L'incendie du Chiado, c'est le gigantesque incendie qui a dévasté
Lisbonne en 1988.
François Vallejo s'en est inspiré pour écrire son roman. L'auteur a vécu dans la capitale portugaise et a été témoins du triste évènement de 1988. le roman n'est publié que 20 ans plus tard, en 2008. "diverses catastrophes, terroristes ou accidentelles (11-septembre ou Katrina) ont ranimé en moi les images de
l'incendie du Chiado. Je constatais que des victimes avaient alors les mêmes réactions, le même désir de préserver ce qu'elles avaient connu ou aimé. " explique-t-il sur lepetitjournal.com. Mais il précise qu'il s'agit bien d'une fiction, et non de souvenirs.
L'auteur peint un tableau apocalyptique de la ville sous la cendre. Il y jette cinq personnages, dont une femme et un français, en errance au milieu des décombres. Des relations vont inévitablement se nouer entre eux. La solidarité ne va pas de soi. Chacun est animé par un sentiment de peur et de défiance. Disputes, paranoïa, objectifs personnels rendent difficile la vie du petit groupe. Juvenal Ferreira va prendre l'ascendant sur les quatre autres. Il va entrer en rivalité avec le français.
La confusion de la situation se traduit par une écriture fragmentée, avec des phrases courtes, qui font souvent l'économie du verbe. le rythme est presque haletant. L'auteur a choisi le discours indirecte pour transcrire les échanges entre les personnages, ce qui contribue à une certaine confusion aussi. On passe de l'un à l'autre de façon très fluctuante.
L'originalité du roman vient du point de vue de la narration. le lecteur "profite" d'une vision de l'incendie de l'intérieur de la ville. Si l'on veut se représenter le récit en images, on imagine bien un style
Enki Bilal, avec une ville détruite et des personnages parfois réduits à une condition de survie animale, et proches de la folie.
Le roman s'inscrit dans une sorte de
huis clos, et on pense à la fois à
Jean-Paul Sartre et son "enfer, c'est les autres" et à
Pessoa et son "intranquillité". On est proche de l'absurde et du surréalisme.
François Vallejo évoque dans son récit des épisodes de l'histoire portugaise, notamment la décolonisation du Mozambique et la fuite de collaborateurs de Vichy en 1944. C'est surtout toute l'atmosphère de la ville de
Lisbonne qui transpire dans son écriture, ne serait-ce que par la géographie de la ville qui est constamment rappelée, le Chiado, Santa Justa, etc...
J'ai personnellement retrouvé un élément qui m'avait frappée lors de mon séjour à
Lisbonne, il y a bien longtemps. Il s'agit de l'impression d'arpenter une très petite capitale où l'on croise au coin d'une rue des personnes rencontrées ailleurs, à Porto par exemple, comme si tout le monde convergeait vers ce qui semble être un point de rencontre inévitable. Si bien que l'on fait l'expérience très vite d'une étrange familiarité avec le lieu.