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Citations de Libération (23)


 Libération
■ La police de Nantes a-t-elle arrêté trois militants qui transportaient un homard géant en papier mâché ?
« Samedi [14/09/19] à Nantes, trois personnes auraient été placées en garde à vue pour avoir transporté un homard en papier mâché pour la manifestation et leur garde à vue aurait été prolongée pour 'association de malfaiteurs'. L’information est-elle véridique ? Que leur est-il reproché ? »
Vous êtes nombreux à nous demander des précisions au sujet de l’arrestation de militants avant une manifestation, samedi à Nantes, au motif supposé qu’ils transportaient un homard en papier mâché.
L’information a été partagée par la page 'Nantes révoltée', qui évoque un 'guet-apens' au cours duquel « pas moins de quinze agents de la BAC, cagoulés et très énervés ont encerclé » un camion qui transportait trois militants et un homard en papier mâché. L’ « œuvre », hommage à François de Rugy, devait apparaître lors de la manifestation prévue pour 14 heures, place Mellinet. Trois personnes ont été arrêtées et placées en garde à vue.
La confiscation du homard en papier a aussi été mentionnée rapidement sur Twitter par des journalistes sur place comme Gaspard Glanz de Taranis News, ou Stéphanie Lambert de Ouest-France. Dans son résumé de la journée, Ouest-France rapportait également que « le homard géant fabriqué par des militants à la Maison du peuple n’a pas pu être acheminé à la manifestation. Dans la matinée, la police est intervenue à Doulon pour saisir la bête en papier mâché. Et interpeller trois personnes ».
Dimanche, CheckNews a contacté la Maison du peuple de Nantes, un squat occupé depuis le mois de juillet et situé dans la rue Jules-Ferry. L’arrestation des trois personnes « à la sortie de la Maison du peuple de Nantes avec un homard en polystyrène et en papier mâché et des ballons en forme de homard » nous a été confirmée par un de ses membres, qui indique qu’elle a eu lieu vers 13 heures, samedi. Dans une vidéo postée sur Facebook, on peut observer qu’un important dispositif policier, composé d’une dizaine de policiers cagoulés, a été dédié à cette opération. Au début de la vidéo, une femme crie : « Ils m’ont dit qu’ils me plaçaient en garde à vue. C’est juste la fabrication d’un homard en papier mâché ! »
Contacté par CheckNews, le Service d’Information et de Communication de la Police nationale (SICoP) indique que les trois personnes interpellées sont une femme de 28 ans, une autre femme de 22 ans et un homme de 29 ans.
Cette opération a eu lieu « dans le cadre d’une enquête ouverte le 26 août 2019 des chefs d’association de malfaiteurs en vue de commettre des dégradations en réunion sur des bâtiments publics et participation à un groupement en vue de la préparation de violences volontaires contre les personnes ou de dégradations de biens », précise le procureur Pierre Sennès. En plus des trois personnes interpellées avec le homard, le parquet de Nantes indique que deux autres personnes ont été arrêtées dans le cadre de cette investigation.
Dimanche, le directeur départemental de sécurité publique de Loire-Atlantique, Benoît Desferet, a assuré au journal Presse-Océan que « le homard n’est évidemment pas le problème. Ce n’est pas pour cette raison que des interpellations ont été menées. […] Une procédure de fond, dans le cadre d’une enquête menée par la Sûreté départementale pour 'association de malfaiteurs' est en cours ».
Joints par CheckNews, les avocats Me Vallée et Me Huriet, qui défendent certaines des personnes interpellées, confirment que cinq personnes ont été placées en garde à vue en deux temps. Une première voiture a été arrêtée par des policiers aux alentours de 9 heures du matin, sur l’itinéraire de la manifestation, avec à son bord, selon Me Huriet, du matériel de peinture et des pétards. Le journal Ouest France évoque pour sa part 'un grand flou' qui « entoure l’inventaire du matériel saisi ». Ni le parquet, ni la police n'ont donné de détails sur le matériel saisi.
Puis la fourgonnette transportant le homard en papier a été stoppée vers 13 heures par la police devant la 'Maison du peuple' de Nantes. Ces personnes ont passé quarante-huit heures en garde à vue avant d’être déférées devant le juge d’instruction, lundi.
Ce dernier a décidé de placer les trois personnes transportant le homard sous le statut de témoin assisté pour « association de malfaiteurs en vue de commettre des dégradations en réunion sur des bâtiments publics ». Les deux autres personnes (qui avaient garé la voiture dans la matinée aux abords de la manifestation) ont aussi été placées sous le statut de témoin assisté pour ce même motif, mais également mises en examen pour « participation à un groupement formé en vue de la préparation de violences volontaires contre les personnes ou de dégradations de biens ». Me Huriet souligne que le juge d’instruction n’a pas suivi les recommandations du procureur qui souhaitait que les cinq personnes soient mises en examen pour les deux motifs. Comme le note le site du service public, « un placement sous le statut de témoin assisté est ordonné lorsqu’il y a des charges moins lourdes que celles qui entraînent une mise en examen. »
Me Huriet dénonce une 'dérive déraisonnable' de la part du parquet nantais et une 'instrumentalisation des infractions d’association de malfaiteurs et du groupement en vue de commettre des dégradations et des violences'.

