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Citations sur Les Rougon-Macquart, tome 1 : La fortune des Rougon (459)

Cet air grave et mélancolique qu'il respira dès son enfance donna à Silvère une âme forte, où s'amassèrent tous les enthousiasmes. ce fut de bonne heure un petit homme sérieux, réfléchi, qui rechercha l'instruction avec une sorte d'entêtement. Il n'apprit qu'un peu d'orthographe et d'arithmétique à l'école des frères, que les nécessités de son apprentissage lui firent quitter à douze ans. Les premiers éléments lui manquèrent toujours. Mais il lut tous les volumes dépareillés qui lui tombèrent sous la main, et se composa ainsi un étrange bagage; il avait des données sur une foule de choses, données incomplètes, mal digérées, qu'il ne réussit jamais à classer nettement dans sa tête.
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Le sourire enfantin du petit Silvère fut pour elle un dernier rayon pâle qui rendit quelque chaleur à ses membres glacés. Elle avait demandé l'enfant, lasse de solitude, terrifiée par la pensée de mourir seule, dans une crise. Ce bambin qui tournait autour d'elle la rassurait contre la mort. Sans sortir de son mutisme, sans assouplir ses mouvements automatiques, elle se prit pour lui d'une tendresse ineffable. Roide, muette, elle le regardait jouer pendant des heures, écoutant avec ravissement le tapage intolérable dont il emplissait la vieille masure. cette tombe était toute vibrante de bruit, depuis que Silvère la parcourait à califourchon sur un manche à balai, se cognant dans les portes, pleurant et criant. Il ramenait Adélaide sur cette terre; elle s'occupait de lui avec des maladresses adorables; elle qui avait dans sa jeunesse oublié d'être mère pour être amante, éprouvait les voluptés divines d'une nouvelle accouchée, à le débarbouiller, à l'habiller, à veiller sans cesse sur sa frêle existence. ce fut un réveil d'amour, une dernière passion adoucie que le ciel accordait à cette femme toute dévastée par le besoin d'aimer. Touchante agonie de ce coeur qui avait vécu dans les désirs les plus âpres et qui se mourait dans l'affection d'un enfant.
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La seconde fille, Gervaise, née l'année suivante, était bancale de naissance. Conçue dans l'ivresse, sans doute pendant une de ces nuits honteuses où les époux s'assommaient, elle avait la cuisse droite déviée et amaigrie, étrange reproduction héréditaire des brutalités que sa mère avait eu à endurer dans une heure de lutte et de soulerie furieuse. Gervaise resta chétive, et Fine, la voyant toute pâle et toute faible, la mit au régime de l'anisette, sous prétexte qu'elle avait besoin de prendre des forces. La pauvre créature se déssécha davantage.
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(...), ils étaient les démons familiers, pillards et criards, de cette étrange maison de la folie lucide ;
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Silvère fit encore quelques pas. Il approchait du fond de l’allée, il n’apercevait plus qu’une bande de ciel où se mourait le jour couleur de rouille. Là, pendant deux ans, avait tenu sa vie. La lente approche de la mort, dans ce sentier où depuis si longtemps il promenait son cœur, était d’une douceur ineffable. Il s’attardait, il jouissait longuement de ses adieux à tout ce qu’il aimait, les herbes, les pièces de bois, les pierres du vieux mur, ces choses que Miette avait faites vivantes. Et sa pensée s’égarait de nouveau. Ils attendaient d’avoir l’âge pour se marier. Tante Dide serait restée avec eux.
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L’étonnement de se voir attaché, la vue de tout ce monde qui le regardait, l’ahurissaient, l’abêtissaient davantage. Comme il ne parlait et n’entendait que le patois, il ne put deviner ce que voulait le gendarme. Il levait vers lui sa face épaisse, faisant effort ; puis, s’imaginant qu’on lui demandait le nom de son pays, il dit de sa voix rauque :

— Je suis de Poujols.

Un éclat de rire courut dans la foule, et des voix crièrent :

— Détachez le paysan.

— Bah ! répondit Rengade ; plus on en écrasera, de cette vermine, mieux ça vaudra. Puisqu’ils sont ensemble, ils y passeront tous les deux.
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Les yeux de Pierre s’habituaient à l’obscurité. Alors, dans les dernières lueurs qui traînaient, il vit tante Dide, roide, morte, sur le lit. Ce pauvre corps, que des névroses détraquaient depuis le berceau, était vaincu par une crise suprême. Les nerfs avaient comme mangé le sang ; le sourd travail de cette chair ardente, s’épuisant, se dévorant elle-même dans une tardive chasteté, s’achevait, faisait de la malheureuse un cadavre que des secousses électriques seules galvanisaient encore. À cette heure, une douleur atroce semblait avoir hâté la lente décomposition de son être.
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Félicité se perdait en plein étonnement. Quelle mouche avait donc piqué Vuillet ? L’image de ce bedeau manqué, un fusil à la main, faisant le coup de feu sur les remparts de Plassans, lui semblait une des choses les plus bouffonnes qu’on pût imaginer. Il y avait certainement là-dessous quelque cause déterminante qui lui échappait. Vuillet avait l’injure trop impudente et le courage trop facile, pour que la bande insurrectionnelle fût réellement si voisine des portes de la ville.

— C’est un méchant homme, je l’ai toujours dit, reprit Rougon qui venait de relire l’article. Il n’a peut-être voulu que nous faire du tort. J’ai été bien bon enfant de lui laisser la direction des postes.

Ce fut un trait de lumière. Félicité se leva vivement, comme éclairée par une pensée subite ; elle mit un bonnet, jeta un châle sur ses épaules.

— Où vas-tu donc ? demanda son mari étonné. Il est plus de neuf heures.

— Toi, tu vas te coucher, répondit-elle avec quelque rudesse. Tu es souffrant, tu te reposeras. Dors en m’attendant ; je te réveillerai s’il le faut, et nous causerons.
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Ce fut une traînée de poudre. En quelques minutes, d’un bout à l’autre de la ville, l’histoire courut. Le nom de Rougon vola de bouche en bouche, avec des exclamations de surprise dans la ville neuve, des cris d’éloge dans le vieux quartier. L’idée qu’ils étaient sans sous-préfet, sans maire, sans directeur des postes, sans receveur particulier, sans autorités d’aucune sorte, consterna d’abord les habitants. Ils restaient stupéfaits d’avoir pu achever leur somme et de s’être réveillés comme à l’ordinaire, en dehors de tout gouvernement établi. La première stupeur passée, ils se jetèrent avec abandon dans les bras des libérateurs.
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Sous cette pluie d’éloges, Rougon baissait humblement la tête. Il murmurait : « Non, non, vous allez trop loin, » avec de petites pâmoisons d’homme chatouillé voluptueusement. Chaque phrase du bonnetier retiré et de l’ancien marchand d’amandes, placés l’un à sa droite, l’autre à sa gauche, lui passait suavement sur la face ; et, renversé dans le fauteuil du maire, pénétré par les senteurs administratives du cabinet, il saluait à gauche, à droite, avec des allures de prince prétendant dont un coup d’État va faire un empereur.
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