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4,06

sur 477 notes
Ce livre figurait depuis quelques semaines dans mon pense-bête et c'est une amie libraire, "Babéliote" à ses heures, qui finit par me convaincre que je devais absolument me le procurer. Je dois aujourd'hui l'en remercier.

Antonin Varenne, retenez bien ce nom.
Si vous aimez l'aventure, le dépaysement et les grandes chevauchée, avec une pointe d'action et de suspense, ce livre est pour vous.
De la jungle Birmane aux grands espaces de l'ouest américain, en passant par les faubourgs de Londres et l'Angleterre du 19è siècle, nous suivons donc le périple d'un soldat de l'armée britannique.
Le sergent Arthur Bowman.
Prisonnier, torturé et mutilé, il est libéré avec une poignée de ses hommes, rescapés du conflit anglo-birman.
Tourmenté, cherchant le réconfort dans l'opium et l'alcool dans une Angleterre en proie à une grande sécheresse où règnent la misère et la folie, il se voit bientôt soupçonné d'un crime atroce.
Ce crime n'est pas sans lui rappeler certaines choses qu'il à vécu en captivité. Il décide donc, autant pour prouver son innocence que pour mettre un terme à une série de crime, de mener l'enquête et de poursuivre celui qu'il soupçonne jusque dans le Nouveau Monde.
Tantôt chasseur, tantôt chassé il mène un combat contre ses vieux démons, pour sa dignité et rétablir la vérité.
Lui, qui pense connaitre le coupable, n'est pas au bout de ses surprises.
Antonin Varenne à du talent.
Il y a tant de détails, ce livre est... lent, mais pas... long
Chaque scène, chaque paysage y est décrit avec précision, on vit l'histoire de cet homme au même rythme que lui, on l'accompagne dans son voyage, on lutte avec lui contre ses fantômes, on s'enivre avec lui, on se réveille à ses cotés...
Croyez moi, l'auteur qui réussit ce pari là, est un grand écrivain.
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1852. le sergent Bowman, de la compagnie de la East India House, est envoyé en mission secrète avec quelques hommes sur une rivière birmane. La mission tourne mal, les Anglais sont faits prisonniers des Birmans, affamés, torturés. Quand ils seront libérés, ils ne sont que dix, les plus coriaces, à avoir survécu.

1858. Londres, en pleine canicule, déborde de ses propres déjections. Bowman n'est plus que l'ombre de lui-même, et occupe, lorsqu'il n'est pas trop ivre, le poste de surveillant dans les rues de la capitale anglaise. D'ailleurs on se demande comment il marche encore, cet ex-sergent, dont le corps mutilé reste marqué par les mois d'enfer de sa captivité. Il passe une énergie folle à tenter de s'oublier, entre l'alcool qu'il boit et l'opium qu'il fume pour occulter ses cauchemars qui le ramènent quelques années plus tôt, dans l'atmosphère humide et chaude de sa cage birmane.

Un cadavre est retrouvé dans les égouts londoniens par un gamin des rues. La position du corps, les mutilations... Pour Bowman, ça ne fait pas l'ombre d'un doute, c'est l'un de ses compagnons d'infortune qui a fait le coup. Et il faut l'arrêter. Et pour cela, il faut découvrir ce que chacun des dix survivants est devenu.



Trois mille chevaux vapeur se situe au carrefour du roman d'aventure, du western (si, si !), du thriller, de la quête personnelle et de l'histoire d'amour. J'ai bien conscience que dit comme ça, on a l'impression d'un mélange pas très ragoutant, et pourtant ! Pourtant ce cocktail est sacrément réussi. Antonin Varenne dresse le portrait d'un Bowman plus vrai que nature qui, partant à la recherche d'un meurtrier, finira par se trouver lui-même. Mais pour ça, il lui faudra errer comme une âme en peine en Angleterre, traverser l'océan sur un paquebot qui va à la vitesse de trois mille chevaux-vapeur, et parcourir plus de la moitié des Etats-Unis, un continent en construction, peuplé de chercheurs d'or, de militaires, d'idéalistes, et d'Indiens rendus fous par la perte de leur identité et de leur territoire.