Mardi matin, la page Facebook 'Nantes révoltée', a publié le témoignage des personnes arrêtées samedi. L’une d’entre elle indique n’avoir « pas compris quand ils nous ont parlé d’une association de malfaiteurs. Pendant les auditions, ils nous ont montré des photos de plusieurs personnes, prises dans la rue. Ils nous ont demandés si on les reconnaissait. Il y avait notamment des photos prises devant la Maison du peuple. » Ce qui semble indiquer que le groupe était sous surveillance depuis l'ouverture de l'enquête le 26 août.
'Nantes révoltée' estime ainsi que c’est la preuve que « des agents secrets enquêtaient depuis des semaines pour arrêter les fabricants de homard en papier… » Le collectif note que « le homard géant en papier, abîmé lors de l’embuscade, a été placé sous scellés 'pour les besoins de l’enquête'. »

- article de Jacques Pezet, Libération, 17 septembre 2019
>> https://www.liberation.fr/amphtml/checknews/2019/09/17/la-police-de-nantes-a-t-elle-arrete-trois-militants-qui-transportaient-un-homard-geant-en-papier-mac_1751649?__twitter_impression=true&fbclid=IwAR0rAxACE-Ad6oq3jQnFtBk-lP85pElNYFsgxW5oUfZO-3cez8oLwGh-E-M
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 Libération
■ « Jeu des mille francs », une nouvelle jeunesse.
Par Annick PEIGNE-GIULY — 31 décembre 2001.
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Née en 1958, l'émission de France Inter s'est convertie à l'euro dès septembre.
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« Bravo madame Truchet de Boulogne-Billancourt, vous avez gagné 30 euros ! »
Depuis septembre [2001], sur France Inter, c'est déjà fait : Louis Bozon parle l'euro couramment. A cent jours de la date prévue, le Jeu des mille francs a choisi de se convertir.
« Le jeu des 152,45 euros »... ça aurait cacophoné un peu dans le micro, le service public a donc décidé d'en profiter pour augmenter la mise qui, mine de rien, plafonnait à 1000 francs depuis 1960. Bienvenue donc dans le Jeu des mille euros, son animateur courtois, son célèbre métallophone, ses questions bleu-blanc-rouge, son chouette public, son Superbanco !
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Depuis sa création, le 19 avril 1958, le plus ancien et le plus épatant des jeux médiatiques aura connu trois ères monétaires. Il naît au doux temps de l'ancien franc. C'est alors le Jeu des 100 000 francs par jour qui commence sa tournée en ce printemps 1958, sous le chapiteau de Radio Circus, sur la place du marché, à Le Blanc (Indre).
100 000 francs, une somme rondelette qui permet aux heureux gagnants de se payer un beau voyage ou une auto d'occasion. L'animateur est son créateur, Henri Kubnik, qui formule lui-même les questions.
Viendront d'autres présentateurs tout aussi affables, dont le riant Roger Lanzac et surtout Lucien Jeunesse le bien nommé, qui y officiera trente années durant.
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• Emile Lefranc.
En 1960, passage de l'ancien au nouveau franc, le Jeu des cent mille francs par jour devient logiquement le Jeu des mille francs, qui poursuit son périple dans les petites villes de France. Avec un succès qu'aucun changement de présidence de Radio-France ne viendra démentir. Pour preuve, ce couple Lefranc, dans la Manche, qui choisira, en hommage, d'appeler son fils Emile... Emile Lefranc ! Le chiffre, lui, ne bougera pas ; jusqu'en 1995, où Louis Bozon vient remplacer Lucien Jeunesse au terme de ses 10 000 émissions ; jusqu'à cette année 2001 où s'annonce l'euro. Surfant donc allègrement sur les augmentations du coût de la vie. Adieu voyages, autos...
« Pour les étudiants, explique Louis Bozon, on sentait que ça améliorait simplement l'ordinaire et pour les anciens, c'était devenu l'occasion de faire un petit cadeau aux enfants. Mais n'est-ce pas à l'image de nos budgets de service public ? » Lequel a donc accepté, avec le passage à l'euro, un superbond du banco.
« On n'est pas au Millionnaire, poursuit Bozon. On sait que les gens ne viennent pas à notre jeu pour l'argent, mais tout de même ! »
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• Lapsus.
Le passage aux mille euros, malgré ses avantages, ne s'est pas fait sans grincements de dents des fidèles, traumatisés par le changement de nom. Louis Bozon, lui, n'a fait qu'un seul lapsus en quatre mois. Sinon, il est resté l'observateur attentif de son public. Depuis le lancement, en 1995, de ses Spécial Jeunes, le panel s'est élargi.
« Il y a sans doute un nouveau public, qui vient désormais aussi pour le gain. Mais la plupart sont là pour l'amour du jeu. Sinon, pour les jeunes, un banco à mille euros, c'est souvent le prix d'une Mobylette. La surprise pour moi, c'est le nombre de gamins qui me disent qu'ils vont mettre l'argent sur leur compte. Et aussi les grands-mères, accros à l'Internet et aux e-mails, qui se sont déjà mises à l'euro. »
Le fringant animateur se voit déjà, demain, à Montmorency (Val-d'Oise), célèbre pour ses cerises, son musée Jean-Jacques Rousseau, pour les célébrités qui y ont vécu, comme Robespierre, Heinrich Heine ou la chanteuse de Caf'Conc', Teresa...
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Une question de madame Lamaline, de Paris IIIe. Une question bleue : quel jeu a inspiré le prénom donné au célèbre Emile Leuro? Ding-Ding-Ding.

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>> https://www.liberation.fr/medias/2001/12/31/jeu-des-mille-francs-une-nouvelle-jeunesse_388868
pour ceux qui n'ont jamais entendu, mais aussi pour ceux qui n'imaginaient pas 'ça' du tout comme ça :
>> https://www.youtube.com/watch?v=dYVGSMsD6WA
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■ L'écrivain italien Corrado Augias rend sa Légion d'honneur à la France. - par Eric Jozsef, correspondant à Rome, 13/12/2020.
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Il ira personnellement restituer lundi sa légion d’honneur au Palais Farnèse, siège de l’ambassade de France en Italie. A 85 ans, l’écrivain et journaliste Corrado Augias refuse de « partager cet honneur » avec le président égyptien, Abdel Fattah al-Sissi* décoré lundi de la grand-croix, à l’occasion de sa visite d’Etat en France.
« A mon avis, le président Macron n’aurait pas dû concéder la Légion d’honneur à un chef d’Etat qui s’est objectivement rendu complice d’atroces criminels », détaille Corrado Augias, sorte de Bernard Pivot transalpin, dans une lettre publiée par le quotidien la Repubblica.
(...)

