Depuis deux siècles, un fleuve souterrain traverse la France politique. Il se nomme le bonapartisme. Non pas qu’il s’agisse du culte ou de la nostalgie d’une dynastie. Personne ne rêve de porter sur le trône le prince Napoléon.(...)
En revanche, le bonapartisme est bien vivant dans une littérature immense, inépuisable, toujours renouvelée avec des bataillons et des régiments de lecteurs. Mais surtout, et c’est là le point, dans un tempérament national, un instinct populaire, un sentiment, une frustration, un espoir, celui d’une autorité légitime, démocratique cela va de soi mais ferme : celui d’un homme providentiel, au moins le temps de son irruption, d’un dirigeant charismatique, inattendu, atypique, romanesque. D’un pouvoir capable de rêver et de faire rêver, de marquer et de peser, de surprendre et de choquer. (...) Quelqu’un qui redonne de la chair et de l’ambition à la politique, qui incarne, qui bouscule, qui peut séduire ou décevoir, gagner ou perdre. Mais rompre, oser, choisir.
Depuis le consulat, des hommes de cette trempe, audacieux, déterminés, non conformistes, hétérodoxes, faits pour les diagonales insolites plutôt que pour les avenues rectilignes, tantôt fêtés, tantôt rejetées, tantôt célébrés, plus souvent démythifiés, la France en a connu une dizaine, parfois venus de la gauche, généralement ancrés à droite, aimant commander mais s’inclinant devant le suffrage universel. Ce sont eux qui incarnent, en le sachant ou sans le savoir, les éternelles résurgences du bonapartisme. Ils n’en portent pas les couleurs mais ils en font revivre le tempérament et, au moins un temps, la popularité ambiguë. Leurs points communs sont l’autorité et la hardiesse, des chemins de traverse qui frôlent les crevasses et les précipices. (...) Séduisants et dangereux, conquérants et téméraires.
La Chine justement, bien plus méthodique et beaucoup moins carnavalesque, menace L'Europe d'une tout autre façon. Elle envahit son marché, prend de plus en plus possession de ses meilleures entreprises et même de ses ports et de ses aéroports, elle distance technologiquement le Vieux Continent, chaque année d avantage.