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Critiques de Andrés Barba (29)
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Vie de Guastavino et Guastavino

Les fetes de fin d'annee et toute l'agitation autour. Le peu de temps que j'ai pu consacrer a la lecture je l'ai mise (accent aigu) sur ce livre, tres court, que j’ai devine leger, facile a digerer (contrairement aux repas).





C'est l'histoire d'un entrepreneur espagnol qui est devenu un des grands constructeurs de New-York au debut du XXe siecle. Rafael Guastavino, qui avec son fils (aussi appele Rafael) a amene aux USA la technique, vieille comme le monde, de la “voute catalane” une voute en briques incombustibles qui peut malgre sa legerete supporter un poids enorme, et l'a brevetee, profitant de l'ignorance et de la naivete des americains. Avec ce systeme de voute il a donne au monde des joyaux comme la Grand Central Station, le pont de Queensboro et son Bridgemarket, la cathedrale St John le theologien a Manhattan, le Grand Hall d’Ellis Island, l’hopital Mount Sinai, la grande synagogue Emanu-El, et hors New-York la Cour Supreme et et le Smithsonian Museum a Washington, la bibliotheque municipale de Boston, l'academie militaire de West Point, et j'en passe.





L'auteur nous le presente d'abord comme un escroc ayant fui l'Espagne apres avoir vole 40.000 dollars, puis comme un obsede par son travail, veritable workoholic.

Sa vie est tres interessante mais le livre m’a donne l’impression d'un article Wikipaedia elargi. Comme pour allonger la sauce (decidement les repas des fetes inspirent ma prose…) l'auteur s'implique enormemement, imaginant, devinant des pensees, pressentant des mobiles. Il s'adresse au lecteur, evoquant les difficultes d'ecrire une vraie biographie, en fait la difficulte de savoir ce qu'a pu etre une vie, et plaide pour un va-et-vient entre narration historique et pure fiction. Il n'est pas le premier a faire cela, il m'a rappele entre autres Marcel Schwob, mais il exagere, il martele cette these sans arret et a provoque en moi une indigestion (ce ne sont plus les repas mais les agapes). Des exemples? “Nous ne savons rien, l’histoire est mensongere”, “Ce qui suit, nous pouvons l’imaginer avec ou sans brume”, “Le petit-fils insiste sur la dignite et le courage de cet enfant de neuf ans qui fut son pere. Encore que, pour croire completement ce recit, le narrateur devrait se defaire un peu du depit et le lecteur du scepticisme. Nous, cependant, nous le croyons", “Nous imaginons, parce que nous sommes de nature cruelle”, “Nous voulons croire que ce soir-la on ouvre une bonne bouteille a la maison et que le fils recoit des tapes de felicitations sur son dos”.

J’arrete la, mais il y en a beaucoup d’autres. Dans cette tres courte biographie romancee l'auteur passe le plus clair de son temps a se regarder en son miroir. Et cela a fini par me devenir enervant. Alors pour le rappeler a l'ordre, en esperant qu'il va se reprendre a l'avenir, je le renvoie faire signer ses parents son bulletin avec ma note: deux etoiles et demie.

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Une république lumineuse

En 1993, dans une ville en bordure d'une jungle sud-américaine et d'un fleuve boueux de 4 kilomètres de large, la torpeur tropicale est troublée par l'apparition d'une trentaine d'enfants, âgés de 9 à 13 ans. Qui sont-ils, d'où viennent-ils, quelles sont leurs intentions ? Leur arrivée au compte-goutte passe d'abord relativement inaperçue, juste quelques mendiants de plus aux carrefours. Mais peu à peu, la cohésion de leur groupe, sans hiérarchie claire, interpelle les habitants, qui ne tardent pas à s'apercevoir que ces enfants parlent un langage incompréhensible. Après l'étonnement vient l'inquiétude, en même temps que les premiers pillages et agressions, avant le choc de la tragédie. Car on sait dès le départ que cela finira mal, la première phrase du roman indiquant que les 32 enfants vont mourir.



