témoins refusent de parler ; d'autres, d'abord réticents, finissent par libérer leur parole ; d'autres enfin sont heureux de voir que la jeune génération s'intéresse à cette période de l'histoire.

Tout en respectant la position de chacun, Stéphanie Trouillard ne néglige aucune piste et fait preuve d'une ténacité et d'une persévérance incroyables ! Soutenue par sa famille, elle fait face avec beaucoup de force aux moments de découragements, aux pistes qui se transforment en culs-de-sac, aux regrets, aux hésitations, faisant fi des remarques que ceux qui s'intéressent à l'histoire et à la généalogie ont coutume d'entendre : "Un véritable passe-temps de vieux, à la limite du glauque ou du carrément macabre".
Le récit, empreint d'émotions parfois contenues, parfois trop fortes, montre à quel point cette quête l'a remuée, virant parfois à la quasi obsession comme elle l'admet elle-même, tant le besoin de connaître la vérité est fort, avant qu'il ne soit trop tard. D'ailleurs, certains passages évoqueront sans aucun doute des souvenirs à celles et ceux qui ont déjà fait des recherches en ce sens. Ainsi, sa description de ses recherches au Service Historique de la Défense à Vincennes :

"Je suis subitement submergée par une émotion inattendue. Je me rends compte que je vois pour la toute première fois la signature de mon aïeul et que je tiens un document qu'il a lui-même touché, il y a plus de soixante ans. [...] En tenant entre mes doigts ces documents, j'ai l'impression qu'un lien vient de se créer avec cet arrière-grand-père que je n'ai jamais connu, comme s'il me passait maintenant le flambeau, le devoir d'être la gardienne de leur passé. [...] Dans la salle Louis XIV, je baisse les yeux. Les larmes brouillent mon regard ; mes mains sont moites ; mon coeur bat à toute vitesse. Je n'ose même plus toucher les papiers de peur de les abîmer. Tout se bouscule dans ma tête."

Par expérience, je confirme que consulter un dossier de résistant au Service Historique de la Défense, un dossier qui n'a peut-être jamais été ouvert avant vous, c'est comme créer ou renouer un lien avec la personne disparue, comme si vous vous étiez donné rendez-vous, un rendez-vous hors du temps.


UNE HISTOIRE FAMILIALE, L'HISTOIRE D'UN PAYS OCCUPÉ
Malgré les obstacles, petit à petit, avec patience, minutie et rigueur, Stéphanie Trouillard effectue un véritable travail de fourmi : elle récolte et rassemble les documents et les témoignages qu'elle parvient à récupérer, les étudie, les classe et les font parler. D'ailleurs, un cahier en fin d'ouvrage rassemble quelques-uns de ces documents – portraits, cartes, archives – qui permettent de mettre des visages sur les noms et de bien situer les lieux cités dans l'ouvrage.
Grâce à ce long travail d'enquête et d'analyse, elle va parvenir à retracer le parcours de ce grand-oncle, un jeune homme bon vivant et volontaire qui, pour fuir le STO, s'est engagé dans la Résistance. Traqué par les soldats allemands et les miliciens, dont Zeller, Munoz et Gross, André Gondet est exécuté le 12 juillet 1944 à l'âge de 23 ans dans une ferme à Plumelec (Morbihan) avec d'autres résistants, des parachutistes SAS et les fermiers qui les avaient accueillis.
Mais, à travers cette enquête, l'autrice nous dévoile plus largement toute une partie de l'histoire de la Résistance en Bretagne et même toute une page de l'histoire de France, l'Occupation, la collaboration, la Résistance, le STO, etc. Mais jamais elle ne perd le fil conducteur de son récit, l'histoire de son grand-oncle.


Au terme de ce récit émouvant, bien documenté et à l'écriture précise, vive et enlevée, André Gondet n'est plus un fantôme. Sorti de l'oubli, il a pleinement repris sa place au sein de la famille et a reçu le 9 février 2019 la médaille de la Résistance française à titre posthume. Ce livre et cette médaille sont sans aucun doute le plus bel hommage que l'on pouvait lui rendre. Mission accomplie pour sa petite-nièce !
Lien : https://romans-historiques.b..
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Mon oncle de l'ombre, une lecture qui ne laisse pas indemne.

Au départ, il y a cette photo entourée de mystères. Stéphanie Trouillard sait qu'il s'agit du frère de son grand père, André Gondet, tué pendant la seconde guerre mondiale mais le sujet reste tabou, il ne faut pas en parler et surtout pas à son grand père. Son chagrin est tel qu'il refuse de parler de cette époque et de ce frère qu'il a pourtant tant chéri. Les années passent mais les non-dits demeurent et vont finir par attiser la curiosité de la jeune journaliste passionnée d'Histoire. Elle veut comprendre, savoir qui était ce grand oncle dont personne ne parle, comprendre les motivations de son engagement dans le maquis de Saint Marcel et les circonstances de sa disparition tragique un jour de juillet 1944. Nous lui emboîtons le pas du Morbihan jusqu'en Allemagne, en passant par Paris, dans des salles d'archives ou devant un bon café mais aussi sur internet ou par missives interposées. le démarrage est difficile mais elle s'accroche. Il faut qu'elle sache, c'est un besoin viscéral. André Gondet semble oublié de tous, à croire qu'il n'a jamais existé mais à force de ténacité, elle finit par recueillir des témoignages et en dresser un portrait de bon vivant, au sens de l'humour, ne rechignant pas à la tâche.