Au-delà de Bowman qui est un anti-héros très crédible, Antonin Varenne dresse toute une belle galerie de personnages secondaires qui côtoieront plus ou moins longtemps le sergent, dont celui d'une femme forte et libre. J'ai particulièrement apprécié le côté "exotique" des aventures de Bowman, ce monde en construction, en pleine mutation, qu'il traverse. Avec un sens du dosage très sûr, Varenne nous propose un meurtrier, un justicier, de l'action, des fausses pistes, de l'utopie, des grands espaces, de l'amour, des indiens et des pistes solitaires sous la lune, de la rédemption.

Bref, je vous invite fortement à parcourir le monde à la vitesse de Trois mille chevaux-vapeur ! Pour ma part, j'ajoute Antonin Varenne à ma liste des auteurs à suivre !
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Trois mille chevaux vapeur ? Plutôt 3000 heures de torture dans la forêt birmane, 3000 odeurs infâmes pendant la sécheresse à Londres, 3000 km de chevauchée dans le Far West américain... Sans oublier les 9 survivants de l'unité d'Arthur Bowman après la guerre anglo-birmane de 1852, les 6 crimes barbares commis par un de ces hommes, les 2 héros en quête de rédemption et la cinquantaine de personnages secondaires, plus réussis et attachants les uns que les autres !

J'ai lu dans les critiques déjà en ligne que la force de Trois mille chevaux vapeur venait du mélange des genres et je ne peux que rejoindre ce point de vue : tantôt roman d'aventure, tantôt polar, tantôt histoire d'un traumatisme, tantôt western, arrosé de beaucoup de whisky et de cauchemars, mais aussi d'une once de psychologie et de romantisme, et de pas mal d'amitié virile et de paysages sauvages, ce roman est tout aussi déroutant qu'il est beau...

L'histoire est rude : lors de la guerre anglo-birmane, le sergent Arthur Bowman et ses hommes ont été capturés et torturés. Neuf sont revenus. Mais dans quel état, mental aussi bien que physique. Des années plus tard, Bowman n'est toujours pas remis et vivote à Londres, à coup de bagarres, d'opium ou de gnôle. Jusqu'à ce qu'un crime horrible le tire de sa torpeur. Car ce crime porte la marque de la forêt birmane, des tortures que lui et ses hommes ont subies là-bas. Voulant arrêter le meurtrier, il s'engage donc dans une grande quête.

Le sergent Bowman est un héros, ou plutôt un anti-héros, réaliste et attachant. Il est certes brutal, alcoolique, un peu fou et très solitaire, mais surtout volontaire, humain, courageux, honnête et très bon. Il évolue au fil du livre, du temps, de ses rencontres, de ses rêves et de ses lectures et m'a donné envie de lire Thoreau, d'aller nager dans le lac Tahoe et d'aider autant que possible les gens autour de moi. Alors, même si j'ai trouvé par moments qu'il y avait quelques longueurs, je suis heureuse d'avoir fait cette belle rencontre.

Challenge Pavés 2015/2016 : 4/xx
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Trois mille chevaux vapeur est un roman inoubliable, un roman d'aventure comme on n'en fait plus et une véritable expérimentation sensorielle.

Oui, c'est un voyage à travers le monde tout autant qu'un voyage intérieur, un roman qui fait appel à tous vos sens et toute votre sensibilité.

Découpé en trois parties se déroulant sur plusieurs années à partir de 1852, cette aventure nous mène de la Birmanie (un passage du récit plein de sons, de bruits et de fureur), au Londres de la grande canicule (un passage tout en odeurs) pour se terminer dans l'Amérique naissante (terre des grands espaces, vision panoramique).

Quand on y rajoute un personnage principal d'une telle épaisseur qu'on a littéralement l'impression de le toucher (tout autant qu'il nous touche) et des dialogues tellement forts qu'ils résonnent longuement à nos oreilles, on sent très vite que ce livre a le goût des expériences mémorables.

Et si, en plus, j'insiste sur le fait que l'auteur possède un talent unique pour titiller notre sixième sens qu'est l'imagination, vous aurez compris pourquoi je parle d'expérience sensorielle.

A la croisée des chemins du western, du roman de guerre, du polar et de l'aventure intérieure, cette histoire est d'une profondeur rare. le genre de récit immersif dont on ne peut (on ne veut) se détacher.

Fascinant, dépaysant, prenant, émouvant, violent, le roman est tout ça à la fois (et tellement plus encore). Difficile de trouver mes mots pour exprimer à quel point les mots de l'auteur m'ont marqué.

