La pendule sonne dix-huit heures. Les rafales s’introduisent jusque dans la cheminée et viennent pousser des cris de loups. Demain tout s’arrêtera.
Il y a l’île qui envoûte avant même qu’on y arrive, sa terre qui nous appelle. Il y a l’île vertigineuse par ses histoires, il y a l’île dans laquelle on apprend des vérités. L’île ne ment pas. Elle est un concentré de vie, brute, resserrée, intense.
L’île est une renaissance, un début de monde, une nouveauté.
L'herbe, mi-haute, verdie par les dernières pluies qui ont nourri les nappes phréatiques, se teinte de tons pastel et se courbe dans un mouvement léger, marqué par les dernières fluctuations du vent.
Les bretons sont comme ça ; éduqués par la météo parce qu’elle leur a appris que chaque instant ne dure qu’un temps, que c’est maintenant ou jamais ; il faut être opportuniste.
Il y a l’île avant l’île, et l’île après l’île. Le voyage, la tempête, la houle, l’arrivée sur le port, le départ depuis le port, et la vérité de l’île. Ses roches, ses contrastes, ses gens, son calme, son isolement, sa puissance, ce petit bout de terre, infiniment petit dans l’infiniment grande mer, mère protectrice ou ravageuse.
Prologue
Il y avait des thoniers, il y avait des bateaux, il y avait de la houle, il y avait de la pauvreté, il y avait des nuages prêts à engloutir les foules, minuscules vies empêtrées dans la misère, il y avait Groix et sa sauvagerie, il y avait la mer turquoise et ses scintillements sous les lumières de septembre, ...
Cette Bretagne des terres désertée ressemble à une destination du bout du monde. En diagonale sur la carte, Ouessant, une autre impression de Finistère, dans un autre style. Mais le résultat est le même, des frissons jusqu’au fond des tripes. Ici, l’homme est petit et les talus infinis.
D’ailleurs qu’est-ce qu’elle fait là, sur cette île ; il fait une chaleur presque intenable en journée alors que le mois d’avril commence à peine. Ce n’est pas son climat habituel. Elle attendrait presque la tempête avec impatience. Le souffle du vent, le bruit des mâts dans le port, les vagues qui éclatent, le feu dans la cheminée en attendant que tout cela passe. Le soleil après la pluie, les éclaircies splendides sur la mer, les faisceaux majestueux perçant les nuages, le chagrin qui passe et l’espoir qui revient.
Quand Nine lui avait proposé une séance de yoga il avait imaginé se laisser bercer par sa voix douce, mais il ne s’attendait pas à subir une discipline militaire.
“C’est bien Jean-Claude, on travaille ton ancrage dans l’élément terre.” dit Nine.
“Ne t’inquiète pas, on sera bientôt tous un jour ou l’autre bien ancré dans la terre.” se dit-il le front en nage.
Il y a l’île qui envoûte avant même qu’on y arrive, sa terre qui nous appelle. Il y a l’île vertigineuse par ses histoires, il y a l’île dans laquelle on apprend des vérités. L’île ne ment pas. Elle est un concentré de vie, brute, resserrée, intense.
L’île est une renaissance, un début de monde, une nouveauté.