Le narrateur de cette catastrophe annoncée est un fonctionnaire des services sociaux de la ville, qui nous raconte, 20 ans après, le fil des événements. Jeune bureaucrate à l'époque, aux premières loges du drame de par son travail, il revient non seulement sur les faits eux-mêmes, mais aussi sur les interprétations et les théorisations qui en ont été faites, sur le ressenti des différents protagonistes (y compris le sien), sur la gestion politique des événements et le battage médiatique qui les a entourés, sur le traumatisme durable qu'ils ont créé dans la région. Il s'interroge aussi sur le trouble et le malaise provoqués par l'apparition soudaine de ces enfants sauvages, qui ne correspondent pas à l'image de l'innocence qu'on associe généralement à l'enfance, sur l'influence qu'ils ont pu avoir sur les enfants de la ville et sur le regard que les adultes portent désormais sur eux.



Tendu inconfortablement entre innocence et perversité, entre civilisation et état de nature, "Une république lumineuse" est l'histoire d'une tentative vaine et tragique de sécession d'un groupe d'enfants qui refusent d'entrer dans le monde des adultes, créant une sorte de communauté instinctive, pour le pire plutôt que pour le meilleur, dès lors que la confrontation de ces deux conceptions de la vie est inévitable.



Pioché presque au hasard (mais y a-t-il un hasard?) sur une table de librairie, cette fable cruelle et émouvante est une très belle découverte. Porté par une écriture puissante et remarquable, ce texte, entre chaos originel et ordre établi, interroge sur l'enfance et ses symboles.
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Une république lumineuse

Un très bon livre !

L'enfant est-il innocent par nature ? Voilà le dilemme auquel est confrontée la petite ville de San Cristobál où trente-deux gamins ont saccagé un supermarché, tuant deux grandes personnes par la même occasion. Répondre oui, c'est semer le trouble dans les consciences, remettre en question une éducation qui voit dans l'enfant un être pur à modeler. Répondre non, c'est en faire des adultes, s'autoriser les pires extrémités et perdre ainsi son humanité. Ignorant la réponse, les protagonistes de cette histoire sont incapables d'imaginer la réacton la plus adaptée. Avec cette tragédie, Andrés Barba revisite l'affrontement nature-culture, convoque en ordre dispersé Rousseau, Voltaire et tous ceux (Golding, Defoe, Tournier, Kipling, Burroughs) qui se sont demandé ce que l'homme deviendrait s'il n'était pas élevé par ses semblables, sans repères, livré à lui-même, n'ayant pour référent qu'un environnement vierge de civilisation. Andrés Barba interroge aussi : « l'homme a humanisé systématiquement ce qu'il ne pouvait pas comprendre, des planètes jusqu'aux atomes ».

Tout aussi intéressants, les états d'âme du narrateur, le jeune fonctionnaire qui se retrouve en première ligne. La chienne errante qu'il manque d'écraser au début du roman, la fille de sa compagne qui se dérobe à son empathie, le monstre invisible de ses peurs et de ses fantasmes… tout le ramène au perturbant mystère de ces gosses indomptés, si déterminés dans leur désir de liberté qu'ils ébaucheront leur propre société (avec sa langue et ses codes).

À lire d'urgence. Une fois de plus, le salut du roman vient de l'étranger.

Bilan : 🌹🌹🌹
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Les petites mains

Après un accident de voiture, Marina, 7 ans, se retrouve à l’orphelinat.

« Mon père est mort sir le coup, ma mère ensuite à l’hôpital »

Voilà la phrase qu’elle répète le plus souvent.

Entre fascination et rejet, ses camarades se conduisent étrangement.

Quel roman bizarre, entre hyperréalisme et irréalité.

C’est comme un rêve qui parfois vire au cauchemar et met mal à l’aise.

Mais c’est tellement bien écrit qu’on adhère sans réserve.

Une grande poésie émane dans une ambiance plutôt lourde.

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Une république lumineuse

Je suis ébahie.



Il y a longtemps que je n'ai pas lu un roman comme "Une république lumineuse".



L'auteur en est Andrés Barba, et il a été édité en langue originale (espagnol) en 2017.



Sa traduction en français par François Gaudry est parue en 2020.



On peut le lire comme un récit d'aventures ou l'allégorie d'une utopie politique ; il est parsemé de considérations sur la formation des langues, l'univers de l'enfance, sur la vie des municipalités, sur le rôle du déni dans la cohésion sociale.



Parmi les questions fondamentales qui reviennent comme des leitmotivs, il en est une, lancinante : qu'est-ce que l'innocence ? A-t-elle des liens avec la cruauté ? La question de la conscience morale est abordée en filigrane dans toute l'oeuvre : peut-on trahir ses idéaux pour la survie d'une communauté ?



Et de temps à autres surgit une révélation comme celle-ci : " Je compris que le désir d'intimité des enfants s'apparente à un appel au secours".