Sa plume est si expressive, son récit si crédible, les sentiments exprimés si forts que cette aventure humaine prend vite des dimensions d'épopée, à une période charnière de notre histoire où elle bascule vers notre société moderne.

Antonin Varenne prend son temps, tout au long de ces 550 pages, pour nous conter son histoire. Pourtant, à aucun moment, on ne sent poindre le moindre ennui tant l'action qui se déroule sous nos yeux (à travers nos sens) prend une dimension épique, en restant au plus proche de l'humain.

Parce qu'il faut parler de cet inoubliable personnage principal. Un homme dur et violent, une vraie brute, qui va se lancer à la poursuite d'un assassin, de ses fantômes et d'une hypothétique rédemption. Un personnage complexe, à la fois effrayant et bouleversant. Un personnage en pleine transformation, à l'image de l'époque qu'il vit.

Je n'aime pas lancer les mots à la légère. J'insiste pourtant : ce roman, d'une profondeur romanesque et psychologique étonnante, loin de tomber dans la facilité tout en restant vraiment accessible, est inoubliable. Un véritable et sombre bijou.
Lien : http://gruznamur.wordpress.c..
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La Birmanie a connu plusieurs assauts et conquêtes mais en 1852, une seconde guerre mis ce pays à la discrétion des anglais.

C'est dans ce contexte de guerre, qu'Arthur Bowman est mandaté par la Compagnie des Indes Orientales pour une mission secrète avec ses comparses. Cela ne se passe pas tout à fait comme prévu, ils sont faits prisonniers par les Birmans et seuls 10 survivront.

Déjà bien avant leur captivité, cela a été le début d'une véritable épopée pour lire ce livre… en effet, il m'avait été fortement recommandé, me poussant aux antipodes de mes goûts littéraires habituels. Lorsque je l'ai trouvé en livre de poche, j'étais toute emballée après avoir reçu tant d'arguments convaincants….mais je ne réalisais pas ce qui m'attendait…. Fleur colchique dans les prés…en Birmanie….

Et puis une promesse, même si c'est pour une lecture cela reste pour moi… un engagement….moral !

Il y a quelques mois me voilà donc embarquée en Birmanie avec Bowman et ses hommes, à bord d'un vieux greement où la mort, la cruauté, sont là à chaque instant, les conditions de vie sont inhumaines. Cela pue la sueur, la testostérone, il y a des cadavres partout, je ne sais pas où je vais, je me prends les pieds dans les mots, bastingage, garnison, enfield, licol, cipayes, aussières.

Alors, pour ne pas tomber par-dessus la jonque, j'ai abandonné Bowman et ses colistiers à leur triste sort….

Non décidemment un roman, une histoire plus que jamais pour un « mâle », ;))) pas pour Fleur !....j'étais…désarçonnée !!!

Enfin, promis, juré, craché, pas très élégant pour une femme vous me direz, mais dans cette histoire de cow boys, pour tenir il faut avoir du caractère, j'ai repris ma lecture au moment de la canicule et là Bowman est revenu de Birmanie et vit en Angleterre. Pour oublier son passé et ses horreurs, il boit et se drogue à outrance.

Et puis au fil des pages, je rentre dans l'histoire et m'attache au personnage de Bowman dans sa quête d'un tueur qui pourrait se trouver parmi la liste des 10 survivants de Birmanie. Il sillonne l'Angleterre s'en va traverser l'Amérique à sa recherche.

J'en suis arrivée à suivre ses miles parcourus sur une carte des US accrochée au mur chez moi, je suis complètement dans l'histoire. Il lui arrive des tas de péripéties, de rencontres, des retournements de situations, je me crois dans les Mystères de l'Ouest…. L'auteur décrit tellement bien les contrées qu'il traverse, la personnalité de ce héros, que je finis par imager Bowman dans mon esprit ! un véritable cow boy que rien ni personne ne peut arrêter, en quête de vérité, un homme solitaire, indépendant, qui peut survivre au désert américain, après ce qu'il a vécu. C'est un vrai guerrier, rusé, intelligent, droit dans ses bottes, un homme de troupes aussi, viril, généreux, qui n'a qu'un seul but : comprendre et aller jusqu'au bout de son objectif, pour laver son honneur, fuir ses démons.

3000 chevaux vapeurs regorge de surprises, d'aventures, de rebondissements, d'émotions, c'est plusieurs histoires dans cette histoire.

