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Citations de Benvenuto Cellini (15)


Je laissai refroidir le bronze pendant deux jours et commençai à le découvrir peu à peu. D’abord la tête de la Méduse, parfaitement venue grâce aux évents et à la loi naturelle du feu qui est, comme je l’avais dit au duc, de s’élever. Poursuivant mon examen, je trouvai l’autre tête, celle de Persée, tout aussi réussie. Cela m’étonna beaucoup plus, car elle est bien plus basse que celle de Méduse. Les canaux débouchaient sur la tête et les épaules de Persée et je constatai que tout le bronze du fourneau avait été exactement employé pour cette tête. Chose stupéfiante ! il n’en restait pas une miette dans les canaux et il n’en avait pas manqué un grain. Cela m’étonna tellement que je crus à une œuvre miraculeuse de Dieu. Je continuai à découvrir la statue avec le même bonheur ; chaque détail était aussi réussi.
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Mon glorieux et immortel Seigneur permit que je finisse complètement mon ouvrage et un jeudi matin, je le découvris tout entier. Il ne faisait pas encore grand jour qu’une foule innombrable s’assembla aussitôt ; tous unanimement rivalisaient de louanges. À moitié caché dans l’embrasure d’une fenêtre basse au-dessus de la porte du palais, le duc entendait tout ce qu’on disait. Il resta là à écouter pendant plusieurs heures, puis, fier et content, se tourna vers messire Sforza : « Sforza, va, trouve Benvenuto et dis-lui de ma part qu’il a comblé mes vœux au-delà de mon attente. Dis-lui que je comblerai les siens d’une manière qui le surprendra. Qu’il ait l’esprit en paix ! » Messire Sforza me transmit ce glorieux message ; cette bonne nouvelle me réconforta. Le peuple me désignait du doigt à un tel ou un tel, comme un prodige inouï.
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La sage-femme qui savait qu’on attendait une fille lava le bébé, l’enveloppa de beaux langes blancs et s’approcha tout tranquillement de mon père Giovanni en disant : « Je vous apporte un beau cadeau auquel vous ne vous attendez pas. » Mon père qui était vraiment un sage lui répondit : « Ce que Dieu me donne me plaît toujours. » Il écarta les langes et vit de ses yeux le fils inespéré. Il joignit ses vieilles mains et, le regard tourné vers le ciel, il ajouta : « Seigneur, je te remercie de tout mon cœur. Cet enfant m’enchante. Qu’il soit le Bienvenu ! » Tous les assistants lui demandaient joyeusement le nom qu’il voulait donner au bébé et il ne cessait de répéter : « Qu’il soit le bienvenu ! » C’est le nom que je reçus au saint baptême et que je porte encore, comme il plaît à Dieu.
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Nous étions en août 1545. Notre duc était à Poggio a Caiano, à dix milles de Florence. J’allai le trouver uniquement pour lui présenter mes devoirs comme citoyen florentin et membre d’une famille dont les ancêtres avaient été très attachés à la famille Médicis ; moi personnellement, j’avais pour le duc Cosme plus d’affection qu’aucun d’eux. J’allai à Poggio, je le répète, uniquement pour le saluer et sans la moindre intention d’entrer à son service.[...]
Il me dit qu’il aimerait bien, pour premier travail, un Persée qu’il désirait depuis longtemps. Il me pria de lui en faire un petit modèle.[...]
Il l’examina soigneusement ; sa joie débordait : « Benvenuto, me dit-il, si la statue en grand est aussi réussie que ce petit modèle, ce sera le chef-d’œuvre de la place. » – « Monseigneur, répondis-je, sur la place il y a les ouvrages du grand Donatello et de l’admirable Michel-Ange, les deux plus grands génies depuis l’Antiquité. Mais Votre Excellence m’infuse un tel courage par ses compliments sur mon modèle que je me sens d’attaque pour réussir trois fois mieux l’œuvre elle-même. »
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Je vais conter ici ma vie et ses tourments
Pour rendre grâce au Dieu maître de la nature
Qui m’a donné une âme et puis en a pris soin,
Tant j’ai réalisé d’exploits de mon vivant.

Mon destin si cruel oublie enfin ses coups
Devant ma vie de gloire et prouesses sans nombre
Grâce, valeur, beauté forment un tel ensemble
Que j’en dépasse beaucoup et rejoins qui me passe.

Un seul regret me point, la pleine conscience
Du temps si précieux perdu en vanités :
De nos frêles pensers, tant emporte le vent.

Puisque regret ne vaut, je me contenterai
De remonter là d’où suis issu, Bienvenu,
Dans la très fine fleur de mon cher sol toscan.
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Cher Barye,


Moins heureux que Benvenuto, vous n’êtes point venu à l’une de ces époques où l’instinct, le sentiment, l’amour et l’enthousiasme de l’art étaient universels, — où l’art était de première utilité, de première nécessité, comme l’eau et le pain.

