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Citations de Andy Mulligan (33)


– Quand l’avez-vous perdue ? a demandé quelqu’un.

– Hier soir, a dit le policier. Elle a été mise à la poubelle par erreur. Du côté de McKinley Hill, par là-bas. Les camions de ramassage sont passés ce matin. Ce qui veut dire que la sacoche est déjà ici ou qu’elle arrivera demain matin. »

Il nous guettait et nous le guettions.

« Est-ce que quelqu’un a trouvé une sacoche ? »

Je sentais les yeux de Gardo plantés sur moi.
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– Qu’est-ce que c’est ? a demandé quelqu’un.

– C’est... une sacoche », a dit le policier, et là ma peau est devenue toute froide et sèche.

Il s’est retourné pour prendre quelque chose des mains de l’homme qui se trouvait derrière lui. Puis il nous l’a montré. Un sac à main en plastique noir, grand comme ma main.

« Cela doit ressembler à ça, dit-il. Pas tout à fait mais presque. Un peu plus grand ou un peu plus petit. Nous pensons que cette sacoche contient des indices qui pourraient nous aider à résoudre un crime.
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Le flic boxeur a parlé un moment avec Thomas qui est un peu notre chef de village, puis il s’est adressé à nous tous.

« Un de nos amis a un problème, il a dit, la voix comme un mégaphone. C’est un problème assez grave et nous espérons que vous pourrez nous aider. Voilà, il a perdu quelque chose d’important. Nous sommes prêts à offrir une belle somme à quiconque retrouvera cette chose. Et mieux encore, nous donnerons mille pesos à chaque famille de Behala, vous comprenez ? Voilà à quel point cette chose est importante pour notre ami. Et pour celui qui la récupérera et qui me la remettra, il y aura dix mille pesos.
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Je crois que Gardo avait un ballon et qu’on jouait sous le panier. Mais maintenant, on était pris dans les phares de ce gros 4 × 4 noir avec les policiers qui en sortaient.
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Le soleil s’était couché. Chez ma tante, il y avait un feu pour faire cuire du riz, et ce soir-là, grâce à l’argent que j’avais trouvé, on avait droit à un de ces précieux poulets à un peso quatre-vingts. On était peut-être trente réunis là – pas tous pour manger un seul poulet, hein ! Celui-là, c’était juste pour la famille. Mais il fait si chaud le soir que les gens préfèrent traîner dehors.
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Cette fois, il y avait cinq hommes, dont un qui paraissait très important, un officier supérieur peut-être – plus vieux et plus gras que les autres. Il avait une tête de boxeur, avec le nez écrasé, pas de cheveux et l’air mauvais.
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On ne la voit pas souvent la police, à Behala. Ici, on règle nos problèmes entre nous. D’abord, il n’y a pas grand-chose à voler et, en général, on ne se vole pas les uns les autres – même si ça peut arriver. Il y avait eu un meurtre quelques mois plus tôt. Un vieil homme qui a tué sa femme – il lui a tranché la gorge avant de la laisser perdre tout son sang qui a coulé sur les murs de la cabane du dessous. Quand la police est arrivée, il s’était déjà enfui et on n’a jamais su si elle l’avait attrapé. Un autre jour, elle est revenue mais c’était pour une campagne électorale : quatre voitures de patrouille qui accompagnaient quelqu’un qui voulait devenir maire – avec tout le cirque, les lumières qui tournoyaient, les radios qui grésillaient, parce qu’elle aime faire le spectacle, la police. Mais bon, en général, elle a mieux à faire que de venir ici.
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Je passerai le relais à Gardo plus tard – après la soirée.

Vous voyez, c’est quand la police est venue, à la nuit tombée, que j’ai compris que la sacoche était très, très, très importante.
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J’ai tout rangé dans la poche de mon short, puis on s’est remis à trier. Ici, il vaut mieux ne jamais attirer l’attention. Mais j’étais tout excité. Nous étions tous les deux excités et nous avions bien raison de l’être, car cette sacoche a tout changé. Bien longtemps après, je me suis dit : Tout le monde a besoin d’une clé.

Avec la bonne clé, vous pouvez ouvrir une porte. Personne n’ira l’ouvrir pour vous.
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Deux petites photos d’une fille en uniforme d’écolière. Difficile de deviner son âge, mais j’aurais dit sept ou huit ans, avec de longs cheveux noirs et de beaux yeux. Un visage grave, comme celui de Gardo – comme si personne ne lui avait jamais expliqué qu’on peut sourire.