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Tout commence à San Cristobal, une ville tropicale d'Amérique latine de deux cent mille habitants bordée par un fleuve de quatre kilomètres de large et administrée par un maire populiste.



Le narrateur est le directeur attaché aux affaires sociales de la ville (le choix de sa profession n'est pas un hasard et rend l'histoire plus percutante encore). Il assiste avec toute la population locale, à l'apparition dans les rues d'enfants livrés à eux-mêmes, parlant une langue inconnue et ne semblant obéir à aucune hiérarchie. Ces enfants vivent de mendicité et de rapines et se livrent à des actes de déprédation de plus en plus violents, jusqu'à attenter à la vie des habitants.



La terreur monte, la paix sociale est en danger. Il faut agir.



Ce récit ménage une belle surprise, dont je ne parlerai pas, mais qui m'a émerveillée.



Il est triste aussi.



Mais il est génial (mot dont d'habitude je n'abuse pas, mais là, vraiment...)



L'auteur est né en 1975 à Madrid. Il est également scénariste et photographe. Il est couvert de prix et excelle, selon le journal le Monde "à dépeindre le flou des frontières entre innocence et perversité".



Je me mets en quête d'autres livres d'Andrés Barba.



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Une république lumineuse

San Cristobál petite ville d’Amérique latine, écrasée par la chaleur, bordée par la jungle d’un côté et un fleuve de l’autre (dont la légende dit que c’est la terre qui s’est mise en mouvement).

L’auteur jeune fonctionnaire, alors fraichement arrivé, se souvient.

Des enfants sont apparus en ville.

Au début, on n’y prête guère attention.

De pauvres indigènes venus probablement de la forêt…

Mais petit à petit, on les remarque : leurs jeux, leur origine, leur langue (on ne les comprend pas).

Qui sont-ils ?



Petit à petit, les évènements échappent aux adultes de la ville jusqu’au drame.

Dans cette atmosphère poisseuse, la vie perd de sa rationalité.

Fascination, incompréhension, répulsion, attraction, se mêlent dans un écheveaux qui devient inextricable.



Un thème parcourt tout le court roman : l’innocence.

Pourquoi des jeunes enfants (ils ont entre 8 et 13 ans) innocents, vierges se couperaient-ils de la société ?

Pour fonder autre chose ?

Et les adultes si organisés, rationnels, le sont-ils vraiment, innocents ?



Il flotte dans l’atmosphère humide comme un parfum de folie, de déraillement.

Tous les mystères ne seront pas révélés. Il restera quelque chose d’insaisissable, d’étranger, de pur, de libre.

Et la liberté au fond terrifie la vie bien rangée de cette petite ville.



En conclusion



Un fascinant et mystérieux roman à l’atmosphère humide et chaude.
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Les petites mains

Effrayant petit roman extrêmement poétique.



Je ne me souviens pas d'avoir lu quelque chose d'aussi étrange, sinon dans la littérature sud-américaine. Or Andrés Barba est un auteur espagnol.



Une enfant de sept ans, Marina, perd ses parents dans un accident de voiture et entre à l'orphelinat.



Cet orphelinat est un monde où les pensionnaires et la nouvelle arrivante lient des accords charnels et diaphanes. Elles détruisent la poupée de Marina, qui se trouve ainsi livrée au monde sans confidente ni protectrice, rejetée de toutes, et les fascinant à la fois. Pour survivre, elle entraînera ses camarades, "les petites mains" dans un jeu cruel et pervers où chacune à tour de rôle se transformera en poupée à qui tous les secrets pourront être livrés et tous les traitements administrés ; jusqu'à ce que mort s'ensuive, symbolique ou réelle ? On ne sait.

Un jour (ou plutôt une nuit, puisque le jeu se pratique la nuit) ce sera à Marina d'interpréter son propre rôle : celui d'une poupée christique, destinée à absorber la noirceur du monde.



Le jeu n'est pas sans danger. C'est une question humaine de survie, de rédemption et de passage.



C'est vraiment très beau et très noir. Mais on ne peut pas dire que ce soit chimérique : nous sommes toutes des "petites mains" dans un jeu aux correspondances multiples.

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Les petites mains

Une fillette de sept ans perd ses parents dans un accident de voiture, dont elle-même réchappe. Elle se retrouve dans un orphelinat.



Et c'est comme si elle amenait avec elle obscurité et perversion. Sans qu'aucun adulte n'intervienne.



