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Citations de Camil Petrescu (55)


Mes pensées m’emportent comme un courant. Il y a en moi quelque chose qui répond à tout cela, des profondeurs… Une larme authentique en provoque toujours une autre dans d’autres yeux, par-dessus la raison, les instincts s’appellent et je comprends maintenant que les souvenirs aussi, ceux des autres et les nôtres, se répondent de l’inconscient comme se répondent dans la nuit les gardiens ou les chiens.

(p.102)
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Ça ne fait rien, jeune étourdi, tu recommenceras. Je ne cessais de répéter à haute voix, comme un enfant, le texte de ce télégramme et il ne cessait de m'attendrir comme la première fois [se souvient Fred]. Il y avait dans ces mots une familiarité un peu « quelconque », si l'on veut, mais ça lui allait, comme n'importe quel geste lui allait d'ailleurs. Elle possédait une élégance naturelle, vive, animale, si je puis dire, qui donnait aux mots un tout autre sens et qui faisait qu'elle pouvait se permettre n'importe quel geste, si risqué fût-il, n'importe quelle infraction aux principes élémentaires de l'élégance, au lieu d'y perdre, elle y gagnait, elle trouvait dans ces écarts audacieux de nouvelles sources de beauté.

(p. 281)
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Elle était alors [au théâtre], comme maintenant, passionnée, excessive, inutilement agitée. C’est elle qui m’a bien fait comprendre le sens de l’expression « lyrisme à froid » qui me vient à l’esprit en ce moment, tandis que je sens, collé à mon ventre comme un oreiller pesant et amorphe, le ventre de cette femme.

(p. 69)
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Ni la manière brutale dont j’ai publié plus tard, avec quelques retouches, et à son insu, sans son autorisation, dans une revue à faible tirage, ces lettres qui n’étaient destinées qu’à moi seul et que j’avais reçues quelques mois plus tôt, ni la bienveillance dont certains critiques ont fait preuve à leur égard, ne l’ont fléchie. Son horreur de l’exhibitionnisme, même psychologique, avait été la plus forte.

(p. 14)
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Cette attention intérieure, cette tension intellectuelle permanente de madame T., non seulement lui épargnaient de poser, elles mettaient aussi en valeur chacun de ses mouvements et leur donnaient une signification, tout comme un éclairage intérieur met en valeur la beauté d'un vase Gallé, [chez elle, la réflexion authentique], cela se sent comme le pouls de quelqu'un ou comme on peut constater en le touchant qu'un corps est vivant grâce à la sensation que donne la circulation du sang.

(p.282)
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Une véritable étreinte entre deux corps est belle comme une conversation entre deux intelligences dont aucune ne cesse jamais de comprendre l’autre ou comme un livre lu avec passion et dont chaque détail est compris et justifié.

(p.70)
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Ces femmes sont pour la plupart d’anciennes prostituées, des aventurières de fiacre à un seul cheval. La vérité, c’est que la souffrance causée par une femme d’intelligence supérieure, délicate, sensible, aussi capricieuse qu’elle puisse l’être, est comme une longue maladie, faite de longues rémissions passagères, de certaines voluptés dans la douleur, accompagnées d’un approfondissement personnel et de l’illumination d’un monde extérieur jusque-là insoupçonné, de ces maladies dont un écrivain (que j’ai lu quelque part) disait qu’elles développent l’intelligence. Mais s’il est vrai que la souffrance causée par une femme « bien » ressemble à la tuberculose, il y a dans la souffrance due à une femme vulgaire quelque chose de la cuisante exaspération d’une furonculose ou d’une maladie honteuse. Elle est intolérable.

(p.332)
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Le poète serait-il en vérité un spécimen voué à être fatalement et durement censuré par la mort ?

(p.351)
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Je l’ai pressé plusieurs fois d’écrire, non seulement parce que sa conversation donnait cette impression unique d’authenticité, mais aussi parce que tout ce que je savais de sa vie, de ses relations, de ce qui faisait de lui un véritable représentant de la société roumaine d’aujourd’hui, me donnait le sentiment qu’il pourrait révéler des choses d’un intérêt documentaire peu banal.

(p.39)
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Ni la manière brutale dont j’ai publié plus tard, avec quelques retouches, et à son insu, sans son autorisation, dans une revue à faible tirage, ces lettres qui n’étaient destinées qu’à moi seul et que j’avais reçues quelques mois plus tôt, ni la bienveillance dont certains critiques ont fait preuve à leur égard, ne l’ont fléchie. Son horreur de l’exhibitionnisme, même psychologique, avait été la plus forte.

(p.14)
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Émilie a pour la peinture, elle qui ressemble, sans le savoir, aux robustes modèles des modernistes, le mépris d’un cuisinier pour la pâtisserie. Je crois même que si je suis venu chez elle et que si j’y viens encore c’est sous l’effet de je ne sais quelle espèce de curiosité que provoque en moi son excitante ressemblance avec les nus pleins et altiers de certains peintres qu’un collègue du Quai d’Orsay me menait voir dans les expositions à scandale des nouveaux peintres. Je pense surtout à Picasso et à Favory.

(p.92)
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L’automne qui se prolongeait était encore beau mais il y avait ce jour là une lumière jaunâtre, brumeuse et un ciel effiloché et bas qui ne laissait pas monter les fumées ni l’odeur d’essence des voitures. Il ne faisait pas froid… à peine un peu humide. A la hauteur du boulevard de la Reine Maria, plein de vacarme et de véhicules de toutes sortes, les vendeurs de journaux criaient une édition spéciale… Malgré l’abus que certains petits journaux en ont pu faire, lorsqu’un des grands quotidiens d’information sort une édition spéciale, on ne peut réprimer un frisson, comme à l’annonce d’un événement d’une dynamique parfois incalculable dont la continuité de la vie et la volonté sont effleurées comme par de grandes ailes invisibles. Quelques lignes seulement , en lettres grosses comme des noix sombres dont l’encre vous collait aux doigts.

