Bande annonce (VO) de la série Recovery Road, adaptation du roman de Blake Nelson paru en français sous le titre Addiction
J'ai compris un truc : on peut changer le cours des choses. On peut réparer ses erreurs. Recommencer sa vie s'il le faut.
Et puis il y a l'irrémédiable, ce qu'on perd à tout jamais. Certaines personnes. Des moments gâchés parce qu'on les a vécus à une époque où on se blindait contre les émotions, faute de savoir s'y prendre autrement.
On ne les voit pas venir, parfois on les ignore quand ils arrivent ; mais plus tard, quand on s'installe dans une certaine monotonie, on réalise à quel point ils étaient importants. On comprend enfin qui a compté dans nos vies, qui nous a fait tel qu'on est.
J’ai trouvé un escalier rouillé qui menait au bas du pont. Au fil de la descente, j’ai vu toute le skatepark s’étendre devant moi. Il y avait foule, comme de bien entendu un samedi soir : des skateurs purs et durs, des gonzesses canon, des teufeurs, des mecs faisant les cons ou juste occupés à glander. J’ai senti mon cœur s’emballer dans ma poitrine quand j’ai dévalé les dernières marches. Ce n’était pas une fête de lycéens avec de la petite bière. C’était du sérieux.
Il vaut mieux que les garçons ignorent leur pouvoir. Ils paniqueraient sûrement, ils feraient tout capoter.
C'est pourtant à eux qu'on se donne. Pas aux parents, ni aux profs, ni à son "avenir". Non, on se donne toujours à un garçon.
Et on finit par faire de longues promenades au crépuscule en pensant à eux et en se demandant dans quel état ils nous laisseront.
« Emploi du temps : réunion d'information médicale sur l'alcool et les drogues, puis séance de thérapie contre l'addiction à l'alcool et aux drogues, et ensuite groupe de parole sur la dépendance à l'alcool et aux drogues. Les sujets ne sont pas très variés. Mais c'est le but. Spring Meadow. Centre de désintoxication. » p.15
« Déjà, comment on peut sortir avec quelqu'un sans avoir bu ? Me demande Trish. / Franchement, ça me dépasse. […] / Je m'imagine à une fête en train de dire aux autres : ''Oh, non, merci, je ne bois jamais de bière'', poursuit Trish. La bonne blague. Je pourrai jamais. » p.28
- Regarde-toi. T’es qu’un gros blaireau.
- Je ne suis pas un blaireau, je suis un geek, réplique Martin sans hésiter. Les blaireaux sont maladroits, c’est pathologique chez eux. Tandis que les geeks ont développé une connaissance approfondie de systèmes complexes.
Le convoi est passé. Il n’y avait pas de fourgon de queue, rien qu’une dernière voiture de marchandises. Je l’ai suivie jusqu’à l’endroit où se trouvait le vigile. Je n’en ai pas cru mes yeux. Face à moi se trouvait un corps humain coupé en deux. Le corps d’un homme qui était vivant à peine trente secondes auparavant.
Il y avait du sang partout. Sur les rails argentés. Sur le gravier à mes pieds. J’ai regardé fixement l’amas sanguinolent, les entrailles qui s’écoulaient sur le ballast. Elles fumaient dans la chaleur du soir.
Et cette puanteur… Lorsque l’odeur de ses entrailles m’a atteint, j’ai eu un haut-le-cœur. J’ai failli vomir.
Stewart fait partie du même monde que moi. Il est mon monde. Il est passé par où je suis passée. Il me comprend comme aucune autre personnes ne peut le faire, et ne le fera jamais..."
A un moment une fille ivre morte entre en titubant et en beuglant. elle se jette sur quelqu'un pour lui mettre des coups de pied. Ses copains essaient de l’arrêter mais elle les cogne eux aussi. Le gérant du bar intervient et le traîne dehors de force. Je la montre à Martin en sirotant mon expresso.
- Tu la vois, elle?
- Ouais.
- C'est moi avant.
Mais qu'est-ce qu'on était supposé faire avec ce poids ? Une fois qu'on l'avait sur soi ? Etre un homme, tout bonnement ? Prendre sur soi, et puis voilà ? Peut-être bien. Peut-être que c'était là le vrai test. Peut-être que c'était exactement ça qui faisait de vous un homme : avoir la capacité de fonctionner tout en ayant les pires secrets possibles en tête. Ce pour quoi tant d'hommes adultes semblaient si ridicules. Ils n'avaient jamais senti ce poids. Ils n'avaient jamais senti cette responsabilité. Ils n'avaient pas passé le test, n'avaient pas fait leurs preuves : c'étaient des petits garçons en habits d'adulte.
Soudain, dans mon esprit, avec la netteté d’une vidéo qu’on se repasse, j’ai vu le vigile se faire entraîner sous le train. Être plié comme une poupée de chiffon. Puis j’ai vu l’autre image : le corps, écrabouillé, coupé, une moitié entre les rails, l’autre moitié hors des rails. Je me suis assis sur le lit de Jared et j’ai à nouveau fondu en larmes. J’ai chialé un certain temps, étouffé par les sanglots, gémissant, suffocant, puis ça c’est arrêté. Je n’avais plus de larmes. J’étais à court de larmes. Il ne me restait rien.