Ensuite, on a regardé la clé. Elle avait une petite étiquette en plastique jaune. Avec un numéro sur les deux faces : 101.

Le plan, c’était juste un plan de la ville.
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Je me suis mis à rigoler et à réciter une prière. Gardo me filait des coups de poing dans le bras et, ça ne me dérange pas de l’avouer, on a même failli danser. Je lui ai donné cinq cents pesos, ce qui était juste puisque c’était moi qui l’avais trouvé. Il m’en restait six cents. Ensuite, on a regardé ce qu’il y avait d’autre, mais c’étaient juste quelques vieux papiers, des photos et – plus intéressant – une carte d’identité. Tout abîmée et froissée mais on le voyait quand même assez bien : un homme qui nous dévisageait droit dans les yeux ou plutôt qui fixait l’objectif avec ce regard un peu effrayé qu’on a quand le flash se déclenche. Son nom ? José Angelico. Âge ? Trente-trois ans, employé de maison. Célibataire et demeurant dans un coin qui s’appelait Green Hills – pas un homme riche donc et c’est bien triste. Mais qu’est-ce qu’on pouvait faire ? Le chercher dans toute la ville pour lui dire : « Monsieur Angelico, monsieur ! On aimerait vous rendre ce qui vous appartient » ?
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Elle m’est tombée dans la main : une petite sacoche en cuir, avec un zip bien fermé et couverte de marc de café. Quand je l’ai ouverte, j’ai vu un portefeuille dedans. Et aussi, un plan plié en quatre – et dans le plan, une clé. Gardo m’a rejoint et nous nous sommes accroupis, là-haut sur la montagne. Mes doigts tremblaient parce que le portefeuille était bien épais. Il y avait onze cents pesos à l’intérieur, et ça, croyez-moi, c’est beaucoup d’argent. Un poulet vaut un peso quatre-vingts, une bière quinze. Une heure à la salle de jeux vidéo, vingt-cinq.
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Nous travaillions ensemble, et les sacs tombaient – certains déjà éventrés, d’autres non –, quand tout à coup j’ai trouvé un « spécial ». Un spécial, c’est un sac intact, pas déchiré, qui vient d’un quartier riche – c’est ceux qu’on guette partout, tout le temps. Même maintenant, je me souviens encore de ce qu’il contenait. Un paquet de cigarettes, avec une dernière cigarette dedans – un petit cadeau. Une courgette qui était assez fraîche pour qu’on la cuise et tout un tas de canettes en fer cabossées. Un stylo qui ne devait plus marcher, mais les stylos c’est facile à trouver, et du papier sec que j’ai rangé aussitôt dans mon sac. Et puis des ordures normales : des restes de nourriture, un miroir brisé ou je ne sais quoi, et puis, là soudain... Je sais, j’ai dit qu’on ne trouve jamais rien d’intéressant mais, bon, une fois dans une vie...
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Gardo a quatorze ans, comme moi. Mince comme un fouet et des bras très longs. Il est né sept heures avant moi, sur le même drap, à ce qu’on dit. Ce n’est pas mon frère, mais c’est tout comme, parce qu’il sait toujours ce que je pense, ce que je ressens – et même ce que je vais dire. Comme il est plus âgé, il n’arrête pas de m’obliger à faire ci ou ça et la plupart du temps j’accepte. Les gens racontent qu’il est trop sérieux, qu’il ne sourit jamais et il leur répond : « Vas-y, montre-moi un truc qui vaut la peine de sourire. » Il peut être méchant, c’est vrai. Faut dire qu’il a pris plus de raclées que moi et du coup il a grandi plus vite. Mais ce que je sais, c’est que je voudrais toujours l’avoir avec moi. Toujours.
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C’est là qu’on les attend, avec la vue sur la mer.
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Bon, par où commencer ?

