Les mots percutants de l’un des maîtres contemporains du flow en français, dont la politique sous-jacente, vacillante, laisse toutefois elle aussi quelque peu sur sa faim.
Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2021/04/28/note-de-lecture-la-faim-de-leur-monde-akhenaton/
La puissance de perforation du flow, le jeu incessant entretenu entre les rimes, les assonances, les allitérations et les sauts de sens en forme de clins d’œil, sont intacts, si ce n’est plus affûtés encore que par le passé. Akhenaton offre ici un témoignage fervent de la puissance de la poésie chantée, qu’elle s’ancre dans le hip hop comme la sienne, celle de D’ de Kabal, celle de Casey, celle de Kae Tempest, celle de Mike Skinner, ou dans une forme plus ancienne réputée plus classique comme celle de Bob Dylan, de Leonard Cohen, de Dominique A ou d’Arthur H, pour ne citer que quelques artistes parmi les dizaines de poètes que compte cet univers – et n’en déplaise à celles et ceux qui, depuis 2016, réaffirment à qui veut les entendre que « cela n’est pas de la littérature ». Les mots ici brillent, pénètrent, distillent, jouent et parlent aux cœurs et aux esprits – et c’est cela qui importe.
Si gêne il y a ici, elle proviendra de la parole politique sous-jacente. Depuis 2015 et les explications parfois quelque peu laborieuses fournies à ses fans après sa participation à une campagne publicitaire de Coca-Cola (avec son titre « Vivre maintenant »), on sait que, selon ses propres mots, Akhenaton « n’est ni un altermondialiste ni un communiste, mais pour un capitalisme juste ». Considérant que « l’opposition frontale ne donne rien », il appelait alors à des méthodes plus inventives pour peser dans la balance. « La faim de leur monde », moins de cinq ans après, sonne ainsi à la fois, dans un contexte entièrement réévalué, en hâte, à l’aune de la pandémie mondiale et de ses immédiates conséquences socio-politiques, comme la confirmation d’une rage intacte face à l’injustice et à l’accaparement, mais aussi comme un paradoxal aveu d’échec quant à ce « réformisme » appelé de ses vœux, avec pour corollaire apparent, hélas, dans la désillusion qui traverse ces pages, le glissement parfois manifeste vers un complotisme viscéral de bien triste aloi.
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