Vous êtes venu dans un temps où l’art est une espèce de bizarre et capricieuse superfluité dont on se passerait assez volontiers. — Aujourd’hui on n’adore plus l’art, — on le tolère, — ou bien, tout au plus, on s’en amuse un instant, puis on l’oublie dans un coin comme un jouet inutile.

Au seizième siècle l’art grandissait et s’épanouissait splendidement, aux acclamations et aux applaudissements des peuples, sous le glorieux et généreux patronage des Jules II, des Léon X, des Clément VII, des François Ier, des Charles-Quint.

Aujourd’hui l’art étiolé végète, misérablement sustenté par quelques trafiquants, par quelques brocanteurs auxquels l’abandonnent l’indifférence du peuple, l’ignorance de la bourgeoisie et les préoccupations des gouvernants.

Au seizième siècle, de nobles et ardentes rivalités, d’effrayantes et merveilleuses luttes éclataient, pour la plus grande gloire de l’art, dans les temples de Dieu et les palais des rois, des papes et des empereurs, entre ces géants qui s’appelaient Michel-Ange et Raphaël, Titien et Tintoret, Primatice et Rosso, Bandinelli et Benvenuto.

Aujourd’hui, à ces chocs terribles qui enfantaient tant de chefs-d’œuvre, ont succédé des batailles non moins passionnées, non moins acharnées ; mais ces batailles se livrent à la sourdine, dans les antichambres des ministères et dans les boutiques, — non pour glorifier l’art, mais pour vendre le plus avantageusement possible quelque toile ou quelque marbre en dénigrant la marchandise des concurrents.

Pour tout résumer en un mot, au seizième siècle on naissait et on vivait artiste, aujourd’hui on naît et on vit marchand.
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La Catherine affirma que j’en avais usé avec elle à la manière italienne. Le juge se retourna vers moi et me dit : “Tu entends ce que raconte la Catherine, Benvenuto? – Si j’en avais usé avec elle à la manière italienne, répondis-je alors, je ne l’aurais fait que dans le désir d’avoir un enfant, en m’y prenant comme vous autres”. Le juge alors de riposter : “Elle veut dire que tu l’as barattée dans un autre vase que celui où se font les enfants.”
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C’est dans ce sentiment de mécontentement que, le lendemain, je découvris ma statue. Il plut à Dieu que, dès qu’on la vit, s’éleva de la foule un cri de louange d’un enthousiasme délirant qui me consola un peu. Les gens ne cessaient d’accrocher des feuillets de vers à la porte qui m’abritait pendant que j’apportais les dernières finitions. Le seul jour où elle fut exposée aux regards pendant quelques heures, on y appliqua, je l’affirme, plus de vingt sonnets chantant tous les louanges éperdues de mon ouvrage. Quand je l’eus recouverte, on continua à attacher quantité de sonnets et de vers latins ou grecs. L’université de Pise était en vacances ; doctes professeurs et élèves rivalisaient pour composer les plus beaux. Mais ce qui me fit le plus plaisir et me donna l’espoir de meilleurs rapports entre le duc et moi, ce fut de voir mes collègues artistes, sculpteurs et peintres, faire assaut d’éloges. Entre tous j’appréciais surtout ceux de l’excellent peintre Jacopo Pontormo et surtout ceux de son brillant élève Bronzino qui ne se contenta pas d’afficher plusieurs sonnets mais m’en envoya à domicile par son Sandrino. Il y disait tant de bien de mon Persée, dans ce beau style dont il a le rarissime secret, que je me sentis un peu rasséréné.
Je recouvris ma statue et y mis la dernière main.
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En voyant combien étaient avancés les nombreux ouvrages dont j'étais entouré, le roi dit à madame d'Étampes: — « Jamais artiste ne m'a été aussi agréable et n'a plus mérité d'être récompensé que celui-là. Il faut penser à le fixer près de nous. Comme il dépense beaucoup et qu'il est bon vivant et grand travailleur, il est de toute nécessité que nous songions à lui; car, remarquez-le, madame, toutes les fois qu'il est venu à la cour et que je suis venu ici, il ne m'a jamais rien demandé. On voit qu'il se donne de tout coeur à sa besogne. Il faut promptement nous l'attacher par quelques bienfaits pour ne point le perdre. »
— « J'aurai soin de vous en faire souvenir, » — lui répondit madame d'Étampes. — Sur ce, ils partirent. — Je continuai avec activité mes ouvrages commencés, et en même temps je m'occupai sans relâche du modèle de la fontaine.
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J’allais rarement au palais et je restais chez moi, où je travaillais avec ardeur à terminer ma statue. J’étais obligé de tirer de ma propre bourse le salaire des ouvriers; car, au bout de dix-huit mois, le duc, après avoir chargé messer Gorini de subvenir à cette dépense, s’ennuya de payer et enjoignit de ne plus me fournir d’argent. Je demandai à Gorini pourquoi il ne me donnait plus rien. Il me répondit avec sa petite voix de moucheron, en agitant ses petites mains d’araignée : « Pourquoi n’achèves-tu pas ton ouvrage ? On croit que tu ne le finiras jamais. » Aussitôt, je lui répliquai en colère : « Que la peste vous étrangle, vous et tous ceux qui croient cela ! » Je retournais à mon malheureux Persée avec le cœur navré et les yeux en larmes, car je songeais à la brillante position que j’avais à Paris, lorsque j’étais au service de ce merveilleux roi François 1er, qui ne me laissait rien à désirer, tandis qu’ici tout me manquait. Plusieurs fois je fus tenté d’agir en désespéré.
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Comme il se sentit mis à nu par les regards et les gestes du duc et des autres assistants, il se laissa emporter par son insolence, et, tournant vers moi son horrible face, il s’écria : “Tais-toi, sale sodomite!”. A ces mots, le duc, furieux contre lui, fronça les sourcils, tandis que les courtisans serraient les lèvres et le fixaient sévèrement. Quant à moi, qui m’entendais si perfidement injurier, je ne pus réprimer ma fureur, mais j’eus immédiatement recours au remède, et je dis : “Insensé! tu sors des bornes. Plût à Dieu, cependant, que j’eusse le secret d’un art aussi noble, puisque, d’après ce qu’on lit, Jupiter l’a pratiqué dans le ciel avec Ganymède, et que les plus grands empereurs et les plus illustres rois du monde s’y adonnent sur cette terre. Je ne suis, hélas! qu’un humble et pauvre homme, qui ne pourrais ni ne saurais me mêler de si merveilleuse affaire”.
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Pour fabriquer des instruments, jeter des ponts, construire des moulins à foulon ou autres machines, il avait des dons miraculeux d’ingénieur. Il fut le premier à bien travailler l’ivoire.[...]Laurent de Médicis et son fils Pierre, qui l’aimaient bien, voyaient qu’il se consacrait totalement à la musique et délaissait son beau talent et son vrai métier : ils lui firent retirer cette place. Mon père le prit très mal et le ressentit comme un geste désobligeant.

