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Citations de Alain Defossé (21)


Un nouveau patron pour un nouveau bar. Brun, petit format, plutôt mignon, sympa. Je sais comment j’ai réagi en découvrant Didier, j’ai réagi exactement comme n’importe quel client de café-tabac, de restaurant, de ces lieux où l’on reste plus de deux minutes réagirait en voyant arriver la nouvelle patronne ou la nouvelle serveuse. C’est forcément ce que j’ai pensé, en voyant Didier pour la première fois, ce petit gars brun au sourire rouge qui s’installait parmi nous, j’ai eu forcément la même réaction qu’un macho devant une petite serveuse, parce qu’il donnait ça à voir et à ressentir, Didier, il était mignon Didier le tueur, et sympa, oui, et bien foutu si vous voulez tout savoir (…). Dans la géhenne où il brûle sans doute, Gorgones et Erinyes doivent se pousser du coude et échanger des clins d’œil quand passe le petit brun aux yeux noirs, tellement sexe, chérie, un homme, un salaud comme on les aime.
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Elle a reculé autant que possible ce moment, avec son thé, mais là elle y est, acculée à devoir identifier et dénombrer ce qu'on lui a pris, volé. Ce n'est pas un saccage. Le salon n'est presque pas dérangé, et le peu qu'elle voit de la chambre lui indique qu'il en est de même là-bas. Elle aurait presque préféré : des tiroirs renversés, des objets brisés, des déchirures, des lacérations, elle aurait presque préféré un vandalisme intégral qui aurait fait de cette mésaventure une tragédie et non un embêtement. Un scandale, pas un contretemps. Un viol, avec violences.
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Ce soir-là, j'ai été le dernier à quitter le bar et les protagonistes de l'affaire, vivants et morts. Je suis le dernier témoin.
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Tout le monde a un jour cette idée, passé un certain âge, tout le monde se dit je pourrais être un héros/ héroïne de roman, se dit-elle au seuil du réveil, un personnage plutôt, restons modeste, un personnage de roman se dit-elle en se réveillant tout à fait, et aussitôt elle se dit que tout le monde a forcément un jour cette idée, passé un certain âge, en se retournant sur sa vie : ma vie à moi est un roman, car il n’y a pas de vie non romanesque. Quoique beaucoup trop détachée de moi-même : jamais je ne me laisserais faire. Un sujet rétif, sec, une vie dissuasive dit-elle. Finalement non. Elle se lève, quitte
sans regret ce moment où l’on rêve toujours un peu sa vie, cette complaisance qui n’a pas d’âge.
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Je pourrais être une héroïne de roman. Je pourrais très bien. C’est à la portée de tout le monde d’être une héroïne. Ça ne dépend même pas de vous. Quelqu’un
vous prend, un écrivain, ou il vous invente, et fait de vous, de moi une héroïne de roman.
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Les conversations tournaient autour de ça, de cette haine qui déferlait. J'ai entendu alors, parfois, à demi-mot, évoquer des projets d’expéditions punitives.

Au hasard de brides de conversations, j'ai découvert chez certains un visage que je ne soupçonnais pas, très noir, très violent, le visage criminel qui se fait jour quand on est poussé à bout, la renaissance de la haine atavique. p 77
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J'ai commandé un tango, c'est ma consommation la plus courante. Le tango est né pendant l'Occupation, c'était la boisson des zazous. J'adore la grenadine, sa couleur et son goût de rouge à lèvres bon marché. J'en ajoute dans tout, la bière, le pastis, le lait.

Au café je ne prends pas de whisky : le sotch est pour moi une boisson de la maison, de la lecture nocturne, de la conversation, de l’écriture ou de l'amour, sa chaleur ambrée est intime. p 62

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Je ne sais pas si je fais bien, je fais ; quelque chose ne me laisse pas le choix de raconter ce que j'ai vécu face à ce qui en est dit, comme s'il l'on me forçait à avouer la vérité des autres en suscitant la mienne.
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Elle lève les yeux vers ses deux fenêtres maintenant éclairées, trop tard. Elle ne va pas se le reprocher. Si elle devait se reprocher ça , elle n'en finirait pas de se reprocher des choses, sa vie ne serait qu'un long reproche, aussi loin que ses souvenirs remontent.
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C'est la nuit. A ce rendez-vous de la nuit, je rejoins tout ce qui a sombré, les gens et moi-même. Mon passé c'est la nuit, aussi mort que les gens, de la même eau qui ne coule plus.

Pourtant je peux parler, je peux écrire de cette eau sombre, je ne fais que cela, toujours, écrire est un travail de mort, je n'ai cessé de le répéter, c'est faire de la mort avec ce qui l'est déjà, ratifier de la mort, fixer, consigner de la mort, et c'est nécessaire.