* dont les services sont fortement soupçonnés d'être responsables de l'enlèvement et de l'assassinat au Caire, en 2016, de l'étudiant italien Giulio Regeni

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>> https://www.liberation.fr/planete/2020/12/13/l-ecrivain-italien-corrado-augias-rend-sa-legion-d-honneur-a-la-france_1808545
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■ Roselyne Bachelot : 100% reconvertie.
• article de Laure Equy, 7 septembre 2016
(...)
Ses parents, mère bretonne et père du Morvan, « d’origine modeste et produits de la méritocratie républicaine », un couple de chirurgiens-dentistes établis à Angers, l’ont dotée d’une culture musicale classique, piano, chant, solfège. « Je jouais 'J’ai du bon tabac' à 3 ans et demi. Avouez que pour une future ministre de la Santé… »
Chez les religieuses du pensionnat du Sacré-Cœur, elle fait ses gammes à haute dose. Et, à la trentaine, en voyage à Vérone, tombe amoureuse de l’opéra. Jamais avare de contre-programmation, elle mixe dans sa playlist, Platée de Rameau, Alcina de Haendel et Maître Gims, Black M, Youssoupha. De quoi décoiffer les puristes, elle adore ça. « En France, on veut mettre chacun dans une case. J’ai un parcours étrange, j’ai fait de l’humanitaire en Afrique, et je connais le monde du travail », raconte l’ex-pharmacienne.
(...)
Elle n’est plus encartée depuis que l’UMP a muté pour se renommer « Les Républicains ». Cette vieille amie de François Fillon, « à titre strictement personnel », ira voter à la primaire mais garde son choix pour elle. Dans son cercle, il y en a toujours deux, trois qui n’en démordent pas. La radio, la télé ? C’est bien gentil, mais c’est pour patienter.
Si son camp gagne en 2017, est-elle sûre de ne pas reprendre du service ? « Certains de mes amis croient que je n’ai pas terminé ma phase de décontamination. »
Mais si, elle se jure guérie de toute tentation de revenez-y [en politique].
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 Libération
■ La chasse fait-elle plus de morts que le terrorisme, mais moins que les violences conjugales ?
(précision dans l'article : Cette infographie, non sourcée et anonyme, avance des chiffres souvent inexacts mais donne des ordres de grandeurs cohérents avec les statistiques officielles.)
- Le terrorisme en France depuis 2000 :
1 075 blessés
280 morts
- La chasse en France depuis 2000 :
3 050 blessés
403 morts
- La violence conjugale en France depuis 2000 :
107 500 blessés
1 800 morts
[…]

>> https://www.liberation.fr/checknews/2018/10/23/la-chasse-fait-elle-plus-de-morts-que-le-terrorisme-mais-moins-que-les-violences-conjugales_1686978?fbclid=IwAR1ueeGii7vkXwjVn_J4m62LX4tbms3v8_83Pz6_PHWi0kB_CC77gAqXS78
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■ Autisme, quand la secrétaire d'Etat déclare illégale la psychiatrie.

La phrase est passée presque inaperçue. Interrogée par Jean-Jacques Bourdin, sur RMC, lundi [01/04/2019], veille de la « journée mondiale de l’autisme », la secrétaire d’Etat aux Personnes handicapées, Sophie Cluzel, a eu ces mots qui se voulaient explicatifs sur la stratégie du gouvernement : « Avec notre plan, il s’agit de ne plus placer des enfants autistes devant des psychiatres. » Et encore : « Face à un spectre de l’autisme très large, il faut que l’on arrête de parler de psychiatrie. » Mettre « l’accent sur la détection et la prise en charge précoce des enfants autistes » et en finir avec « des prises en charge inadéquates dans des hôpitaux psychiatriques où ils n’ont rien à faire ».
Oui, vous avez bien lu… Il faut en finir avec la psychiatrie, et son corollaire : plus aucun enfant diagnostiqué autiste ne doit passer devant un psychiatre. Propos ahurissants et inquiétants à plus d’un égard. D’abord à quel titre un responsable politique s’immisce dans le choix d’une stratégie thérapeutique ? Ensuite, pouvoir affirmer cela sans provoquer de tollés montre à quel point dans la guerre qui a lieu depuis dix ans sur l’autisme, la psychiatrie a perdu les batailles. Des défaites successives depuis ce jour de 2005 où la Haute Autorité de santé a publié des recommandations pointant la non-pertinence des approches psychothérapeutiques.
Certes un rééquilibrage était pour le moins nécessaire. Depuis une bonne trentaine d’années, la pédopsychiatrie avait montré des failles évidentes dans la prise en charge de ces enfants et encore plus dans le rapport avec les parents, laissant ces derniers dans une solitude et un désarroi profond. Reste qu’aujourd’hui seules les approches pluridisciplinaires permettent de soulager un peu, enfants comme parents. Sans remettre en cause la nécessité d’une approche plus inclusive de l’enfant dans la société, en particulier à l’école.
Les déclarations laissent sans voix : exclure la psychiatrie de ce champ-là est aussi stupide que d’exclure le langage dans la prise en charge. « La psychiatrie n’est pas seulement la spécialité de la folie », a rappelé non sans bon sens le professeur Bernard Golse, qui dirige le service de pédopsychiatrie de l’hôpital Necker. « C’est aussi le soin du lien et notamment le lien entre le patient et son environnement. » Et mesuré, il ajoute : « Si nous rejoignons la secrétaire d’Etat dans sa volonté de dénoncer les clichés concernant les causes de l’autisme, le modèle le plus plausible quant à l’origine des troubles de l’autisme est un modèle polyfactoriel, incluant des facteurs biologiques, génétiques et environnementaux dans une perspective épigénétique. » De même, le Dr Michel David, psychiatre et vice-président du Syndicat des psychiatres des hôpitaux (SPH), a dénoncé « des propos excessifs ».
Comment ne pas croire dès lors que ces propos de la secrétaire d’Etat visent d’abord à cacher les déceptions actuelles qui s’accumulent vis-à-vis des fortes promesses lancées ? Souvenez-vous, Emmanuel Macron avait fait de l’intégration des autistes une priorité de son quinquennat. Deux ans plus tard, cela traîne pour le moins, même si l’objectif était louable. Et comme toujours ce sont les mêmes qui restent à l’abandon, enfants autistes devenus objets récurrents de propos définitifs et lénifiants.