Il se remit tout de suite à son métier et fit un miroir d’os et d’ivoire, d’une brasse environ de diamètre, avec des figures et des feuillages d’une grande précision et d’un dessin parfait ; il avait la forme d’une roue ; le miroir était au centre, entouré de sept médaillons dans lesquels étaient sculptées les sept Vertus en ivoire et os noirci.
Le miroir et les sept Vertus étaient en équilibre, mais mobiles, si bien que, quand la roue tournait, toutes les Vertus bougeaient ; elles avaient à leur pied un contrepoids qui leur permettait de rester droites. Comme il savait un peu de latin, il avait écrit autour du miroir un vers latin qui disait : « Je suis une roue ; en quelque point que je me tourne, la Vertu reste droite » : Rota sum ; semper, quoquo me verto stat Virtus.
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Je me trouvai bientôt à Lucques, d'où je me rendis à Pise. J'avais alors seize ans environ. Arrivé à Pise, près du pont du milieu, à l'endroit que l'on nomme la Pietra del Pesce, je m'arrêtai devant la boutique d'un orfèvre: je regardais attentivement ce que le maître faisait, lorsqu'il me demanda qui j'étais et quelle profession j'exerçais. Je lui répondis que j'étais un peu de son métier. Aussitôt, cet homme de bien m'invita à entrer dans sa boutique et me donna du travail en me disant:—« Ta bonne mine me fait croire que tu es un bon et brave garçon; »— et, à l'instant, il me mit entre les mains de l'or, de l'argent et des pierres précieuses. A la fin de la journée il me mena dans sa maison, où il vivait honorablement avec ses enfants et sa femme, qui était d'une beauté remarquable.
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C'est alors que vint à Florence un sculpteur nommé Pietro Torrigiani. Il arrivait d'Angleterre, où il avait vécu longtemps, et, comme il était intime ami de mon maître, il le visitait tous les jours. Quand il eut vu mes dessins et mes travaux, il me dit: Je suis venu à Florence pour emmener le plus de jeunes je gens que pourrai. J'ai en effet à exécuter une oeuvre importante pour mon roi, et je voudrais pour m'aider quelques-uns de mes chers Florentins. Ta manière de travailler et tes dessins sont plutôt d'un sculpteur que d'un orfèvre, et comme j'ai à jeter de grands ouvrages en bronze, je te ferai à la fois riche et habile en ton art.
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Je répondis à ces mots que les hommes qui entendaient agir à leur manière devaient d’abord créer un monde à leur manière (...)
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