Quand je pousse la porte, Guadalupe n'y est pas.
A sa place, un homme se tient adossé au bar, jambes croisées, et croque dans une pomme.
Les traits fins, mâchoire carrée, cheveux châtains et courts, une vraie gueule d'ange à qui on donnerait le Bon Dieu sans confession.
Mais l'assurance, le charisme qu'il dégage fait pencher la balance vers le petit diable qui vous incite aux plus vils péchés. Et le tatouage que l'on peut deviner sous la manche droite de son t-shirt gris sculpté par ses pectoraux d'acier ne fait rien pour le contredire.
Il s'arrête de mâcher, me déshabille littéralement du regard, de la tête aux pieds, sans aucune pudeur. Avant de plisser ses yeux aux prunelles noisettes tachetées de vert, et braquer son regard lumineux sur le mien, me mettant quasiment à nu.
A ce moment précis, mon cœur s'emballe sans aucune logique.
A ce moment précis, je suis Eve, mais c'est lui qui me tend sa pomme.
- Un morceau ?
Alors, puisque l'amour se définit comme passionnel, je suis allée voir au mot passion : « Amour considéré comme une inclinaison irrésistible et violente. » Monsieur Larousse se fout de moi, c'est le serpent qui se mord la queue. Je note quand même l'emploi des adjectifs « irrésistible » et « violente ». En bref, l'amour est une version BDSM de l'amitié.
Si je suis en colère contre le jour, c'est uniquement parce qu'il met un terme à ma nuit dans ses bras.
instinctivement, mes doigts retrouvent les siens, et je referme les yeux pour me laisser envahir par ce sentiment de plénitude dont je compte apprécier chaque seconde tant qu'il est encore temps.
Ses lèvres se posent sur les miennes. Douces et exigeantes à la fois, elles ont le goût de l'urgence, la saveur de l'exception, le piquant de l'inédit. Une cohorte de sensations me bouscule et me met au tapis tandis que sa bouche picore la mienne de tendres baisers.
L'amour, c'est comme une cigarette... Alors, l'amour tue. En toute impunité, il grille les neurones à petit feu, consume le cœur pour le rendre aussi noir que le charbon. Je hais l'amour, je le déteste aussi fort que j'aime Sacha.
Qu’importe ce qui nous lie, je refuse de le couper. Jamais.