- Eric Favereau, 03/04/2019
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 Libération
■ Jeu de dupes (Libé, 17/10/21).
Espagne : derrière l’écrivaine à succès Carmen Mola se cachaient trois hommes.
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Lauréat d’un grand prix littéraire en Espagne, un trio d’hommes proches de la cinquantaine est sorti de l’anonymat, alors qu’il signait sous un nom féminin. Une supercherie qui agace les activistes féministes.
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Une professeure de mathématiques, née à Madrid, proche de la cinquantaine, mère de trois enfants. Une auteure de romans policiers discrète et solitaire, qui préférait utiliser un pseudonyme. Voilà ce que l’on croyait savoir de Carmen Mola. La supercherie a duré jusqu’à vendredi. Ce jour-là, Camen Mola a remporté le prix Planeta, le plus important de la littérature hispanique, pour son nouveau roman 'La Bestia'. L’ouvrage raconte l’histoire d’un journaliste, d’un policier et d’une jeune fille qui tentent de percer le secret derrière une vague de meurtres parmi les classes populaires, lors de l’épidémie de choléra dans le Madrid de 1834.
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Le prix Planeta, accompagné d’un pactole d’un million d’euros, a poussé les vrais auteurs à sortir de leur trou. Derrière l’énigmatique signature, se cachent en réalité trois auteurs masculins. Carmen Mola, pseudonyme sous lequel a été publiée une trilogie de romans policiers ('La fiancée gitane', 'Le réseau pourpre', 'La Nena') à succès, était en fait le trio d’auteurs : Jorge Díaz, Agustín Martínez et Antonio Mercero.
« Derrière le nom de Carmen Mola, il n’y a pas, comme dans tous les mensonges que nous avons racontés, une enseignante de lycée, mais trois écrivains, trois scénaristes et trois amis […], qui un jour, il y a quatre ans, ont eu l’idée folle de combiner leurs talents pour écrire une histoire ensemble », a expliqué Jorge Díaz après avoir reçu le prix. « Cette histoire a eu du succès et en a donné une autre, une autre, une autre… et à la fin, elle nous a amenés ici ce soir », a-t-il ajouté. Le trio avait, au fil des interviews, disséminé des éléments sur la vie (elle aussi fictive) de l’auteure, présentée comme « la Elena Ferrante espagnole ».

Le trio d’hommes d’environ 50 ans s’est défendu d’avoir utilisé une signature féminine pour booster les ventes de ses bouquins sanglants. « On ne s’est pas caché derrière une femme mais derrière un nom », s’est défendu Antonio Mercero auprès du quotidien espagnol El País. Un argument qui ne passe pas auprès de l’écrivaine féministe Beatriz Gimeno. « Au-delà de l’utilisation d’un pseudonyme féminin, ces gars-là répondent à des interviews depuis des années. Ce n’est pas seulement un nom, c’est un faux profil qui a conquis les lecteurs et journalistes. Escrocs », a-t-elle réagi sur Twitter. L’Institut pour les femmes, que Beatriz Gimeno a présidé, avait d’ailleurs inclus un des livres de Carmen Mola dans sa sélection des 'œuvres féministes'.

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>> https://www.liberation.fr
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 Libération
AVEC LE MACRONISME, LA CULTURE D'ENTREPRISE S'INSTALLE AU POUVOIR POLITIQUE

[...] S’il assure ne pas résumer la vie politique à celle d’une entreprise, Emmanuel Macron en reprend pourtant les codes, affirme Thierry Herrant, spécialiste de la communication d’entreprise, qui avance l’idée d’une «présidence managériale»
[...]
«Helpers», «benchmarking», «feedbacks», «process»... souvent moqué depuis le lancement d’En marche!, le jargon du mouvement a fait son entrée au Palais Bourbon avec l’arrivée de la majorité présidentielle.
«Disruptons les pratiques : on brainstorme ce matin en mode atelier», tweetait dimanche le nouveau député Eric Bothorel, qualifiant aussi l’Assemblée de «plus grand espace de coworking» de France.
«On a des deadlines, des policies, des lignes directives», énumère-t-il, parlant de «back-office» du parti pour être efficace. «Ce n’est pas un gros mot», dit-il insistant sur la liberté de parole conservée. Pas un gros mot non plus, l'«ice-breaking» pour que les nouveaux députés REM apprennent à se connaître, même si, dit-il, «on n’a pas joué avec des balles en prononçant le nom de chacun».
Bruno Bonnell, un chef d’entreprise qui s’avoue «un peu perturbé» en devenant député, veut, en conservant sa «profonde intégrité», «accompagner dans une transformation subtile» l’Assemblée, particulièrement en termes de numérique. «On vote avec des enveloppes et des urnes, parfois sur des bulletins manuscrits», note par exemple celui qui veut «digitaliser (sa) circo» et mettre en place un logiciel de traitement des courriers des administrés, «une habitude d’entreprise pour suivre les clients».
Autre ressemblance avec l’entreprise: le verrouillage de la communication du «macronisme», sa défiance envers les médias et la préférence pour les journalistes spécialisés, analyse Thierry Herrant. On préfère «des ministres experts qui parlent à des experts sur des sujets techniques», explique-t-il. «Moins il y a d’infos, moins il y a de risques."

LIBÉRATION EN LIGNE, 30 JUIN 2017
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 Libération
• A l’occasion de la 23e Journée nationale pour la prévention du suicide, de nouvelles données sont publiées par le Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH), ce mardi [5 février 2019].

[...] l’Hexagone présente toujours un des taux les plus élevés d’Europe, avec près de 9 000 suicides par an. Et ce chiffre ne s’améliore pas vraiment.