Mon jour de chance-malchance, celui où tout a basculé ? C’était un jeudi. Gardo et moi, nous étions près d’une des grues – des monstres, avec douze roues énormes, qui sont capables de grimper sur les collines. Elles ramassent les ordures et les soulèvent si haut que vous ne voyez même pas jusqu’où et puis elles lâchent tout. Elles s’occupent de tout ce qui arrive et on n’est pas censés travailler près d’elles parce que c’est dangereux. Les gardiens tentent de nous tenir à l’écart à cause des orages d’ordures. Mais si on arrive à être les premiers – faut dire qu’on évite de monter dans les camions-bennes parce que ça, c’est très dangereux : j’ai connu un gosse qui y a laissé son bras –, alors ça vaut le coup de rester tout près du monstre. Les camions déchargent, les bulldozers poussent les déchets jusqu’aux grues et elles nous les amènent tout là-haut, à nous qui sommes assis au sommet de la montagne.
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« Qu’est-ce que tu as, Gardo ?

– Du stupp. Et toi ? »

Je retourne le bout de papier.

« Du stupp. »

Il faut que je vous dise : je suis un garçon-poubelle en short. Je travaille le plus souvent avec Gardo et, à nous deux, on est des rapides. Certains gosses, les plus petits, et puis les vieux, ceux qui ne savent plus, ils ne font que fouiller et fouiller, comme s’il fallait tout retourner. Mais dans tout ce stupp, il faut être capable de repérer très vite le papier et le plastique, et je me débrouille pas trop mal. Gardo est mon partenaire, on travaille toujours ensemble. Il veille sur moi.
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Le caoutchouc, c’est bien aussi. La semaine dernière, on a reçu une livraison imprévue de vieux pneus. En quelques minutes, il n’y en avait plus un seul – les adultes nous ont chassés, nous les petits, et ils ont tout pris. Un pneu à moitié usé, ça peut valoir un demi-dollar, et avec un pneu mort, on fait tenir le toit de la maison, suffit de le poser dessus. Il y a aussi les restes de fast-food, mais c’est un petit commerce à part. Gardo et moi, on n’y touche pas, ça se passe à l’autre bout de la décharge, où il doit bien y avoir une centaine de gosses qui s’occupent des pailles, des gobelets et des os de poulet. Tout est trié, nettoyé, emballé puis pesé et vendu. Les camions les rapportent en ville et ça continue à tourner. Les bons jours, je gagne deux cents pesos. Les mauvais, cinquante peut-être. On vit comme ça, au jour le jour, en espérant ne jamais tomber malade. On s’accroche. Oui, on s’accroche parce que la vie tient au crochet qu’on a dans la main et qui nous sert à fouiller les ordures.
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Je suis un trashboy, un garçon-poubelle, depuis que j’ai l’âge de me déplacer tout seul et de ramasser des choses. À trois ans, je triais déjà.

Je vais vous dire ce qu’on cherche.

Du plastique, parce qu’on peut tout de suite en tirer de l’argent... au kilo. Le mieux, c’est le plastique blanc. On en fait une pile. Après, il y a le bleu.

Du papier, s’il est blanc et propre – pour pouvoir le nettoyer et le faire sécher. Le carton aussi.

Des boîtes en fer, et tout ce qui est métallique. Du verre, à condition que ce soit des bouteilles. Les vêtements ou n’importe quel bout de tissu – on trouve un tee-shirt de temps en temps, un pantalon, et ces sacs qui servent à trimbaler des choses. Ici, on s’habille surtout avec ce qu’on trouve dans nos montagnes, mais la plus grande partie, on en fait des tas qu’on pèse et qu’on vend. Vous devriez me voir dans ma tenue de combat : un jean coupé et un tee-shirt trop grand pour pouvoir le remonter sur ma tête quand le soleil tape fort. Mais pas de chaussures. D’abord, parce que je n’en ai pas, et ensuite parce qu’on a besoin de ses pieds pour sentir. L’école de la Mission s’est démenée pour nous obtenir des souliers montants, mais la plupart des gars les ont vendus. Les ordures sont molles et nos pieds durs comme des sabots.
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Vous voulez venir voir ? Venez, venez, mais, Behala, vous la sentirez bien avant de la voir. Et pourtant, elle est grande. Elle fait au moins la taille de deux cents terrains de football, ou alors de mille terrains de basket. Je ne sais pas, on dirait qu’elle s’étend jusqu’au bout de la Terre. Et je ne sais pas non plus la part de stupp qu’il y a dedans, mais les mauvais jours, c’est comme s’il n’y avait que ça, et passer sa vie les pieds là-dedans, à respirer ça, à y dormir... Oui, peut-être qu’un jour on trouvera « quelque chose de bien ». Oui.
Et voilà, ce jour est arrivé. Il m’est arrivé.
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