Mais rapidement, le collectif prend le pas sur l'individuel. Il ne peut en être autrement lorsqu'on aborde la résistance. L'histoire familiale s'inscrit dans la grande Histoire, celle d'une France piétinée par l'occupant nazi. André Gondet faisait partie de cette armée des ombres, magnifiquement peinte par Joseph Kessel. Ces jeunes hommes et femmes ont puisé force et courage dans leur jeunesse et dans l'amour de la patrie en péril et ressentaient au plus profond de leur être la nécessité de se battre, de ne jamais se résigner. Ces petits gars, jeunes maquisards de Saint-Marcel ou d'ailleurs, nous ont fait le sacrifice de leur vie pour que nous puissions connaitre la liberté. Ce devoir de mémoire est essentiel, nous ne devons jamais oublier, c'est notre histoire à tous.

Stéphanie Trouillard signe ici un magnifique premier livre, richement documenté et bien écrit, où elle nous livre une vérité sans fioritures ni faux semblants en osant mettre le doigt sur des sujets sensibles tels que la place de la femme dans la résistance ou encore la collaboration.

« Les morts ne sont vraiment morts que lorsque les vivants les ont oubliés » dit le proverbe. Pari réussi.
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Parce qu'on lit avec ce que l'on est, ce que l'on sait, ce que l'on a vécu, j'ai tout de suite pensé que cet ouvrage de Stéphanie Trouillard, "Mon oncle de l'ombre (enquête sur un maquisard breton)" serait pour moi. Moi, Castelbriantaise d'origine (de Châteaubriant en Loire-Inférieure devenue Loire-Atlantique), moi, bercée par l'histoire de ses fusillés – 27 otages tués en représailles d'un attentat contre des officiers allemands, dont le jeune Guy Moquet – moi qui étais terrorisée par les visites à la Carrière des fusillés dans laquelle sont encore alignés les poteaux d'exécution – 9 au total , c'est-à-dire 1 pour 3 hommes – moi qui l'imaginais encore habitée de soldats, qui avais l'impression d'entendre les balles. Je ne m'étais pas trompée.

Ce livre est un récit, une enquête très fouillée menée par l'auteure, journaliste à France 24. Intriguée par ce portrait d'un jeune homme accroché au mur de la maison familiale, elle tente de reconstituer la vie de ce grand oncle qui n'a pas dépassé l'âge de 23 ans, fusillé un matin de juillet 1944. Ce visage va devenir son obsession, va l'entraîner dans des recherches sans fin. Elle veut savoir, savoir pourquoi, comment, il en est arrivé là !

J'ai beaucoup aimé le travail de prospection, précis, rigoureux, acharné. J'ai aimé toutes ces rencontres de personnes capables – ou pas – de lui apporter des bribes, des morceaux de la vie d'André Goudet. Comme dans une enquête policière, Stéphanie Trouillard avance à petits pas et même parfois recule mais jamais ne se décourage. Ses explorations l'emmènent jusqu'en Allemagne. Nous découvrons le camp de travail de Bretten près de Karlsruhe où cet oncle devenu F.F.I. par la suite fit un passage dans le cadre du Service de Travail Obligatoire. Tout est bien expliqué, détaillé, classé. Mais je n'en dirai pas plus.

L'écriture n'est pas en reste, qui, extrêmement léchée, parsemée de formules élégantes, rend la lecture facile et captivante. Ce récit intéressera ceux qui se passionnent pour l'Histoire, et surtout celle de la Seconde guerre mondiale. Il apporte en effet nombre d'informations sur l'occupation en Bretagne. A ce titre il m'a personnellement émue, me remettant en mémoire les anecdotes relatives à cette époque, relatées par ma mère.

Magnifique travail de mémoire.

Lien : https://memo-emoi.fr
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J'ai beaucoup apprécié l'histoire sous forme d'enquête, les moments de doute, les moments de déception et de tristesse mais aussi et surtout les moments de joie lors de la découverte des indices .
Un grand homme qui ne sera pas oublier grâce à vous , un destin tragique pour donner un sens à notre liberté d'aujourd'hui.
Un sacrifice pour la liberté de tout un pays ....
Merci pour la transmission historique mais aussi locale pour un héros breton .
Un grand bravo !
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
J'ai vraiment l'impression de courir depuis des mois après un fantôme. André a vécu 23 ans ; mais, à en croire mes vaines recherches, personne ne se souvient de lui. Personne ne l'a vu, ne l'a entendu, ne l'a connu. Je finis même parfois par douter de son existence. J'assiste en quelque sorte à sa seconde mort. Les hommes qui l'ont tué n'ont pas seulement écourté sa vie ; ils l'ont aussi plongé dans un éternel oubli. Il ne reste rien de ce petit résistant, mis à part cette photo, une pochette d'archives et une petite-nièce qui s'acharne à vouloir le ressusciter.
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Si mon grand-père était face à moi, je le saoulerais de questions à n'en plus finir. Cela m'aurait certainement fait gagner du temps dans mes recherches, mais m'aurait-il tout dit ? En retraçant le parcours d'André, je comprends mieux ses silences et ses regards vagues. Il a voulu nous protéger de la violence des hommes de de sa propre douleur. Pourquoi nous infliger ce qu'il avait vécu ?
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