Camille Vigogne Le Coat

Bravo à l’autrice pour ce travail exceptionnel ! Et en plus ça se lit d’une traite, comme un polar. Essentiel. Merci !

Le livre révèle avec moult détails l’affairisme qui gangrène la ville de Fréjus, l’argent liquide qui coule à flots, les marchés publics décrits comme truqués, les arrangements entre RN et LR, et pour parfaire le tout il fait état de témoignages d’antisemitisme de la part du maire de Frejus. Chaque chapitre est une révélation affligeante d’un pan du système mafieux qui dirige la commune. Le maire David Racheline et le RN nient en bloc. L’autrice dit avoir toutes les preuves de ce qu’elle avance. Espérons que la justice s’en empare et fasse toute la lumière sur ces affaires.

Hasard du calendrier, j’ai lu ce livre le jour où le FN/RN est envoyé au tribunal correctionnel en 2024 pour l’affaire des assistants parlementaires. Avec ce livre, c’est une autre affaire qui pourrait finir en procès dans les prochains mois, il semblerait en tout cas justifié que la justice se penche sur le cas des personnages que l’on y croise, à commencer par David Rachline.



Le maire RN de Fréjus depuis 2014 est en effet la cible principale de l’enquête de la journaliste Camille Vigogne Le Coat. Mais pas que, car c’est tout un réseau quasi-mafieux qu’elle met en évidence au fil de chapitres portant sur autant de sujets d'interrogation : urbanisme débridé aux mains d’un unique promoteur, montres de luxe achetées en argent liquide, police municipale ne respectant pas la loi, fêtes sauvages y compris en périodes de confinement, antisémitisme et racisme, embauches d’amis et de proches, gestion calamiteuse du club de foot… Le portrait de près de 9 ans de gestion RN de la mairie de Fréjus est pour le moins écœurant.



L’auteure avait déjà révélé des éléments en début d’année dans des articles dans L’Obs, enquête reprise également dans d’autres journaux. Pour ce livre, elle a poursuivi ses investigations, interrogé pas mal de monde, dont les principaux « accusés » (dont les réponses - quand ils ont accepté de répondre - sont retranscrites telles quelles en fin d’ouvrage), et avance au final plusieurs éléments de preuve (vidéos, enregistrements, témoignages) qu’elle s’est procurés.



Tout cela est très intéressant à lire, et se lit d’ailleurs comme un récit assez prenant. Mais plus que la succession d’accusations, ce qui m‘a semblé manquer, c’est d’une part la mise à disposition de certains documents dont elle dispose (je ne parle pas de révéler ses sources anonymes bien sûr, mais on aimerait voir et entendre les fameux enregistrements dont elle parle, pour ne pas avoir à la croire sur parole) et d’autre part le récit de l’enquête en elle-même (ça aurait été passionnant de savoir sur quoi elle se base, comment elle a obtenu ces éléments, comment elle a pu enquêter et rassembler des témoignages en terres hostiles, quelles difficultés elle a rencontrées).



Alors au final, ce livre était-il nécessaire ? S’il est incomplet et si ses 14 chapitres auraient pu donner une série d’articles thématiques, il faut souvent la parution de livres (sur les Ehpad, sur des médicaments dangereux...) pour déclencher des réactions fortes. Espérons que ce sera le cas. Le tribunal judiciaire de Draguignan s’est d’ores et déjà penché sur les suites à donner à cette affaire, à suivre donc.



On pourrait en attendant espérer que les électeurs prennent conscience de pour qui ils votent, mais j’ai bien peur que le caractère de probité des élus importe de moins en moins aux électeurs. Le travail de cette journaliste est dans tous les cas à saluer, et j’espère qu'il ne restera pas sans suites.