Alors oui l'ascenseur émotionnel est monté un max, je me suis parfois empourprée, j'ai aimé quand Mary, la femme du pêcheur lui a nettoyé ses cicatrices…., sa rencontre avec le prêcheur Peevish, j'ai aimé Madames Desmond, une histoire d'amour profondément romantique, vraie ; la tendresse qui se dégage de cette écriture à la fin du roman, d'une autre époque certes, mais j'ai adoré, je m'y suis presque crue…. à ses côtés….

Il a été mon héros Bowman, un homme sans visage, mais pourtant si authentique.

Au début de cette aventure chevaleresque, livresque, renverser la vapeur avec moi, c'était loin d'être gagné….

C'est la prouesse d'écriture d'Antonin Varenne, certes j'ai lu cette histoire, mais je l'ai surtout VECUE..... ;)
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Ressentez-vous le souffle ?

Celui du voyage, celui de l'aventure, celui qui provoque des picotements le long de l'échine ?

Celui de la peur, des cauchemars, des remords, de l'angoisse ?

Il vient battre contre votre visage, s'infiltrer dans les pores de votre peau, s'introduisant dans vos tripes, faisant un petit arrêt par votre coeur et remontant jusqu'aux parcelles les plus cachées de votre cervelle. Provoquant un riche mélange de sensations épicées, amères, peu sucrées mais entêtantes.

Un bouquin immense. J'ai beaucoup de chance ces temps derniers de tomber sur des pépites. Bon pas que de la chance. Gruz et ses chroniques y sont pour beaucoup. Rendons à Gruz ce qui est à Gruz.

Un bouquin immense disais-je. Un vrai roman d'aventure, une vision moderne et pas idyllique du milieu du XIXème siècle.

Où la vie était âpre et ne faisait jamais de cadeau. Où seuls les plus forts survivaient (dixit Darwin abondamment cité). Un monde où la bonté et la beauté étaient vite souillées par l'homme.
Un monde en effervescence, en pleine mutation scientifique, religieuse, économique, morale et sociale.

Antonin Varenne nous propose un voyage original, inédit et passionnant à travers 3 continents.
Son tour de force est d'introduire des éléments modernes dans son récit : tueur en série, femme indépendante, vision humaniste des minorités... La projection en est d'autant plus forte.

Son personnage, Arthur Bowman, véritable force de la nature va nous emmener dans sa quête de rédemption à travers une odyssée abrupte, violente et sans retour.
Bowman va vivre le traumatisme de la guerre en Birmanie, l'horreur d'un Londres à bout de souffle et neurasthénique et les grands espaces américains sifflant entre ses oreilles.
Cette quête désespérée le conduira aux confins de la folie, du désespoir et de l'abandon pour en ressortir de sa chrysalide telle un papillon magnifique.
Entre-temps, son combat contre ses démons, l'alcool et la drogue, ses pensées, ses remords et ses rêves monstrueux lui réserveront des années sombres et de sacrés moments d'effroi et de solitude.

Mordant. le bouquin l'est. Assurément.
4/5
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1852.
Le sergent Bowman est soldat. Un excellent soldat. La Birmanie, son nouveau terrain de jeu. Désigné par le haut commandement pour ses qualités de meneur d'hommes, il sent bien que cette nouvelle mission fumeuse pourrait bien être de celles qui vous laissent sur le carreau.

1858.
Londres. Bowman a survécu. S'il en est revenu, il y a cependant laissé une part conséquente de son humanité. le trauma est profond, les fantômes nombreux. Il y a, comme ça, des hommes sur qui le destin, qu'est jamais le dernier pour la déconne, s'acharne. Lorsqu'un corps atrocement mutilé se fait jour, c'est qui qui qu'on accuse-t-on ? Misteeeeeer chance ! Seulement voilà, si le bonhomme est souvent compté ces derniers temps, il s'est constamment relevé ! Groggy, chancelant, mais toujours combatif. D'autant plus que ce mode opératoire, il le connaît. La victime expiatoire, pas son truc ! Il est grand temps de solder les comptes avec le passé...

