FIVE POINTS d'
ERIC YUNG
On entre dans l'histoire de Stéphanie Saint Clair d'
Eric Yung comme dans un roman, puis très vite c'est l'histoire d'une femme d'exception comme on dit qui se profile, dans ce New York – décor de cinéma des années 20-30 – 40 – prohibition, mafias, gangs en tous genres .
Il faut remarquer la maîtrise de Yung pour décrire l'ambiance de NY - Harlem le quartier chaud. Ses trafics, ses moeurs, ses lieux louches, ses restaurants chics.
Et naturellement ses personnages emblématiques.
Dans ce ‘mitan' comme le dit l'auteur, dans un vocabulaire mi argot américain, mi français, il utilise tous les termes appropriés – qui sait qu'il a travaillé aux stups au Quai ? – et qu'il connaît si bien, qui confortent la découverte – pour le lecteur – d'un monde interlope où se mêlent gangsters juifs, italiens, blacks.
Dans ce Harlem grouillant règne ‘son' personnage, une femme à laquelle on va s'attacher indéfectiblement jusqu'à la fin du livre.
Pourquoi ? C'est une immigrée d'origine française martiniquaise, mais ça ne suffit pas, c'est
une vraie gangster qui plonge dans les jeux clandestins avec un succès singulier pour une femme de l'époque.
Cette Stéphanie Saint Clair très vite surnommée la Princesse de Harlem n'hésite pas à constituer autour d'elle un clan mafieux, composé de figures sympathiques, qu'elle envoie descendre tous ceux qui la gênent.
Le personnage prend au fil des pages une dimension mythique, créée de son vivant par une présence quotidienne redoutable au sein du Harlem-décor.
Se souvient-elle de son ‘éducation religieuse' et de la fréquentation assidue de l'Eglise à la Martinique lorsqu'elle était enfant ? Elle pose alors un regard généreux, compatissant, et quasiment révolutionnaire sur la condition des ses compatriotes noirs de la grande cité américaine, dans laquelle s'exerce toujours une ségrégation immonde.
En secret et modestie elle aide ceux qui ont besoin.
Elle s'enrichit sur les jeux, mais la concurrence mafieuse menace sans cesse son pré carré, elle se défend farouchement, ce qui la rend aussi attachante, mais elle n'hésite jamais à tuer sans bavures.
Alors pourquoi cette sympathie du lecteur, plus que ça, cet attachement à la Princesse ?
C'est le secret d'
Eric Yung. Il sait dans toutes ses oeuvres, nous rendre des personnages tirés de l'ombre ou de l'opprobre, comme des icônes à cheval entre le vice et la vertu, je devine d'où il a tiré cette magie littéraire, mais ça c'est la confidence de l'homme à son ami Daniel.
Et puis le final du roman comme au cinéma, romanesque à souhait. J'aime les histoires qui finissent bien, (j'ai eu peur bien des fois cependant), enfin bien…lisez ce livre !
Daniel Soria
14 nov 2021.