J'ai bien failli lâcher ce roman en court de lecture, malgré un début assez accrocheur et comique quand le taxi de Mitchell Wilson perd ses freins dans la descente qui le conduit à l'aéroport. J'ai eu beaucoup de mal à me motiver toute la première partie du roman. J'ai trouvé que ça partait dans tous les sens et les réflexions de Wilson étaient un peu rébarbatives. Toutefois, l'écriture de cet auteur m'a incitée à me replonger dans ce roman dense sans me laisser distraire par des lectures plus faciles. Une fois passée la lente première partie, j'ai apprécié le ton sarcastique et les personnages un peu déjantés, cabossés. Reste que je l'ai trouvé bien trop long et que la fin m'a laissée dubitative. J'aurais aussi beaucoup de mal à dire le message j'en ai retiré.
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On se promène, ou plus souvent on navigue, le long de la Floride, ou dans les Caraïbes... On boit de la bière locale, et du rhum, surtout du rhum. Un arrière fond musical, volontiers jazzy. Il fait chaud et moite et vous voilà plongé dans 9 nouvelles de 20-30 pages mettant souvent en scène un Américain blanc dans le monde bigarré des Caraïbes (Grenadines, Barbade, ...) dans les années 70. C'est violent, décapant, et souvent second degré.
Voilà une très belle découverte.
Ce recueil a reçu le National Book Award de la 1ère oeuvre de fiction en 1985. Les Américains y ont reconnu un style à la Conrad et à la Hemingway.
"Chaque jour était une petite aventure épique sans objet, un long canular qui défilait toujours à a manière d’un dessin animé, comme si la moindre activité n’avait de sens que si elle était plongée dans l’atmosphère de drame et de menace d’un mauvais opéra."
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Ces neuf nouvelles ancrées dans une moiteur tropicale sont le premier ouvrage signé Bob Shacochis, auteur depuis du remarquable roman La Femme qui avait perdu son âme. Eparpillées sur les confettis d'îles caribéennes ou sur les côtes de la Floride, les destinées des personnages blancs et noirs, trafiquants, musiciens, apprentis révolutionnaires, pêcheurs, expatriés, nous grisent comme le plus puissant des rhums.
Au bonheur des îles aurait pu s'intituler Derrière la carte postale, tant l'Américain, ancien correspondant de guerre qui a couvert l'invasion d'Haïti en 1994, et qui a beaucoup bourlingué avec les Peace Corps, fait preuve de réalisme, de cynisme, et d'un humour plus grinçant qu'une porte qui coince, comme en témoigne le titre Easy in the islands.
Car de la Barbade à Antigua, rien n'est facile, mais tous s'accrochent, entourés de musique, omniprésente, de chaleur, de beauté délabrée. Aux yeux des Américains, elles peuvent sembler interchangeables, et pourtant: « Là-bas, au loin, au-delà du Gulf Stream, invisibles, se trouvaient les îles -il y en avait qui étaient aussi parfumées que la cardamone, certaines avaient des histoires cachées comme de la graisse sous une gaine, d'autres étaient aussi détestables qu'un mal de tête, certaines recélaient des trésors si abondants qu'ils n'avaient plus aucune valeur, d'autres n'étaient que de purs fantasmes et d'autres encore avaient le pouvoir de vous engloutir, comme la baleine d'Achab. »
Au bonheur des îles, un bonheur de lecture.
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Haïti, 1998, le corps d’une femme est retrouvé sur l’autoroute 1 à bord de sa voiture criblée de balles. Elle est identifiée comme étant Jacqueline Scott, reporter freelance et photographe, mariée à Parmentier, trafiquant de drogue. Ce dernier est incarcéré à Miami, accusé d’avoir organisé le meurtre de son épouse. Il charge l’agent à la retraite Conrad Dolan d’enquêter pour l’innocenter. Il lui doit bien ce service car il a été son informateur. Dolan contacte alors Tom Harrington, avocat international en poste à Haïti, pour l’aider dans ses recherches qui vont mettre à jour les multiples identités de la victime, Jacqueline Scott, allias Renée Gardner, allias Dorothy Chambers, allias Dorothy Kovacevic, allias « La femme qui avait perdu son âme »….
