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3.3/5 (sur 22 notes)

Nationalité : États-Unis
Né(e) à : Tucson, Arizona , le 17/08/1982
Biographie :

Amelia Gray est l’autrice de cinq livres, dont récemment Isadora (FSG). Ses textes fictionnels et ses essais ont notamment été publiés par The White Review, The New Yorker, The New York Times, The Wall Street Journal, Tin House, et VICE.

Elle a été finaliste du PEN/Faulkner Award for Fiction pour son premier roman "Menaces".

Elle vit à Los Angeles.

L’écriture d’Amelia Gray se nourrit de son travail remarqué de scénariste pour les séries Mr. Robot et Maniac.

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VLEEL Acte II Rencontre littéraire avec 6 éditeurs qui présentent leur rentrée littéraire 2022


Citations et extraits (62) Voir plus Ajouter une citation
Elle croit que ses souffrances seront récompensées par la gloire, que la joie et la douleur trouveront un équilibre sur la balance de sa vie, mais elle se trompe. Le bonheur ne se gagne pas. Nous tombons dessus tels des ivrognes, avant de retrouver notre contenance et de poursuivre notre chemin en titubant, à la recherche du monde entier comme on danse.
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Je trouvais que l’empathie était une compétence belle et précieuse, et j’essayais de la pratiquer au moins une fois par jour.
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La femme et l’homme dînent en tête à tête pour la première fois. Un dîner en tête à tête ! La femme essuie une trace de rouge à lèvres sur son verre d’eau. L’homme fait tourner son couteau à beurre dans sa main encore et encore et encore et encore. Tous les deux ont envie d’aller aux toilettes. Pourquoi est-ce toujours comme ça pendant les dîners en tête à tête ? L’homme s’excuse. Restée seule à la table, la femme se gratte l’avant-bras un peu trop fort et arrache un lambeau de peau avec son ongle. Elle essaie de le replacer mais n’y parvient pas, même en plaquant la main dessus. Il s’enroule sur lui-même comme la pelure d’un crayon. La femme est consternée. Au retour de l’homme, elle glisse les mains sur ses genoux. Il tire sa chaise et s’assoit lourdement.
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Franny ne lui avait jamais reproché ses moments de confusion. Un jour, un groupe de geais querelleurs les avait stoppés dans leur promenade. Deux des oiseaux se tournaient autour, louvoyant et s’esquivant, se becquetant les ailes avant de reculer. Ceux qui les entouraient poussaient ensemble une sorte de violent bruit d’eau. Leurs ailes bleues étaient déployées, comme si quelqu’un avait laissé tomber son écharpe au sol. Ils évoluaient en ligne serrée autour des combattants au centre.
Elle lui avait pris la main : « Tu es au milieu de la route », avait-elle dit.
Il savait qu’avec Franny il s’était trouvé quelqu’un de bien. Après seulement quelques mois de rencards au cinéma, ils avaient annoncé leurs fiançailles. Ils avaient invité le père de David au restaurant et lui avaient appris la nouvelle au moment où les plats arrivaient. Le père de David songea à quel point Franny était grande, à quel point elle était plus grande que son fils. Même avec les deux assis en face de lui à table, il pouvait voir les fines lignes droites de la colonne vertébrale de Franny qui la faisait se dresser plus haut que son pauvre fils de trente ans, avec sa calvitie précoce, qui se battait contre un bout de viande avec le côté de sa fourchette. Franny avait l’air plus forte et plus vieille et plus intelligente que son garçon. Avec son couteau à beurre, et sans rompre le contact visuel avec le père, elle poussa le petit morceau de steak errant sur la fourchette tâtonnante de David. « Quand même, pensa le père de David, épouse une colonne bien droite et elle deviendra le bâton sur lequel t’appuyer. »
Ce sont les patients réguliers de David qui posèrent le plus de questions. Il y avait ses amis d’enfance, Samson et l’autre, celui dont David n’arrivait jamais à se souvenir du nom, même lorsqu’il avait son dossier contenant près d’une vie entière d’historique dentaire ouvert sur les genoux. David était resté en contact avec ses vieux amis qui venaient le voir tous les ans pour leurs bilans. Ils discutaient en général des petites victoires et des défaites ordinaires des équipes de sport locales. Ses assistantes laissèrent fuiter la nouvelle des fiançailles, avant de persuader David de leur montrer une photo de sa future mariée. Après cela, tout le monde voulut en savoir plus sur sa poigne, sur ses talents de cuisinière, et si elle pouvait les aider à porter une table en chêne au troisième étage.
