Comment était-il possible que les gouvernements de Juan José Arévalo et de Jacobo Árbenz, acharnés à mettre fin au féodalisme au Guatemala et à convertir le pays en une démocratie libérale et capitaliste, aient provoqué semblable hystérie chez l'United Fruit et aux États-Unis ? Que les propriétaires terriens guatémaltèques s'indignent, il pouvait le comprendre, c'étaient des gens confits dans le passé. Il comprenait aussi l'United Fruit, bien sûr, qui n'avait jamais payé d'impôts auparavant. Mais à Washington ! C'était ça la démocratie que voulaient les gringos pour l'Amérique latine ?
Est-ce que par hasard les sociétés dans votre pays ne paient pas d'impôts ? Alors qu'ici, bien sûr, elles s'acquittent de moins de la moitié de ce qu'elles paient là-bas.
Un amalgame de mensonges transformés en vérités par de gigantesques conspirations des puissants ...
Avec subtilité et opportunisme. En organisant les chose de façon que l'opinion publique, décisive dans une démocratie, fasse pression sur le gouvernement pour qu'il agisse afin de mettre un frein à une menace sérieuse.
La manipulation consciente et intelligente des comportements constitués et de l'opinion des masses est un élément important de la société démocratique. Ceux qui manipulent ce mécanisme méconnu de la société constitue un gouvernement invisible qui a le pouvoir véritable de notre pays... La minorité intelligente a besoin de faire un usage continu et systématique de la propagande.
la thèse qu'il avait exposée selon laquelle le XXe siècle serait celui de l'avènement de la publicité comme outil principal du pouvoir et de la manipulation de l'opinion publique dans les sociétés aussi bien démocratiques qu'autoritaires.
A peine entré, je me sens déconcerté par l'épouvantable pépiement des oiseaux. Ils sont dans des cages et leur vacarme agrémentera ma conversation d'au moins deux heures avec l'ancienne miss Guatemala (qui ne le fut jamais). J'avoue que je suis un peu nerveux. Cela fait deux ans que j'imagine cette femme, que je l'invente, que je lui attribue toutes sortes d'aventures, que je la défigure pour que personne - ni même elle - ne la reconnaisse dans mon affabulation. Je m'attendais à beaucoup de choses, sauf à cette volière bruyante et gigantesque. Il y a des canaris africains, des pigeons ramiers, des perruches, des cacatoès, des aras et d'autres espèces variées que je suis incapable d'identifier. Une sorte d'«horreur du vide» a fait que tout est occupé, qu'il ne reste aucun espace libre. On ne peut se déplacer dans la maison de Marta sans faire tomber un pot avec des plantes grandes ou petites qui s'amoncellent partout par dizaines ou par centaines. Les statues, bustes et figures religieuses — bouddhas, christs, vierges et saints - alternent avec momies et catafalques égyptiens, photos, tableaux et hommages à des dictateurs latino-américains comme le généralissime Trujillo ou Carlos Castillo Armas. Ce dernier fut le « grand amour de sa vie», m'avouera-t-elle un peu plus tard, et tout un mur lui est dédié avec une photographie géante et une lampe votive à sa mémoire qui flambe jour et nuit et qui doit être elle aussi en plastique, comme la vertigineuse quantité de fleurs - rosés, glaïeuls, œillets, mimosas, orchidées, tulipes, géraniums —Jouets et souvenirs de voyage des endroits du monde où Marta Borrero Parra a un jour posé le pied. À en juger par ce que je vois, elle a dû faire plusieurs fois le tour du monde. [p. 366-367]
- Cancer du pancréas, dit soudain le malade en faisant un petit soubresaut. C'est le pire. On me l'a découvert très tard, quand il avait déjà fait des métastases. Les douleurs sont horribles, c'est pourquoi je suis sous sédatif la plupart du temps. Le père Ulloa, mon ami le jésuite, je suppose que tu te souviens de lui, ne me laisse pas accélérer la chose. Il dit que ce serait un suicide, il veut que je souffre jusqu'au bout. Je lui dis que c'est pur sadisme de la part de l’Église. Il me parle de Dieu et des mystères infinis de la doctrine chrétienne. Jusqu'à maintenant, je l'ai écouté , mais je ne sais pas si je vais continuer à lui obéir longtemps. Que penses-tu de ça ?
- Je ne crois plus en Dieu, Arturo.
-Tu es devenu athée alors. D'abord communiste et maintenant athée. Apparemment tu es incorrigible, Efrén.
- Athée, non, seulement agnostique. Voilà ce que je suis dorénavant : un homme perplexe. Ni croyant, ni non-croyant. Un indécis, si tu préfères. Je te dirai mieux : tu te souviens, quand nous étions gamins, combien cela nous angoissait de penser si souvent à la mort, à ce qui viendrait après ? J'ai changé aussi là-dessus. Pour incroyable que cela te semble, maintenant cela ne me fait rien qu'il y ait une vie ou non dans l'autre monde. [p. 305]
Sa tâche essentielle consistait à éviter que l'armée se divise pour des raisons politiques et rejoigne ceux qui conspiraient: sempiternelle histoire centraméricaine. (p.106)
Coup d'état au Guatemala avec la CIA