Je n'ai pas aimé. Heureusement, c'était court.
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Une république lumineuse

Le narrateur d'Une République lumineuse, jeune fonctionnaire des services sociaux qui travaille à l'intégration des communautés indigènes, fraîchement promu et marié, arrive dans la ville de San Cristobál avec sa femme et la fille de celle-ci pour y prendre le poste de directeur des services sociaux.



Ville à l'ambiance humide et étouffante située au bord du Río Eré, fleuve de quatre kilomètres de large, et d'une forêt impénétrable, San Cristobál pourrait être argentine ou brésilienne si elle n'était imaginaire. La routine de cette ville provinciale de deux cent mille habitants va se dérégler avec l'arrivée d'un groupe de trente-deux enfants âgés aux origines inconnues, s'exprimant dans une langue incompréhensible. Leur comportement indomptable va rapidement devenir dangereux. Et pourtant la violence de ces enfants âgés de neuf à treize ans, bientôt meurtrière, apparaît comme naturelle, loin de la sauvagerie froide des enfants chez J. G. Ballard, et leur bande sans hiérarchie ni morale semble guidée avant tout par le plaisir instinctif de vivre et de jouer.



Enfants volés, enfants évadés ? Certains affirment qu'ils ont « surgi » du fleuve ; ils apparaissent et disparaissent avec la rapidité d'un vol d'étourneaux. L'épaisseur insondable de la forêt et le flux incontrôlable du Río Eré sont aussi la métaphore d'un sens qui échappe, celui des agissements des enfants.



« Les discours sont une chose, les faits en sont une autre. Deux jours plus tard, j'ai assisté à la première des nombreuses agressions. J'étais sorti me promener avec Maia et nous les avons rencontrés en traversant le petit parc de la colline. Ils étaient six, la plus âgée devait avoir une douzaine d'années. Assis à côté d'elle sur un banc, deux garçons qui se ressemblaient, peut-être des jumeaux, de dix ou onze ans, et deux filles assises par terre qui paraissaient jouer à tuer des fourmis. Tous avaient cette saleté qu'ont parfois les enfants indigents des grandes villes. La même attitude aussi. Ils semblaient distraits, mais en réalité ils étaient aux aguets. Je me souviens que l'aînée portait une robe ocre brodée de dessins sur la poitrine – des arbres ou des fleurs – et qu'elle me jeta un regard méprisant.

À une trentaine de mètres, une femme d'une cinquantaine d'années traversait le parc avec des sacs à provisions. Un instant tout parut immobile. Je me rendis compte que Maia et moi tentions d'affronter mentalement la sensation que quelque chose d'inévitable allait se produire. L'aînée des filles se leva. Malgré sa tenue dépenaillée, elle avait une espèce de fluidité féline et cette grâce que le corps ne dégage qu'avant l'adolescence. Elle fit signe aux enfants autour d'elle et, sans un mot, ils s'approchèrent rapidement de la femme. »



Écartelés entre leur perception de l'innocence de l'enfance et la sauvagerie grandissante des actes, la familiarité et l'étrangeté cohabitant chez les membres de cette bande qui finit par influer sur le comportement de leurs propres enfants, les adultes de San Cristobál sont hésitants, paralysés ou bien tentés immédiatement de recourir à la force pour rétablir l'ordre – raisonnements et éthique des adultes qui interrogent souterrainement le mythe de l'innocence des enfants comme l'ambiguïté des réactions face à la violence dans nos sociétés.



La forêt épaisse qui borde la ville apparaît comme le lieu du cauchemar des origines où s'engendrent les monstres. L'atmosphère inquiétante de puissance végétale et aquatique qui entoure San Cristobál, familière aux lecteurs de Wilson Harris ou de Juan José Saer, la narration a posteriori puisque les faits évoqués par le narrateur se sont déroulés vingt-deux ans auparavant, en 1993, établissent d'emblée un rapport de mystère et d'incompréhension, d'une histoire qui ne pourra être saisie que de manière parcellaire par le narrateur et par le lecteur. Ce mystère est accentué par la forme du récit, où les rumeurs et les faits précis – date des faits de mendicité infantile et des premières agressions commises par les enfants, de l'attaque du supermarché Dakota, références détaillées aux articles, essais et films consacrés ultérieurement à cette histoire – semblent se heurter au mur des gestes et des mots indéchiffrables de la bande des trente-deux.