« Chaque suicide est une catastrophe, à l’origine de beaucoup de douleur et de traumatismes chez les proches, et il peut être l’un des événements les plus pénibles auxquels sont confrontés les professionnels de santé », écrit Pierre Thomas, professeur de psychiatrie à Lille, dans un éditorial du BEH qui paraît ce mardi matin, à l’occasion de la 23e journée nationale pour la prévention du suicide.
Et de détailler : « On considère qu’un suicide endeuille en moyenne sept proches et impacte plus de vingt personnes. Il est démontré que le risque de suicide augmente significativement dans l’entourage d’une personne suicidée. Et cette observation a conduit à développer l’idée de la contagion suicidaire et à tenter de mettre en œuvre des moyens pour lutter contre cette contagion. »
[...]
On retrouve des facteurs de risque bien connus : le fait d’être une femme, de vivre une situation financière délicate, mais aussi le fait d’être célibataire, divorcé ou veuf. L’inactivité professionnelle joue également ainsi que des événements traumatisants. Reste que « le facteur le plus associé aux pensées suicidaires reste d’avoir vécu un épisode dépressif caractérisé au cours de l’année ».
[...]
Plus généralement, d’autres facteurs – en particulier les événements de vie douloureux pendant l’enfance ou l’adolescence – tels que le décès ou la maladie d’un proche, un climat de violence familiale et surtout le fait d’avoir subi des violences sexuelles, semblent être des déterminants majeurs de passages à l’acte.
[...]

>> tout l'article : https://www.liberation.fr/france/2019/02/05/en-france-le-suicide-se-porte-tristement-bien_1707335
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 Libération
Extrait de l'article "Le ju jitsu est utile contre la police, contre les maris, les pères, les patrons" écrit par Cécile DAUMAS et Simon BAILLY qui ont interviewés Elsa DORLIN au sujet de son livre "Se défendre". Un livre sur le féminisme mais pas que...

On retient trop souvent du féminisme les demandes de loi et l'exigence de criminalisation comme si toute revendication passait par la figure de "victime". Cette demande est un tout petit pan du féminisme. Il y a toujours au un large courant qui a critiqué ce processus de vulnérabilisation des femmes qui, au nom de la protection de la veuve et de l'orphelin, leur a dénié les droits et les ressources leur permettant de se défendre elles-mêmes [...].
Il est impensable qu'un femme se défende par elle même...
Être interpellé comme un corps violentable fait partie de la définition sociale de la féminité, et cette définition doit être maintenue coûte que coûte. Si les femmes sont violentables, alors elles ne doivent pas pouvoir se défendre et doivent être éduquées dans l'ignorance de leur capacité propre à se défendre. Il faut donc les protéger, protéger leur virginité, leur honneur, les défendre des hommes stigmatisés comme "dangereux"; c'est un paternalisme au sens propre du terme. Il faut aussi faire peser sur le recours à la violence un interdit, un tabou, et ostraciser les femmes qui le transgresse comme des hystériques, des folles, des exceptions monstrueuses. [...] Dans l'autodéfense féministe, on part de la condition matérielle d'un corps de femme. La boxe est liée à une socialisation masculine du corps. Mouvements amples, virilité par les poings hauts et mythologie de la rixe. Dans l'autodéfense féministe, on part de la réalité de la socialisation de corps éduqués à ne pas prendre beaucoup d'espace, à demeurer dans l'ignorance de leur puissance et ayant peu de temps libre pour incorporer un savoir martial qui doit pourtant être le plus efficace possible. Il s'agit donc d'acquérir des ressources qui relèvent du "combat réel" : apprendre à casser les représentations faussées de l'insécurité (le parking sombre et non la chambre à coucher, le lieu de travail, la famille...) Il faut apprendre à faire confiance à ses ressentis, utiliser sa rage pour réanimer ses muscles, expérimenter une autre représentation de soi.
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■ Quand Philippe de Villiers voulait déboulonner des statues.
- par Sylvain Chazot, 26 juin 2020 -

-- En 1989, Villiers militait pour le déboulonnage de statues révolutionnaires comme celles de Robespierre ou Marat, rien de moins que des « criminels contre l’humanité ». --

Depuis la mort de George Floyd aux Etats-Unis et le regain d’énergie du mouvement Black lives matter, la question de l’héritage culturel se pose en France et notamment au sujet de la place donnée dans l’espace public aux représentations de figures historiques controversées. La statue de Colbert, devant l’Assemblée, est ainsi visée – voire vandalisée –, certains n’admettant pas que le Premier ministre de Louis XIV, initiateur du fameux Code noir fixant un cadre légal à l’esclavage, trône ainsi devant le palais de la représentation nationale.
Faut-il déboulonner Colbert ?
Et plus largement, faut-il déboulonner les statues des personnages contestés ?
Emmanuel Macron a vite répondu à cette question. « La République n’effacera aucun nom ou aucune trace de son histoire », a-t-il déclaré le 14 juin. Voilà qui plaira à Philippe de Villiers version 2020. Moins à Philippe de Villiers version 1989.
Comme l’ont repéré des internautes, l’ancien secrétaire d’Etat du gouvernement Chirac participait, en 1989, à l’émission Apostrophes consacrée à la Révolution française. Le Vendéen s’y montrait très vindicatif envers les figures de la Révolution, souhaitant même que leurs statues soient… on vous le donne en mille… déboulonnées. Se faisant le porte-étendard des contre-révolutionnaires vendéens massacrés entre 1793 et 1796, Villiers lance : « Que l’occasion qui est belle soit saisie par le président de la République pour décrocher et déboulonner les statues de tous les criminels contre l’humanité, dont les crimes sont imprescriptibles : Robespierre, Marat, Saint-Just, Turreau, Carrier… […] Le général Turreau, l’homme des colonnes infernales, est sur l’Arc de Triomphe. » Et Villiers d’ajouter avoir écrit à ce sujet au président Mitterrand.

