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Citations de Abdelkrim Saifi (21)


On n’en croyait pas nos oreilles. Comment peut-on fabriquer des bombes avec des allumettes ? Une seule suffit pour allumer la mèche, mais tout le monde a des allumettes, monsieur le commissaire, le stock on l’a revendu. – Oui, mais à qui ? – On a des revendeurs, dans la rue. – Je vais vous expliquer, a poursuivi le commissaire. Vous avez livré des allumettes à la frange violente de l’ENA. Ils récupèrent le soufre des allumettes, et avec ça ils fabriquent des explosifs. Vous voyez bien que je suis au courant...
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Ça ne peut plus durer, la hogra, l’exploitation, la misère, le mépris. Nous, les indigènes, comme ils nous appellent, ne voulons qu’un peu plus de considération, être mieux traités, pouvoir nourrir notre famille. Nous avons payé le prix du sang pendant la guerre contre l’Allemagne, des hommes sont morts, d’autres sont revenus estropiés, et voilà comment ils nous traitent !
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Oui Dahmane, on préfère ignorer que notre destin n’est plus dans nos mains, ne casse pas nos rêves. Oui on reviendra, mais pas les mains vides, la hchouma, la honte. Un jour, bientôt, ou plus tard. Arrête de nous raconter notre misère, on la voit bien, elle est là, elle s’accroche, dis-moi plutôt comment gagner au tiercé, dis-moi comment avoir le courage de tout laisser et de refaire ma vie là-bas, dis-moi qu’on ne me fera aucun reproche si les enfants n’ont rien à manger, dis-moi que j’aurai une maison, que tous les arbres donneront de beaux fruits, que je serai un homme respecté.
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Les seules personnes à qui nous parlions parfois étaient des policiers ou des militaires, qui fouillaient d’abord le cabas puis nous palpaient. Ils nous regardaient toujours méchamment. À force on a fini par s’y habituer, par trouver ça normal. Yamina avait raison, Alger ressemblait au paradis, mais cela avait un goût amer, comme quand on oublie de mettre du sucre dans le thé.

 
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Ah le Selecto ! Plus tard, et pendant bien des années, il suffisait de prononcer ce mot magique pour que naisse dans les yeux de tous les enfants de l’Algérie, arabes ou pieds-noirs, une petite étincelle, comme un signe de reconnaissance, un étendard qui rassemblait tous ceux qui avaient foulé cette terre. C’était notre madeleine de Proust à nous. Il fallait le boire bien frais, laisser traîner ce goût de pomme et de caramel dans la bouche, avec des bulles pétillantes qui éclataient lentement contre le palais.
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Le temps passe, et on oubliera, c’est le proverbe arabe qui dit ça. Certains jours, les proverbes devraient se taire.
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Le mot qui revenait le plus souvent n’était pas indépendance, mais houria, la liberté. Les Arabes aspiraient simplement à être libres, et plus que tout à ne plus subir la hogra, l’injustice, l’humiliation. Nous étions en guerre, on en parlait chaque jour en France, on la vivait chaque jour en Algérie.
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Pour conjurer le sort, pour ne pas aller à l’encontre de la volonté du Maître du temps et des choses, on évitait de prédire des événements, des arrivées qui pouvaient être remises en cause par le destin.
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Elle promenait son sourire nonchalant, sûre d’elle, reine dans le gynécée, port altier et verbe cassant, et tous craignaient son jugement. Un mot, le soir, à son mari et la foudre tomberait. Un mot, le matin, et c’était l’assurance d’un cadeau quand il rentrait.
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La liberté ne sera pas offerte sur un plateau. Nous allons endurer encore beaucoup de souffrances. Mais rien ne nous arrêtera.
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Ils parlaient de la guerre, ils en étaient revenus silencieux. Ils ne comprenaient pas. Avoir risqué sa vie, chaque jour, chaque heure, chaque minute, et être autant maltraités au travail, dans les commerces, par les policiers, non, ils ne comprenaient pas.
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Il fallait de l’acier pour l’industrie, pour le bâtiment, pour l’automobile, il fallait de l’acier pour tout, et partout. Les hommes, la plupart torse nu, d’autres revêtus d’un habit pare-feu, allaient au contact, jusque dans la gueule du loup.
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À l’époque, ils nous appelaient les indigènes. Et nous, les indigènes, melina, on n’en pouvait plus. La misère, le mépris, la honte. On voulait que ça change, ne serait-ce qu’un tout petit peu. Mais ils ne voulaient rien lâcher. C’était la race supérieure. On n’avait pas de haine contre eux, absolument pas, on subissait, c’est tout. On voulait juste être mieux traités.
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Comme j’étais d’une famille connue, on m’a mis à l’école, j’ai appris à lire et à écrire. Plus grand, je me suis fait remarquer parce que je parlais parfaitement le français, sans accent, ça les étonnait. Et j’avais une belle écriture, je savais faire les pleins et les déliés, j’étais le roi de la plume Sergent-Major !
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C’était leur rire à eux, le rire des survivants. Non, pas de questions ! On ne vous dira rien ! Et ils riaient, unis dans une fraternité indissoluble. Ils avaient leurs secrets, que même Yamina ne connaissait pas. Allez, racontez !
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Sur le tourne-disque, la voix grave et puissante de Dahmane El Harrachi avait trouvé mieux que quiconque les mots pour raconter l’exil : Ya Rayah, Oh toi qui pars... Il évoquait les regrets de tous ceux qui avait pris la route, ne pensant qu’au retour. Quand il chantait, les femmes se taisaient, baissaient la tête, écrasaient parfois une larme.
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Elle refoulait la douleur, n’en montrait rien, pour préserver les vivants, comme pour empêcher la mort de rôder, Va voir ailleurs, moi j’ai donné, espérant, priant, implorant pour que les autres enfants vivent, pour qu’il n’y ait pas d’accident à l’usine, pour que la maladie ne s’attarde pas. Chaque jour elle touchait ses enfants pour s’assurer qu’ils étaient bien là, les faisait rire, c’était bien la preuve qu’ils étaient vivants.
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Tout le monde était fatigué de la guerre, on croyait que c’était fini, mais ça continuait. On racontait les rafles, les bombes qui explosent en ville, la violence des soldats. Personne ne faisait confiance à personne, on pouvait être dénoncé pour un oui pour un non, par quelqu’un cherchant à récupérer votre maison ou votre commerce.
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On ira au hammam el Salhine, les bains ancestraux, pour se purifier, pour soigner ses os ou ses états d’âme, peu importe. Il y aura toujours quelques dattes deglet el nour sur la table, et en repartant on regardera le désert, dans une solitude qui donnera l’impression que le temps et l’espace n’existent pas.
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On y avait ses habitudes, et à chacun son troquet, celui des Kabyles, celui des gens de Sétif, d’Oran, de Biskra, d’Alger. On échangeait les nouvelles du pays, on buvait du café ou de la limonade. Pour le vin ou la bière, on allait dans l’arrière-salle ou dans les chambres. Les apparences étaient sauves, même s’il fallait parfois raccompagner des amis ivres morts, avachis sur le trottoir, tard dans la nuit.
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