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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Yourcenar l'explique assez vite à son lecteur : le souvenir pieux est un petit feuillet à glisser dans un missel et invitant, parmi quelques citations tirées des Écritures, à se souvenir devant Dieu d'un défunt ou d'une défunte. Tel est en somme le principe de son livre tout entier. Mais s'il y a ici de la piété, elle tourne le dos à la bondieuserie pour n'être que familiale, sans exclure d'ailleurs l'esprit critique, ni même une touche corrosive souvent savoureuse.

Avant d'être le portrait d'une famille, c'est celui d'une époque et d'une société, et même de la bonne société : l'aristocratie et la bourgeoisie industrielle de Belgique, au tournant des XIXème et XXème siècles. Souvenirs pieux tient ainsi à la fois du portrait de caractères, de la chronique sociale, de l'essai et de l'autobiographie. Yourcenar n'y cache ni son affection ni ses moqueries, voire plus rarement sa détestation d'un personnage. Elle ne dissimule rien non plus de ses questions de petite fille, à l'époque des faits, ou de vieille dame lorsqu'elle écrit ce texte. Il y a un dialogue permanent entre ce qu'était le monde de ce temps-là et celui qu'il a enfanté par la suite. le livre se transforme même parfois en une charge virulente contre l'idéologie du progrès qui a gouverné tout le XXème siècle avec les éclatants triomphes que l'on sait. L'auteure prend le parti de la liberté contre les conformismes, de l'harmonie du monde contre son exploitation effrénée, de la nature et de l'animal contre l'arrogance humaine. Pas trace de militantisme dans son propos, mais une délicate broderie de notations et de rapprochements, dessinant peu à peu une morale que je trouve admirable.

Certes, le lecteur se perd parfois dans les ramifications et les enchevêtrements de cette famille. L'architecture du livre favorise d'ailleurs cet égarement, en invitant à la flânerie et à la rêverie plutôt qu'à l'exploration sèche et méthodique d'archives parcellaires. Yourcenar n'a pas voulu que l'on confonde son oeuvre avec une austère entreprise de généalogiste : l'objet n'est pas pour elle de tracer au cordeau un réseau de filiations ou d'héritages, mais de redonner vie et souffle à quelques figures de son enfance ou de sa mythologie familiale, en des histoires émouvantes qui atteignent à l'universel. On mesure la nature de l'exploit, tant les histoires de famille sont en général aussi incompréhensibles que dénuées d'intérêt, dès lors que ce sont celles des autres. Mais voilà, c'est tout simple : ce qu'écrit Marguerite Yourcenar n'appartient pas au monde des autres.
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Délicieux moment à lire ce livre ! le ton est juste, avec assez d'intimité pour présenter les ancêtres d'où vient Marguerite Yourcenar et assez de distance pour éviter l'hagiographie et instiller une note d'humour. J'ai souvent souris en lisant ce livre, telle cette réflexion sur le généalogiste amateur qui engrange ses millésimes pour parler des dates naissances-mariage-décès des ancêtres ! Les passages sur l'éducation bourgeoise de la fin du XIX° sont nombreux et décrivent très bien la rigueur de cette éducation.
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Probablement il ne faut pas commencer par ce livre pour découvrir l'oeuvre de Marguerite Yourcenar, il faut déjà avoir un certain intérêt pour l'auteur, au risque de trouver ce récit long, peut-être pénible.
Si l'on accepte la clarté des tournures de ses phrases souvent marquées par une érudition alors ce livre peut devenir un plaisir.
Ici Yourcenar prend toute la liberté de son écriture dans sa propre histoire. Ou plutôt dans l'histoire de sa famille, de ses ancêtres. Car il n'est pas question pour elle de nous ennuyer avec de l'autofiction.
Elle puise dans les archives de sa famille, récolte de nombreux éléments, tout cela est on le devine une partie conséquente de son travail. Puis sautant d'un aïeul à l'autre dans des portraits et souvenirs plus ou moins longs, elle raconte sa vision de la petite histoire. Et tout est prétexte pour partager une vision des choses et du monde.
Preuve en est que Marguerite Yourcenar est très loin de se pavaner dans des fausses mémoires de famille : le choix du titre. "Souvenirs pieux", ces mots qui - on l'apprend vite - sont sur les faire-part de décès de ses ancêtres, et qui sont vides de sens, parfois hypocrites de la part des vivants qui les choisissent quand on songe au mort lui-même...
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