• « Mémoricide »
Cela valait en 1989. Mais pas en 2020. Car dans 'Le Point', mardi 23/06, Villiers s’insurge contre ceux qui veulent déboulonner des statues.
« La prétention au déboulonnage des statues répond à une surenchère dangereuse qui commence par le caprice individuel, parfois fondé sur une intuition compréhensible, mais qui finit le plus souvent par la réécriture de l’Histoire », estime-t-il, accusant les 'déboulonneurs' de « chercher à briser notre imaginaire collectif pour exciter les uns et les autres ».
Il ajoute : « Il s’agit ni plus ni moins que de perpétrer un 'mémoricide' et d’engager un processus de soumission pénitentielle. » Et le même de citer '1984', d’Orwell, qui a « eu la prescience de ce que nous subissons ».
Il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis, direz-vous. Alors de ce point de vue, le patron du Puy du Fou n’est pas un imbécile.
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- Extrait de 'Chez Pol', newsletter politique quotidienne réservée aux abonnés de Libé.
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 Libération
■ Gérald Darmanin doit quitter le ministère de l'Intérieur.
Tribune d'un collectif d'élues et responsables politiques (23 juillet 2020).
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Des élues de gauche (Clémentine Autain, Manon Aubry, Elsa Faucillon...) dénoncent un « mépris vis-à-vis de toutes les femmes » et la « double violence » que constitue pour elles cette nomination.
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Tribune.

Nous, femmes, responsables politiques françaises, prenons la parole pour dénoncer la nomination de Gérald Darmanin à la tête d’un des plus importants ministères pour lutter contre les violences faites aux femmes. Cette parole que nous, femmes, avons eu tant de mal à libérer au travers du mouvement #MeToo, notamment, doit être entendue et respectée. Cette nomination intervient après les dernières élections municipales qui, malgré une abstention qui doit toutes et tous nous interroger, ont permis que la moitié des plus grandes villes de France soient désormais administrées par des femmes ayant conduit des listes de renouvellement citoyen.

Comment, alors, tolérer cet entre-soi « d’homme à homme » dans le choix stratégique du ministre de l’Intérieur ? Gérald Darmanin est présumé innocent. Mais comment justifier la promotion à l’Intérieur d’un ministre mis en cause dans une enquête préliminaire pour viol, harcèlement et abus de faiblesse et dont les avocats ne contestent pas les faits mais leur qualification pénale ? D’un ministère qui doit être celui de la protection des citoyennes face aux violences sexistes et sexuelles toujours aussi nombreuses ? Comment assurer l’équité des parties dans ces conditions ?

Cette indignation transcende les clivages politiques républicains. Nous, femmes en politique, pouvons témoigner de la double violence que les femmes doivent affronter. La violence politique, bien souvent décuplée à leur encontre, et les violences ordinaires que subissent toutes les femmes (compétences sans cesse remises en cause, difficultés à concilier vie familiale qui repose encore trop souvent sur les femmes et vie professionnelle ou militante, etc.).

Depuis le début de la Ve République, seules deux femmes ont accédé au second tour de l’élection présidentielle, et personne ne peut oublier le torrent d’injures sexistes qui a accompagné la nomination de la seule femme Première ministre sous François Mitterrand il y a bientôt trente ans.

Au-delà des convictions politiques, nous, femmes responsables politiques, qui nous nous inscrivons dans la tradition républicaine et démocratique, dénonçons cette injure de trop, faite tout à la fois à l’exemplarité politique et, plus grave encore, à toutes ces femmes qui ont tant de mal à être entendues par les institutions policières et judiciaires de notre pays.

La police républicaine mérite mieux que cette nomination et les femmes en politique comme ailleurs ne se tairont plus ! Gérald Darmanin ne peut rester ministre de l’Intérieur. Son maintien signifierait un égal mépris de la part du président de la République vis-à-vis de toutes les femmes et de leur combat pour le respect et l’égalité.
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• Auteures de la tribune : Claire Monod, coordinatrice nationale Génération·s, conseillère régionale Ile-de-France; Sophie Taillé-Polian, coordinatrice nationale Génération·s, sénatrice du Val-de-Marne
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Un article concernant ASLI ERDOGAN, auteure - Le bâtiment de pierre...

LIBÉRATION
http://www.liberation.fr/debats/2017/01/01/erdogan-versus-erdogan_1538480
Tribune
Erdogan «versus» Erdogan
Par Atila Özer, Ecrivain, philosophe — 1 janvier 2017 à 17:26 (mis à jour à 17:50)

Tayyip contre Asli, deux faces d’un même pays : une société en pleine modernisation contre la dérive totalitaire d’un président.

L’histoire, parfois, se condense avec ironie. Entrée après le putsch raté du 15 juillet dans l’hiver du totalitarisme, la Turquie, ces jours-ci, est le théâtre d’un procès on ne peut plus symbolique, dont les deux protagonistes, qui portent le même patronyme, résument à eux seuls leur pays, l’un son côté obscur, l’autre sa face lumineuse.

Au ban des prévenus (aux côtés d’une linguiste et de deux journalistes), Asli Erdogan, romancière internationalement renommée. Placée en détention préventive le 17 août pour «appartenance à une organisation terroriste» (entre autres chefs d’accusation), elle encourt la réclusion à perpétuité. Comme des dizaines de milliers de femmes et d’hommes - policiers, militaires, juges, intellectuels, enseignants… - elle a été raflée sans véritable raison. Sacrifiée sur l’autel de la sécurité de l’Etat.

Au départ, celui-ci prétendait lutter contre les «gülénistes», faction du régime tombée en disgrâce, que l’on a désignée comme responsable du putsch. Mais rapidement est venu le tour de ceux qui avaient osé prendre la parole pour défendre les droits de la minorité kurde ou la reprise du dialogue politique rompu un an plus tôt par le gouvernement. Les élections venaient de faire perdre à l’AKP - le parti au pouvoir - sa majorité. Il s’agissait alors de reconquérir l’électorat. Et l’on sonna le tocsin contre le «terrorisme» et le «séparatisme». C’est de cette seconde vague de la purge que la romancière a été victime. A présent, ce qui s’avère n’être rien d’autre qu’une gigantesque chasse aux sorcières entraîne peu à peu dans la tourmente tous ceux qui résistent à l’anéantissement de la liberté d’expression et à la mise en place de l’ordre totalitaire.