« Une des choses les plus tragiques des agressions est qu'elles ont laissé très peu de traces acoustiques. On peut entendre les voix dans quelques enregistrements de l'attaque du supermarché Dakota. On dirait des trilles d'oiseaux inintelligibles, comme le bourdonnement dans la forêt, mais il suffit de fermer les yeux pour percevoir que la musique de leurs échanges compose ce qui pourrait être la conversation d'enfants ordinaires : la cadence des exclamations succède à celle des plaintes, les affirmations catégoriques aux acclamations, les questions alambiquées aux réponses. Et la joie, comme si ces enfants avaient trouvé un secret de la joie qu'ils avaient du mal à trouver chez les enfants normaux. En écoutant ces rires, on a la sensation que le monde a été compensé par quelque chose, juste par la vertu de ce son. Mais nous ne comprenions pas un seul mot. »



La fin tragique de ce roman symbolique et déstabilisant publié en 2017, le septième livre de l'écrivain madrilène traduit en français par François Gaudry, à paraître prochainement chez Christian Bourgois éditeur, laisse une trace profonde, comme une fable sous tension dont l'écho contemporain résonnera longtemps chez la lectrice et le lecteur.



Retrouvez cette note de lecture et beaucoup d'autres sur le blog de la librairie Charybde :

https://charybde2.wordpress.com/2020/04/05/note-de-lecture-une-republique-lumineuse-andres-barba/
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Versions de Teresa

Presque un chef d'oeuvre ! J'adore... Sujet rude, mais c'est si intelligent ! A lire, lire et relire.....
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Une république lumineuse

1993 : une époque pas si lointaine et pourtant révolue : pas de smartphones, d'information en continue, de connexion permanente.



C'est à cette époque que le narrateur arrive dans la ville de San Cristobàl, probablement en Amérique du Sud, en tant que fonctionnaire aux affaires sociales.



Il pensait lutter contre les inégalités frappant les communautés indigènes, pourtant une autre urgence se dessine.



Car des enfants arrivent en ville, comme recrachés par la forêt, avec leur langage incompréhensible et leur violence...



Pour évoquer l'atmosphère de ce roman, nul besoin d'évoquer la moiteur du climat, les eaux boueuses du fleuve Eré ou l'étouffante forêt.



Il suffit de regarder cette magnifique couverture, sombre représentation de la forêt, comme un pied de nez au titre du livre, percée de points lumineux.



Des yeux d'enfants mais inquiétants car différents. Ces enfants qui affluent à San Cristobál ne sont pas soumis et humbles comme les plus pauvres mais ils mendient avec la morgue des souverains. Ils ne supplient pas, ils revendiquent par la violence ce dont ils ont besoin.



Le livre oscille tout au long entre réel et fantastique, chaque lecteur pouvant choisir à son gré l'une ou l'autre explication.



Andrés Barba offre un roman aux multiples questions auxquelles bien peu trouveront une réponse certaine.



Au final, ce récit est, avant tout, une plongée dans l'enfance. Nos chères têtes blondes sont-elles aussi innocentes que nous aimerions le penser ? Et nous, adultes, comment réagissons-nous face à une violence qui nous paraît si inconcevable chez de jeunes enfants ? À vous de le découvrir...



Ce roman, loin de mes lectures habituelles, a été une belle découverte. Sans être un coup de cœur, j'ai été entraînée par son atmosphère si sombre et entêtante.
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Une république lumineuse

La forêt est dense. Épaisse.

Assoiffée. Asphyxiante.

Un monstre vert. Impénétrable.

La chaleur est lourde. Humide.

Le soleil est écrasant. Infernal.

La forêt pèse de tout son poids protecteur dans une langue mélancolique.

Sur des enfants.



La forêt les avale. Elle les engloutit dans une dimension fantasmagorique pour les recracher en une réalité violente.

Anarchique. Désorganisée.

Un chaos sanglant et meurtrier.

Les enfants sont nulle part. Ils sont partout.

Ils sont le futur, une nouvelle civilisation engendrée par la nature, dotée d'une langue propre.

Un code pour se comprendre, pour comprendre; ordonner la pensée pour organiser le chaos.



Les enfants communiquent par un code: une nouvelle langue pour appréhender le réel. Pour nommer ce qui n'a pas encore été nommé. "Une langue magique où les noms des choses surgiraient spontanément de leur propre nature."

Une langue pour donner réalité, le langage pour octroyer un destin.

Le mot pour prouver l'existence des faits.

