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Citations de Anna de Noailles (313)


L'enfant privilégié ne connaît de la mort que le nom : on lui épargne la vue de l'injure suprême de la nature, mais Il devine l'insécurité autour de ses pas, il est intrigué et abattu par l'énigme dolente qui s'étend de la terre au firmament, et sous quoi s'efforce, lutte et gémit la création entière.
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Anna de Noailles
La vie profonde

Être dans la nature ainsi qu'un arbre humain,
Étendre ses désirs comme un profond feuillage,
Et sentir, par la nuit paisible et par l'orage,
La sève universelle affluer dans ses mains !

Vivre, avoir les rayons du soleil sur la face,
Boire le sel ardent des embruns et des pleurs,
Et goûter chaudement la joie et la douleur
Qui font une buée humaine dans l'espace !

Sentir, dans son coeur vif, l'air, le feu et le sang
Tourbillonner ainsi que le vent sur la terre.
- S'élever au réel et pencher au mystère,
Être le jour qui monte et l'ombre qui descend.

Comme du pourpre soir aux couleurs de cerise,
Laisser du coeur vermeil couler la flamme et l'eau,
Et comme l'aube claire appuyée au coteau
Avoir l'âme qui rêve, au bord du monde assise...
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Il n’est pas un instant...

Il n’est pas un instant où près de toi couchée
Dans la tombe ouverte d’un lit,
Je n’évoque le jour où ton âme arrachée
Livrera ton corps à l’oubli.

Se peut-il que se rompe une veine qui porte
Un même sang parmi deux corps,
Et que l’un des deux reste au moment que la porte
Se ferme sur celui qui sort ?

Qu’advient-il de celui que le destin néglige,
De celui qu’on nomme vivant ?
Attend-il que la plaie à son côté se fige ?
De quel fiel va-t-il s’abreuvant ?

– Que valent donc les mots, les larmes, les caresses,
Le féroce accaparement
D’un corps par l’autre corps, si ces promesses cessent
Au terrible et dernier moment ?

Qu’avons-nous souhaité dans le plaisir, cher être,
Si ce n’est d’être tour à tour
Celui qui meurt, celui qui voit l’autre renaître,
Celui qui l’assiste d’amour ?

Quand ma main sur ton cœur pieusement écoute
S’apaiser le feu du combat,
Et que ton sang reprend paisiblement sa route,
Et que tu respires plus bas,

Quand, lassés de l’immense et mouvante folie
Qui rend les esprits dévorants,
Nous gisons, rapprochés par la langueur qui lie
Le veilleur las et le mourant,

Je songe qu’il serait juste, propice et tendre
D’expirer dans ce calme instant
Où, soi-même, on ne peut rien sentir, rien entendre
Que la paix de son cœur content.

Ainsi l’on nous mettrait ensemble dans la terre,
Où seule, j’eus si peur d’aller ;
La tombe me serait un moins sombre mystère
Que vivre seule et t’appeler.

Et je me réjouirais d’être un repas funèbre
Et d’héberger la mort qui se nourrit de nous,
Si je sentais encor, dans ce lit des ténèbres,
L’emmêlement de nos genoux...

(p. 57-58)
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Le bonheur d’aimer est si fort...

Le bonheur d’aimer est si fort,
Étant seul la négation
Du quotidien et de la mort,
Que je n’ai, dans ma passion,

Dans cet amour que je ressens,
Vraiment jamais rien désiré,
Rien attendu, rien espéré,
Que mon désir éblouissant !

Vent pur des nuits suave abondance, moisson !
Flots d’air frais arrachés aux golfes des étoiles,
Espace palpitant qui fais comme une voile
Se gonfler dans mon cœur les rêves et les sons,

Pénétrez dans la chambre ennemie où repose
Le trésor éclatant d’un beau corps soucieux,
Et ramenez vers moi, plus parfait que la rose,
Le bleuâtre parfum qui flotte sur ses yeux !

(p. 70)
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Amour, pourquoi mêler ton nom divin...

Amour, pourquoi toujours mêler ton nom divin
À la mort sombre et négative ?
Toi seul es évident, tout autre espoir est vain,
Rien n’est rien, hormis ceux qui vivent.

Toi seul poses l’empreinte allègre de tes pas
Sur la cruelle et sourde terre.
Tout est brutal et froid. – Toi seul es un mystère,
Puisque la mort n’existe pas !...

(p. 79)
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La Nuit

Nuit sainte, les amants ne vous ont pas connue
Autant que les époux. C'est le mystique espoir
De ceux qui tristement s'aiment de l'aube au soir,
D'être ensemble enlacés sous votre sombre nue.

Comme un plus ténébreux et profond sacrement,
Ils convoitent cette heure interdite et secrète
Où l'animale ardeur s'avive et puis s'arrête
Dans un universel et long apaisement.

C'est le vœu le plus pur de ces pauvres complices
Dont la tendre unité ne doit pas s'avouer,
De surprendre parfois votre austère justice,
Et d'endormir parmi votre ombre protectrice
Leur amour somptueux, humble et désapprouvé...

(p. 59)
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L'image

Pauvre faune qui va mourir
Reflète-moi dans tes prunelles
Et fais danser mon souvenir
Entre les ombres éternelles.

Va, et dis à ces morts pensifs
À qui mes jeux auraient su plaire
Que je rêve d'eux sous les ifs
Où je passe petite et claire.