Bob Shacochis a mis dix ans pour écrire ce roman d’espionnage à l’architecture particulière qu’il aurait pu appeler « On ne meurt que deux fois ». Il le divise non pas en cinq chapitres mais en cinq livres. L’auteur atteint de troubles cardiaques pensait qu’il allait mourir d’un jour à l’autre, aussi a-t-il rédigé les différentes parties comme des histoires indépendantes, reliées entre elles par un personnage centrale : une « Mata Hari » séduisante, moderne et mystérieuse. Il s’est avéré qu’il ne s’agissait que de fibrillation atriale parfaitement soignable.
Il mélange les styles partant d’un simple polar, le meurtre d’une jeune femme, il ouvre son histoire sur un roman d’espionnage, en y mêlant FBI, CIA et différents services secrets militaires américains, pour donner une dimension géopolitique internationale. Comme le dit l’auteur lors d’une interview : « J’étais une pute cherchant des clients. »
Son roman est écrit comme un reportage. Il y met des éléments qu’il a lui-même connu comme cette femme qui a perdu son âme réellement en Haïti, alors qu’il était reporter là- bas.
Pour cette œuvre monumentale, il sera finaliste du prix Pulitzer en 2013 mais le jury lui préférera « La vie volée de Jun Do » d’Adam Johnson.
Remarquablement bien écrit, c’est une histoire dont la lecture est parfois déroutante et où le lecteur peut se sentir perdu mais il est poussé par un besoin irrépressible de connaître la vérité, vérité qui se dévoile petit à petit comme les poupées russes, les matrioskas.
Traduction de François Happe.
Editions Gallmeister, 789 pages.
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Un roman qui vous appelle à lui, on en rêve la nuit, l’histoire nous possède et jamais ne nous quitte.
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Histoires intéressantes,le revers de la médaille est parfois difficile à imaginer.
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Des qualités manifestes pour décrire la diplomatie barbouzarde des États-Unis. Très glauque. Trop glauque, parfois franchement pesant, rendant la lecture pénible.
Instructif cependant.
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Je n'ai pas accroché, je me suis enfuis avant la centaine de page... je m'ennuyai.
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Une somptueuse fresque violente et métaphysique sur l’Amérique contemporaine.
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Je sais qu'il s'agit d'un roman qui divise. Soit on adore, soit on craque. Autour de moi, quasi tout le monde a craqué.
Moi, j'ai adoré.
La première partie est un peu rude, je l'avoue. Mais une fois qu'on se lance et qu'on la passe, tout devient intense. Parce qu'on ne lit pas un roman mais plusieurs, avec des styles différents en fonction des parties. Et là j'ai été conquise.
Malgré la tristesse et la noirceur du propos (on peut dire qu'il ne s'agit pas d'un roman très optimiste), j'ai voyagé, je me suis sentie emmenée avec les personnages. J'ai vécu avec eux.
Voilà une bonne raison de s'accrocher sur les premières pages.
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Une plume fantastique, une vraie claque.
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La femme qui avait perdu son âme ou le lecteur qui avait perdu l’envie de terminer ce livre : "telle est la question." Alors oui je l’ai terminé parce que je n’aime pas critiquer (c’est le mot) un livre que je n’ai pas terminé. Mais pour résumer au mieux ce que j’ai ressenti rien de tel qu’une citation du livre lui-même :
" Il se réprimanda pour avoir essayé de comprendre ce foutoir haïtien aux strates multiples, où une couche en recouvrait une autre, elle-même empilée sur une autre, son inutilité et ses contradictions, la distribution des personnages complètement merdique, les coups montés qu’il aurait dû voir venir de loin, les intrigues qui se déroulaient sous ses yeux et dont il n’avait jamais remarqué qu’elles se rejoignaient pour former un leurre. "
En l’occurrence pour moi il suffit de remplacer "haïtien" par livre et vous aurez compris mon opinion pour l’essentiel. Mais je pourrais aussi reprendre à mon compte la suite des pensées du personnage que je viens de citer :
" Cette mission amorphe – une chose aux contours flous, et non pas une mission qui débordait de son cadre initial – lui avait faussé l’esprit et avait détraqué ses pensées, et il se retrouvait à gémir intérieurement sous l’effet de quelques véritables meurtrissures à l’âme. "
Je remplacerais juste "mission amorphe" par lecture amorphe, et "sous l’effet de quelques véritables meurtrissures à l’âme" par la désagréable sensation d’avoir perdu mon temps avec pour seule excuse la diatribe du téléspectateur Lambda surpris devant le générique de fin de «Koh Lanta» : "Oui mais je l’ai regardé (lu) jusqu’au bout pour être bien sûr que c’était vraiment nul."
