À l'abri de la différence, c'est une parenthèse dans la vie d'Émilie. Émilie est différente. Pourquoi ? le lecteur l'ignore. Il sait seulement qu'Émilie n'est pas comme les autres, et pire encore, qu'elle a les traits de l'ennemi.
Émilie est enfermée dans une grotte, en compagnie d'Anna, Yan, Tob et la petite Maïa, jeune orpheline affectueuse et attachante. Au-dehors, la guerre fait rage, mais le lecteur ignore tout des raisons de leur isolement. C'est volontairement que l'auteure ne nous dévoile que peu d'informations quant au contexte. Jusqu'à la fin, on ignore ce qui se passe à l'extérieur, et ce qui a plongé les protagonistes dans cette situation délicate. Nous sommes là, dans cette grotte, avec une poignée de personnages que, comme eux, nous allons devoir apprendre à connaître et à côtoyer.
Les dynamiques entre les personnages se révèlent peu à peu. Émilie est différente. Cette différence se voit, elle ressemble aux ennemis, et en tant que telle, elle est considérée avec la plus grande méfiance pas ses compagnons d'infortune. Si elle est là, c'est grâce à Yan. Elle va bientôt se lier d'amitié avec Anna et prendre sous son aile la petite Maïa, qui fait sourire par sa fraîcheur et sa spontanéité, parfaite illustration de l'adage « la vérité sort de la bouche des enfants ».
Dans ce huis-clos, peu de descriptions, mais ce qui fait la force de l'histoire, ce sont les dialogues. Les relations entre les personnages ne vont cesser d'évoluer. Méfiance, indifférence, attachement, amitié et même amour, tous les aspects des relations humaines sont évoqués dans le roman. Tout oppose les personnages, à commencer par cette différence que l'on ne décrit jamais, mais qui est pourtant omniprésente. L'auteure se demande, et le lecteur avec elle, ce qui peut diviser et séparer les hommes : la candeur de l'enfance, qui s'oppose aux désillusions des adultes, le passé susceptible d'entraver les relations futures, les idées préconçues, ou encore le manque de communication.
Cette parenthèse contrainte et forcée va permettre à Émilie de faire le point sur sa vie, de renouer le dialogue rompu, d'ouvrir son coeur aux autres et d'accepter les mains tendues. À la fin de l'aventure, si l'avenir est plus que jamais incertain, Émilie, Anna, Yan, Tob et Maïa ont acquis de précieuses valeurs et ont progressé dans leurs histoires personnelles et communes.
Par ce roman proche par certains aspects de la pièce de théâtre tant les dialogues y occupent une place centrale,
Séverine Vialon nous livre une formidable leçon de vie.