Physiquement absent du procès, le président Recep Tayyip Erdogan en est - si l’on peut dire - l’âme. Depuis la révolte de Gezi en 2013, à laquelle son règne a bien failli ne pas survivre, c’est lui, et personne d’autre, qui bannit de l’administration toute personne rétive à sa vision du monde. C’est lui, et personne d’autre, qui met au pas télévisions, journaux, maisons d’édition. C’est lui, et personne d’autre, qui fait embastiller tout esprit libre. Car la séparation des pouvoirs et l’indépendance de la justice n’ont plus cours en Turquie.

Recep Tayyip Erdogan, le nom du négatif de l’ethos politique turc : le nom de la violence d’Etat, le nom du mépris du droit, le nom de l’atteinte aux libertés, le nom de l’oppression des Kurdes. Un condensé des vieilles conceptions et des vieilles méthodes, celles du putsch de 1980, et avant cela de la dictature kémaliste, et avant cela encore du despotisme ottoman. Celles dont la jeunesse insurgée de Gezi ne voulait plus. Mais le gouvernement l’a fait taire.

Asli Erdogan, le nom de l’espérance, qui n’est pas morte, bien que la démocratie, elle, le soit tout à fait, puisque les contre-pouvoirs - médias, associations, justice, opposants - ont été neutralisés. Il existe toujours un Parlement et des partis politiques. Une façade - grandement délabrée - qui n’empêche plus de voir le fond de la relation entre gouvernants et gouvernés dans la Turquie d’aujourd’hui : l’entreprise de conformation de la société à la vision islamo-nationaliste du président. La population turque, ou plutôt sa partie moderniste, résiste encore, mais de façon désormais dispersée. En continuant de ne pas penser comme le chef. En protestant contre les violences faites aux femmes, aux dissidents, aux minorités. En s’opposant, dans la mesure du possible, à l’arbitraire étatique. C’est de cela qu’Asli Erdogan est le nom, en lieu et place de tous ceux qui ont été réduits au silence.

Que lui a-t-il été reproché ? Dans un Etat de droit démocratique, rien qui puisse justifier la prison. Asli Erdogan y a été jetée parce qu’elle collaborait au journal pro-kurde Özgür Gündem, fermé la veille de son arrestation. Dans la Turquie d’Erdogan, crime suprême. Car cela équivaut à être membre d’une «organisation terroriste» - en clair, membre du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), en conflit avec l’Etat turc depuis 1984. Etrange syllogisme : tout journal prokurde fait partie du PKK ; Asli Erdogan collabore à un journal prokurde ; donc Asli Erdogan fait partie du PKK. Négation du principe de personnalité des peines. Négation de la liberté d’informer. Négation de la liberté d’opinion. Oui, Asli Erdogan est une femme engagée. Oui, depuis vingt ans, elle plaide la cause des victimes du pouvoir et du conformisme social dans son pays. Asli Erdogan a-t-elle pour autant jamais soutenu ou justifié les attentats terroristes du PKK ? Non. Elle n’a fait que son devoir d’esprit libre et juste. En relatant la réalité du calvaire de la minorité kurde. Et en défendant l’idée que le conflit ne pouvait être résolu que par la voie pacifique du dialogue et d’un compromis équitable. «Me voilà aujourd’hui en prison pour avoir cru à des mots tels que vérité et paix, constatait-elle dans sa lettre du 16 octobre.

Le crime d’Asli Erdogan ? Un crime imaginaire. A l’inverse de celui de Tayyip. Où en est la Turquie aujourd’hui, à cause de son président ? Il y a quelques années encore, le pays se modernisait, se démocratisait, se rapprochait de l’Europe et de ses normes. Et puis Tayyip s’est mis en tête de réaliser enfin son projet caché : la réislamisation de la société, la réottomanisation de la politique extérieure. Et quand la jeunesse s’est insurgée contre cette orientation qui revenait à liquider presque un siècle de conquêtes républicaines, quand son gouvernement a commencé à vaciller, Tayyip a mis fin à l’Etat de droit, Tayyip a mis fin à la liberté de la presse, Tayyip a mis fin à la liberté de pensée… Tayyip s’est mis en tête de renverser la République. Rupture du contrat social. Crime contre les droits de l’homme, crime contre la démocratie. Bien réels, ceux-là. Mais dans la Turquie de Recep Tayyip Erdogan, un président félon ne répond pas de ses crimes.

Jeudi 29 décembre, Asli Erdogan a été remise en liberté sous contrôle judiciaire. Il faut s’en réjouir, bien sûr. Mais aussi continuer à la soutenir, car les charges qui pèsent contre elles sont maintenues, et, dans l’attente de la suite de son procès, il lui est interdit de quitter le territoire national. Comme elle l’a déclaré à sa sortie de prison, «la différence entre les conditions de détention et celles de la vie à l’extérieur se réduit peu à peu en Turquie».