(p. 366)
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Sollicitée par mon regard, Émilie me renseigne avec le soin qu’elle mettrait à faire les présentations : « C’est mon fiancé. » Je suis instantanément envahi par un sentiment oublié, qui me pénètre tout entier, comme une éruption qui s’étend sur toute la peau… Je me rappelle le temps où, avec mes camarades de lycée, je fréquentais les bordels les plus misérables, sales et misérables comme seuls peuvent l’être les bordels d’une capitale orientale. (…) Eh bien, j’ai souvent vu, dans ces chambres, des cartes postales illustrées et des photographies dont j’ai longtemps cru qu’elles avaient été ramassées dans la rue ou volées à leurs destinataires dans le seul but de décorer la chambre de la femme et de lui donner l’illusion d’une vie de famille. Mais j’ai découvert un jour que ces cartes postales étaient bel et bien adressées aux femmes chez lesquelles je venais et contenaient d’authentiques faits de famille.

(p.79)
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Ce tas de feuilles qui tenait enfermées deux existences encore toutes chaudes de leurs tourments, me donnait un vague frisson dû, aussi, à cette coïncidence qui avait voulu que Fred Vasilescu s'écrase au sol le lendemain du jour où il en avait terminé avec lui.

(p.368)
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[Au bord de la Mer Noire, à Movila] se rassemblait toute la jeunesse, le soir, après qu’elle s’était grillée pendant toute la journée sur la plage étroite et sinueuse. Les femmes, à peu près anonymes le jour, tandis qu’elles sommeillaient, mollement allongées sur des draps blancs, toutes pareilles d’une certaine manière, telles des brebis dans un parc à bestiaux, ou semblables, si l’on veut, les unes à de jeunes conscrits, les autres à des « girls » d’opérette, devenaient le soir des « dames ». Habillées, elles reprenaient une silhouette personnelle, une biographie et un nom, généralement très connu, car à cette époque venaient à Movila la plupart de ceux qui faisaient la prospérité et la mondanité de Bucarest…(…) La hiérarchie sociale, après l’anarchie et la promiscuité de la plage, se rétablissait ici… Les noms à patine aristocratique et parfois princière se regroupaient à part. Les hommes et les femmes qui avaient joué au bridge toute l’après-midi, après la sieste, en costumes blancs ou pull-overs de couleur, se retiraient à la fin du dîner qu’ils prenaient tôt.
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Nous nous sommes quittés de la manière la plus cordiale devant le restaurant et je leur ai demandé de m’envoyer la revue qu’ils voulaient publier. Je crois que j’ai encore commis une suprême impolitesse car, non seulement je leur ai demandé comment je pouvais régler mon abonnement, mais j’ai même porté la main à mon portefeuille. C’était par simple précipitation mentale. Moi qui passe, dans notre milieu, pour un modèle d’aisance et d’assurance, parce que je me considère toujours comme au moins l’égal de ceux avec qui je parle, même si je ne suis pas forcément du même monde qu’eux, je suis timide et gêné aux entournures devant les gens que j’admire.

(p.47)
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[…] j’ai pâli, je crois que mes lèvres sont devenues blanches. Alors, interrompant leur passionnante discussion sur le programme de leur groupe, l’écrivain blond, vigoureux, et plein de bienveillance, m’a demandé si je ne me sentais pas mal. C’est à peine si j’ai pu murmurer une réponse tout en lui montrant la mouche, exténué, du bout de mon couteau. Il a souri et d’un geste accessoire, comme il aurait mis une parenthèse, il a extrait la mouche avec sa fourchette, l’a jetée par terre et a dit à mon ami, comme en passant, d’un ton d’indulgente ironie : « Monsieur est délicat ». Puis il a proposé que leur manifeste soit tiré sur du papier de luxe, avec des dessins modernes.

(pp.45-46)
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C’est un plaisir que je ne peux pas décrire... Je tire les choses au clair pour moi-même et... vues ainsi, même les souffrances du passé y gagnent une sorte d’adoucissement qui les rend supportables... Une douleur racontée est une douleur non pas diminuée mais harmonieuse, comme une sorte d’opération avant laquelle on vous donnerait de la cocaïne. Le plaisir de l’écriture est plus fort encore que l’héroïne même. (Et j’ai senti dans sa voix, au téléphone, qu’il se brisait, comme un homme que l’on poignarde). Ah, si on pouvait tout raconter…

(p. 365)
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Quand j’écris, maintenant, il en va autrement. C’est étrange comme d’écrire m’aide à penser. Je dis bien « à penser ». Le temps de coucher une phrase sur le papier, une autre se forme d’elle-même en mon esprit, venant approfondir la première.

(p.246)
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Les quelques conversations téléphoniques que j’ai eues avec lui m’ont fait comprendre quelle étonnante découverte a constitué pour lui la possibilité de se libérer par l’écriture. Pour lui qui refoulait depuis des années un mystère pareil à un germe destructeur dans ses profondeurs organiques, pour lui qui s’était enfermé en lui-même avec son secret comme s’il eût été incarcéré en compagnie d’un dément, la possibilité de s’exprimer prenait le sens d’une évasion.

(p.364)
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