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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Dans Souvenirs pieux, Madame Yourcenar nous offre, de sa belle écriture, la vie romancée de sa branche maternelle.

Roman à structure fermée, il débute sur la naissance de l'écrivaine et le trépas de sa mère, quatorze jours plus tard. Ce qui amènera l'envoi d'un souvenir pieux, faire-part de décès agrémenté de versets de la Bible et d'un texte précisant la félicité de la défunte à rejoindre le Seigneur. le livre s'achève par les chapitres relatant la jeunesse et la vie de sa mère jusqu'à son mariage.

Entre ces deux parties, Marguerite Yourcenar décrit la généalogie maternelle en insistant pendant de longs chapitres sur deux de ses grands oncles, Octave Pirmez et son frère Fernand, dit Rémo.

Octave est un auteur belge, qui fut reconnu tardivement dans son pays. Très proche de son frère, il écrira sur sa vie pour lui rendre hommage. Car Fernand est un être passionné, typique du XIXème siècle. Il s'enflamme pour les nouvelles idéologies, progrès, liberté, socialisme, continuations de celles de la Révolution française. Dans ce milieu aristocratique et catholique, Fernand n'est pas accepté. Seul Octave le soutiendra, bien que pris dans son carcan social. Fernand se suicidera, « avec un pistolet qu'il ne savait pas armé », comme l'affirmera la famille soucieuse des qu'en-dira-t-on. Ces deux personnages typiques et presque romantiques influenceront l'oeuvre de Marguerite Yourcenar, d'où ces passages très longs sur eux mais qui s'expliquent.

Souvenirs pieux permet à l'écrivaine de nous faire découvrir ce qui finalement constituera l'essence de sa production littéraire. Elle cherche également à montrer que la vie est loin d'être un chemin rectiligne, qu'elle est faite d'impasses et de longs trajets de contournements. Est-ce la raison pour laquelle Souvenirs pieux appartient à un triptyque appelé le Labyrinthe du monde ? Possible.

C'est un beau roman que nous propose l'auteure, pas le meilleur, mais que je conseille, ne serait-ce que pour l'écriture et la profondeur de la culture de cette grande dame qu'était Marguerite Yourcenar.
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Ce premier tome de la trilogie du Labyrinthe du Monde n'est pas le roman le plus connu de Marguerite Yourcenar. Il ne l'est pas du tout d'ailleurs, et s'est bien dommage. Un examen en surface mené par un lecteur pressé ne donne pas franchement envie de le lire. L'auteure – est-il besoin de rappeler qu'il s'agit de la première académicienne ? - se livre à une sorte de biographie rétrospective de sa famille maternelle.
Prenant pour point de départ sa naissance, elle se livre à un exercice ardu : retracer le parcours de plusieurs générations à l'affût de documents épars. Certes, il ne s'agit pas de n'importe quelle famille entre une petite noblesse et une bonne bourgeoisie. le cadre belge ne paraît que peu intéressant... et pourtant. Elle s'attache à une période cible : la naissance de cet État sans Nation. La démarche est originale car avec un souci généalogique et quelque peu historien, l'auteure veut nous plonger dans une époque et un milieu. le contexte livré par de petites esquisses narratives disséminées ça et là. Il est présent sans prendre la première place.
La romancière nous livre un panorama familial sans complaisance se livrant à une critique acerbe teintée de respect (encore que...). Mais bien au delà d'une réflexion sur des temps passés elle nous livre par petites touches l'esquisse d'une pensée qui est ancrée dans notre actualité contemporaine : l'écologie, la place de l'humanité, le rôle des femmes dans la société, le conformisme. le caractère de cette oeuvre est particulier, facile d'accès (le style Yourcenar) et mérite à être connu. Plus qu'à lire la suite. Encore que le lecteur satisfait pourra aisément s'arrêter à la fin de ce roman (qui se conçoit comme une oeuvre à part entière).
Lien : http://kriticon.over-blog.com
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toujours un style irréprochable et agréable, une culture qu'elle offre simplement à tout un chacun, un auteur dont on ne peut se lasser
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"Souvenirs pieux" (1974) est le premier volume de la trilogie autobiographique de Marguerite Yourcenar "Le labyrinthe du Monde" ; il explore la lignée maternelle. le second tome "Archives du Nord" (1977) part de la nuit des temps pour aboutir, à travers la lignée paternelle, à cet "enfant qui a environ six semaines". Enfin "Quoi ? L'Éternité" est inachevé, s'arrête en 1918 et a été publié un an après la mort de Marguerite en 1987.

