Je joins à cette lettre une mèche de cheveux de la petite qui, je l'espère vous apportera un peu de réconfort. C'est à vrai dire une mèche bien fine, avec une demi-douzaine de cheveux seulement, car Daisy n'en a pas encore de trop.
Nous n'avons presque jamais prononcé le mot amour, entre nous. Je me suis parfois demandé si c'était notre différence d'âge qui donnait à ce mot un air incongru, ou bien si la raideur et la timidité de nos tempéraments respectifs nous en interdisaient l'usage.
Sans le réconfort du corps prodigue de Mercy Stone, jamais, il le sait, il n'aurait appris à éprouver la réalité du monde ni à comprendre les finesses de sentiment et de pensée que d'autres considèrent comme un dû.
Le moment arrive où nous devrions échanger adresses, numéros de téléphone, faire des plans pour former un petit ensemble qui se réunirait le cas échéant une fois par mois pour pratiquer, peut-être sur le territoire clandestin de nos logements respectifs, peut-être pour le restant de nos jours.
Mais il ne se passe rien. La lumière nous épuise, cette lumière trop douce du printemps. Elle est trop légère, elle ressemble trop à celle du jour. Le rayon de soleil orangé qui se faufile entre les immeubles se moque gaiement de notre idée de trouver un autre bar. La lumière prohibe expressément toute ultime étreinte et quelque chose comme de la honte plutôt que de l'embarras nous pousse à mettre rapidement un terme à la soirée pour partir chacun dans sa direction.
Le professeur Flett n'a besoin que d'un peu d'attention féminine. D'attention aimante, pour être précis. Ne vous moquez pas de lui; plaignez-le plutôt, aimez-le.
Les femmes n’échappent jamais vraiment à l’attraction cosmique de leurs mères, pas plus qu’aux attentes fébriles de leur amour imparfait.