Que dire de ce récit homérique si ce n'est qu'il est de ces romans que l'on évoque avec le petit sourire ému du ravi de la crèche.
Bowman est un anti-héros dont on se souviendra longtemps. Assimilant avec brio aventure et quête identitaire, Varenne délivre une partition proche de la perfection. Une petite musique entêtante qui vous titille au tout début, sournoise et impérieuse, puis qui s'affirme crescendo pour finalement lâcher ses trois mille chevaux vapeur dans un fracas assourdissant. Pas une once d'ennui, pas un seul décrochement de mâchoire à déplorer à ce jour.

L'ambition de la vérité comme catharsis. Un monde, tout comme Bowman, en pleine mutation. L'esprit multi-univers de cette histoire foisonnante ne cesse de surprendre agréablement. Philosophie, polar, odyssée, amour, tout y est à sa juste place, s'imbriquant symbiotiquement en un récit dépaysant au souffle ravageur. Un homme dans la tourmente qui, à force de ténacité et d'abnégation, pourrait bien se dire qu'en définitive, le premier jour du reste de sa vie vaut peut-être la peine d'être vécue...

Merci à Gruz...
4,589/5,000
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« Trois mille chevaux vapeur » d'Antonin Varenne est un condensé de western, polar, nature writing, histoire, amour, aventure, voyage, guerre et littérature maritime. Un mélange surprenant mais qui se révèle loin d'être un gloubi-boulga fade ou pire, écoeurant. Bien au contraire, c'est un cocktail détonnant qui fonctionne à merveille.
1852, guerre anglo-Birmane. A bord du Healing Joy (« Joy » qu'on pourrait traduire par « grosse ironie » sûrement…), le sergent Bowman et quelques-uns de ses hommes reçoivent l'ordre d'une mission secrète pour l'East India Company… Mission qui tournera mal puisqu'ils seront fait prisonniers et torturés dans les geôles birmanes pendant 6 ans (y a d'la joie, vite dit, on cherche encore les hirondelles…).
De retour à Londres six ans plus tard, il est loin le soldat fort, fier et sans peur. Ivre et embrumé dans les volutes d'opium à longueurs de journée, il traine dans un Londres aussi fétide que lui (quand il est en mesure de « trainer »). Dire qu'il n'est plus que l'ombre de lui-même serait presque une description trop flatteuse de ce qu'il est devenu.
J'avais bon nombre de critiques élogieuses sur ce roman, ce qui a, sans conteste, éveillé ma curiosité. Mais lorsque j'ai commencé les premières pages, je me suis demandé si j'allais tenir la longueur, dans cette ambiance lourde et sombre, près de 554 pages… Pourtant, il a suffi de me perdre dans le fog londonien pour me mettre à suivre Bowman, lui-même, sur la piste du tueur dont les massacres ressemblant aux tortures birmanes réveillent ses angoisses et ses crises.
Quelles sont les raisons qui poussent l'ancien sergent à rechercher ce tueur, à essayer de découvrir quel est parmi ces dix hommes qui ont rescapé comme lui à ces années de captivité, celui qui sème la mort et réveille ses cauchemars ? le sait-il lui-même ? Sorte d'acte de rédemption, pour sauver des êtres, lui qui, de sa main, a si souvent donné la mort ? Besoin d'aller vers les ténèbres encore et toujours, parce qu'il ne connait que ça, parce qu'il est hypnotisé par cela ? Façon de sombrer plus encore, d'aller à la rencontre de la mort, car la solution finale est la seule possible après ce qu'il a vécu ? Incapacité de se sauver, de tourner la page et de chercher à oublier et à trouver un sens à sa vie, une envie de vivre et non plus de survivre comme un errant ?
Bowman, c'est d'abord un soldat. Un homme rustre, dont le visage est rarement dessiné par des sourires (ou alors sardoniques). Un soldat et donc, par définition, obéissant aux ordres des chefs sans broncher, et qui attend que ses hommes en fassent de même avec ses propres injonctions. Un soldat que certains pourraient définir sans coeur, capable des pires atrocités en temps de guerre, mais aussi un homme qui n'a pas peur de se battre, un homme que beaucoup considèrent comme courageux. (toute médaille a son revers ?).