Quand on lui demanda pourquoi ressusciter une mère dont elle s'était peu souciée jusque-là et qui mourut de complications après son accouchement, Yourcenar répondit : "Parce qu'elle a existé".
En historienne, en généalogiste, Yourcenar opère, du point où elle vint à la vie, une boucle temporelle qui conduit en bord de Meuse à Flémalle et chez des serviteurs des princes-évêques pour revenir à sa grand-mère, l'attachante Mathilde, et Fernande sa maman. Sur le chemin, elle rend un long hommage à son grand-oncle Octave Pirmez ["...dans le cadre belge, apparaît comme un pendant wallon à De Coster" , "La Littérature belge", Denis-Klinkenberg], l'ancêtre qui laissa une trace dans la littérature belge du 19è siècle et dont elle reconstitue quelques moments de vie marqués par la personnalité du frère, Fernand (dit Rémo), qui se suicida.

Les souvenirs pieux sont ces petites images catholiques émises au décès d'un proche et que l'on glissait dans un missel; ils servent, dans ce roman-mémoire, à évoquer toute la famille maternelle de l'auteur.

Par ce travail de mémoire, à partir d'archives et de témoignages, Yourcenar s'efforce de toucher à quelque chose d'universel, effectuant un lien entre la généalogie et cet "être que j'appelle moi". Elle tient à distance l'être qu'elle fut de sorte que ce moi représente la réunion, pas nécessairement cohérente, de ce je raconté et de celle qui écrit.
En choisissant de considérer le je passé comme un être radicalement étranger, l'auteure pointe les présupposés, compromis et paradoxes qui le constituent et met donc en question le consensus sur lequel repose l'écriture autobiographique.

Reconstituer une généalogie à partir de documents lacunaires ne fut pas mince affaire : "La vie passée est une feuille sèche, craquelée, sans sève ni chlorophylle, criblée de trous, éraillée de déchirures, qui, mise à contre-jour, offre tout au plus le réseau squelettique de ses nervures minces et cassantes. Il faut certains efforts pour lui rendre son aspect charnu et vert de feuille fraîche, pour restituer aux événements ou aux incidents cette plénitude qui comble ceux qui les vivent et les garde d'imaginer autre chose."

Et celle qui se définit comme un "historien-poète et romancier" ("Souvenirs pieux", page 214) dut à ces fins solliciter sa seconde disposition: "Dans Souvenirs pieux ou dans Archives du Nord, j'ai compté [...] sur mon imagination pour évoquer, par exemple, le retour de l'église villageoise de ma grand-mère Mathilde, et le bonheur qu'elle éprouve à marcher dans l'herbe par ce matin d'été, ou encore les dernières réflexions de mon grand-père Michel-Charles. Mais mon projet m'obligeait à ce que tous les détails, même s'ils faisaient l'objet d'une sorte de montage romanesque, fussent authentiques." ("Les yeux ouverts", entretiens).

La fermeté de l'écriture jointe à un regard de moraliste sur la destinée et le temps humain.
Lien : https://christianwery.blogsp..
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Dans sa trilogie, Yourcenar raconte ses origines, son histoire et commente les événements familiaux. Voici les titres de la trilogie familiale :

Souvenirs pieux (1974)
Archives du Nord (1977)
Quoi? l'Éternité…(1988)

Grâce au Labyrinthe du monde, Marguerite de Crayencourt, dite Yourcenar, devient immortelle sous sa plume. Elle s'est inventée comme un personnage de ses romans et c'est beau. C'est la représentation humaine dans toute sa splendeur et dans sa déchéance qui s'offre à nous.

Pour ce faire, Yourcenar a eu à sa disposition de nombreux documents comme des lettres, des livres, des photos, des archives. Elle a interviewé des gens, elle a donc entrepris une démarche sur le terrain.

J'ai retrouvé cette vidéo sur YouTube où elle accepte de répondre aux questions de Bernard Pivot pour l'émission Apostrophes à propos de Souvenirs pieux et d'Archives du Nord. C'est touchant d'entendre la grande Yourcenar parler de ses écrits.


Souvenirs pieux

Tout d'abord, qu'est-ce qu'un souvenir pieux? Yourcenar le mentionne dans son livre après le décès de sa mère.

«[…] : un feuillet de format assez petit pour qu'on pût l'insérer entre les pages d'un missel, où l'on voit au recto une image de piété, accompagnée d'une ou plusieurs prières, chacune d'elles portant souvent au bas, en très petits caractères, l'indication exacte des heures, jours, mois et années d'indulgence que leur récitation procurerait aux âmes du Purgatoire ; au verso, une demande de se souvenir devant Dieu du défunt ou de la défunte, suivie de quelques citations tirées des Écritures ou d'ouvrages de dévotion, et de quelques oraisons jaculatoires. » (p. 60)

Pour se souvenir des siens, Yourcenar décide de les coucher sur le papier pour leur rendre ainsi un hommage. À cet égard, elle s'interroge sur l'identité des membres de sa famille, du côté de sa mère, du côté de son père. Souvenirs pieux est composé des parties suivantes :

L'accouchement
La tournée des châteaux
Deux voyageurs en route vers la région immuable
Fernande

Yourcenar ouvre son bouquin en relatant sa naissance le 8 juin 1903 à Bruxelles et le termine par un chapitre consacré à cette mère, Fernande, qu'elle n'a pas connue, car elle morte d'une fièvre typhoïde le 18 juin laissant son père, un homme de 50 ans, seul, à l'élever. Entre ces deux parties, une tournée des châteaux belges de Flémalle, de Marchienne et de Suarlée ayant appartenu à la famille de sa mère est présentée, et un portrait de deux grands-oncles est dressé, Fernand dit Rémo qui s'enlèvera la vie et Octave Pirmez, qui a été écrivain, essayiste.