Les questions qu’on lui posa furent directes mais pour l’essentiel polies. Un patient qui travaillait à la faculté d’art de l’université locale lui demanda s’il pourrait utiliser Franny comme modèle pour son cours de dessin vivant, estimant que son anatomie offrirait ainsi une interprétation visuelle simplifiée.
« Elle est massive », dit un oncle du côté de son père qui venait le voir tous les deux ou trois ans pour ses dents et qui avait reçu un email des assistantes avec une image en pièce jointe. « Je ne dis pas ça méchamment », insista-t-il par-dessus les bruits d’aspiration.
David savait que ses patients et sa famille essayaient simplement de résoudre le mystère physique qu’était Franny. Mais la vérité est qu’il s’était toujours considéré comme un homme de taille moyenne, jusqu’à ce qu’il la rencontre et se rende compte à quel point il était petit. Une perspective qu’il appréciait.
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Le scotch qui entourait le paquet était doublé de ficelle cirée. David glissa ses ongles sous le bord du ruban adhésif et essaya de tirer. Il n’avait aucune envie d’aller chercher un couteau à la cuisine, et préféra perdre du temps à examiner chaque recoin du colis pour trouver l’extrémité qu’il allait pouvoir décoller. À l’intérieur se trouvait une boîte en polystyrène, fermée elle aussi par du scotch épais. Un reçu était attaché au couvercle, indiquant des frais de crémation de 795 $, des frais d’emballage de 25 $ et des frais de livraison de 20,95 $.
Le colis faisait une cinquantaine de centimètres carrés. Il était criblé d’autocollants rouges avec un dessin de verre brisé imprimé dessus. L’adresse de retour était celle d’un funérarium de la ville. David posa le colis sur la table basse entre les magazines de cuisine de Franny et un tas de vieux journaux. Certains des mots croisés terminés dataient d’il y a plusieurs semaines, plusieurs mois peut-être. Franny avait l’habitude de lire le journal et David de remplir les mots croisés. Il emporta les journaux au sous-sol et les empila dans un coin reculé.
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David connaissait bien le déclin. À la mort de son père, le sous-sol de la maison en avait été la victime tacite. Son père avait pris l’habitude d’y descendre même quand il avait eu du mal à marcher, s’accrochant à la rampe et s’arrêtant à chaque marche pour souffler, examinant les imperfections sur le mur. Quand il réémergeait, il disait parfois « Sous nos pieds et hors de nos têtes », mais finissait toujours par y retourner. Pendant ses derniers jours, David entendait son père au sous-sol presque tous les soirs. On aurait dit qu’il fouillait des cartons et qu’il enfonçait des clous dans des planches.
Après sa mort, le sous-sol s’était vu submergé par le laisser-aller. Cet endroit composé d’une chambre d’amis, d’une salle de bains, d’un salon, d’un atelier, et d’une remise sur dalle de béton, s’était transformé en une seule et même entité dévastée. De la poussière s’échappait des aérations encombrées, se déposant en fine couche sur les outils de l’atelier. La chambre d’amis débordait de pourritures. Dans la salle de bains, l’eau des toilettes s’était évaporée en laissant une ligne minérale dessinée sur la céramique. Un oiseau avait construit son nid dans la fenêtre fissurée du sous-sol et des brindilles étaient éparpillées au sol. Sans autre source d’air, la moisissure avait envahi les murs humides. Les tuyaux abritaient tout un écosystème de rouille. Une unique pousse verte émergeait de la bonde du lavabo de la salle de bains. Les murs semblaient recouverts d’un duvet. Les cartons étaient ramollis par l’humidité. Dans la chambre d’amis, un tas de feuilles ressemblait à une bauge d’écureuil. Le placard de la chambre renfermait des manteaux rendus légers par le travail des mites. Sur une étagère de la remise, l’une des conserves de pêches avait éclaté et laissé couler son contenu le long du mur, attirant des fourmis, qui avaient alors attiré des lézards, qui avaient attiré un chat, entré là en déchirant l’une des moustiquaires et laissant derrière lui les queues tortillantes de ses proies. Le chat avait quitté les lieux avant que David ne découvre les dégâts, laissant malgré tout l’odeur chargée d’ammoniaque de son urine sur une pile de livres de cuisine dans un coin de la remise. David les recouvrit avec d’autres livres de cuisine, qu’il avait descendus de la cuisine parce qu’il ne voulait plus les voir. Une inondation suite à l’explosion d’un chauffe-eau avait finalement permis d’unifier le tout en une couche solide et pourrissante.