Il ne faut tout de même pas exagérer, lire ce livre ne fait à priori aucun dégât sur l’âme et surtout ne présente aucun risque de la perdre. Il y a de très bon passages, simplement pour environ 800 pages sur les 869 que compte le livre, je n’ai absolument pas suivi les méandres alambiquées de l’esprit de l’auteur encore moins lorsqu’il nous embarque dans ses névroses de viol et d’inceste et ses fantasmes sexuels sans grand intérêt pour moi.
C’est malgré tout un livre bien écrit à condition d’aimer les phrases à rallonge qui se vident de leur substance avant le point final. Cependant ce roman trouvera certainement des lecteurs enthousiastes. La preuve ? Il a été finaliste du Pulitzer en 2014.
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Très bien écrit mais intrigue complexe !
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Quand Shacochis sonde les cœurs et les âmes...
Vent debout, ce roman mosaïque investit le temps et l’espace avec la force d’un tsunami. Accrochez-vous aux branches, le voyage est périlleux, violent mais passionnant. Avec une précision horlogère, les fils de l’intrigue patiemment tissée par Bob Shacochis forment une toile d’araignée dans laquelle ses protagonistes sont englués et se débattent comme de beaux diables pour ne pas y abandonner leurs rêves, leur force vitale, leur âme.
Le lecteur assiste en direct à l’autopsie d’un monde déboussolé soumis aux caprices de groupes occultes œuvrant dans l’ombre pour déstabiliser des Etats, manipuler des dirigeants, dévoyer des projets, souffler sur les braises de conflits latents. Steven Chambers (ex-Kovacevic), croate de naissance devenu américain -au lendemain de la Seconde guerre mondiale, il a suivi sa mère lors d’un exil douloureux- est un de ces démiurges qui veulent mettre le monde en coupe réglée. Dans cette optique, il n’hésite pas à utiliser sa propre fille en la transformant en une sorte de caméléon (successivement Dottie, Jackie ou Renée) au gré des missions imaginées par son géniteur. Mais également le fils de son meilleur ami, le sergent Eville Burnette, qu’il dirige vers les forces spéciales pour servir ses desseins. Ni Dottie, ni Eville ne sont en mesure de décrypter les motivations de celui qui, tel un marionnettiste, influe sur leur existence.
On suit ce trio mémorable d’un pays à l’autre (Haïti, Turquie, Etats-Unis, Afghanistan, Croatie...) selon une chronologie bouleversée mais dont on saisit la cohérence au fil du récit. La multiplicité des thèmes abordés –l’impérialisme américain, la manipulation des humanitaires, le nationalisme outrancier, la corruption des hommes de pouvoir, la guerre entre les agences de renseignements, les relations père-fille- dit assez la richesse de ce livre roboratif aux multiples ressorts.
Shacochis donne une vraie épaisseur à ses personnages qui sont tourmentés et ne cessent de s’interroger sur leur implication dans le monde. Ils peuvent aussi fendre la carapace et s’avérer fragiles et tellement humains comme dans l’épisode où Dottie et Eville s’isolent sur une île déserte sur les Outers Banks en Caroline du nord pour une semaine loin des drames générés par leur existence de soldats de l’ombre. Enfin, ils sont eux-mêmes, s’épanouissent entre pêche et camping sauvage, résistent à une tempête qui les fortifie un peu plus. Mais ce n’est qu’une semaine ; la parenthèse, aussi intense soit-elle, ne comble pas leur besoin d’équilibre et de sérénité. Besoin particulièrement nécessaire pour Dottie, la pile électrique, qu’ Eville souhaiterait apprivoiser, lui qui en fait un portrait contrasté : «Il semblait y avoir une ligne de faille au plus profond d’elle-même, deux plaques différentes de sa personnalité écrasées l’une contre l’autre en un raclement permanent, et dont il pouvait facilement imaginer qu’elles se briseraient un jour, et se soulèveraient avec un effet dévastateur.» Au point de lui faire perdre son âme ?
