La Surprise de l'amourL'Orchestre Lyrique de l'ORTF sous la direction Jean Claude HARTEMANN interprète "
La Surprise de l'amour" ,
opéracomique en deux actes de
Charles MONSELET d'après
MARIVAUX.
Distribution :
- Monique STIOT : Colombine
- Linda FELDER : La Comtesse
- Gérard FRIEDMANN : Lélio
- Aimé DONIAT : Arlequin
On avait déjà l'heure du berger.; voici venir maintenant l'heure de l'absinthe. Paris n'est continuellement occupé qu'à se créer des habitudes. A l'habitude du tabac, à l'habitude de la bière, il a ajouté l'habitude de l'absinthe.
Qu'on ne s'attende pas à de banales imprécations contre ce breuvage-émeraude, comme dirait Victor Hugo. Je sais les désordres que son abus entraîne.
A bordeaux, les tonneliers se repaissent avec délices des rats qu'ils attrapent dans les celliers, ou chais, pour me servir de l'expression locale. Ils dépouillent ces rats ordinairement très-gras, les fendent en deux et les servent sur le gril, assaisonnés avec des herbages, du sel et une forte pincée de poivre. J'en ai gouté maintes fois ; ce n'est pas seulement bon, c'est succulent, c'est excellent.
«La gastronomie est la joie de toutes les situations et de tous les âges. Elle donne la beauté et l'esprit. Elle saupoudre d'étincelles d'or l'humide azur de nos prunelles ; elle imprime à nos lèvres le ton du corail ardent ; elle chasse nos cheveux en arrière ; elle fait trembler d'intelligence nos narines. Elle donne la mansuétude et la galanterie.»
- «S'attaquant à tous les sens à la fois, elle résume toutes les poésies : poésie du son et de la couleur, poésie du goût et de l'odorat, poésie souveraine du toucher. Elle est suave avec les fraises des forêts, les grappes des côteaux, les cerises agaçantes, les pêches duvetées ; elle est forte avec les chevreuils effarouchés et les faisans qui éblouissent. Elle va du matérialisme le plus effréné au spiritualisme le plus exquis : de Pontoise à Malaga, de Beaune au Johannisberg. Elle aime le sang qui coule des levrauts, et l'or de race, l'or pâle qui tombe des flacons de Sauternes.»
RONDEAU DE NOUVELLE ANNEE
TOUJOURS À MADAME X***
Que voulez-vous qu’on vous souhaite ?
Vous avez richesse et beauté.
Avec la grâce qui complète,
Avec l’esprit, cette clarté !
Vous avez même la bonté.
En dot tout vous fut apporté ;
La fée a cassé sa baguette.
Il vous faut demeurer parfaite ;
Que voulez-vous ?
L’an dernier n’est pas regretté :
Tout nouvel an est votre fête.
Ah ! si j’étais un grand poète,
Je sais bien qui j’aurais chanté !
Mais je n’ai rien qu’une lyrette :
Que voulez-vous ?
p.127
Monselet ne prit pas le dos de la cuillère pour rédiger dans ses Récits de table une sorte de « pièce montée » en quatre tableaux dont l’Estomac tenait le rôle-titre. On y lit ce genre d’hallucinant borborygme dialogué:
(3ème tableau)
L’ESTOMAC. Excellent café ! arôme pénétrant ! Ma foi, encore une tasse.
LE COGNAC. A la bonne heure!
L’ESTOMAC. Oh ! doucement, doucement ! Pas de bain de pied.
LE RHUM. Tu as raison; le bain de pied est absurde et incommode.
L’ESTOMAC. Mais qui t'appelle, toi ?
LE RHUM. — Je viens pousser le cognac.
LA CURAÇAO. Je viens pousser le rhum.
L’ANISETTE. Je viens pousser le curaçao.
L’ESTOMAC. Grâce !
LE KIRSH. – Ranchez-Fus, Fus audres ; ne me regonnaisez-fus pas ?
L’ESTOMAC. C’est le kirsch de la forêt Noire ! Je suis joli !
LE KIRSH. Ezze-gue che fus vais bir ?
L’ESTOMAC. Qu’est-ce qu'il dit?
LE MARASQUIN. – Il demande s’il te fait peur.
L’ESTOMAC. Je le crois bien, parbleu !
LE KIRSCH. - Tarteiffle!
L’ESTOMAC, au kirsch. - Allons, mon brave, ne vos fâchez point. On ne fait point d'esclandre ici. Pourquoi diable venez-vous si tard? On ne comptait plus sur vous.
LE KIRSCH. —Ch'aggzebde fos exguices.
L’ESTOMAC. Qu'est-ce qu'il dit?
LA CRÈME DE MENTHE. Il dit qu'il accepte vos excuses.
L'ESTOMAC. On croirait qu'ils s'apaisent là-haut. Je n'entends presque plus rien. C'est généreux à eux de me laisser un instant de répit.
Vous le voyez, madame, je vais au-devant de votre curiosité ; je me confesse à vous librement. Oui je suis tourmenté de l'ambition de laisser un nom invoqué à l'heure des repas. Quelques travaux dirigés dans ce sens, quelques publications encouragées par des hommes spécieux, ont déjà témoigné de ma ferveur et de mon zèle. A défaut de renom poétique, si difficile à conquérir, je me contenterai avec reconnaissance d'un peu de gloire culinaire. Les casseroles ont aussi leur airain.
Puchero espagnol
Décidément, j’accuse les savants de s’être trompés : c’est bien sûr pour cet été un jour quelconque, à une heure encore inconnue, que doit paraître la comète, car la chaleur insolite qui subito est arrivée, justifie assez ces prévisions. Or, donc, s’il faut passer de vie à trépas, en forme de rôti au soleil, tâchons d’être un rôti gras, dodu, afin d’être mangé par quelque divinité de l’autre monde, ce qui me semblerait moins désagréable que d’être avalé par quelques roturiers de l’empire de Satan.
Mais, à propos de quoi, je vous demande, vais-je vous parler de science, de ciel et d’enfer ? Ma foi, à propos d’un pot-au-feu, oui ! D’un vrai pot-au-feu, et j’entre en matière.
- Allons donc ! redressez-vous donc ! Soyez donc vous-même ! Quittez ce vêtement d'imposture qui ne va pas à votre taille ! Pour une haine comme la vôtre, pas de moyens mesquins. Voyez, est-ce que je ruse, moi ? est-ce que je prends cette peine avec vous ? Fi donc ! Ne rampez plus comme les vipères, bondissez et frappez comme les lionnes !
Ivresse chaude et forte
A qui j'ouvre ma porte
Les jours de désespoirs,
Ivresse, viens ce soir.