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Citations sur Le Monde d'hier : Souvenirs d'un Européen (289)

Qu'un homme éprouvât des pulsions et eût le droit de les éprouver, la convention était bien obligée de l'avouer tacitement. Mais qu'une femme pût pareillement y être sujette, que la Création, pour l'accomplissement de ses desseins éternels, eût besoin aussi de la polarité féminine, le reconnaître loyalement eût été offenser la notion de la "sainteté de la femme".
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On suppose généralement que, dans la vie, le but propre et typique d'un Juif est la richesse. Rien n'est plus faux. La richesse n'est pour lui qu'un degré intermédiaire, un moyen d'atteindre son but véritable, et nullement une fin en soi. La volonté réelle du Juif, son idéal immanent, est de s'élever spirituellement, d'atteindre à un niveau culturel spirituel supérieur...
le pieux, le savant versé dans la connaissance des Ecritures, est mille fois plus estimé que le riche au sein de la communauté; même le plus fortuné donnera sa fille à un homme vivant pour l'esprit, fût-il pauvre comme Job, plutôt qu'à un marchand.
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Pour moi, l’axiome d'Emerson, que les bons livres remplacent la meilleure université, est resté inébranlablement valable, et je suis toujours persuadé que l'on peut devenir un excellent philosophe, historien, philologue, juriste ou tout ce qu’on vouda, sans avoir mis les pieds à luniversité, ni même au Iycée. D’innombrables fois, je me suis assuré dans la vie pratique que certains bouquinistes sont souvent mieux informés sur les livres que les professeurs dont c’est le domaine, que les marchands d’art s’y entendent mieux que les savants historiens de l’art, qu’une grande partie des anticipations et découvertes essentielles dans tous les domaines sont dues à des chercheurs solitaires. Si commode et si salutaire que puisse être l'enseignement universitaire pour des esprits moyens, il me paraît que des natures indivi- duellement productives peuvent s’en passer, qu'il peut meme agir sur elles comme une entrave.
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Ce qu'on a négligé du côté des muscles, on peut le rattraper plus tard ; l’élan vers le spirituel, la puissance d'appréhension de l'âme, en revanche, ne s'exerce que dans ces années décisives de la formation, et seul celui qui a appris de bonne heure à épanouir largement son âme est plus tard à même de saisir en lui le monde entier.
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Dans ce chaos insensé, la situation se faisait de semaine en semaine plus absurde et immorale. Qui avait économisé pendant quarante ans et, en outre, patriotiquement placé son argent dans les emprunts de guerre était réduit à la mendicité. Qui avait contracté des dettes en était déchargé. Qui s'en tenait correctement à la répartition des vivres mourait de faim ; seul celui qui la transgressait effrontément mangeait son soûl. Qui savait corrompre faisait de bonnes affaires ; qui spéculait profitait. Qui vendait en se réglant sur le prix d'achat était volé ; qui calculait soigneusement se faisait quand même rouler. Dans cet écoulement et cette évaporation de l'argent, il n'y avait point d'étalon, point de valeur fixe, il n'y avait plus qu'une seule vertu : être adroit, souple, sans scrupule, et sauter sur le dos du cheval lancé au grand galop, au lieu de se faire piétiner par lui.
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Pour la première fois j'appris à bien observer le type éternel du révolutionnaire professionnel, qui, par son attitude de pure opposition, se sent grandi dans son insignifiance, et se cramponne aux dogmes parce qu'il ne trouve aucun point d'appui en lui-même. Rester dans cette confusion bavarde, c'était s'embrouiller, cultiver des camaraderies peu sûres et compromettre la sécurité morale de ses propres convictions. Je me retirai donc, En réalité, aucun de ces conspirateurs de café ne s'est jamais risqué à organiser un complot, et de tous ces maîtres improvisés de la politique mondiale, pas un seul n'a jamais su faire de la politique quand on en aurait vraiment eu besoin. Dès que commença le travail positif, la reconstruction après la guerre, ils demeurèrent plongés dans leur négativisme d'ergoteurs grincheux, tout comme, parmi les écrivains antimilitaristes de ce temps-là, bien peu, après la guerre, ont réussi à produire encore une œuvre substantielle.
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Et c'est ainsi que le pur, le bel enthousiasme prêt à tous les sacrifices des premiers jours se transforma peu à peu en une orgie des sentiments les plus détestables et les plus stupides. On « combattait» la France et l'Angleterre à Vienne et à Berlin, sur le Ring et sur la Friedrichstrasse, ce qui était singulièrement plus aisé. [...] Shakespeare était banni des scènes allemandes, Mozart et Wagner des salles de concert de France et d'Angleterre, les professeurs allemands expliquaient que Dante était un Germain, les français que Beethoven était un Belge, on réquisitionnait sans scrupules les trésors culturels des pays étrangers, comme le blé ou les minerais. Ce n'était pas assez que chaque jour des milliers de paisibles citoyens de ces pays s'entretuassent sur le front, on insultait et on conspuait à l'arrière, dans les deux camps, les grands défunts ennemis qui depuis des siècles reposaient muets dans leurs tombeaux. La confusion des esprits devenait de plus en plus absurde.
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La technique du national-socialisme a toujours été de donner à ses instincts de puissance exclusivement égoïstes un fondement idéologique et pseudo-moral, et cette notion d' "espace vital" fournissait à sa volonté d'agression toute nue un petit manteau philosophique, un slogan qui paraissait inoffensif par le vague de sa definition et qui, en cas de succès, pouvait légitimer toute annexion, même la plus arbitraire, en la représentant comme une nécessité éthique et ethnologique.
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Par la suite, j'ai rencontré à plusieurs reprises d'autres femmes qui, avec leurs bandeaux blancs, plongeaient dans un monde héroïque et olympien : Cosima Wagner, la fille de Liszt, dure, sévère et pourtant imposante avec ses gestes pathétiques ; Elisabeth Förster, la soeur de Nietzsche, gracieuse, petite, coquette ; Olga Monod, la fille d'Alexandre Herzen que, toute petite, Tolstoi avait souvent prise sur ses genoux ; j'ai entendu Georg Brandes, dans sa vieillesse, parler de ses rencontres avec Walt Whitman, Flaubert et Dickens, ou Richard Strauss racon- ter sa dernière entrevue avec Richard Wagner. Mais rien ne m'a touché comme le visage de cette aïeule, la dernière parmi les vivants sur qui se fût posé le regard de Goethe. Et peut-être suis-je aujourd'hui moi-même le dernier qui puisse dire : j'ai connu un être sur la tête duquel la main de Goethe a reposé un instant avec tendresse.
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C'est ainsi que la société d'alors voulait la jeune fille sotte et niaise, bien élevée et sans idées, curieuse et pudique, dénuée d'assurance et de sens pratique et, grâce à cette éducation étrangère à la vie, destinée d'emblée à être plus tard, dans le mariage, formée et conduite passivement par I'homme.
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