On sait combien les écrivains américains sont motivés par un objectif ultime : le roman total. Cette quête, Bob Shacochis l’a menée durant douze ans que dura l’écriture de cette œuvre. Le résultat est à la hauteur de son ambition. Ce roman gigogne offre nombre de niveaux de lectures : ceux qui aiment l’aventure, l’espionnage ou la géopolitique y trouveront matière à se passionner. Ceux qui s’intéressent en priorité à la psychologie des personnages, aux ressorts dramatiques de leur évolution ou la complexité des sentiments ne seront pas déçus non plus.
Ce voyage au long court ne laisse pas insensible. Au contraire, il ouvre des perspectives sur le monde tel qu’il va, et il ne va pas bien. Optimistes béats, s’abstenir…
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xenophon
arinsal
Un livre de 850 pages, déjà connu. Les plus : l’auteur a certainement visité les lieux du roman, Dubrovnik, Istambul, Haïti, le Montana. Belle documentation géopolitique donnant un sous-bassement historique crédible. Les portraits de la belle héroïne en être brisé par son propre père et celui du seul personnage généreux et courageux du livre sont touchants. Une écriture originale, foisonnante, parfois lyrique voire poétique, avec des dialogues inclus dans les phrases et dépourvus de guillemets qui déroute pendant les 100 premières pages mais si on s’accroche, cela peut donner du plaisir. Ce livre est un puzzle dont on ne comprend le sens qu’à la fin au point que certaines scènes du début ne trouvent leur explication que 400 ou 500 pages plus loin. Le lecteur est donc amené à faire des retours en arrière fréquents ce qui n’est pas gênant.
Les moins : la traduction est très bonne mais non parfaite, dans un style parfois négligé. Certaines phrases de plusieurs lignes n’ont pas de verbe. Volonté de l’auteur ou erreur du traducteur ? Le doute est permis. Un petit regret, que l’auteur ait édulcoré certaines scènes violentes comme s’il avait voulu épargner la sensibilité des lecteurs et cela fait à mon sens perdre un peu d’intensité au récit. C’est d’autant plus étonnant que pour d’autres scènes, on y va franco et trash. Deux poids-deus mesures, mais je n’ai pas compris pourquoi. Enfin, l’hymne aux USA sauvant le monde grâce à ses héroïques braves soldats sans peur et sans reproche face aux épouvantables communistes et autres djihadistes pourvus de tous les vices m’a un peu gêné.
IL reste que Shacochis est un écrivain qui mérite qu’on passe une cinquantaine d’heures à le lire.
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Certains ont lu un chef d'oeuvre et trouvé un équivalent à John le Carré. Après 800 pages il s'avère qu'on est loin du compte.
Au premier degré c'est "Zazie et son papa dans la CIA", au milieu de clichés sur la géopolitique des années 80-90, une longue intrigue nous promène de pays en pays partout où les USA ont cru bon d'intervenir.
Papa est un maître de la manipulation pour un pays de guerriers (sic) et comme son fils est mollasson, c'est sa fille qui continuera la dynastie des durs à cuire venus de Croatie.
Sa fille qu'il aime un peu trop, qu'il manipule aussi et qui perdra son âme à cause de lui.
Au deuxième degré peut être faut il lire une critique de l'Amérique sûre d'elle, inculte et maladroite et qui, au fond, ne fait que pervertir sa jeunesse en combats douteux.
Pour en être sûr il faut digérer ce long roman rempli de psychologie lourdingue, de scènes étirées à l'infini
et surtout un personnage central tellement peu crédible.
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