Sans doute n'aurais-je pas aimé suivre les pas de ce soldat, s'il n'avait été qu'un roc à la Rambo, sans sa part d'ombre, sans ses fêlures, ses crises d'alcoolique et ses nombreux cauchemars, suite à ces années d'emprisonnement et de tortures en Birmanie. Bref, je n'aurais pu l'apprécier s'il n'avait pas sombré, même si l'image du héros en était bien effritée. Les cicatrices sur son corps lui rappellent l'enfer qu'ils ont vécu, lui et ses hommes. Et cela lui rappelle qu'avoir l'âme en paix n'est peut-être pas fait pour lui. Je n'aurais pas été curieuse de comprendre cet homme s'il n'avait été que le sergent Bowman sans jamais être Arthur (lorsque Varenne le nommait par son prénom, -ça c'est le miracle des mots et du sens qu'ils prennent-, cela le rendait tout à coup plus humain, un être presque capable de côtoyer les hommes qui l'entourent).
Ses traits, sa carrure, sa force en imposent et impressionnent ceux qui croisent sa route. Il force le respect et fait presque peur. Son visage et son regard sont marqués parce qu'il a vécu. On comprend en une seconde que ce n'est pas le genre de joyeux drille avec qui on pourrait s'en payer une bonne tranche un soir, en sirotant un verre ou deux, à se raconter les anecdotes de notre jeunesse et nos dernières aventures. Sûr qu'on va pas se risquer, après une bonne blague, à lui donner une claque dans le dos, en super potes qu'on est devenus. Pas même sûr qu'il comprenne notre humour (et pourtant je peux en avoir, de l'humour, je crois, surtout après un verre ou deux. Tu sais pas ce que tu perds, Bowman). Alors on l'évite, on change de trottoir. Idem pour les femmes qui croisent sa carapace. Elles sont à la fois curieuses et effrayées par lui. Certaines sentent d'instinct qu'il vaut mieux ne pas l'approcher de trop près, au risque de se faire mal, de se brûler.
J'ai grandement apprécié la description de ces hommes, aux caractères si différents, des plus rustres aux plus doux et altruistes, j'ai aimé partager leurs espoirs et les envies de chacun. J'ai aimé ces rencontres, ces hommes au coeur bon, généreux qui adoucissaient un peu l'ambiance sombre : Franck le pécheur, Peevish (« Prêcheur »), le vieux Brewster et Alexandra Desmond, et d'autres encore...
J'ai aimé l'écriture d'Antonin Varenne, capable de rendre si réel chacun des personnages, même les secondaires mais aussi l'atmosphère qu'il rendait de chacun des pays, de toutes les bourgades et villes qu'Arthur Bowman parcoure lors de sa quête : la Birmanie, les bas-fonds de Londres, les grands espaces américains, le tout saupoudré par les faits historiques de la fin du 19ème : la guerre de sécession, la conquête de l'Ouest, les indiens et mexicains, les rêves de tous qu'ils soient américains ou non… Et j'ai fini par m'attacher à Arthur Bowman.
Comme dans un vrai polar sans autre étiquette, Varenne arrive à ménager le suspense. Je me suis vue passer d'un suspect à un autre, me tromper de cible, de coupable, pour finalement, comprendre que c'est parce qu'on l'est tous un peu, à notre manière…
Une belle découverte. Une très belle aventure, riche en émotions et impressions diverses. Et je vous remercie encore de m'avoir donné l'envie de cette lecture. Je me suis sentie l'âme d'une chercheuse d'or ravie, exultant d'émotions, en serrant entre les mains cette petite pépite-là.
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Je reprends mon souffle après ces 690 pages menées tambour battant au côté du Sergent Arthur Bowman ! Lu sans ennui aucun j'ai vraiment apprécié cette quête humaine à travers les continents.

Et puis c'est aussi la première fois que je rencontre l'auteur en cours de lecture, je me trouvais à la page 339 au bord de la diligence de la Butterfield Overland Mail en Amérique au départ de Saint-Louis !

Ce fût très sympa d'indiquer à l'auteur où j'en étais et d'écouter lire le début du chapitre de ma lecture et de m'assurer que nombre de détails de son livre sont véritables ! Là il s'agissait du règlement à l'intérieur des diligences.

On passe d'un continent à l'autre et on découvre le 19ème siècle à travers les yeux du sergent. Loin d'être un enfant de coeur le sergent Bowman n'aura de cesse de retrouver le meurtrier de cet homme découvert dans les égouts de Londres, d'autant plus que c'est lui que la police considère comme coupable.

Coupable, il l'est d'emblée et à sa manière. En effet ses choix n'ont pas toujours été équitables et pacifiques...