À travers ces parties, Yourcenar cherche à comprendre qui elle est en abordant ses ancêtres maternels. Elle relève des traits chez ces derniers se retrouvant également chez elle.

Ce que je pense

Chaque fois que je lis un livre de Marguerite Yourcenar, je suis toujours fascinée par sa plume. Elle manie la langue comme nulle autre et elle développe son information d'une façon éblouissante, inimitable. Par exemple, je me dis en la lisant : «Mais comment a-t-elle fait pour écrire cette phrase? Où a-t-elle été chercher cette idée?» Son génie m'apparaît bien mystérieux. Ses connaissances sont immenses, son savoir indéniable et sa manière de raconter, unique.

Alors, je pense que j'ai lu Souvenirs pieux en ressentant un immense respect pour cette autrice. J'ai aimé en apprendre davantage sur les siens, sur les châteaux, sur elle. En plus, mon conjoint est Belge et lorsque je vais en Belgique, je me rends avec lui visiter les châteaux et je dois dire que j'ai beaucoup pensé à ce pays, à la mer du Nord, un peu présente, à Liège que nous habitons lorsque nous y allons, à Bruxelles, la toute belle.

Je dois aussi dire que les Belges devraient lire ce bouquin pour connaître un peu plus leur patrimoine, la façon de vivre de leurs ancêtres, le développement de leurs villes.

J'ai apprécié également connaître des traits de la personnalité de Marguerite Yourcenar. Je ne savais pas qu'elle était sensible à la cause animale ou encore à la protection de la planète. Je me suis retrouvée dans sa façon de percevoir l'univers et la cause animale. Comme elle le mentionne :


«Cette fillette vieille d'une heure est en tout cas déjà prise, comme dans un filet, dans les réalités de la souffrance animale et de la peine humaine ; elle l'est aussi dans les futilités d'un temps, dans les petites et grandes nouvelles du journal que personne ce matin n'a eu le temps de lire, et qui gît sur le banc du vestibule, dans ce qui est de mode et dans ce qui est de routine. » (p. 33-34)

La peine humaine m'afflige, les maux de mon siècle me détruisent intérieurement et physiquement tout comme ce que l'on fait subir depuis des siècles aux animaux. C'est l'horreur… et c'est pourquoi je suis végétarienne depuis presque 30 ans. Comme elle, je déteste les futilités de mon siècle et je crois que le temps est précieux et qu'il ne faut pas le gaspiller. En somme, je déteste perdre mon temps.

Mais encore, les souvenirs ouvrent une voie en soi, ils peuvent faire trembler un rêve, ils peuvent creuser un trou dans notre inconscient, ils peuvent nous habiter longtemps. Comme le mentionne Yourcenar sur cette envolée sur la mer du temps :

« C'est à l'intensité que se mesure un souvenir». (p. 199)

Donc, je dois dire que je suis bien heureuse d'avoir lu Souvenirs pieux. Je vous recommande ces souvenirs si vous voulez découvrir un peu plus la destinée de celle qui fut la première dame à être admise à l'Académie française. Elle a ouvert la porte, certaines et certains diront enfin, aux autrices dans ce temple encore si masculin.
https://madamelit.ca/2022/03/28/madame-lit-souvenirs-pieux-de-marguerite-yourcenar/
Lien : https://madamelit.ca/2022/03..
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Premier volet assez déconcertant de la trilogie de Yourcenar sur ses origines. Ici, elle se concentre sur la famille belge de sa mère, qu'elle n'a pas connue puisque celle-ci est morte quelques jours après sa naissance, des suites de l'accouchement. Elle aborde au début le récit de la mort, pour s'éloigner ensuite dans le temps (c'est le plus long car difficile d'y voir autre chose qu'une vaste digression sur l'histoire de la Flandre à travers les siècles), passer vers le milieu du livre à un récit plus "romanesque" centré autour de la figure d'un parent éloigné, Octave Pirmez, qui a connu de brefs succès littéraires dans la seconde moitié du XIXème siècle. Enfin la dernière partie revient sur la rencontre de ses parents, leur lune de miel de quelques années à travers l'Europe... le magnifique style Yourcenar est là, mais à la sobriété habituelle s'y ajoute, et je n'ai pas vraiment apprécié, une pointe de coquetterie aristocratique.
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