Des faits anciens , contés par un narrateur acteur d'un passé traumatisant.

Des évènements tragiques narrés par le truchement d'articles , de revues de presse, de témoignages et d'essais.

L'écrit comme preuve , clé de compréhension quand faits et langue s'articulent dans une logique de réciprocité.



Or si la langue, écrite et orale, donne réalité aux faits, les enfants SONT langage.

Davantage que leurs actions et leur mode de communication, leur présence même fait sens et porte en elle une signification.

Quand le récit donne réalité aux faits, eux donnent réalité au récit .

A une fable qui s'écoule comme le fleuve; dont la morale reste en suspens.

A une fable dont ils sont sujets et objets, langage dans le langage.

A une fable dont chacun d'eux porte un signe. "Héritiers de rien". Signifiant tout. Car "l'enfance est plus puissante que la fiction."



"Une république lumineuse" d'Andres Barba questionne l'enfance. Celle, adulte, des rues, qui pille et tue. Celle, adolescente, chaotique , qui échappe à l'ordre. A notre monde. Qui s'en créé un comme elle s'invente un langage. Le langage au coeur d'une réflexion métalinguistique magistrale qui l'appréhende comme clé de compréhension des faits. Comme source du réel.
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Les petites mains

Entre fantasme et réalité, le lecteur ne sait où se situe la frontière. Marina est une très petite fille de sept ans. Séparée de ses parents brutalement, elle arrive dans un orphelinat où elle est à la fois adulée et haïe. Car elle joue beaucoup, Marina, et elle entraîne se camarades au-delà du jeu d'enfance. Curieux roman, très court, où la poésie l'emporte sur la narration.
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Une république lumineuse

Dès les premières pages puis durant toute ma lecture, je n'ai pas pu m'empêcher de penser au film Le village des damnés (celui de de Wolf Rilla et daté de 1960, pas son remake par John Carpenter qui m'a beaucoup moins marqué). J'ai bien conscience qu'il y a beaucoup de différences et peu de similitudes mais je me demande si ce livre ne pourrait pas en être une adaptation très, très libre et empreinte de réalisme magique. C'est du moins l'impression que j'ai eu.



Contrairement au film qui, pour rappel, relate les aventures d'une bourgade dans laquelle sont nés, dans des conditions troublantes, une trentaine d'enfants étranges et maléfiques, le roman d'Andrés Barba ne m'a pas fait un grand effet. Malgré son décor visuel et immersif, ses scènes sont moins marquantes et les effets de suggestion ne parviennent jamais réellement à créer une ambiance inquiétante ou intrigante. Au contraire, il m'a laissé assez indifférent et face à un vague sentiment d'incompréhension. En effet, je n'ai jamais vraiment saisi où l'auteur voulait en venir ni même quel était son propos ou quels étaient les symboles disséminés dans l'intrigue. De plus - mais il n'y est pour rien, j'en ai bien conscience - ma lecture du roman a été parasitée par les images du film. Les descriptions des enfants sales, sauvages, étaient largement éclipsées derrière celles des enfants du film, calmes, aux cheveux blancs et au regard hypnotique. Ce sont eux que je voyais dès qu'ils entraient en scène. C'est vrai qu'ils étaient sacrément flippants ces petits gamins avec leurs yeux perçants et leur attitude glaçante…

L'article complet sur Touchez mon blog, Monseigneur...
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Une république lumineuse

Andrés Barba poursuit son exploration des territoires de la jeunesse. Le romancier espagnol excelle à dépeindre le flou des frontières entre innocence et perversité.
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Et maintenant, dansez

N°403 – Mars 2010

ET MAINTENANT DANSEZ – Andrés BARBA – Bourgois Éditeur.



Les personnages tout d'abord. Ines la mère qui autrefois a été belle, Pablo, le mari, ancien employé de Chemins de Fer espagnols dont l'emploi était toute sa vie. Il voue une affection attachante à son épouse qui n'est pourtant plus que l'ombre d'elle-même, Santiago, le fils préféré, qui a de plus en plus honte de ses parents mais qui prend conscience qu'il est incapable d'aimer une autre femme que sa mère, Barbara, la fille, 40 ans, qui a souffert d'être un peu mise à l'écart et qui s'aperçoit que sa vie d'épouse et de mère de famille devient de jour en jour plus morne. Elle se découvre des penchants homosexuels pour Eléna, son employée de maison. Il y a aussi Béatriz, la petite sœur anormale, morte à trois mois. Personne ne parvient vraiment à faire le deuil de ce fantôme.