Alors, il va se lancer corps et âme dans une quête humaine pour retrouver les soldats qui comme lui ont fait parti d'une vaste machination qui les aura tous en quelques sorte détruits....

Tous sont potentiellement des meurtriers, même Bowman ... Tous sont à la fois bourreaux et victimes de la cupidité humaine.

Difficile pour moi de résumer un tel ouvrage, si complet et intéressant, extrêmement bien documenté sur les grands bouleversements de ce siècle à travers les continents.

On traverse le 19ème siècle et on traverse l'océan et aussi l'Amérique ! On se perds dans les bas fond de Londres, on s'inquiète et on frémit dans la jungle Birmane... On navigue, on galope, on se repose peu, on s'inquiète, on se tourmente et parfois on semble trouver la paix en lisant et en écrivant ...

On rencontre des personnages, des communautés, on visite des lieux toujours plus à l'ouest, on emprunte mille moyens de locomotions et on chevauche solitaire les grands espaces américains à la recherche d'une terre vierge et riche !

Arthur Bowman m'a d'emblée charmé, avec ses cicatrices, ses traumatismes. Il ira jusqu'au bout de lui-même, il se métamorphosera en un autre, plus humain assurément !

Merci Antonin Varrene de m'avoir littéralement embarqué avec vos Trois mille chevaux vapeur ! A la conquête de l'ouest et même bien davantage, à la reconquête d'un homme.

Je ne peux que vous conseiller fortement cette lecture grisante,
cette chevauchée fantastique à côté d'un homme ayant traversé
mille tempêtes et tornades pour trouver peut-être, enfin, la paix...


Lien : http://imagimots.blogspot.fr..
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Trois mille chevaux vapeur est un roman inoubliable, un roman d'aventure comme on n'en fait plus et une véritable expérimentation sensorielle.

Oui, c'est un voyage à travers le monde tout autant qu'un voyage intérieur, un roman qui fait appel à tous vos sens et toute votre sensibilité.

Découpé en trois parties se déroulant sur plusieurs années à partir de 1852, cette aventure nous mène de la Birmanie (un passage du récit plein de sons, de bruits et de fureur), au Londres de la grande canicule (un passage tout en odeurs) pour se terminer dans l'Amérique naissante (terre des grands espaces, vision panoramique).

Quand on y rajoute un personnage principal d'une telle épaisseur qu'on a littéralement l'impression de le toucher (tout autant qu'il nous touche) et des dialogues tellement forts qu'ils résonnent longuement à nos oreilles, on sent très vite que ce livre a le goût des expériences mémorables.

Et si, en plus, j'insiste sur le fait que l'auteur possède un talent unique pour titiller notre sixième sens qu'est l'imagination, vous aurez compris pourquoi je parle d'expérience sensorielle.

A la croisée des chemins du western, du roman de guerre, du polar et de l'aventure intérieure, cette histoire est d'une profondeur rare. le genre de récit immersif dont on ne peut (on ne veut) se détacher.

Fascinant, dépaysant, prenant, émouvant, violent, le roman est tout ça à la fois (et tellement plus encore). Difficile de trouver mes mots pour exprimer à quel point les mots de l'auteur m'ont marqué.

Sa plume est si expressive, son récit si crédible, les sentiments exprimés si forts que cette aventure humaine prend vite des dimensions d'épopée, à une période charnière de notre histoire où elle bascule vers notre société moderne.

Antonin Varenne prend son temps, tout au long de ces 550 pages, pour nous conter son histoire. Pourtant, à aucun moment, on ne sent poindre le moindre ennui tant l'action qui se déroule sous nos yeux (à travers nos sens) prend une dimension épique, en restant au plus proche de l'humain.

Parce qu'il faut parler de cet inoubliable personnage principal. Un homme dur et violent, une vraie brute, qui va se lancer à la poursuite d'un assassin, de ses fantômes et d'une hypothétique rédemption. Un personnage complexe, à la fois effrayant et bouleversant. Un personnage en pleine transformation, à l'image de l'époque qu'il vit.

Je n'aime pas lancer les mots à la légère. J'insiste pourtant : ce roman, d'une profondeur romanesque et psychologique étonnante, loin de tomber dans la facilité tout en restant vraiment accessible, est inoubliable. Un véritable et sombre bijou.
----------------- Lu sur " Emotion " Blog littéraire et musical

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