Citations sur Vie auprès du courant (11)
QUARANTE DEGRES A CATANE
La mer chaude
étire une langue indolente
vers des cuisses dorées
sur un sable de braise.
La paralysie caniculaire sévit.
Derrière l'obscurité des lunettes
le cerveau a de hauts loupés
comme des avions blessés.
Le soleil est sauvage
et il ne faut pas en parler,
mais la terre est un fourneau,
et l'Etna sur le feu
fume du goulot.
IV
RENTRANT CE SOIR
Le bleu a émergé de par-delà
tout ce qui apparaît
et habille le clair-obscur d'une montagne
que tu es en train de regarder.
Le bleu est en toi,
et attend là.
Le bleu chante sans bruit,
s'approfondit, tend vers le noir.
C'est ta propre montagne quand tu
rentres de voyage. Elle ne parle jamais de
ce que la vie est devenue.
Mais la montagne muette qui dirige
le cours des flots,
et l'homme fatigué qui se dirige
vers son giron
restent aussi immobiles l'un et l'autre
dans ce chant ténébreux.
Quand on voit une fleur qui nous est chère
piétinée, et humiliée et cassée,
mais
qu'on la voit se redresser,
trouver la santé, trouver des couleurs, devenir belle,
trouver la force de se lever
alors on ne trouve pas que la vie soit vaine.
( cité par Richard Rognet, dans " Les frôlements infinis du monde")
La fleur se dresse
Quand on voit une fleur qui nous est chère
piétinée et humiliée et cassée,
mais
qu’on la voit se redresser,
trouver la santé, trouver des couleurs , devenir belle,
trouver la force de se lever
– alors on ne trouve pas que la vie soit vaine
Avant qu’elles ne disparaissent
il est encore temps de songer à
ce qu’elles ont signifié pour soi,
à ce qu’elles continuent d’être.
On se dit que dans un sens
on a toujours vu sa vie au travers
de branches souples, nues,
et de branches grossières à l’écorce épaisse.
Enchevêtrement d’air et de vie
et de tout ce qui afflue.
Un homme peut enrager dans ces nuées,
être pris de folie furieuse,
hurler dans l’obscurité.
non pas à cause des moustiques, mais du reste :
de ce qu’il ressent
mais ne peut expliquer
LA GRAINE EST SEMÉE À L’AVEUGLE
L’idée est une graine,
et la graine dans la terre a des projets
culminants comme des montagnes
et effrayants comme des abysses.
On peut avoir peur
de mettre la graine.
Elle peut ne devenir qu’une
fane d’aneth.
Elle peut fendre le globe.
« Ça craque dans les piquets obliques d’une clôture enneigée. » (p. 6)
Au bord du chemin difficile
Il pleut des soleils étincelants
Comme si de rien n’etait.
Nous avons l’immensité oú puiser
Mais ne savons l’utiliser.
Elle regorge de tempêtes
Que nous ne comprenons pas.
Un feu éclate,
Tout aussi énigmatique.
Dans les tombeaux reposent tous nos
Vieux souvenirs.
Nous les appelons
Sans obtenir de réponse.
Ils ne nous voient pas,
Regardent bien au-delà de nous.
Le vent souffle et transperce.
Le vent souffle et transperce.
Les vieilles feuilles dansent.
Les vieilles portes grincent.
Mais les vieilles idées se font
neuves et dangereuses
dans le vent jeune.