Confirmer la mort n'est jamais triste. Éprouvant, parfois, mais jamais triste. C'est donner ses lettres de noblesse à ce qui est mort p 55
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Ce qui a été tué est non seulement une jeune femme, mais tout un équilibre, un sens. Ecoeuré de doutes, je refuse à la nature même la confiance que je ne peux plus accorder aux hommes. Alors je pars.
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De la chance, quelle acceptation, quelle réflexion de victime, je suis une victime-née pour me dire une chose pareille, se faire cambrioler et estimer qu'on a de la chance que cela ne se soit pas produit avant, une parole de victime-née.
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Elle arrête ces réflexions, se force à ne pas penser, à constater: volée. Cambriolée. Cela arrive. Cela lui arrive. Ce soir celui est arrivée. C'est très froid. Un cambriolage parmi combien ce soir? Quel pourcentage de risque de cambriolage quand on habite Paris XIX e au premier étage sur cour? Énorme. Ce soir c'est elle. Pour la sensation de viol on verra plus tard. Là elle doit juste se forcer à : constater. C'est ton tour, voilà tu n'as plus qu'à constater. Alors entre, entre chez toi. Avance
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On ne sait pas pourquoi ce cambriolage fait resurgir quelque chose du passé. Peut-être est-ce un simple accroc dans une vie très lisse, qui dévoile, comme une déchirure sur un canapé montre au-dessous quel tissu le recouvrait avant, qu’il était rouge et doré avant d’être beige et neutre, que ça foisonnait au-dessous, les couleurs, les conversations, les postérieurs posés là de morts depuis des lustres, les verres qui s’entrechoquent et les drames qui se dénouent. Cette présence d’un jeune homme dans des meubles trop neufs pour une dame âgée, c’est autant d’anachronisme, du passé qui se glisse sous la porte comme un courant d’air. Cette intrusion a perturbé les ondes magnétiques du temps, si une telle chose existe, le champ magnétique qu’Anne sécrète elle-même, dans lequel elle se meut depuis si longtemps, et qu’elle veut absolument clair et vide, inexistant pour tout dire.
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Elle a l'impression de traîner désœuvrée dans un appartement qui est le sien sans l'être, alors que l'heure devrait être à l'urgence, à la fébrilité. Non, elle ne fait que constater, prendre la mesure des choses, et ces choses n'appellent aucune urgence, parce que fenêtre cassée, cambrioleur enfui, bijoux dérobés, chéquier disparu, que voulez-vous que je fasse sinon constater posément, l'affolement ne me rendra rien. Ce sentiment de paix quand un événement, quel qu'il soit, est irrémédiable. L'inverse même du danger.
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Accoudé au troisième étage, il voyait le toit noir de la Rover ralentir au pied de l'immeuble, il devinait les mains de sa marraine qui actionnaient les vitesses, le volant, les mains de Diane posées sur ses genoux ou esquissant des fragments de geste. Parfois il n'y avait aucune place, et il voyait Diane descendre et prendre pied sur le trottoir, puis l'auto noire s'éloigner, tourner dans la rue suivante. Il la suivait des yeux pendant que Diane pénétrait dans l'immeuble.
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Diane allait souvent travailler en ville. La femme blonde avait installé pour elle, dans l'arrière-boutique du magasin d'antiquités, une petite presse à gravure récupérée là quand elle avait pris le magasin, quelques années auparavant. Diane s'entraînait, cherchait, expérimentait, Diane avait une vie à elle, cela se sentait quand elle rentrait. Quelquefois la femme blonde la raccompagnait en voiture
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Jamais ils ne se sont dit, à ces moments-là, qu'un choix était fait, était en train de se faire, que ces journées de vacuité dans l'appartement prêté, à peine touché, à peine investi, étaient un choix qu'ils faisaient. Pourtant se taire était choisir, persister dans leur mutisme était choisir, ils optaient pour une vie entière avec ce même détachement qu'ils avaient pour évoluer dans les grandes pièces jamais vraiment rangées, jamais vraiment en désordre non plus, entre les meubles en déshérence.
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Ils ont investi les lieux sans vraiment les toucher, sans se laisser toucher, sans mouvement aucun. Du grand appartement, ils ont fait une sorte de radeau des Enfants terribles, dans une magie quotidienne, sans rire, comme le font les très jeunes gens. Ils se levaient tôt et se couchaient tard, même quand ils n'avaient rien à faire. Ils faisaient l'amour dans une chambre donnant sur le boulevard, éclairée par les réverbères, emplie des échos de la circulation, fumaient des cigarettes accoudés au rebord du bow-window. Ne donnaient pas de nouvelles, n'en recevaient pas.
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Ce sont de ces guérets que naît la maladie de l'âme, c'est dans ces fermes basses, boueuses, où cohabitent le silence et les secrets, que fermentent les mésactions familiales, de génération en génération, qui nourrissent les actes criminels, les désertions de soi-même, emplissent les dispensaires psychiatriques où se presseront, en blouse blanche, les jeunes filles de la région, à qui cette idée vient tout naturellement p 73
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