Quand survient le chaos, l'humanité peut-elle renaître ?
Ils s'appellent Kiran, Matthew, Tobias et Charly.
Ils ont quatorze, vingt, dix et seize ans.
Ils vivent en Inde, en Australie et dans l'Utah lorsque les conséquences cataclysmiques du dérèglement climatique s'abattent sur leurs têtes. Tornades, tsunamis, inondations ravagent subitement leur monde.
Chacun d'eux se retrouve seul dans la tourmente jusqu'à ce qu'ils se rencontrent sur la route dévastée. Ensemble, ils vont devoir affronter territoires hostiles et folie humaine pour survivre
et retrouver ce qui leur a été arraché.
Un roman d'aventures et d'anticipation bouleversant de rudesse et d'humanité, qui a toute sa place aux côtés de Sirius de Stéphane Servant et des romans de Patrick Ness. Imaginés par une toute jeune auteure au talent remarquable, les héros d'Apocalypse Blues marqueront les esprits pour longtemps.
Par Chloé Jo Bertrand, paru chez Big Bang, collection Young Adult des Editions Bragelonne
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Le narrateur est Tobias :
Nos respirations montent en blanc vers le plafond.
Camille n’aura pas froid. Si elle a froid, je tuerai Sarabe pour l’habiller avec sa peau. Si elle a faim, je lui donnerai à manger. Je chasserai pour elle. On restera dans la voiture avec les loups. On se tiendra chaud. Si mon frère meurt de froid, on le mangera.
Mes mâchoires claquent. Je ne veux pas que mon frère meure.
Mais s’il meurt, on le mangera.
On mangera Kiran. On mangera Charly.
Je ne veux pas que mon frère meure.
Je sais pas pourquoi.
- Pourquoi ton sweat est trop grand ?
- Pourquoi ta jambe est cassée ?
- Moto, répondit-il, submergé par une nouvelle envie de rire.
- Adolescence.
- Tes parents sont vivants quelque part. Ils t’attendent. Tu es le seul d’entre nous qui peut se dire ça, Charly.
- Puisse.
- Ta langue n’a aucun sens.
Pendant une seconde, je crois l’entendre rire tout bas. J’ai dû rêver. Il serre ma main une dernière fois, puis me lâche. Je glisse la mienne sous mon oreiller.
- Dono bad, Kiran.
C’est mon tour de rire sous cape.
- Dhon-no-baad, je corrige. De rien, mon ami.
Nos âges ne veulent plus dire grand-chose... Plus personne ne nous prend pour des enfants, rien d'autre n'a vraiment d'importance. Les gens d'ici nous font confiance, nous écoutent quand on parle qu'on a beaucoup marché. Comptent nos âges à la texture de nos pieds.
- Tu sais tu devrais pas faire ça.
Il haussa un sourcil surpris.
- Pourquoi ?
- Parce que fumer tue.
- Vivre tue, répliqua-t-il d'un ton désinvolte teinté d'amertume.
- L'océan, reprend Charly, c'est comme le lac, mais beaucoup, beaucoup plus grand, salé, et ça fait des vagues.
- Salé comme quand on pleure ?
- Oui, si tu veux.
- C'est quoi des vagues ?
Cette fois elle lui pose une colle. Mais pas à Matthew qui sourit et répond !
- C'est quand l'océan se met debout, s'enroule sur lui-même, et se brise en chantant.
Il a deux types de tornades.
D'abord, des masses d'air chaud et des masses d'air froid se rencontrent, et un cumulonimbus descend en entonnoir jusqu'à toucher le sol. Ça souffle et ça casse tout.
Tu peux aussi mettre une scie et un couteau dans une grange qui sent la mort. Deux enfants dont l'un est en train de mourir de la gangrène, et l'autre qui lui coupe la jambe. Ça hurle et ça casse tout ce qui est important.
Trois heures, quatre joints, un passage en ville et plusieurs bouteilles plus tard, un poids lourd détruisait sa moto et le laissait inconscient sur le bitume de l'autoroute.
T'aimer m'a rendu plus fort, et ça me tue parce que je voudrais être plus fort par moi-même, sans avoir besoin d'aimer quelqu'un pour ça. Je sais pas si ça me plaît, que tu sois ma force, parce que je sais pas si j'ai envie d'avoir ma force qui marche ) côté de moi, je sais pas si c'est vraiment une force si tu peux la faire disparaître avec une balle dans la tête ou une explosion ou un raz-de-marée. Je sais pas si je veux d'une force aussi vulnérable.
- On pourrait passer nos samedis soirs chez toi et regarder un film.
- Ecouter de la musique et discuter.
- Et tu pourrais m'apprendre à cuisiner.
- Tu pourrais me demander de te raconter des trucs positifs sur moi quand j'aurai pas le moral.
- Tu pourrais me chanter des chansons.
- On pourrait être amis.