Ines, mère jadis sévère et un peu bigote, à presque soixante dix ans, perd la tête et s'enfonce de jour en jour dans les affres de la vieillesse et de la sénilité. Elle perd de plus en plus la mémoire, oublie jusqu'aux prénoms de ses proches, agit d'une manière désordonnée dans les gestes les plus quotidiens, perd jusqu'au sens du langage. Pablo prend conscience que sa femme est condamnée, se révèle maladroit, coupé de la réalité depuis son départ en retraite, et paradoxalement, dépendant de sa femme. Chacun, à cette occasion, se remet en question, s'interroge sur lui-même, sur son avenir, sous l'ombre tutélaire d'Ines qui n'est déjà plus là mais qui reste étonnamment présente, même si chacun pense à sa mort prochaine... Il en résulte une ambiance angoissante.



Ce roman sans grands dialogues, sans beaucoup de descriptions non plus, offre le ton assez pathétique des monologues intérieurs (sauf celui d'Ines qui n'existe pas). C'est aussi une série un peu délétère de portraits juxtaposés, avec seulement entre eux des liens artificiels. Je ne suis pas bien d'accord avec la quatrième de couverture qui annonce un texte « sans pitié ni misérabilisme ». Je serais plutôt de l'avis contraire (Les évocations d'Ines et de sa maladie sont affligeantes, les réflexions de Pablo sont un mélange de craintes, de fausse complicité et de navrante subordination, il y a une sorte de diabolisation de la beauté féminine, de la nudité, du plaisir sexuel, une volonté de transformer tout cela en tabou, l'impression un peu bizarre que chacun d'eux n'est pour l'autre qu'un étranger ).



Il me paraît que ce roman un peu lugubre donne à voir des personnages malgré tout un peu lisses, sans grand relief et incrustés dans le quotidien. Il marque un bouleversement réel des choses, une tentative peut-être manquée de briser des interdits et de formuler des non-dits, une peinture sans concession d'êtres face à leurs contradictions, une sorte de lente agonie d'un foyer jadis stable qui maintenant part à vau l'eau, une évocation de l'impossibilité pour les enfants, Barbara et Santiago, de s'unir à leur tour sous l'égide de l'amour, la consécration de la solitude. C'est un roman de la défaite face à la vie, l'image un peu délétère de la vieillesse, de la mort annoncée et de la triste condition humaine.



Ces quatre mouvements me paraissent peu convaincants et je ne suis pas bien sûr de vouloir poursuivre la lecture de l'œuvre de ce jeune auteur.



© Hervé GAUTIER – Mars 2010.






















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Versions de Teresa

Cette lecture ne m’a pas plu car il y rôde la mort et où j’avais une sensation de transgression en lisant sur les amours d’un adulte avec une mineure handicapée.

Si la prose est élégante et le sujet est traité avec délicatesse, la situation est en elle même scabreuse. Étonnant comme l’auteur, âgé de 31 ans a pu avoir la maturité suffisante pour traiter un sujet pareil : le triangle amoureux entre Teresa, 14 ans, atteinte du syndrome de Down, un homme de 30 ans, Manuel et la soeur aînée de Teresa, Veronica.



Cette histoire est montrée en 14 parties comme le Requiem de Mozart et chaque partie est centrée sur Manuel ou Veronica. Teresa ne protagonise aucun chapitre, c’est un personnage passif, vu et interprété par les autres deux.



L’amour et ses phases est traité sans en approfondir les aspects; l’auteur se pose la question sur le processus de tomber amoureux de quelqu’un.

Manuel fera la connaissance de Teresa au sein d’une colonie de vacances et il sera littéralement foudroyé par l’amour qu’elle lui inspire.

Mais quels sentiments inspire Teresa à Manuel ? C’est difficile à expliquer. Mais faut-il avoir une réponse à tout? Le roman traite aussi sur le désir, un désir abordé de façon métaphorique.



Analysant un peu, c’est Manuel qui me parait le plus désemparé des trois personnages; il me semble immature, inexpérimenté, hésitant entre l’attirance physique, la solidarité affective et beaucoup de scrupules. Il est incapable de s’exprimer avec clarté et le lecteur perçoit bien toutes ses carences affectives dans son éducation sentimentale.