Tu leur diras l'air de mon front
Et ses bandelettes de laine,
Ma bouche étroite et mes doigts ronds
Qui sentent l'herbe et le troène,

Tu diras mes gestes légers
Qui se déplacent comme l'ombre
Que balancent dans les vergers
Les feuilles vives et sans nombre,

Tu leur diras que j'ai souvent
Les paupières lasses et lentes,
Qu'au soir je danse et que le vent
Dérange ma robe traînante,

Tu leur diras que je m'endors
Mes bras nus pliés sous ma tête,
Que ma chair est comme de l'or
Autour des veines violettes ;

- Dis-leur comme ils sont doux à voir
Mes cheveux bleus comme des prunes,
Mes pieds pareils à des miroirs
Et mes deux yeux couleur de lune,

Et dis-leur que dans les soirs lourds,
Couchée au bord frais des fontaines
J'eus le désir de leurs amours
Et j'ai pressé leurs ombres vaines...

(p. 24-25)
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Exaltation

Le goût de l'héroïque et du passionnel
Qui flotte autour des corps, des sons, des foules vives,
Touche avec la brûlure et la saveur du sel
Mon cœur tumultueux et mon âme excessive...

Loin des simples travaux et des soucis amers,
J'aspire hardiment la chaude violence
Qui souffle avec le bruit et l'odeur de la mer,
Je suis l'air matinal d'où s'enfuit le silence;

L'aurore qui renaît dans l'éblouissement,
La nature, le bois, les houles de la rue
M'emplissent de leurs cris et de leurs mouvements;
Je suis comme une voile où la brise se rue.

Ah! vivre ainsi les jours qui mènent au tombeau,
Avoir le cœur gonflé comme le fruit qu'on presse
Et qui laisse couler son arôme et son eau,
Loger l'espoir fécond et la claire allégresse!

Serrer entre ses bras le monde et ses désirs
Comme un enfant qui tient une bête retorse,
Et qui mordu, saignant, est ivre du plaisir
De sentir contre soi sa chaleur et sa force.

Accoutumer ses yeux, son vouloir et ses mains
A tenter le bonheur que le risque accompagne;
Habiter le sommet des sentiments humains
Où l'air est âpre et vif comme sur la montagne,

Être ainsi que la lune et le soleil levant
Les hôtes du jour d'or et de la nuit limpide;
Être le bois touffu qui lutte dans le vent
Et les flots écumeux que l'ouragan dévide!

La joie et la douleur sont de grands compagnons,
Mon âme qui contient leurs battements farouches
Est comme une pelouse où marchent des lions...
J'ai le goût de l'azur et du vent dans la bouche.

Et c'est aussi l'extase et la pleine vigueur
Que de mourir un soir, vivace, inassouvie,
Lorsque le désir est plus large que le cœur
Et le plaisir plus rude et plus fort que la vie...

(p. 21-22)
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Nous n'etions point frivoles. Nous étions philosophes, encyclopédistes, géometres, chimistes et astronomes selon nos amants. Nous avons aidé aux oeuvres de Voltaire et de Rousseau. Ils nous ont fait des madrigaux et nous leur avaons fait des chapitres pour leurs ouvrages.
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La coquille est le principe et le symbole de notre temps et cela s'entend aisément, car c'est vraiment de la conque d'Aphrodite qu'est sortie notre époque parfumée, amoureuse et divine
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Peut-etre l'amour n'est-il que la grand pieté qu'éprouvent l'un pour l'autre ceux a qui la musique, et la poésie, et toute la beauté donnent une telle détresse ...
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Elle sentit qu'elle l'aimait jalousement, avec un gout mystique de la sagesse paternelle
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Des amis de son pere, leurs fils, quelques jeunes filles de son age venaient a leur maison a Paris, les rejoignaient en été au chateau que monsieur de Rozée possédait en Touraine.
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La flamme chez cette enfant montait des profondeurs du sang, gagnait le cerveau, faisait sur la pensée, sur la raison, danser son rouge incendie
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Étonnante enfance mystique et amoureuse, désespérée, sage et violente!
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Son etre fatigué des vives passions de l'enfance, des hasards d'un mariage hatif, des douleurs de la maternité malheureuse, se resposait ainsi au creux des apres-midi molles, bercé du plaisir de vivre faiblement a la sensuelle crainte de la mort
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l¿amour n'est point pour les pauvres en hiver, mais pour ceux-la seuls qui, pouvant vivre, ont ce gout de mourir de délire et d'ardeur ...
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musique enchainée qui disait qu'il n'est point d'amour pour les hommes quand la terre est glacée, et quand il n'y a pas d'abri, pas de table et de pain, pas de nuit de lune, tiède et claire comme un chambre, pas de loisirs, pas de divans lourds et de parfums...
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J'ai l'impression quand j'étudie, avec ce tablier de toile dont tu ris, que je suis comme le moine dans sa cellule, qu'il y a sans que je les voie d'autres moines dans d'autres celules, et que nous sommes, comme cela, tout un couvent, dans le monde, de travailleurs heureux et qui n'ont pas de vanité
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Quoiqu'elle ne se sentit ni malheureuse ni désirante d'autre chose, sa vie monotone et mince lui apparaisait seulement comme un moment lucide du sommeil, comme le versant luisant de la nuit
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