Au-delà d’Asli Erdogan et de ses coprévenus, ce sont tous les prisonniers d’opinion - et ils sont fort nombreux - qui ont besoin de la solidarité internationale. A commencer par celle de l’Union européenne, qui est à la croisée des chemins. Ou bien, par cynisme, elle continue de pactiser avec Recep Tayyip Erdogan, et se rendra ainsi complice de ses crimes ; ou bien, se souvenant de l’espoir qu’elle peut représenter pour ceux qui dans le monde se battent pour la liberté, renouant avec ses principes fondateurs, et s’armant d’un tout petit peu de courage, elle prend le parti d’Asli Erdogan et se dresse enfin contre la dérive totalitaire d’un Etat qui fait partie du Conseil de l’Europe et de l’Union douanière.
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 Libération
■ Transclasse : « J’ai voulu réhabiliter les parents. »
Fils de chauffeur poids lourd, normalien, le journaliste Adrien Naselli montre le rôle essentiel des parents dans les parcours de transclasses.
- article d'Elsa Maudet, publié le 21 octobre 2021 -
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Adrien Naselli, journaliste indépendant, diplômé de l’Ecole normale supérieure et du Centre de formation des journalistes, auteur de 'Et tes parents, ils font quoi ? Enquête sur les transfuges de classe et leurs parents' (JC Lattès).
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« Quand on évoque la méritocratie, on ne fait parler que ceux qui en bénéficient. J’ai voulu corriger cela en réhabilitant les parents, et en évitant une lecture misérabiliste des parcours transclasses : je n’ai pas eu une vie particulièrement douloureuse. Et puis, être transfuge de classe aujourd’hui, c’est plutôt un atout tant cette figure est valorisée. Presque tous les parents de transclasses que j’ai rencontrés surveillaient leurs enfants, l’heure à laquelle ils rentraient à la maison et la façon dont ils faisaient leurs devoirs. Beaucoup leur ont mis des livres entre les mains. Dans les familles immigrées, le mot d’ordre récurrent était 'Tu dois y arriver !' avec l’espoir que leur enfant fasse mieux qu’eux. »
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« Je viens d’un village à côté de Grenoble. Mon père était conducteur de poids lourd, puis conducteur de bus, et ma mère, secrétaire. J’ai eu le parcours classique d’un étudiant qui ne sait pas quoi faire après le bac et qui n’a aucun réseau. Quasiment tous mes cousins font le métier de leurs parents. Ma cousine, par exemple, est aide-soignante, comme sa mère. La fac, c’est la période où j’ai le plus travaillé, au sens scolaire du terme, parce que j’étais déterminé à m’en sortir dans cette jungle. Deux ou trois profs ont repéré cette assiduité et m’ont suggéré de m’inscrire à la section parallèle d’admission à l’Ecole normale supérieure de Paris, qui permet d’entrer sur dossier et pas sur concours, ce que j’ai fait. J’ai été reçu. Mes parents m’avaient pourtant dit de ne pas aller à l’ENS, que ça ne servait à rien, que j’avais tout ce qu’il fallait à Grenoble. Ils voulaient que je fasse un IUT info-com parce que c’était une formation professionnalisante. Les catégories plus favorisées attendent du prestige pour leur enfant ; pour mes parents, c’était trop cher, trop loin. »
(...)

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>> https://www.liberation.fr/idees-et-debats
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 Libération
La poésie est un sport de combat.
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Je suis extrêmement sensible - j'y manque souvent moi-même et je me le reproche - au mot juste. Et pour moi, le mot juste, c'est le mot beau. J'aimerais une littérature qui n'emploie que les mots exacts, qui signifient ce qu'ils doivent signifier. J'aime la littérature où les arbres, les pierres portent leurs noms.

2551 – François Mitterrand, Paris-Match, 24 avril 1988.
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 Libération
■ La France garde-t-elle des copies des œuvres d’art qu’elle restitue au Bénin ? - article de Jacques Pezet, 30 octobre 202.
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Avant qu’ils ne repartent au Bénin, les 26 trésors royaux d’Abomey, conservés par le Quai-Branly, ont fait l’objet de sauvegardes photographiques ou de radiographies, qui doivent servir à la recherche.
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La France s’apprête à rendre au Bénin 26 œuvres d’art des palais royaux d’Abomey, emportées en 1892 comme butin de guerre. Jusque-là stockés au musée du Quai-Branly, à Paris, ces objets royaux devraient rejoindre Cotonou le 9 novembre. (...)
Contacté par CheckNews, le musée du Quai-Branly confirme que « les 26 objets qui vont être restitués au Bénin ont tous bénéficié d’un constat d’état détaillé et d’une campagne de photographie HD ». Certaines œuvres ont bénéficié de sauvegardes plus approfondies. « Les neuf objets exposés dans les collections permanentes ont bénéficié d’une imagerie par photogrammétrie, qui permet la création de modèles 3D des objets », précise le musée, qui insiste sur le fait que « le but n’est pas de recréer des copies des œuvres mais de disposer de doubles numériques pour l’étude et la recherche ». Sur ce point, le musée français assure que « toute la documentation résultante des analyses est partagée avec nos partenaires béninois ».
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« Afin de voir quelle est la construction de ces objets, les inclusions métalliques et identifier d’éventuelles caches pour charges magiques », cinq objets ont également « été investigués par radiographie aux rayons X », indique le musée. (...) Joint par CheckNews, le physicien Emmanuel Vartanian, qui dirige la société Res Artes, chargée d’effectuer les radiographies des trois bochios, indique que ces analyses ont eu lieu en 2019.
Le directeur du laboratoire d’analyse indique que sa société « travaille régulièrement » avec le musée du Quai-Branly pour analyser d’autres œuvres. Il confirme que la technique de radiographie aux rayons X, qui fonctionne comme une radiographie médicale, « permet de connaître la structure d’une œuvre, de voir si l’objet est endommagé » ou « d’identifier des techniques d’assemblages » qui peuvent être utiles aux chercheurs.
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De manière générale, le musée du Quai-Branly signale que ses collections font l’objet d’analyses, plus ou moins approfondies, « afin d’améliorer la connaissance des objets, d’assurer leur conservation et d’accompagner leur restauration ». Le département du patrimoine et des collections du musée utilise alors ses propres outils d’examen et d’analyse, ou fait appel à des universités ou des laboratoires privés pour les examens les plus techniques.
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>> https://www.liberation.fr/checknews/la-france-garde-t-elle-des-copies-des-oeuvres-dart
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Tout cela n'a vraiment plus d'importance. Je peux a présent balancer la vérité. Personne ne le fera si ce n'est moi. Quatre mois que je me suis ramassé une branlée aux présidentielles 2012. Enfoiré de Copé ! En tout cas, personne ne sait déjà plus qui je suis. 1725 apparitions à la télé, et pas des minuscules, et le mec du péage, dans sa cabane pourrie avant-hier, qui me regarde et qui me demande si c'est pas moi qui présente "Questions pour un champion" !
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Elle avait eu un bébé et que c'était son papa qui le gardait. On lui a demandé qui était le père, elle a dit: "C'est mon frère".
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Depuis, dix ans, il porte en lui une "pulsion de mort", cherche la "sensation de tuer" et voue un culte aux tueurs en série.
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