Veronica est une fille étrange, en crise. Elle s’apprécie mal physiquement, elle connait quelques déboires avec son cursus universitaire et elle est fâchée avec sa meilleure amie Ana. Elle ne connait rien à l’amour et elle peut être cruelle avec Teresa, à la limite de la malveillance.



Le monde de Teresa est confiné, silencieux, hermétique. Elle a une sexualité qui est plus pure, innocente et évidente par rapport à Veronica.

Teresa va provoquer une véritable passion chez Manuel qui va se tourner vers l’introspection : insatisfait avec son travail, ses 30 ans, et la monotonie de sa vie.



Une lecture difficile car le thème est très sensible.
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Les petites mains

C’est un roman court ou novella, un récit comme un diamant effilé, cruel et assez angoissant.



C’est l’histoire de Marina, 7 ans, orpheline après un accident de la route où elle même a échappé à la mort et sera placée dans un orphelinat où elle sera malheureuse et moquée par les autres car elle a eu tout de même une enfance heureuse.



C’est une immersion dans le milieu de l’enfance, un monde assez impitoyable et secret où les petites filles iront jusqu’à inventer des situations et des jeux d’une rare violence, en même temps que tout baigne dans l’innocence.

Marina est différente des autres filles, ce qui génère autant l’admiration que la haine. Le groupe autour de Marina deviendra menaçant, frôlant en permanence la transgression.



Cet auteur possède un talent particulier pour décrire le monde ambivalent de l’enfance où règne l’innocence et la cruauté, la peur de l’inconnu et l’absence de défenses.
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Une république lumineuse

Un bon moment de lecture, dont j'ai surtout apprécié la quailité d'écriture et le style narratif rétrospéctif qui relate 20 ans après des événements qui ont secoué une petite ville de province (d'Amérique Latine ?) : des enfants semi-sauvages apparaissent ("mais d'où viennent-ils?") et commettent des vols en bandes; à la suite d'une attaque plus meurtirère que les précédentes rapines, la communauté décide de réagir mais les enfants disparaissent dans une forêt/jungle assez inextricable pour que les recherches n'aboutissent pas. Par contre, et c'est là le point essentiel de renouvellement du thème, des enfants de la commune sont en quelque sorte "infectés" et rejoignent la bande de sauvageons. Le décalage avec la normalité de la communauté est bien sur d'abord social (pas de hiérarchie, pas d'hygiène corporelle, pas de tentative de "gagner de l'argent") mais même linguistique (ils parlent une espèce de langue d'extra-terrestre). J'ai presque pensé à des histoires de zombies !

L'histoire se terminera un peu de façon saugrenue (j'ai été déçu) et violente mais laissera à l'auteur un traumatisme émotionnel qui le secoue encore 20 ans après.

Bon, je résume assez grossièrement sans doute mais je ne vois pas en quoi le débat sur l'innocence des enfants constitue une nouveauté ni même ce que ce livre apporte de nouveau au débat, à part comme je l'ai dit l'idée d'une rebellion contagieuse. J'ai pensé pour ma part aux bandes d'enfants délinquants de Bogota mais le récit est trop court pour vraiment approfondir la réflexion (et c'est dommage).



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Une république lumineuse

Un fonctionnaire des services sociaux nous narre les archives d’une étrange histoire qui s’est déroulée vingt ans plus tôt à San Cristobal et qui s’est soldée par une fin tragique.

L’histoire des « trente-deux » comme on l’appelle est terrifiante.

Trente-deux enfants, entre 9 et 13 ans, sorti de nulle part et parlant une langue incompréhensible s’installent en ville, mendient et rejoignent la forêt au coucher du soleil.

Nul ne sait d’où ils sont sorti. Certains évoquent qu’ils se seraient sauvé d’un endroit de détention, d’autres évoque la thèse magique.

D’abord intrigués, les habitants deviennent vite méfiants. Les enfants seraient responsables de multiples agressions.

Le narrateur, vous contera leur histoire jusqu’au final, dramatique.



Andrés Barba nous livre ici un conte fantasmagorique. Fabuleux et déroutant. Terrifiant.

Ce livre se lit d’une traite tant il est hypnotisant.



Muni d’une très belle plume, l’auteur espagnol n’en fait pas moins monter la tension créant une ambiance anxiogène persistante jusqu’au drame final.



Au détour de cette fable, il nous invite à nous interroger sur l’enfance et son innocence présumée, vaste question.

Nul ne peut lire se livre sans être bouleversé. Vous voilà prévenu.
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