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Les hommes ne méprisent rien tant que leur propre confort et détestent les femmes qui, dans leur vie, le leur offrent. Ils attendent de leur épouse la sécurité et des autres femmes le danger, sans se rendre compte que toutes risquent la mort à fréquenter des inconnus et passent donc leur vie à tenir ces menaces à distance, une tasse qui ne doit jamais se renverser sur les hommes qu'elles aiment, lesquels pendant ce temps les détestent pour ce qu'elles feignent d'être. La maternité est une situation encore plus sombre, car la mère laisse grandir dans son corps l'architecte de sa propre fin ; l'enfant qui ne la tue pas en couches lui brisera plus tard le cœur. Les hommes, eux, doivent se fabriquer le genre de danger qui se présente sans relâche aux femmes.
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Je leur ai appris à écouter le point qui pulse sous leurs côtes, à se déployer à partir de lui comme une bannière, je leur ai appris à courir et à bondir, à se changer en colonnes si parfaites qu'ils pourraient durer toujours. Je leur ai appris à consommer la beauté, à l'accueillir en eux et à fabriquer la danse que cette beauté leur avait offerte, un art qui n'existe que comme la beauté seule peut exister, en tant que la vie elle-même rassemblée dans un instant. Je leur ai appris tout cela, mais je ne leur ai jamais appris à nager.
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C'était une saison particulièrement bonne pour la danse, et on sentait en ville que si les choses continuaient ainsi, nous finirions peut-être l'année par d'incalculables progrès dans les domaines de l'art et de la science, progrès qui nous projetteraient dans l'ère de la dignité humaine et de l'amour. Je me produisais au centre de la grande salle de la Gaîté-Lyrique, le public debout autour de moi. D'immenses fenêtres ouvraient sur la neige, et l'étoile de boussole gravée dans le bois me donnait l'impression de danser sur une carte du monde.
Je dansais sans doute sur du Chopin, car à l'époque il n'y en avait que pour Chopin. Avant que le pianiste ne se lançât, j'aimais rester debout une minute en silence, afin de m'imprégner de mon public et de respirer avec lui. J'espérais que tous auraient le sentiment que j'improvisais spécialement pour eux, alors que j'avais en réalité pratiqué chaque mouvement en séquence pendant des semaines, même ma façon d'aller me mettre en position et l'aisance avec laquelle je demandais au pianiste un certain mouvement ou une certaine cadence.
L'impression de spontanéité finit d'ailleurs par faire bien son œuvre, de sorte que je me sentis peu à peu trop obligée de prouver ma propre maîtrise, ce qui fit perdre à toute l'entreprise une partie de sa magie, mais ce fut bien après cet hiver de 1909, où la magie était présente à profusion.
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Au chevet d'Isadora à Corfou, où la maladie, joviale, menace de la faire chavirer

Si j'avais eu tort tout ce temps et qu'il existe bien une vie après la mort, je peux divertir l'équipe céleste des heures durant en leur décrivant dans le moindre détail cette chambre de quatre sous. Un mobilier tristounet entoure le lit, et même si l'hôtelier a fait grand cas de la salle de bains privée, j'aimerais autant prendre mon bain devant tout le monde si cela peut me donner des témoins pour les araignées. La salle de bains n'est équipée que d'une seule fenêtre hublot, à peine assez grande pour que je puisse y passer le bras. Dehors, les goélands plongent en diagonale vers l'abîme et en remontent avec des bouts de poisson ensorcelé.
Peut-être suis-je en convalescence en enfer, dans un cercle de la souffrance où les damnés battent les tapis avec des raquettes de tennis et poussent des chariots de bois par les chemins pavés tandis que geint inlassablement une insignifiante sirène, et à l'instant où cela me devient insupportable, la sirène s'éteint en un gémissement déçu et le ferry baisse sa passerelle pour le débarquement des passagers. Le charme de ce port s'est tari moins d'une heure après notre arrivée et à présent, au bout d'un mois, j'aimerais autant être roulée en boule dans une eau fangeuse au fond d'un puits.
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